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De l'efficacité des limites du pouvoir de révision constitutionnelle en droit positif congolais

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par Aaron DJENGO
Université de Kinshasa - Licence 2015
  

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2. Revue de la littérature

Dressant le bilan de trente années de pratique constitutionnelle sur le continent noir, Pierre François GONIDEC s'interrogeait déjà sur l'utilité même des Constitutions africaines, laissant ainsi poindre son scepticisme sur l'évolution du constitutionnalisme africain36(*). Curieusement, cette interrogation prémonitoire et ce scepticisme averti valent encore leur pesant d'or, particulièrement sur la question de la révision car, l'Afrique est restée un espace qui «  adopte, remet en cause, suspend, abroge, puis renouvelle la Constitution à son souhait37(*) ».

Ce peut être pour cette raison que la question de l'exercice du pouvoir de révision constitutionnelle domine la littérature constitutionnelle et les réflexions sur le continent africain en général38(*), et en RDC en particulier39(*). Cyrille GOUGBEDJI en sait assurément quelque chose, puisqu'il note : « il n'y a pas de matière qui ait soulevé plus d'intérêt et de polémiques pour les chercheurs sur le nouveau constitutionnalisme africain que les questions relatives à l'exercice du pouvoir politique et à la révision constitutionnelle40(*) ». L'ordre constitutionnel se trouve constamment menacé41(*)sur ce continent par les querelles relatives à l'accession au pouvoir et par la mise en oeuvre que les représentants du peuple font de la souveraineté nationale dont l'exercice des prérogatives leur est délégué par la Constitution, enchaine-t-il.

En Afrique, ces altercations, souvent entre la majorité et l'opposition, s'explique par l'image bilieuse de la révision constitutionnelle : en effet, ce mécanisme d'adaptation de la Constitution a perdu toutes ses vertus d'adaptations. Il n'est plus un moyen de prise en compte du dynamisme de la vie politique et sociale, de rectification des erreurs et insuffisances relevées au cours de la mise en application du texte constitutionnel et d'amélioration des mécanismes institutionnels42(*). Il n'est encore moins initié dans la rationalité et traduit en revanche l'émergence des intérêts politiques des uns et des autres, ne laissant aucune place à une révision innocente de la Constitution, dont Jean WALINE doutait déjà de l'existence43(*).

Dans ces conditions, qu'une Constitution africaine puisse évoluer sans rupture de légalité et sans faire l'objet de multiples révisions gênantes, ce serait donc une avancée considérable44(*). D'autant plus que généralement, en dépit de quelques singularités, le pouvoir de révision est intervenu pour ré-constitutionnaliser certains instruments du présidentialisme déconstitutionnalisés et pour en introduire de nouveaux, renchérit Stéphane BOLLE45(*).

S'il faut restreindre l'analyse à la RDC, le phénomène est presque similaire. C'est possiblement Jacques DJOLI qui mesure mieux la portée de cette corrélation dans un article fraichement publié : « nos Constitutions semblent fades, limitées à trancher la question du pouvoir et des mandatures. En révisions permanentes, elles traiteront toujours des mandats d'un président, des rapports de ce président avec les autres centres de décisions, des prérogatives du président et de ses ascendants sur les chambres élues46(*)... »

Et Philippe BIYOYA de compléter :«  dans ces cas, la révision constitutionnelle ici envisagée opère comme une stratégie de conservation des pouvoirs issus d'un processus électoral lui-même perçu comme une stratégie de sortie de crises politiques graves , quand ce ne sont pas des guerres civiles ou insurrectionnelles éprouvantes. Le problème en ce moment serait celui de l'impression d'instrumentalisation de la Constitution que donnerait la technique de révision, et par ricochet, le problème plus fondamental de la fonction politique, économique et sociale de la Constitution dans la politique africaine47(*) ».

Partant, le tableau sombre que dresse Evariste BOSHAB est donc fondé : « la révision constitutionnelle passe pour un tabou inviolable, surtout en Afrique subsaharienne où sa simple évocation soulève des passions et suscite des réactions inexplicables. Une lourde suspicion pèse sur toute révision constitutionnelle depuis que l'épidémie de conférences nationales souveraines a redonné voix au chapitre aux peuples autrefois bâillonnés48(*). »

D'où l'intérêt d'affirmer avec Dieudonné KALUBA que le contrôle de constitutionnalité reste ouvert lorsqu'une révision constitutionnelle est susceptible de dépasser les limites matérielles imposées par le constituant de 200649(*). C'est donc un mécanisme de neutralisation de toute suspicion autour de la révision constitutionnelle.

* 36GONIDEC (P-F.), « A quoi servent les Constitutions africaines ? Réflexion sur le constitutionnalisme africain », RJPIC, octobre-décembre, 1988, n°4, p.849.

* 37GLELE (M-A), « La Constitution ou loi fondamentale », Encyclopédie juridique de l'Afrique, tome I, Abidjan, NEA, 1982, p.33.

* 38Voy. SINDJOUN (L.), Lesgrandes décisions de la justice constitutionnelle africaine. Droit constitutionnel jurisprudentiel et politiques constitutionnelles au prisme des systèmes politiques africains, Bruxelles, Bruylant 2009, pp.185-310 ; OMAR DIOP (E-A.), « Réflexions sur un phénomène constitutionnel inédit : la prorogation du mandat présidentiel de la République en Côte d'Ivoire », Revue de Droits africains, n° 41 Bruxelles, 2007, pp.3-70 ; BOSHAB(E.), Entre la révision de la Constitution et l'inanition de la constitution, op.cit., p.11; MBATA B. MANGU(A.), « Monarchies présidentielles : le syndrome du troisième mandat ou d'une présidence à vie dans les États membres de l'Union africaine », RADG, n°3, 2014, pp. 47-66 ; DJOLI ESENG?EKELI(J.), Droit constitutionnel. L'expérience congolaise, op.cit., pp. 241-245 ; KAMUKUNY MUKINAY(A.), Contribution à l'étude de la fraude en droit constitutionnel congolais, Kinshasa, EUA, p.407-442; KAMUKUNY MUKINAY (A.), Droit constitutionnel congolais, op.cit., 2011, pp. 18-20 ; ESAMBO KANGASHE (J-L.), La constitution congolaise du 18 février 2006 à l'épreuve du constitutionnalisme. Contraintes pratiques et perspectives, AcadémiaBruylant., pp. 227-307 ; ESAMBO KANGASHE (J-L.), Le droit constitutionnel, Louvain-la-Neuve, Académia-L'harmattan, 2013, pp. 22- 24; KALUBA DIBWA (D.), La justice constitutionnelle en République démocratique du Congo. Fondements et modalités d'exercice, Louvain-la-Neuve, Académia-L'Harmattan, 2013, pp. 361-501 ; SOMA(A.), « Le contrôle de constitutionalité des normes supra législatives », Annuaire béninois de justice constitutionnelle, PUB, 2013 ; KLEIN(CL.), « Le contrôle de lois constitutionnelles : Introduction à une problématique moderne », Cahiers du Conseil constitutionnel, n°27, janvier 2010, pp. 1-27.

* 39MENDE (P.), Contribution au débat africain et congolais sur l'encadrement juridictionnel du pouvoir de révision constitutionnelle, Mémoire DES, Faculté de droit, Université de Kinshasa, 2011-2013, p. 19.

* 40GOUGBEDJI (C.), « Le pouvoir constituant dérivé à l'épreuve de la rigidité constitutionnelle en Afrique », inConstitutionnalismes africains, 1996, pp. 29-63.

* 41La Constitution, la souveraineté constituante donc, est également menacée par les autorités chargées de la réviser. L'histoire constitutionnelle du 20ès nous enseigne que les autorités de révision ont revendiqué le droit d'abroger la Constitution et donc de remettre en cause ce que le constituant, le peuple ou ses représentants avaient voulu. La souveraineté du peuple serait donc confrontée au défi de la révision constitutionnelle. Lire en ce sens BEAUD (O.),La puissance de l'Etat, Paris, PUF, 1994, p. 308.

* 42DANELCIUC-COLODROVSCHI (N.), op.cit., pp. 757-775.

* 43WALINE (J.), «  Les révisions de la constitution de 1958 », in Droit et politique à la croisée des cultures.Mélanges Philippe ARDANT, LGDJ, 1999, pp. 243-254.

* 44CABANIS (A.) et MARTIN (M-L.), « Un espace d'isomorphisme constitutionnel : l'Afrique francophone », in Mélanges Dmitri Georges Lavroff, Paris, Dalloz, 2005, pp. 343-361.

* 45 BOLLE (S.), « Des Constitutions « made in  Afrique », mai 2005 :http://www.La Constitution-en- Afrique.org

* 46DJOLI (J.), « La mobilité constitutionnelle en Afrique postcoloniale : dimension structurelle et opportunisme conjoncturel », op.cit., p. 676-699.

* 47BIYOYA (PH.), « L'Afrique face à la révision constitutionnelle en période pré-électorale : problèmes et perspectives »,in Congo-Afrique, 2014, pp. 709-715.

* 48BOSHAB (E.), op.cit., p.278.

* 49KALUBA DIBWA (D.), La justice constitutionnelle en République démocratique du Congo. Fondements et modalités d'exercice, op.cit., pp. 361-501.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld