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Les interventions du législateur dans le fonctionnement de la justice administrative au Cameroun

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par Cyrille Arnaud FOPA TAPON Cyrille Arnaud
Université de Dschang Cameroun - Master 2012
  

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SECTION 2 : LA COMPATIBILITE DES VALIDATIONS LEGISLATIVES AVEC LES EXIGENCES DE L'ETAT DE DROIT

Le régime juridique d'une institution ou d'un concept est l'ensemble des règles applicables à cette dernière ou à ce dernier. Comme nous l'avons déjà dit, aucun texte constitutionnel ou législatif ne réglemente les validations législatives aussi bien en France qu'au Cameroun, mais, les validations législatives sont à certains égards compatibles avec l'Etat de droit. Longtemps considéré comme un empiètement flagrant dans le domaine privilégié de la justice, la nécessité du recours aux validations législatives s'est fait ressentir car on lui reconnait une place fondamentale malgré les gardes fous posés par le principe de la séparation des pouvoirs. C'est pour cette raison qu'au lieu de les supprimer purement et simplement comme l'auraient souhaité certains auteurs, la jurisprudence, principalement constitutionnelle, a jugé mieux de les encadrer afin d'éviter tout débordement de la part du législateur. C'est ainsi pour être mise en oeuvre les validations doivent respecter certaines conditions (paragraphe 1) lesquelles conditions produisent des effets (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Les formalités exigées pour l'exercice du pouvoir de validation

C'est le juge constitutionnel français, qui pour la première fois, pose les conditions que le législateur devrait respecter pour mettre en oeuvre des validations, dans une de ses décisions rendues en date du 22 Juillet 1980120(*). En posant ces conditions, le juge constitutionnel reconnait aux validations législatives leur importante nécessité. Au soutien de cette décision, deux types de conditions ressortent : les conditions communes à toutes les validations (A) et les conditions particulières (B).

A- Les exigences générales du recours aux validations législatives

La décision du 22 Juillet 1980 pose les bases d'une réglementation des validations. La jurisprudence rappelle donc les règles bien établies qui représentent les frontières que le législateur ne peut en aucun cas franchir121(*). C'est ainsi que le législateur doit intervenir en vue de satisfaire un intérêt général (1) et son intervention doit respecter l'autorité des décisions de justice devenues définitives (2). En outre, et plus rigoureusement, la loi doit être assez précise pour que les actes validés soient déterminés exactement (3).

1- La satisfaction d'un intérêt général suffisant

« Si le législateur doit toujours légiférer dans l'intérêt général, l'appréciation doit être plus stricte en matière de validation et au regard de bouleversements opérés dans l'ordonnancement des normes juridiques »122(*). Les mécanismes d'élaboration de la loi permettent-ils la prise en compte de l'intérêt général? Si la détermination de l'intérêt général doit être le fait du législateur, au premier chef des parlementaires qui sont les élus du peuple, il va de soi que les mécanismes d'élaboration de la loi ne sont guère satisfaisants. La part déterminante de l'Exécutif dans l'initiative des lois, la mainmise du Gouvernement sur la procédure législative ne favorisent guère une prise en compte effective du point de vue des élus. Le problème est celui de l'excès de rationalisation des procédures parlementaires, C'est là aussi un problème politique qui peut éventuellement aboutir à des modifications de la Constitution allant dans le sens d'une restauration des pouvoirs du Parlement, particulièrement dans l'édification des lois.

La satisfaction de l'intérêt général est donc la raison d'être d'une disposition de validation123(*). Le contrôle effectué dans ce domaine est d'une intensité variable. Dans certains cas, la référence à l'intérêt général est absente ; dans d'autre cas, les raisons d'intérêt général sont implicites ; dans d'autres cas encore, il est mentionné qu'il existe des raisons d'intérêt général sans que ces raisons soient explicitées124(*) ou avec des précisions quant à l'intérêt général en cause. En vérifiant que le législateur a bien poursuivi un intérêt général suffisant, le juge constitutionnel peut se livrer à un contrôle de proportionnalité entre les mesures prises (de validation) et l'intérêt général.

Il est à noter que l'objectif de la préservation du fonctionnement du service public constitue le motif d'intérêt général le plus souvent invoqué125(*), mais d'autres objectifs d'intérêt général sont tels : éviter que la paix publique ne soit menacée par la multiplication des contestations, mettre fin à des divergences de jurisprudence et éviter par là même le développement des contestations dont l'aboutissement aurait pu entraîner des conséquences financières préjudiciables etc.126(*) Ainsi, l'acte validé ne doit pas contrevenir à un principe de valeur constitutionnel à moins que le but d'intérêt général poursuivit par la validation ne soit lui-même de valeur constitutionnelle. Toutefois, un motif purement financier n'est pas de nature à fonder une validation législative127(*).

Comme on peut le constater, le contrôle de la poursuite d'un but d'intérêt général est donc un instrument d'appréciation de la validité de la loi de validation, en tant que celle-ci, comme toutes autres lois est l'expression de la volonté générale et ne saurait aller à l'encontre de l'intérêt général. La deuxième condition est relative au respect des décisions de justice devenues définitives.

2- Le respect des décisions de justice devenues définitives

Cette exigence découle du principe de la séparation des pouvoirs. Il « n'appartient ni au législateur, ni au gouvernement de censurer les décisions des juridictions, d'adresser à celles-ci des injonctions et de se substituer à elles dans le jugement des litiges relevant de leur compétence »128(*). Il est rappelé qu'aucune loi de validation ne peut intervenir, une fois que le juge administratif a prononcé un jugement, devenu définitif. Un argument utilisé à cet égard, est le fait que le recours pour excès de pouvoir, qui constitue une forme de protection juridictionnelle des administrés129(*), est expressément prévu par la Constitution. Ce qui veut dire qu'une éventuelle validation après l'annulation d'un acte administratif, serait contraire à la Constitution. La condition de respect des « décisions de justice devenues définitives » ou des « décisions de justices passées en force des choses jugées » figure généralement dans le libellé de la mesure de validation130(*). C'est pour cela qu'il est à remarquer que le législateur précise parfois lui-même que les validations sont prononcées sous réserve des décisions de justices devenues définitives. Cette exigence signifie dès lors qu'une loi de validation ne peut intervenir que dans les procédures pendantes ou porter sur les actes pris sur le fondement d'un acte ayant fait l'objet d'une annulation sans avoir été eux-mêmes annulés par une décision de justice devenue définitive131(*).

Par ailleurs, l'expression « respect des décisions de justices définitives » utilisée indifféremment avec « respect de la chose jugée » est-elle absolue tant on a remarqué que l'intérêt général (motif suffisant) peut être invoqué pour justifier la validation d'acte déjà annulés ?132(*) La réponse est négative. Une atténuation doit être apportée à cette exigence parce que la rigueur pourrait conduire à une paralysie des institutions. Ainsi, comme l'a préconisé le juge constitutionnel français, l'acte annulé ne pouvant plus faire l'objet de validation, la mesure prise sur son fondement peuvent l'être à condition de ne pas être annulé par une décision devenue définitive.

Bien que trouvant son fondement dans le principe de la séparation des pouvoirs, cette exigence est atténuée par l'intérêt général qui est une nécessité fondamentale qui tend aussi à la préservation de l'Etat de droit. A ces deux exigences s'ajoute une troisième, la portée limitée des validations.

3- L'exigence d'une précision stricte des actes validés

Le législateur doit prendre soin, lorsqu'il procède à une validation, de préciser dans les dispositions de validation quelle est l'irrégularité dont l'acte sera considéré comme purgé ou lorsque la validation concerne des actes pris sur le fondement d'un acte irrégulier ou l'aboutissement d'une procédure entachée d'irrégularité en amont, de viser l'acte illégal, ou l'irrégularité de procédure133(*). L'objet de cet examen est de rappeler que le législateur ne peut prendre des mesures de validation, « qu'à condition de définir strictement leur portée qui détermine l'exercice du contrôle de la juridiction administrative »134(*). Ainsi, le juge constitutionnel est à même de restreindre le prononcé de validations trop vagues, car, il arrive que le législateur choisisse une formule lapidaire procédant à la validation sans en préciser la portée ; or le caractère circonscrit de la validation est une condition de sa validité. C'est pour cette raison que  « si le législateur peut, dans un but d'intérêt général suffisant, valider un acte dont le juge administratif est saisi afin de prévenir les difficultés qui pourraient naître de son annulation, c'est à condition de définir strictement la porté de cette validation »135(*).

Il convient de remarquer que ces conditions communes aux validations sont cumulatives et aucune ne peut être écartée au profit de l'autre. Qu'en est-il des conditions particulières ?

* 120 Décision n°80-119 DC du mardi 22 juillet 1980, in Les grandes décisions du Conseil constitutionnel, Paris, Dalloz, 9ième édition, 1997. Dans cette affaire, le juge constitutionnel a été appelé à statuer sur la constitutionnalité d'une loi de validation.

* 121 MATHIEU (B.), « Les validations législatives devant le juge constitutionnel : bilan d'une jurisprudence récente », in RFDA, n°11, juillet-août 1995, p.781

* 122 Ibidem. p.782.

* 123 Cf. CHAPUS (R.), op.cit. ; DE LAUBADERE (A.), VENEZIA (J. C.) et GAUDEMET (Y.), Traité de droit administratif, Paris, LGDJ, Tome 1, 14ième édition, 1996, p.458.

* 124 Voir MATHIEU (B.), article précité, p.781.

* 125 Quelques exemples tirés de la jurisprudence du Conseil constitutionnel français : continuité et bonne marche du service public de l'enseignement supérieur, continuité du service public des transports urbains, de la protection sociale etc. Cf. notes de synthèses précitées.

* 126 Cf. Notes de synthèses précitées.

* 127 Cf. Notes de synthèses précitées. Une validation de nature purement financière n'est-elle justifiée que si les montants en cause sont suffisamment importants pour mettre en péril un intérêt public.

* 128 Décision n°80-119 DC du 22 juillet 1980 précitée.

* 129 HOUHOULIDAKI Antonia, L'exécution par l'Administration des décisions du juge administratif en droit français et en droit grec, Mémoire de DEA de Droit public comparé des pays européens, Université Paris I Sorbonne, disponible sur le site www.memoireonline.com

* 130 Cf. Notes de synthèses précitées.

* 131 Ibidem.

* 132 C'est le cas par exemple d'un concours administratif annulé pour cause d'illégalité, les candidats reçus ont déjà terminé leur scolarité et sont affectés à leur poste respectif. Quelques années plus tard, le juge annule le concours saisi d'un recours pour excès de pouvoir. Sa décision acquiert autorité de la chose jugée. Mais il serait injuste, et ce dans le souci de préserver la continuité du service public (motif d'intérêt général) d'obliger tous les candidats à subir un nouveau concours.

* 133 Cf. Notes de synthèses précitées.

* 134 Voir MATHIEU (B.), article précité, décision du Conseil constitutionnel français n°95-363 DC du 11 janvier 1995.

* 135 Décision n°99-422 du 21 décembre 1999 sur la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon