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L'enquête des juridictions pénales internationales.

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par José Tasoki Manzele
Paris 1 Panthéon-Sorbonne - Docteur en droit 2011
  

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Section III. Quelques formes particulières du contrôle juridictionnel du Procureur

Sans apporter des précisions, nous risquerions de nous contredire. Nous avions posé en terme de postulat l'absence de contrôle des Procureurs des juridictions ad hoc par le Juge. Puisqu'il ne s'agissait que d'un postulat, nous remarquons tout de suite la présence du Juge dans le cadre des formes particulières du contrôle juridictionnel du Procureur devant les juridictions ad hoc. D'ailleurs, c'est au niveau des juridictions ad hoc que ce contrôle est apparu le premier. Aux termes des Statuts et Règlements de procédure et de preuve des juridictions pénales internationales, les formes particulières du contrôle juridictionnel du Procureur sont de deux ordres. Il s'agit d'une part de la conférence de mise en état (§1) et, d'autre part de l'audience de confirmation des charges (§2).

Paragraphe I. La conférence de mise en état

A. Historique

De la Haye (T.P.I.Y.) à Arusha (T.P.I.R.).- Il est sans conteste que la conférence de mise en état est un mécanisme qui consacre le contrôle juridictionnel de l'activité du Procureur pendant l'enquête. Cette procédure est instituée pour la première fois en droit international pénal par le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie. Le 25 juillet 1997, les juges de ce tribunal ont adopté un amendement qu'ils ont introduit dans l'article 65 du Règlement de procédure et de preuve. Désormais, un article 65 bis y est intégré et porte dans son alinéa A ce qui suit :

« (...) [u]ne chambre de première instance ou un juge de première instance convoque une conférence de mise en état dans les cent vingt jours de la comparution initiale de l'accusé, puis tous les cent vingt jours au moins pour organiser les échanges entre les parties de façon à assurer la préparation rapide du procès, pour examiner l'état d'avancement de l'affaire et donner à l'accusé la possibilité de soulever des questions s'y rapportant, notamment son état de santé mentale et physique (...) »

La même disposition fut entérinée le 8 juin 1998 par le Tribunal pénal international pour le Rwanda qui l'a ajoutée également dans son Règlement de procédure et de preuve. Le contenu de l'article 65 bis du Règlement de procédure et de preuve des juridictions ad hoc laisse apparaître les raisons profondes qui ont justifié l'amendement apporté à l'article 65. Il s'agissait en réalité d'assurer la mise en état contradictoire de l'enquête, d'éviter la lourdeur et la lenteur qui caractérisent parfois toute procédure d'enquête répressive644(*) -en la soumettant rapidement au contrôle d'un juge- et de reconnaître à la personne accusée dès l'avant-procès un interlocuteur neutre devant lequel il sera désormais en droit de soulever des questions ou des inquiétudes qui se rapportent soit à la procédure elle-même, soit à sa situation personnelle.

Grâce à un autre amendement à l'article 65 du même Règlement de procédure et de preuve adopté le 10 juillet 1998, un juge, totalement dévoué à la mise en état, fut institué. L'article 65 ter du Règlement de procédure et de preuve des juridictions ad hoc dispose que dans les sept jours suivant la comparution initiale de l'accusé, le président de la Chambre de première instance désigne au sein de cette dernière un juge chargé de la mise en état des affaires. La mission que le juge de la mise en état exerce sous l'autorité et le contrôle de la Chambre de première instance consiste à coordonner les échanges entre les parties lors de la phase préparatoire au procès, en s'assurant que la procédure ne prend aucun retard injustifié, que les parties sont prêtes, comme elles doivent l'être, et en prenant toutes les mesures nécessaires afin que l'affaire soit en état pour un procès équitable et rapide. En fait, le juge de la mise en état contribue activement à préparer rapidement le procès645(*), ainsi que le souligne un rapport dressé par le Président du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie à l'attention du Conseil de sécurité des Nations Unies :

« (...) [l]e groupe de travail a estimé que les parties se plieraient sans doute plus facilement aux demandes et aux propositions faites par le juge de la mise en état. Depuis l'adoption de cette proposition, les juges de la mise en état participent plus activement aux réunions tenues en application de l'article 65 ter du Règlement. Les parties savent désormais qu'elles doivent faire preuve de diligence et le rôle accru du juge de la mise en état devrait favoriser la coopération entre elles (...) Le groupe de travail a également estimé que le juge de la mise en état pouvait participer plus activement encore à la gestion de la phase préalable au procès sans que cela implique des audiences supplémentaires (...) »646(*)

De la Haye et Arusha (T.P.I.Y. et T.P.I.R.) à la Haye (C.P.I.).- En revanche, en ce qui concerne la Cour pénale internationale, ce parcours n'a pas été suivi. Prenant en son compte les difficultés rencontrées par les juridictions ad hoc en vue de l'institution d'un juge de la mise en état, la Cour pénale internationale a anticipé en prévoyant dès le départ dans son Règlement de procédure et de preuve la règle 121. Cette règle, qui se consacre à la procédure applicable avant l'audience de confirmation des charges, précise que « la Chambre préliminaire tient des conférences de mise en état pour que l'échange d'informations se déroule dans de bonnes conditions. Pour chaque affaire, un juge de la Chambre préliminaire est désigné pour organiser ces conférences soit d'office soit à la demande du Procureur ou de la personne concernée »647(*). A la différence des juridictions ad hoc, le Règlement de procédure et de preuve de la Cour pénale internationale ne nous semble pas très précis. La procédure de mise en état suppose l'existence d'une affaire complexe, exigeant une préparation poussée, son instruction devant être contrôlée et close par un juge de la mise en état. Ceci implique non seulement que le juge de la mise en état organise et facilite les échanges entre les parties en cause, mais aussi et surtout assure la préparation du procès en rendant l'affaire prête à venir à l'audience pour être plaidée. Il en découle que, comme le précise le Règlement de procédure et de preuve des juridictions internationales ad hoc, la conférence de mise en état doit organiser les échanges entre les parties de façon à assurer la préparation rapide du procès, pour examiner l'état d'avancement de l'affaire et donner à l'accusé la possibilité de soulever des questions s'y rapportant.

Dans cette perspective, le juge chargé de la mise en état prend, à l'occasion de cette procédure, des mesures qui se rapportent notamment aux exceptions préjudicielles soulevées pour vices de forme de l'acte d'accusation, exceptions d'incompétence, demandes relatives à la communication des éléments de preuve, demandes de mesures de protection pour les victimes et les témoins, demandes de mise en liberté provisoire, demandes de constat judiciaire et demandes d'admission de déclarations écrites des témoins. Désormais, les pouvoirs dont dispose le juge de la mise en état deviennent élargis, ce qui lui permet de statuer sur les requêtes courantes, sans consulter la Chambre au complet. Concrètement et comme le souligne si bien un rapport du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, les juges de la mise en état contrôlent plus étroitement la préparation des procès afin que le tribunal international puisse commencer immédiatement un nouveau procès si un autre venait à être suspendu soudainement648(*). Ainsi, poursuit-il, lorsque des difficultés ont surgi au début du procès SESELJ, le procès de Dragomir MILOSEVIC, dont la préparation était terminée, a pu être programmé en remplacement. De même, l'affaire GOTOVINA et consorts ayant pris du retard, l'affaire DELIC, qui était prête à être jugée, a commencé à la place. Grâce à une meilleure gestion de la mise en état des affaires, le Tribunal international a pu en outre commencer trois nouveaux procès649(*).

* 644 HARMON Mark B., « The Pre-Trial Process at the ICTY as a Means of Ensuring Expeditious Trials », Journal of International Criminal Justice, vol. 5, n° 2, 2007, p. 390.

* 645 HARMON Mark B., « The Pre-Trial Process at the ICTY as a Means of Ensuring Expeditious Trials », loc. cit.

* 646 T.P.I.Y., Lettre du Président du Tribunal adressée au Président du Conseil de sécurité des Nations Unies, 29 mai 2006, Doc. N.U, S/2006/353, 31 mai 2006, § 19-20.

* 647 Règle 121, § 2 (b), Règlement de procédure et de preuve de la Cour pénale internationale.

* 648 T.P.I.Y., Lettre du Président du Tribunal adressée au Président du Conseil de sécurité des Nations Unies, 15 mai 2007, Doc. N.U., S/2007/283, 16 mai 2007, § 5.

* 649 T.P.I.Y., Lettre du Président du Tribunal adressée au Président du Conseil de sécurité des Nations Unies, 15 mai 2007, Doc. N.U., S/2007/283, 16 mai 2007, § 5.

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