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Du secret professionnel du ministre de culte

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par Rémy MUNYANEZA
Université nationale du Rwanda - Bachelor's degree en droit 2008
  

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§2. La Théorie du fondement social et de l'ordre public

La théorie du fondement contractuel en honneur pendant une partie du XIXe siècle s'harmonisait avec l'esprit libéral et individualiste de l'époque. Elle a été rapidement combattue car elle restreignait la portée de la loi à la seule protection d'un intérêt privé, celui de la personne qui s'est confiée au professionnel53(*).

Une conception tenant davantage compte du fondement social du texte légal a alors été opposée à la théorie du fondement contractuel. Elle repose sur l'idée que si la loi pénale incrimine la révélation de certaines confidences, c'est parce qu'il importe non seulement à la personne qui s'est confiée au professionnel, mais à l'ensemble des citoyens et au bien commun, que chacun puisse être assuré de la discrétion des personnes chargées d'une mission particulièrement importante dans l'ordre moral, sanitaire ou patrimonial54(*).

Sans doute, la violation du secret professionnel peut causer un préjudice aux particuliers qui ont dû révéler à certaines personnes des faits qu'ils n'auraient pas divulgués s'ils n'avaient pas été obligés de le faire en s'adressant à elles, mais cette raison ne suffirait pas pour en justifier l'incrimination et la loi l'a punie seulement parce que l'intérêt général l'exige55(*).

C'est le goût du scandale et la manie des révélations indiscrètes particulièrement de la part du corps médical, qui incita le législateur de 1810 à pénaliser la violation du secret professionnel. Mais il faut aussi constater que le bon fonctionnement de la société veut que le malade trouve un médecin, le plaideur un défenseur, le pénitent un confesseur ; ni le médecin, ni l'avocat, ni le prêtre ne pourrait accomplir leur mission, si les confidences qui leur sont faites n'étaient assuré d'un secret inviolable. Il importe donc à l'ordre social que ces confidents nécessaires soient astreints à la discrétion et que le silence leur soit imposé sans condition ni réserve, car personne n'oserait plus s'adresser à eux si on pouvait craindre la divulgation du secret confié. Ainsi l'article 458 du Code pénal a pour but, autant de protéger la confidence d'un particulier, que de garantir un devoir professionnel indispensable à tous56(*).

Lorsqu'un particulier, dit-on, révèle la confidence qui lui a été confiée, la victime de l'indiscrétion est seule atteinte et elle ne peut que s'en prendre à elle-même d'avoir mal placé sa confiance. Mais quand un médecin, un avocat, par exemple, trahit le secret qui lui a été confie, c'est le public, tout entier qui risque de souffrir de ce manque de foi, car dans la crainte d'indiscrétions, il pourra hésiter à recourir au médecin ou à l'avocat, et la santé publique ou les intérêts de la justice s'en trouveront compromis57(*). Ainsi la vraie raison du texte pénal, d'est la nécessité d'inspirer pleine confiance dans la discrétion de certaines personnes dont le ministère et la profession sont indispensables et de nécessité publique.

Cette doctrine a surtout été développée par Muteau58(*). Elle a été suivie par un grand nombre d'auteurs et a été traduite rapidement dans un grand nombre de décisions de jurisprudence qui considèrent que « c'est dans un intérêt d'ordre public qu'est punie l'indiscrétion de certaines personnes dont le ministère est indispensable à tous. » Cette conception fut, à l'évidence, celle du législateur belge de 1867. Au cours des travaux préparatoires du code pénal belge de 1867, il fut expressément déclaré que les praticiens tenus au secret professionnel sont fondés à placer l'intérêt social au-dessus de l'intérêt privé lorsqu'ils sont interrogés en justice, et lorsque, dans ce cas, ils jugent à propos de révéler ce qui leur a été confié, aucune peine ne doit les atteindre59(*).

Dans ses conclusions précédent l'arrêt de la Cour de cassation du 20 février 190560(*), souvent cité, le procureur général invoquait cette notion d'intérêt social dans les termes suivants : « le secret professionnel n'est pas un privilège accordé à certaines personnes :... c'est dans un intérêt d'ordre social, reposant sur la confiance que doivent inspirer au public certaines professions, que la loi punit les révélations de secrets confiés à ces personnes ».

Intéressant la société tout entière et non seulement le confident et son client, le secret professionnel est ainsi considéré comme rattaché à l'ordre public, ce que Henri De Page définit comme étant ce « qui touche aux intérêts essentiels de l'Etat ou de la collectivité, ou qui fixe les bases juridiques fondamentales sur lesquelles repose l'ordre économique ou moral d'une société61(*).

Nombreuses sont les décisions de jurisprudence qui fondent le secret professionnel sur l'ordre public. Parmi les plus récentes, l'on peut citer l'arrêt de la Cour de cassation rendu le 30 octobre 1978 qui confirme que l'obligation de garder le secret sur tout ce dont les confidents ont eu connaissance dans l'exercice de leurs fonctions ou en raison de la confiance qui s'attache à leur profession, est d'ordre public ; l'immunité qui en dérive quant au témoignage ou à la production de documents en justice repose sur la nécessité d'inspirer une entière sécurité à ceux qui doivent se confier à ces confidents62(*).

* 53 Idem, p.27.

* 54 Idem, p.14.

* 55 Ibidem.

* 56 Emile Garçon, Code penal annoté, cité par P. LAMBERT, Op. Cit., p. 28.

* 57 Robert GARRAUD, Traité théorique et pratique d'instruction criminelle et de procédure pénale, cité par P. LAMBERT, Op. Cit., p. 28.

* 58 C. MUTEAU, Op. Cit., p. 28.

* 59 Nypels, Législation criminelle de la Belgique, t. III, cité P. LAMBERT, Op. Cit., p. 28.

* 60 Pas., 1905, I, p. 141. cité par P. LAMBERT, Op. Cit., p. 28.

* 61 Henri DE PAGE, Traité élémentaire droit Civil belge, 3e éd., t I, Bruxelles, éd. Bruylant, 1962, p. 29.

* 62 Cass., 30 octobre 1978, Pas., 1979, I, p.249; J.T., 1979, p. 369 ; Rev. dr.pén. 1979, p. 293 (obs. R. S) ; Rechts. Weekbl.,1978-1979, col 2232 et Bull. inf. inami, 1979, p. 60 et (et la note de Robert Grosemans). cité par P. LAMBERT, Op. Cit., p. 29.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault