WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Partenariat et médiation commerciale: la situation de la société d'état québécoise.

( Télécharger le fichier original )
par Souhail CHALOUHI, Ing; PMP; LL. M.
Université de Sherbrooke - Maà®trise en Droit 2008
  

Disponible en mode multipage

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

PARTENARIAT ET MÉDIATION COMMERCIALE : LA SITUATION DE LA
SOCIÉTÉ D'ÉTAT QUÉBÉCOISE

Par
Souhail Chalouhi

Essai présenté dans le cadre du programme de maîtrise en prévention et règlement des
différends, à la faculté de droit de l'Université de Sherbrooke, en vue de l'obtention du
grade de maître en droit (LL.M.)

Faculté de droit
Université de Sherbrooke

IDENTIFICATION SIGNALITIQUE

PARTENARIAT ET MÉDIATION COMMERCIALE: LA SITUATION DE LA SOCIÉTÉ D'ÉTAT QUÉBÉCOISE

Souhail Chalouhi

Essai réalisé en vue de l'obtention du grade de maître en droit (LL. M.)

Université de Sherbrooke Octobre 2008

Mots clés : Médiation commerciale, règlement des différends, contrats de construction, clauses contractuelles, modes alternatifs, droit, justice alternative, conciliation, facilitation, société d'État, droit administratif, gestion de la chose publique, conflit, arbitrage, IMAQ, partenariat.

L'émergence de la médiation commerciale et son développement se font à un rythme accéléré pour palier à l'insuffisance de la justice à répondre aux besoins des citoyens. Ce processus de règlement des différends est en plein essor partout au Canada, aux États-Unis et dans le reste du monde. Pourtant, au Québec et en particulier à Hydro-Québec, on affiche une certaine réticence à acquiescer à la demande des fournisseurs d'inclure dans les contrats une clause de médiation commerciale comme mode de règlement des différends. Dans un contexte où la société d'État favorise une relation de partenariat, on s'interroge sur les perceptions des acteurs clefs par rapport à un mode de règlement qui est susceptible de préserver les relations à long terme entre les parties en conflit.

SOMMAIRE

La médiation commerciale est en plein essor dans le monde des affaires et ne cesse de gagner du terrain au Canada et partout dans le monde. Au Québec, ce nouveau mode de règlement, encore méconnu, a vu le jour au milieu des années 90 à la cour des petites créances.

Devant l'émergence d'un tel mode de règlement des différends commerciaux, les partenaires d'Hydro-Québec ont fait savoir à plusieurs reprises, par l'intermédiaire de leur association, l'Association des Constructeurs des Routes et Grands Travaux du Québec (ACRGTQ), leur désir de voir une clause de médiation civile et commerciale dans les contrats d'Hydro-Québec. La société d'État affiche une certaine réticence à cette requête malgré qu'elle prône une relation de partenariat avec ses fournisseurs. Cette recherche s'intéresse aux perceptions des acteurs clés d'Hydro-Québec par rapport à la médiation, mode reconnu être en mesure d'actualiser les valeurs du partenariat prôné par la société d'État avec les fournisseurs.

L'analyse de cette question se base sur une étude théorique et sur des entrevues semidirigées auprès des acteurs clés en mesure d'influencer la politique de la société d'État en matière de règlement des différends. La recherche fait d'abord la lumière, au point de vue théorique, sur la relation entre le partenariat et la médiation comme mode de règlement des différends, ensuite elle présente la perception du partenariat; par après, elle expose la conception des décideurs par rapport à la médiation à travers leur pratique et enfin on dégage la perception des acteurs par rapport à la dynamique entre le partenariat et la médiation dans un tel contexte.

La recherche dévoile que les acteurs se voient contraints, comme gestionnaires des biens communs et gardiens des deniers publics, à procéder par appels d'offres publics pour la plupart des contrats de fourniture. De telle sorte que ce mode d'approvisionnement ne permet pas une véritable relation de partenariat, mais plutôt une relation d'affaires régulière.

Il appert qu'au point de vue théorique, la médiation, comme mode de règlement des différends commerciaux, va de pair avec le partenariat vertical client-fournisseur dans la

mesure où la médiation actualise les valeurs du partenariat dans la recherche d'une solution au conflit. Cependant, la recherche révèle qu'il existe un écart entre la perception des acteurs clés et la théorie affirmant qu'il existe une relation entre le partenariat et la médiation. De sorte que les acteurs interviewés voient la médiation à l'intérieur d'un cadre juridique où le contrat, la Loi et les règlements en vigueur sont la source de justification de toute solution. Ainsi, toute demande d'un fournisseur doit être fondée en Droit.

En bref, la recherche établit clairement que les causes de l'écart entre la perception des acteurs et la théorie résident dans la méconnaissance de la médiation avec tout son potentiel. Toutefois, les acteurs affichent une certaine ouverture pour essayer, à titre expérimental, une telle clause afin d'évaluer la plus-value réelle de son instauration dans les contrats de la société d'État.

Jus est ars boni et aequi

Le droit est l'art du bien (par opposition au mal) et de l'équitable (par opposition au droit strict).

Le Digeste1.

REMERCIMENTS

Je tiens à remercier mon directeur, monsieur Georges A. Legault, de sa générosité d'avoir accepté de me soutenir dans la réalisation de ce projet. Sa sagesse et ses nombreuses interventions m'ont été très utiles pour parfaire mes idées et m'encourager à poursuivre cette aventure inusitée pour l'ingénieur que je suis.

Cependant je ne peux pas passer sous silence la patience de ma famille, en particulier de mon fils Mark, pour ses précieux conseils.

1 http://webu2.upmf-grenoble.fr/Haiti/Cours/Textes/intro.html#H

Le Digeste fut publié le 16 décembre 533 et entra en vigueur le 30 décembre de la même année. La commission de rédaction, dirigée par Tribonien, comptait onze avocats dont deux professeurs de l'école de droit de Beyrouth (Dorothée et Anatole)

TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION 1

CHAPITRE 1 LE PARTENARIAT D'AFFAIRES ET LA MÉDIATION CIVILE ET COMMERCIALE (CADRE CONCEPTUEL DE RÉFÉRENCE) 18

Le contexte du marché de l'approvisionnement d'Hydro-Québec 18
Le partenariat, un choix stratégique dans la politique

d'approvisionnement d'Hydro-Québec 21

La médiation, un mode de règlement des différends

dans le cadre d'un partenariat 31

1.3.1 Les insuffisances du mode usuel de règlement des

différends 31

1.3.2 Les besoins 34

1.3.3 Une approche de pratique suggérée : Médiation Uri-Fisher-Plus 38

CHAPITRE 2 PRÉSENTATION DES DONNÉES RECUEILLIES IN SITU 46

2.1 Acteur D-01 46

2.1.1 La perception du partenariat 47

2.1.2 La perception du mode de règlement des différends 49

2.1.3 La perception de la relation entre le partenariat et le

mode de règlement des différends 53

2.2 Acteur D-02 54

2.2.1 La perception du partenariat 55

2.2.2 La perception du mode de règlement des différends 60

2.2.3 La perception de la relation entre le partenariat et le

mode de règlement des différends 65

2.3 Acteur D-03 68

2.3.1 La perception du partenariat 68

2.3.2 La perception du mode de règlement des différends 69

2.3.3 La perception de la relation entre le partenariat et le

mode de règlement des différends 74

2.4 Acteur D-04 76

2.4.1 La perception du partenariat 76

2.4.2 La perception du mode de règlement des différends 78

2.4.3 La perception de la relation entre le partenariat et le

mode de règlement des différends 82

2.5 Acteur D-05 84

2.5.1 La perception du partenariat 85

2.5.2 La perception du mode de règlement des différends 86

2.5.3 La perception de la relation entre le partenariat et le

mode de règlement des différends 93

2.6 Acteur D-06 95

2.6.1 La perception du partenariat 95

2.6.2 La perception du mode de règlement des différends 96

2.6.3 La perception de la relation entre le partenariat et le

mode de règlement des différends 100

2.7 Acteur D-07 102

2.7.1 La perception du partenariat 102

2.7.2 La perception du mode de règlement des différends 103

2.7.3 La perception de la relation entre le partenariat et le

mode de règlement des différends 106

CHAPITRE 3 ANALYSE ET INTERPRÉTATION DES DONNÉES 108

3.1 Analyse de la perception du partenariat 108

3.2 Analyse de la perception par rapport à la médiation 112

3.2.1 Les forces du mode usuel 114

3.2.2 Les faiblesses du mode usuel 116

3.2.3 La pratique du mode alternatif 117

3.2.4 Attentes par rapport au processus 118

3.2.5 Attentes par rapport au médiateur 120

3.2.6 Les forces (satisfactions) du mode alternatif 121

3.2.7 Les faiblesses (déceptions) du mode alternatif 122

3.3 Analyse de la perception de la dynamique entre

partenariat et règlement des différends 124

CONCLUSION 129

BIBLIOGRAPHIE 132

ANNEXE 1 QUESTIONNAIRE DE L'ENTREVUE SEMI-DIRIGÉE 136

INTRODUCTION

Les projets de construction sont parmi les plus importants générateurs des conflits en raison de leur complexité et du nombre important d'intervenants et d'intérêts divergents impliqués dans la réalisation d'un projet. D'un coté, le donneur d'ouvrage tente, à l'intérieur d'une limite budgétaire préétablie, de réaliser un projet performant avec un contenu difficile à préciser et dont l'envergure exacte ne sera connue qu'une fois le projet achevé. De l'autre coté, le fournisseur des biens et services tente de maximiser ses profits par la réduction des coûts tout en respectant les obligations contractuelles. C'est dans un tel contexte qu'un gérant de projet est amené à oeuvrer pour mener à terme un projet de construction où la bonne gestion des conflits est un gage de réussite.

Dans ce sens, Hydro-Québec, qui est reconnue comme étant le plus grand donneur d'ouvrage de construction au Québec, se trouve confrontée aux multiples réclamations provenant des entrepreneurs et des fournisseurs lors de l'exécution des contrats. À cet égard, la politique d'Hydro-Québec en matière de règlements de différends en cas de conflit avec ses fournisseurs est clairement annoncée dans les clauses générales des documents d'appel d'offres. À cet effet, il est stipulé :

Procédure en cas de différend

a) Obligation de poursuivre les travaux

L'entrepreneur doit poursuivre les travaux diligemment, malgré tout différend avec Hydro-Québec. Cette poursuite ne constitue pas une renonciation de sa part à faire valoir ses droits.

b) Avis de l'entrepreneur

Dès que survient un problème relatif à l'interprétation ou à l'exécution du contrat, l'entrepreneur doit en donner avis par écrit au représentant d'Hydro-Québec et il doit l'informer de son intension, le cas échéant, de présenter une réclamation. Le plus tôt possible après cet avis, l'entrepreneur doit exposer en détail, par écrit, les arguments à l'appui de sa réclamation et le cas échéant, ses méthodes de calcul. Il doit joindre à cet exposé détaillé toutes les pièces justificatives.

c) Décision du représentant d'Hydro-Québec

Sur réception de l'exposé détaillé de l'entrepreneur et de toutes les pièces justificatives,
le représentant d'Hydro-Québec étudie la demande de l'entrepreneur et informe par écrit

ce dernier de sa décision. En cas de désaccord avec cette décision, l'entrepreneur peut demander au supérieur hiérarchique du représentant d'Hydro-Québec de réviser cette décision, en exposant les motifs à l'appui de cette demande de révision. »2; on retrouve la même procédure dans les contrats de sa filiale la S.E.B.J. pour le règlement de différends avec les fournisseurs.

Par la suite, le rejet par Hydro-Québec et le maintien de la demande de compensation du fournisseur indique qu'il y a litige entre les parties. À ce moment, la société d'état enclenche la procédure interne afin d'en arriver à un règlement3. Il s'agit, en premier lieu, d'une tentative de règlement par voie de négociation bipartite entre Hydro-Québec et le fournisseur, laquelle négociation est encadrée par des directives administratives4 et doit respecter les engagements contractuels basés sur les faits et les normes juridiques. Par après, si les négociations échoppent, le dossier sera transféré au contentieux5 de l'entreprise avec un mandat de défendre les intérêts de l'entreprise advenant une action en justice de la part de fournisseur.

Bref, le mode de la médiation n'est pas envisagé clairement, dans les procédures de gestion de réclamations, comme mode de règlement de différends en cas de conflit avec un fournisseur. Le mode usuel employé pour le règlement des conflits est la négociation bipartite selon des critères objectifs fondés en droit où les clauses du contrat, la loi et les règlements en vigueur sont la source de toute justification, et en cas d'échec, le dossier est débattu devant le tribunal.

Parmi les cas rencontrés, une cause célèbre a marqué l'histoire de l'industrie de construction au Québec d'une manière particulière et qui est devenue une source de réflexion pour la réalisation de ce projet de recherche. Il s'agit d'un conflit qui a trait au jugement de la Cours Suprême du Canada dans l'affaire Banque de Montréal c, Bail Ltée6.

2Anonyme (2005). Clauses générales pour contrat de travaux, Montréal, Hydro-Québec article 19, 1er février 2005.

3 Anonyme (1999). Guide de gestion des réclamations, Hydro-Québec, Unité de contrôle, partie I-2.

4 Ibid. Partie I, article 4.0.

5 Ibid. Article 5.0.

6 Canada, Cour Suprême du Canada (1992). Banque de Montréal c. Bail Ltée, Canada, 1992-2 R.C.S. 554, Nos du greffe : 21748, 21747.

En bref, cette cause était à l'origine une réclamation, datée du 19 août 1977, de quelques centaines de milliers de dollars d'un sous-traitant d'un fournisseur d'Hydro-Québec. Le jugement final, qui a eu lieu le 25 juin 1992, a coûté à Hydro-Québec la somme de 6 438 674 $ plus les intérêts depuis le 8 juin 1983, sans toutefois tenir compte de tous les frais juridiques pendant 15 ans de procès. Ce jugement a connu un résultat « perdantperdant » car le demandeur principal a fait faillite avant le jugement et Hydro-Québec a déboursé plus de trente fois le montant réclamé au départ. En conséquence, cette cause suscite l'interrogation sur l'insuffisance du judiciaire à répondre aux besoins des deux parties en conflit et pose la question sur la pertinence de recourir à la médiation comme mode de règlement de conflits commerciaux.

Aussi, d'autres évènements incitent à se questionner davantage sur la pratique de règlement des conflits commerciaux à Hydro-Québec. D'abord, en 2003, un important programme de formation déployé par Hydro Québec à tous les employés concernant « les comportements clés pour réussir une relation de partenariat » : ce programme fait suite au virage que la société d'état a pris pour favoriser la relation de partenariat avec ses fournisseurs. Ainsi, dans un document7 intitulé Le partenariat avec les fournisseurs : une relation gagnant-gagnant, Hydro-Québec, qui est parmi les plus importants acheteurs de biens et services du Québec, manifeste son désir de maintenir des relations dynamiques et durables avec ses fournisseurs. Cette politique d'approvisionnement est motivée par le volume important d'acquisition des biens et services d'une grande importance stratégique pour Hydro-Québec et dont le marché est tenu par des fournisseurs spécialisés, en nombre relativement restreint. Avec une telle politique, la société d'état a une ferme volonté et un intérêt particulier à favoriser le développement au Québec d'une infrastructure industrielle spécialisée capable de fournir des biens et services indispensables à la réalisation de la mission fondamentale de l'entreprise.

Cette forme de partenariat est définie comme étant une relation d'affaires durable basée sur
la confiance mutuelle entre Hydro-Québec et un partenaire qui unissent leurs efforts pour
atteindre des objectifs partagés8. Cette orientation a été approuvée par le Conseil

7 Anonyme (1998). Le partenariat avec les fournisseurs : une relation gagnant-gagnant, Direction principale approvisionnement et services, Hydro-Québec ISBN2-550-33157-5, 98G027.

8 Ibid.

d'administration, le 1er octobre 19989, afin de confirmer l'engagement de l'entreprise envers ses partenaires d'affaires, pour établir des relations « basées sur le respect mutuel et un partage équitable et durable des risques et des bénéfices »10.

En 2004, les acquisitions d'Hydro-Québec de biens et services ont atteint 2 394 M$ dont 94 % provenait des fournisseurs établis au Québec11. À cette fin, la société d'état a établi des partenariats d'affaires en conformité avec ses valeurs et orientations stratégiques, dans la recherche d'une véritable mutualité d'intérêts en vue de générer des bénéfices tout en assurant le déroulement harmonieux de ses projets et de ses activités12.

Ensuite, lors du 62ième congrès annuel tenu les 18, 19 et 20 janvier 2006, le Sommet HQE/SEBJ-ACRGTQ, le partenaire principal de la Société d'État, l'Association des Constructeurs des Routes et Grands Travaux du Québec, a exprimé le désir d`instaurer dans les contrats d'Hydro-Québec une clause de résolution des conflits qui inclut un mécanisme de facilitation. En réponse à cette requête, HQE/SEBJ a fait savoir lors de l'atelier 2 de ce congrès qu'elle ne peut pas modifier ses contrats pour y inclure une clause à cet effet. Cette demande d'un important partenaire d'Hydro-Québec est motivée par l'émergence de la médiation comme mode de règlement des conflits commerciaux où le milieu des affaires du Québec n'a pas voulu rester passif devant un tel phénomène.

En effet, le 3 octobre 2002, une coalition13 de partenaires économiques et juridiques influents a décidé de se mobiliser afin de promouvoir l'instauration de la médiation dans la relation d'affaires au Québec. Cette mobilisation a été précédée par un sondage mené par SOM, en février 2002, qui a révélé que 25 % seulement des cadres québécois connaissaient la clause de médiation et 20 % du public visé avait l'intention d'utiliser la clause de médiation dans les contrats. Le gouvernement du Québec a toujours encouragé la déjudiciarisation et a fait connaitre sa préférence pour la médiation et le règlement à l'amiable des conflits commerciaux. Cette position a amené Me Michel Bouchard, sousministre de la justice, à déclarer14 : « Comparée aux procédures judiciaires, la médiation

9 Conseil d'administration (1998). Nos partenaires d'affaires, Montréal, Hydro-Québec, 11 septembre 1998.

10 Ibid.

11 Anonyme (2004). Rapport annuel, Montréal, Hydro-Québec, page 52.

12 Ibid.

13 Anonyme (2002). Institut de médiation et d'arbitrage du Québec, 3 octobre 2002.

14 Institut de médiation et d'arbitrage du Québec (2002). Communiqué de presse, octobre 2002.

est beaucoup plus avantageuse : elle s'avère moins coûteuse, plus rapide et totalement confidentielle. Ces bénéfices sont à la portée de tous dans la mesure où on prévoit, dans les contrats, une clause de médiation ». Cette politique du ministère de la justice du Québec de promouvoir la médiation civile et commerciale est clairement annoncée dans son dépliant15 La médiation civile et commerciale, une bonne façon de s'entendre. Dans ce dépliant, le ministère de la justice du Québec évoque les avantages de la médiation comme étant un mode de règlement qui favorise le rapprochement entre les parties, permettant ainsi des relations harmonieuses et préservant le lien de confiance entre ces dernières.

Cette revue sommaire de la pratique de la médiation au Québec nous amène à constater que le gouvernement et le milieu des affaires sont manifestement favorables à l'instauration de la médiation comme mode de règlement des différends civils et commerciaux. Force aussi de constater qu'il apparaît qu'il y a au Canada un large consensus pour l'adoption de la médiation comme mode de règlement des conflits. Les entreprises commerciales manifestent clairement leur intérêt pour la médiation, non seulement pour des raisons d'économie dans les procédures, mais aussi pour construire et maintenir des bonnes relations d'affaires à long terme, où il s'avère difficile de le faire avec les modes judicaires.

D'ailleurs, la médiation obligatoire a été adoptée dans plus d'une province. En effet, l'Ontario, avec la règle 24.1 des règles de procédures civiles prise en application par la Loi sur les tribunaux judiciaires, met en application la médiation civile obligatoire. Les parties à un différend en matière civile sont obligatoirement envoyées en médiation dans les 90 jours suivant le dépôt de la défense. En Saskatchewan, après la clôture de la plaidoirie écrite dans les affaires civiles contestées, les parties doivent participer à une séance de médiation avant de passer à une nouvelle étape16. En Colombie-Britannique, le recours à la médiation en matière civile fait partie de la culture juridique. Il existe un mécanisme de médiation obligatoire pour les causes relevant de la Cour des petites créances. En Alberta, les règles de médiation imposent à certaines parties en Cour des petites créances de participer à la médiation17.

15 Justice Québec (2005). La médiation civile et commerciale, une bonne façon de s'entendre, 10 mai 2005.

16 Canada, Saskatchewan (s. d.). Loi « Queens Bench Act », paragraphe 54 (2).

17 Canada, Alberta (s. d.). Loi « Provincial Court Act ».

Quant aux États-Unis, ils sont sans doute les plus avancés en matière de l'emploi de la médiation en matière civile et commerciale. En effet, les Américains font abondamment appel à la médiation depuis plus de 30 ans et cet engouement pour la médiation a rendu nécessaire de la réglementer par la Loi uniforme américaine sur la médiation18. En 1995, aux États-Unis, environ 20 % de l'ensemble des procès civils intentés devant les tribunaux américains étaient des affaires impliquant l'État fédéral19. Pour assurer un traitement plus efficace de ses affaires, la ministre de la justice Mme Janet Reno, a lancé en 1995 un programme de règlement du litige par la voie de la médiation. Ainsi, les États-Unis sont ouverts à l'utilisation d'une procédure de médiation civile et commerciale dans tous les cas appropriés.

Aussi, en 2002, les pays membres des Nations-Unies ont adopté par résolution à l'assemblée générale de la 57e session, la loi type de la commission des Nations-Unis pour le droit commercial international sur la conciliation commerciale internationale (CNUDCI)20. Cette résolution a amené le Canada à envisager l'intégration de cette loi type dans le droit canadien.

Dans un tel contexte, il est tout à fait pertinent de faire une réflexion et de poser la question suivante : pourquoi la clause de procédure en cas des différends, inscrite dans les contrats d'Hydro-Québec, n'inclut pas la médiation, un mode de règlement gagnant-gagnant, reconnu pour préserver les relations à long terme et basée sur la confiance et l'équité entre les parties?, alors qu'elle prône par sa politique de partenariat une relation gagnant-gagnant durable basée sur la confiance et l'équité avec ses fournisseurs?

À première vue, il semble que la société d'état tient un discours qui dégage une apparence d'incohérence dans sa politique d'approvisionnement au niveau de ses relations avec ses fournisseurs. À ce sujet, Jacques Caillouette21 de l'université de Sherbrooke voit les partenariats comme un espace de conflit, de négociation et de médiation. Il explique sa

18 USA (2001). Uniform Mediation Act, National Conference of Commissioners on Uniform State Laws, USA.

19 Peter Steenland (1999). Du règlement des litiges dans les tribunaux fédéraux américains, Revue de l'IIP, USA.

Note : IIP, Démocratie et droits de l'homme. De 1995 à janvier 2002, M. Steeland a présidé « The Office of Dispute Resolution » au US Department of Justice.

20 Nations Unies (2002). Publication des Nations-Unies, Numéro de vente F.05.V.4, ISBN : 92-1-233409-1.

21 Université de Sherbrooke (2001). Pratique de partenariat, Pratique d'articulation identitaire et mouvement communautaire, NPS, vol. no1.

réflexion par le fait que « sous un voile de partenariat peuvent se glisser des pratiques de négation de l'autre plutôt que de collaboration avec lui ». Par son étude22, il évoque aussi les rapports de pouvoir des partenaires qui peuvent être une source de conflit : « des rapports de pouvoir traversent donc l'espace partenarial et y introduisent un élément de conflit à prendre en compte pour penser les pratiques partenariales. » La médiation est essentielle dans une relation de partenariat, car cette pratique « met en communication des gens, des organismes, des systèmes d'action qui, laissés à eux-mêmes, tendent au repli sur soi ».

Cette réflexion d'un chercheur chevronné contribue à se questionner davantage, à savoir si le refus d'Hydro-Québec d'instaurer une clause de médiation dans ses contrats d'approvisionnement est cohérent avec sa politique du partenariat. Un survol de lecture a permis de constater que la même apparence d'incohérence se retrouve aussi dans le discours du ministère des transports du Québec. En effet, cet organisme public s'est engagé dans une démarche de partenariat public - privé23 fort de l'expérience européenne, et en particulier de celle de l'Angleterre24, alors qu'il tient un discours de pénalités25 et n'envisage pas une clause de médiation dans ses contrats avec ses partenaires.

Après une recherche sommaire, une insuffisance dans la connaissance de ce phénomène, en apparence incohérent, a été constatée : l'absence d'une clause de médiation dans les contrats d'Hydro-Québec avec des fournisseurs partenaires. Ce constat a motivé cette recherche-ci qui offre l'occasion d'une réflexion sur la nature des modes de règlement des différends dans une relation de partenariat entre un organisme parapublic comme HydroQuébec et ses fournisseurs de biens et services.

En apparence, il semble y avoir une incohérence dans la politique d'approvisionnement
d'Hydro-Québec. Car dans un contexte où la médiation civile et commerciale est en plein
essor et reconnue comme étant le mode de règlement des conflits le plus approprié pour

22 Ibid., page 92.

23 Ministre des transports du Québec (2003). Colloque sur l'apport de partenariat, Allocution, Montréal, 31 octobre 2003.

24 Radio-Canada, Nouvelles du 23 novembre 2005, Québec s'inspire de la Grande-Bretagne : « Selon le Devoir, des hauts fonctionnaires du gouvernement Charest ont assisté à un séminaire donné par une Délégation de la Grande-Bretagne, chef de file en matière de partenariat entre le privé et le public (PPP) ».

25 Transport Québec (2005). Centre d'affaires, Partenariat public-privé, contexte d'application, 16 septembre 2005.

actualiser les valeurs du partenariat, il semble que la société d'état tient un discours contradictoire en adoptant un mode de règlement des différends qui apparaît incompatible avec les valeurs annoncées dans sa politique du partenariat.

D'abord, monsieur Boisclair définit le partenariat comme étant :

« une démarche par laquelle une organisation s'associe avec au moins une autre organisation dans le cadre d'une relation sur mesure et évolutive; les deux organisations s'entendent pour poursuivre un but commun en mettant en commun ou en échangeant des ressources, afin d'obtenir des résultats mutuellement avantageux, dans le respect de leur mission, mandats et objectifs respectifs, tout en demeurant souveraines en dehors du partenariat >>26.

Plus particulièrement, dans le cas d'Hydro-Québec, le partenariat d'affaires est une relation client-fournisseur privilégiée dictée par le besoin l'un de l'autre et vice versa. Par conséquent, il est l'organisation, voulue optimale, des relations de deux sociétés décidant de travailler ensemble dans la durée27, l'une vendant la marchandise qu'elle produit et l'autre la lui achetant pour la transformation ou la consommation.

Ainsi, en raison de la particularité et de l'importance stratégique des produits et services achetés et de la fréquence des contrats octroyés par l'entreprise, de nombreux individus d'entreprises commerciales et de corporations doivent leur subsistance et leur prospérité aux contrats accordés par la Société d'État. De même, Hydro-Québec a besoin des fournisseurs qualifiés, permanents et fiables en mesure de l'accompagner dans la réalisation de ses projets de développement. Cette vision a été à l'origine de l'approche de partenariat (gagnant-gagnant) qu'Hydro-Québec a mis de l'avant dans sa politique d'approvisionnement. En effet, Hydro-Québec, consciente de son rôle comme citoyen corporatif responsable et gestionnaire des fonds publics, dévoile ses valeurs partenariales d'une manière générale dans le Code de Conduite28 intitulé "Nos valeurs, notre responsabilité". La société d'État annonce :

« Agir avec intégrité, c'est, par exemple: - Éviter tout conflit d'intérêts et toute
apparence de conflit d'intérêts; - faire preuve de transparence en toute
circonstances >>29. Dans un autre chapitre, elle annonce qu'il faut traiter avec

26 Michel Boisclair (2004). Le partenariat : principes, définition, enjeux et mise en oeuvre. M.A.P., Montréal, École nationale d'administration publique.

27 Christophe Leclercq, Xavier Leclercq (1993). Gestion stratégique de la concurrence en temps de crise, Éditions Maxima, ISBN 284001445.

28 Hydro-Québec, (2006). Code de Conduite 2006. Nos valeurs, notre responsabilité, Groupe Affaires corporatives et Secrétariat général, Bibliothèque et Archives nationales du Québec, ISBN 2-550-47189-X, ISBN 2-550-47190-3, (PDF) 2006G035.

29 Ibid. page 5.

équité et courtoisie nos clients, fournisseurs et partenaires : << Cultiver de bonnes relations avec les clients, fournisseurs et partenaires de l'entreprise. Considérer nos fournisseurs et partenaires comme des alliés essentiels. Traiter les clients, fournisseurs et partenaires avec équité. >>30.

Par sa volonté d'entretenir des relations de partenariat avec ses fournisseurs, la Société d'État déclare que cette relation doit être une relation d'affaires (gagnant-gagnant) dynamique, durable, fondée sur la confiance, le partage des risques et des bénéfices, l'équité et le respect31, l'intégrité et la transparence qui sont essentielles à l'administration de la chose publique. Ces valeurs sont partagées par les fournisseurs car ils l'ont fait savoir à plusieurs reprises à la table de concertation.

Malgré ces valeurs mises de l'avant dans sa politique d'approvisionnement, Hydro-Québec adopte une philosophie et une procédure de règlement, en cas des différends avec ses fournisseurs, qui semblent incompatibles avec cette conception du partenariat. En effet, le mode usuel de règlement des différends ne traite que le litige32 sans s'attaquer au conflit qui, souvent, est plus large, et qui embrasse d'autres activités et préoccupations comme la relation d'affaires et le règlement des irritants qui, parfois, perdurent depuis des années et qui sont à l'origine du litige en question. En plus, le mode usuel exige que toute recherche d'une solution au conflit doive être faite selon la norme juridique33 et toute entente doit être fondée en droit où un avis juridique est nécessaire34 pour son acceptation. Or, cette façon de résoudre le conflit peut amener une rupture dans les relations d'affaires entre partenaires et même produire un résultat perdant-perdant comme dans l'affaire Banque de Montréal c, Bail Ltée citée plus haut. De la sorte, cette démarche de solution du conflit parait aller à l'encontre des souhaits exprimés dans les valeurs partenariales. Aussi, la négociation bipartite pratiquée par le mode usuel pour résoudre le conflit est une négociation basée sur

30 Ibid. page 20.

31 Hydro-Québec (1998). Conseil d'Administration, politique approuvée le 11 septembre 1998.

32 Hydro-Québec, (2007). Guide de gestion des réclamations, Le litige : << Le rejet, par HQE/SEBJ et le maintien d'une demande de compensation par le fournisseur ou entrepreneur indique qu'il y a litige entre les parties. >>, révision 2 mai 2007.

33 Ibid. << Son argumentation doit être appuyée par des faits qui eux-mêmes doivent être supportés par des preuves. On entend ici par preuves l'information écrite (Clauses du contrat, devis technique, dessins, lettres, rapports de travaux, échéanciers, etc.) >>

34 Ibid. Unité d'Affaires juridiques. << Il se prononce sur le fondement légal d'une réclamation et de son règlement par l'émission d'un avis. >>

les positions des parties35 où l'objectif consiste à en arriver à une entente à l'intérieur de la fourchette des prix préalablement établis. Une telle négociation repose essentiellement sur les forces et les faiblesses de la position des parties36 où l'atteinte des objectifs monétaires doit toujours guider les actions37.

Bref, le mode de règlement proposé par l'encadrement, et qui est souvent utilisé, est la négociation sur position où chaque partie fixe ses propres valeurs et intérêts en essayant de les maximiser. Cette façon de faire ne tient pas compte des valeurs communes ni du contexte, car le contrat ne stipule aucune valeur et il est binaire : ou on a droit ou on n'a pas droit à la chose revendiquée. Le mode judiciaire ne tient pas compte non plus des valeurs dans la preuve devant les tribunaux. La négociation sur position traite chacun comme un moyen et non comme une fin en soi, ce qui risque d'user du rapport de forces favorable à Hydro-Québec pour faire fléchir le fournisseur qui détient souvent une position économique plus restreinte. De cette façon, on limite l'autonomie de négociation du fournisseur et on porte atteinte à sa dignité. C'est ainsi que l'écart se manifeste entre le discours des valeurs présenté dans la politique du partenariat et l'encadrement mis en place pour régler les différends contractuels avec les fournisseurs.

Pour atténuer cet écart, il apparaît plus cohérent d'adopter un mode de règlement des différends en mesure d'actualiser ces valeurs lors de la recherche d'une solution à un conflit entre la Société d'état et ses partenaires. D'où un modèle de médiation comme celui de Ury et Fisher qui semble le plus indiqué : une solution est recherchée en se basant sur les intérêts et les valeurs communs partagés, les relations à long terme, tout en considérant le conflit avec toute son amplitude. Cette approche permet de régler le litige et ses causes profondes par la convergence des normes juridiques, partenariales et d'éthique propres à la gestion de la chose publique.

D'abord, la norme juridique, qui est le contrat, sera évoquée pour qualifier le litige et ses
conséquences. Elle peut être employée pour situer le droit de chacune des parties en litige
ainsi que ses obligations contractuelles. Ensuite, comme dans la plupart des cas le litige est

35 Ibid. Article 2.6, Stratégie de négociation, Objectif : << La stratégie de négociation vise à mettre en place tous les moyens possibles en vue d'en arriver à une entente entre les parties, et ce à l'intérieur de la fourchette de prix que le gestionnaire a établi lors de son étude de réclamation. >>

36 Ibid. La stratégie de négociation, moyens : << Ceci repose, dans une très large mesure, [...], sur les forces et faiblesses de la position d'Hydro-Québec. >>

37 Ibid. Article 3.0, la négociation : << L'atteinte des objectifs monétaires doit toujours guider nos actions. >>.

issu d'une mauvaise pratique qui se perpétue depuis longtemps de part et d'autre, on peut y discuter de solutions afin de prévenir d'autres conflits dans le futur. Ainsi, dans une médiation où on cherche une solution, le fournisseur, en l'absence du rapport des forces, peut faire part ouvertement de ses doléances relatives aux documents contractuels ambigus et aux clauses jugées abusives dans un contrat par adhésion comme celui d'Hydro-Québec.

De même, Hydro-Québec peut trouver une solution qui saura à la fois répondre à ses contraintes en matière d'échéancier et de qualité, et tenir compte de la préoccupation de son partenaire pour lui permettre de prospérer et de demeurer sur le marché. Aussi, la présence d'un tiers neutre crédible, dans une médiation, rassure le corps social d'une intégrité de gestion et écarte toute apparence de favoritisme ou de conflit d'intérêts, ce qui n'est pas le cas lors d'une négociation bipartite. Quant à l'entente, en plus de la solution du litige, elle peut inclure des éléments successibles d'améliorer les opportunités et les relations d'affaires à long terme, de la sorte qu'une telle forme de médiation actualise les valeurs partenariales déclarées par Hydro-Québec. Par conséquent, ce mode de règlement des différends semblerait plus cohérent avec la politique d'approvisionnement de la Société d'État. Ce lien entre le partenariat et la médiation, en l'absence d'une clause de médiation dans les contrats d'Hydro-Québec avec ses fournisseurs, nous amène à questionner la position adoptée par la Société d'état qui semble incohérente en termes de finalité visée dans ses pratiques d'affaires.

La présente recherche ne prétend pas porter un jugement de valeur sur la pratique d'affaires d'Hydro-Québec ni évaluer la pertinence de cette politique. Mais elle tente, tout simplement, de donner un portrait fidèle d'un phénomène constaté afin de permettre aux décideurs de faire un choix éclairé en ce qui a trait du mode de règlement des différends issus des contrats d'approvisionnement dans une perspective de relations de partenariat. À cet effet, cette recherche se limitera aux contrats d'approvisionnement d'Hydro-Québec et de sa filiale Équipement SEBJ.

La présente recherche a donc pour objectif d'alimenter la réflexion des intervenants qui ont à faire le choix de la politique de règlement des différends à Hydro-Québec, en particulier ceux qui sont pour le maintien du statu quo et ceux qui sont en faveur d'un changement de cette politique. Ce qui amène à poser la question générale de cette recherche à savoir : y-a-

t-il une incohérence réelle entre la conception du partenariat et l'absence de la médiation chez les acteurs à Hydro-Québec?

Pour répondre à une telle question, il faut d'abord voir si, théoriquement, il existe un lien entre le partenariat et la médiation et ensuite obtenir la conception des acteurs clefs de la dynamique entre le partenariat et le mode de règlement des différends. En conséquence, on s'interroge sur la lecture que font les acteurs du lien entre la médiation et le partenariat tant du point de vue des acteurs décideurs que celle des administrateurs de la première ligne. Une analyse de perception des acteurs sera employée afin de connaître s'il existe une incohérence réelle entre le partenariat et le mode usuel de règlement des différends.

D'abord, l'indentification des acteurs principaux est capitale afin d'être en mesure de connaître la position réelle d'Hydro-Québec. Ensuite, le rôle de chacun des acteurs sera précisé afin de connaître comment il influence le choix d'un nouveau mode ou le maintien du choix de ce qui est en place comme mode de règlement de différends. Pour ce faire, des variables seront identifiées, qui permettront de déterminer s'il existe une cohérence entre la conception du partenariat et la médiation commerciale chez les acteurs influents d'HydroQuébec.

Les objectifs à atteindre par ce projet de recherche résident principalement dans trois questions spécifiques de recherche. Il s'agit donc de savoir :

a) Au point de vue théorique, y a-t-il un lien nécessaire entre le partenariat et la médiation, et si oui, quelle forme de médiation?

b) Quelle est la perception des acteurs chez H.Q, devant une éventuelle incohérence entre l'absence de la médiation et le partenariat?

c) Dans quelle mesure la méconnaissance de la médiation avec tout son potentiel est la cause de l'écart?

La méthodologie de recherche pour ce projet s'appuie sur une analyse documentaire et une étude in situ par des entrevues semi-dirigées auprès des acteurs afin d'en arriver à tirer une conclusion qui répondra à la question posée par cette recherche. Au départ, l'analyse documentaire sera faite d'abord pour situer le contexte et ensuite pour clarifier le cadre conceptuel, afin d'identifier les variables de recherche. Par la suite, l'étude empirique par des entrevues semi-dirigées permettra d'obtenir le point de vue des acteurs clés qui

influencent la politique d'Hydro-Québec dans le choix du mode de règlement des différends et qui ont causé ce phénomène qui semble incohérent. Ils seront interviewés sur leurs actions dans le contexte, sur leurs intentions face à l'émergence des modes alternatifs de règlements des différends et aux revendications de leurs partenaires. On interrogera la vision qu'ils ont du partenariat et leurs perceptions de la médiation et du rôle du médiateur dans le règlement de leurs conflits commerciaux avec leurs partenaires. A cet effet, un questionnaire d'entrevue sera préparé avec des questions ouvertes afin de permettre aux interviewés d'exprimer librement leurs opinions sur les sujets en jeu et de cueillir des données fiables pour les variables analysées par cette recherche.

En premier lieu, le questionnaire traitera des variables personnelles relatives à l'âge, la formation, la position hiérarchique, le secteur d'activité, les années de service à HydroQuébec et dans le secteur privé. L'information concernant l'âge permettra d'identifier s'il y a un écart générationnel dans les opinions et les perceptions exprimées. La nature de la formation, à savoir technique, de gestion ou judicaire, permettra de savoir dans quelle mesure le domaine de formation de l'acteur peut influencer sa conception du partenariat et de la médiation. Quant à la position hiérarchique, elle permettra d'identifier la position du décideur dans l'entreprise afin d'évaluer le degré de pouvoir qu'il possède pour changer et influencer les politiques d'approvisionnement de la Société d'État.

En ce qui à trait au secteur d'activité, il est très utile de connaître les perceptions de trois secteurs principaux soient : le contrôle de gestion (qui émet et contrôle les procédures de gestion), l'approvisionnement (qui est le maître d'oeuvre de la politique d'approvisionnement de l'entreprise) et la gestion des contrats (qui applique la politique d'approvisionnement selon les procédures établies. Enfin, il sera intéressant de savoir si les années de service de l'acteur dans l'entreprise influencent sa culture de gestion, sa perception et son ouverture sur les revendications du partenaire.

En deuxième lieu, le questionnaire abordera l'écart entre le partenariat et le règlement des différends tel que vécu et perçu par les acteurs clefs de la Société d'état. Les décideurs seront questionnés d'abord sur leur conception du partenariat à partir d'un exemple réussi puis d'une expérience non réussie de la pratique du partenariat. Les opinions exprimées, appuyées par leurs expériences pratiques, permettront d'analyser les variables de recherches identifiées dans le cadre de référence.

La perception du partenariat sera cueillie à travers des sondes issues du cadre conceptuel afin de mesurer l'écart entre le cadre conceptuel et la perception des acteurs, à savoir :

- Relation gagnant-gagnant;

- Relation basée sur la confiance;

- Relation basée sur la transparence;

- Relation basée sur le partage équitable des risques et des bénéfices;

- Relation basée sur le respect mutuel.

Ensuite, ils seront interrogés sur leur conception du mode de règlement des différends à travers leur pratique du mode usuel et de leur expérience vécue avec un mode alternatif. Ceci permettra de confirmer le mode usuel employé tout en dégageant les forces et les faiblisses d'un tel mode. On cherche à savoir à travers des sondes dans quelle mesure les modes usuels sont perçus comme :

- Négociation bipartite basée sur la normalité juridique;

- Volonté du donneur d'ouvrage de garder le contrôle du processus;

- Démarche quasi-judiciaire.

Par après, les acteurs seront questionnés sur les forces des modes usuels afin de cueillir les

données pour les variables suivantes : - Rapport de forces favorable; - Validation des clauses contractuelles;

- Justification de la décision auprès du corps social;

- Dissipation de toute apparence de conflit d'intérêts;

- Transparence.

Ils seront également questionnés sur les faiblesses des modes usuels afin de savoir dans quelle mesure ils sont motivés à instaurer de nouveaux modes de règlement des différends : - Problèmes d'accès à la justice;

- Délais longs;

- Coûts élevés;

- Brisure entre droit et morale;

- Brisure entre droit et valeurs partenariales;

- Rupture de la relation d'affaires pour cause de faillite du partenaire;

- Détérioration de la relation d'affaires.

D'autre part, il est important de connaître, à travers leur expérience vécue, les attentes des acteurs par rapport aux modes alternatifs. Ainsi, à travers leurs attentes, on peut lire l'écart entre la médiation présentée par le cadre de référence et leur compréhension de ce mode de règlement des différends tel que :

- Définition du conflit;

- Mode contraignant ou non contraignant;

- Mode confidentiel.

En plus, il est important de connaître les attentes des acteurs clefs par rapport au médiateur
et par rapport au rôle qu'il doit jouer. De la sorte, on peut indirectement voir l'écart entre
leur conception et le cadre théorique proposé. Ces attentes peuvent concerner par exemple :

- Un agent de changement;

- L'obligation de résultats;

- Demeurer crédible et impartial;

- Gérer l'échange d'information;

- Quelqu'un du métier;

- Intervention accrue;

- Maitre d'oeuvre du processus.

Ensuite, la perception des acteurs sera identifiée à travers leur satisfaction et leur déception à l'égard de l'expérience vécue, ce qui donne une idée du degré de connaissance du mode de la médiation proposé par le cadre conceptuel. Des éléments tels que les suivants seront pris en compte :

- Flexibilité du processus permettant aux parties de choisir quelqu'un du métier; - Absence de contrainte du processus;

- Présence d'un tiers neutre changeant la dynamique et aidant à trouver une solution;

- Médiateur intervenant;

- Présence d'un tiers extérieur au conflit;

- Réflexion sur le conflit.

Ainsi, leurs conception par rapport au processus et au médiateur vont contribuer à mesurer les écarts des variables de recherche présentées avec le cadre conceptuel.

En dernier lieu, les acteurs principaux seront questionnés sur leur perception relative à la dynamique entre le partenariat et le mode de règlement des différends. Il est capital, pour le projet de recherche, de savoir si les acteurs considèrent l'existence d'une relation entre le partenariat prôné par Hydro-Québec et le mode de règlement des différends. Ainsi, la nature de cette relation vue par les décideurs sera très utile pour comprendre l'écart constaté.

Pour faire la lumière sur la position de l'entreprise, sept acteurs clefs ont été identifiés, pour l'entrevue semi-dirigée, en raison de leur position dans les unités principales qui sont les plus concernées par la politique d'approvisionnement et les règlements des différends issus des contrats entre Hydro-Québec et ses fournisseurs. D'abord, un cadre supérieur de la Direction projets de production a été rencontré en raison de sa vaste expérience dans la gestion de la construction des projets majeurs et des conflits commerciaux vécus avec les entrepreneurs fournisseurs de moyenne et grande envergures. Ensuite, un acteur important de la Direction Acquisition a été ciblé pour connaître les intentions de cette Direction, responsable de l'encadrement de l'approvisionnement, dans sa politique de partenariat avec les fournisseurs. Par après, un décideur du premier niveau de la SEBJ a été rencontré en raison de son expérience passée dans le secteur privé et de son vécu à la SEBJ dans la gestion des projets majeurs de constructions hydroélectriques à la Baie-James. Puis, un cadre du premier niveau de la Direction Transport a été sollicité pour obtenir son opinion, suite à sa longue expérience dans la réalisation des projets de transport à la Société d'état.

Il était également utile de questionner un responsable de l'unité administration des contrats qui se trouve en première ligne dans la mise en oeuvre des politiques avec les encadrements établis. Son point de vue est très utile pour avoir l'heure juste quant aux forces et faiblesses des politiques pratiquées. Un cadre influent du premier niveau de la Direction Contrôle de Gestion, a également été choisi afin d'obtenir des informations sur les intentions de cette unité administrative chargée d'encadrer et de contrôler la pratique de gestion au groupe HQE/SEBJ. Enfin, un juriste de l'Unité Affaires juridiques a été sélectionné pour l'entrevue afin de profiter de sa grande expérience vécue dans les règlements des conflits provenant des activités de construction des projets d'Hydro-Québec.

En résumé, tous ces acteurs sont des membres du comité de gestion de la haute direction HQE/SEBJ et sont les principaux décideurs dans la politique d'approvisionnement d'Hydro-Québec et la relation avec les fournisseurs, ce qui fait que leurs opinions contribueront de façon significative à répondre à la question de recherche posée au départ.

Cette recherche se divise en trois sections. Le premier chapitre vise d'abord à préciser le contexte et à présenter en détail le cadre conceptuel du sujet. Le deuxième chapitre est consacré à la présentation des données qualitatives recueillies sur le terrain par les entrevues semi-dirigées. Le troisième chapitre porte sur l'analyse, l'interprétation et l'explication de ces données à travers le cadre théorique afin de répondre à la question de recherche. Une brève conclusion clôturera l'ensemble du travail réalisé dans ce projet de recherche.

CHAPITRE 1 LE PARTENARIAT D'AFFAIRES ET LA MÉDIATION CIVILE ET COMMERCIALE (CADRE CONCEPTUEL DE RÉFÉRENCE)

Ce chapitre vise principalement à définir le cadre conceptuel utilisé dans ce projet de recherche et à dégager les variables à mesurer in situ par les entrevues semi-dirigées, tout en répondant à la première question spécifique de recherche. En premier lieu, il est important de préciser le contexte dans lequel les activités d'approvisionnement d'HydroQuébec se développent afin de comprendre l'évolution de la politique d'acquisition de la société d'état. En deuxième lieu, on présente le concept du partenariat d'affaires tel que décrit par la littérature de gestion et par les divers documents d'Hydro-Québec. En troisième lieu, on expose la nature de la médiation préconisée comme mode de règlement des différends dans une relation de partenariat. Enfin, une réflexion sera faite sur la relation entre le partenariat et le modèle de médiation proposée en vue d'élucider la première question spécifique de recherche, à savoir : Au point de vue théorique, y a-t-il un lien nécessaire entre le partenariat et la médiation, et si oui, pour quelle forme de médiation?

1.1 Le contexte du marché de l'approvisionnement d'Hydro-Québec

Hydro-Québec est une société d'État à vocation commerciale, mandatée38 par le Gouvernement du Québec pour assurer principalement l'approvisionnement de l'ensemble de la collectivité québécoise en énergie électrique. Pour remplir sa mission, la Société d'État a choisi de développer et de mettre en valeur les ressources énergétiques sur le territoire du Québec. À cet effet, elle est supportée par deux filiales, soient Hydro-Québec Équipement et la Société d'Énergie de la Baie-James39 communément appelée S.E.B.J. et dont la mission est de réaliser les projets d'ingénierie et de construction des aménagements de production hydroélectriques et du transport électrique au Québec. Ces deux divisions sont mandatées pour réaliser les grands projets de constructions qui totalisent environ deux milliards de dollars par année40. Ces deux entreprises, maîtres d'oeuvre des projets de construction d'Hydro-Québec, doivent se maintenir à la fine pointe de la technologie en

38 Québec, Gouvernement du Québec. Loi sur Hydro-Québec, L.R.Q., chapitre H-5, Article 3.1.1. « La Société est, pour les fins de la présente loi, un mandataire de l'État et l'a toujours été depuis le 14 avril 1944».

39 Ibid., Article 39.1, Objets de la Société d'Énergie de la Baie-James.

40 Hydro-Québec (2006) Plan stratégique 2006-2010, Montréal.

recherchant constamment des solutions pour réduire les coûts et les délais des travaux, tout en procurant à Hydro-Québec des équipements performants41. Ainsi, les projets sont réalisés en étroite collaboration avec les partenaires de l'industrie et du milieu, selon des critères de rentabilité et d'intégration au point de vue social et environnemental42.

C'est dans cette optique qu'Hydro-Québec annonce demeurer au service du Québec et qu'elle est résolument tournée vers l'avenir pour créer de la richesse dans un partenariat profitable avec les fournisseurs et l'ensemble de la collectivité. D'ailleurs, cette volonté est clairement annoncée par la vision que la société d'état s'est donnée pour exprimer ses valeurs et ses orientations stratégiques. À cet effet, Hydro-Québec déclare « Par notre vision, nos valeurs et les principes énoncés dans nos politiques, nous voulons témoigner de notre volonté d'être une entreprise dynamique, à l'avant-garde sur le plan technologique et au coeur des grands changements qui marqueront l'évolution de notre industrie et de notre société >>. 43

Cela fait en sorte qu'aujourd'hui, Hydro-Québec se trouve directement concernée par la volatilité du marché d'approvisionnement de ses équipements où elle doit gérer le risque de pénurie qui se pointe désormais à l'horion. Cet enjeu préoccupe les acteurs d'affaires nationaux par les activités de construction importantes dans l'ouest canadien, en raison du boom pétrolier d'Alberta qui draine des ressources importantes provenant d'autres provinces. Dans sa chronique dans ledevoir.com, édition du lundi 28 août 2006, Éric Desrosiers écrit :

« En regardant l'Alberta, c'est l'avenir du Canada que l'on regarde, affirmait la semaine dernière le Globe and Mail dans un dossier sur le sujet. Pas que les chapeaux de cow-boys seront bientôt à la mode à Montréal, ni que l'Île-du-PrinceÉdouard abandonnera la culture de la pomme de terre pour l'exploration pétrolière. C'est plutôt de pénurie de main-d'oeuvre qu'il est question.>>

Ainsi, le vieillissement de la population québécoise et le départ massif à la retraite des baby-boomers sont aujourd'hui une réalité inquiétante pour l'ensemble de l'industrie de la construction au Québec. Selon le magazine de l'association de l'industrie électrique du Québec CHOC, depuis quelques années, la pénurie de main-d'oeuvre est un sujet chaud qui

41 Montréal, Hydro-Québec (s. d.) Site d'Hydro-Québec, [En ligne] http://www.hydroquebec.com/profil/ hqequipement.html.

42 Ibid.

43 Montréal, Hydro-Québec (s. d.) Site d'Hydro-Québec, [En ligne] http://www.hydroquebec.com/ publications/fr/politiques/index.html.

préoccupe plusieurs employeurs44. À cet effet, Louis St-Arnaud, président directeur général d'Arno électrique, un important partenaire fournisseur d'Hydro-Québec, souligne45 que le nombre de monteurs de ligne inscrit à la CCQ est passé de 1300 qu'il était en 1994 à environ 600 en 2003, ce qui fait que la pénurie de main-d'oeuvre dans ce secteur constitue un véritable casse-tête pour les entrepreneurs québécois. Aussi, les acteurs internationaux de l'industrie où évolue Hydro-Québec ne sont pas en reste et sont inquiets de la disponibilité de fournisseurs qualifiés et spécialisés et de l'augmentation des coûts de la fourniture d'équipements électriques majeurs en raison de la fulgurante croissance des pays émergents (Les BRIC), le Brésil, la Russie, l'Inde et la Chine. Par ailleurs, une étude de KPMG LLP46, publiée le 22 mars 2007, révèle qu'une pénurie grave d'entrepreneurs qualifiés constitue la barrière principale au développement de nouveaux projets de construction. À ce sujet, Richard Whittington de KPMG LLP au Royaume-Uni témoigne que de plus en plus de sociétés cherchent à s'attaquer à la pénurie de travailleurs qualifiés.

C'est dans un tel contexte qu'Hydro-Québec est appelé à réaliser ses projets annoncés dans son plan stratégique afin d'assurer son développement et satisfaire la demande croissante de ses clients. Pour faire face aux défis posés par un tel contexte, plusieurs penseurs préconisent de nouvelles relations d'affaires entre les donneurs d'ouvrage et leurs fournisseurs. Choisir leurs fournisseurs strictement en fonction de leurs prix et de leur capacité à respecter les engagements est une approche qui va à contre-courant des tendances de l'heure47 : « Il ne faut plus penser aux fournisseurs comme à des entités interchangeables. Partout dans le monde, on évolue vers une logique de collaboration à long terme >>48. Dans le même sens, Philipe Hoste, chef de la direction de Sonaca NMF Canada, un fournisseur d'importants clients comme Bombardier, s'interroge sur la question en disant : « Pourquoi moi, un fournisseur, me lancerais-je dans certains développements, si dans un an le couperet risque de m'éliminer?49 >>. D'un autre côté, monsieur PierreAndré Julien, professeur émérite à l'Institut de recherche de l'Université du Québec à Trois-Rivières, mentionne que l'entreprise intelligente est celle qui choisira ses

44 CHOC, magazine 23, no.1, Juin 2005.

45 Ibid. Louis St-Arnaud. La construction des ouvrages énergétiques et la pénurie de main-d'oeuvre spécialisée.

46 KPMG International, 22 mars 2007. C'est un réseau de cabinets belges indépendants qui fournissent des services en matière d'audit, de fiscalité et de conseils financiers. Il est présent dans 148 pays avec plus de 113 000 professionnels.

47 Les affaires.com, 1er décembre 2007, Fournisseur et partenaire.

48 Ibid. Mehran Ebrahimi, professeur au Département de management et de technologie de l'UQAM.

49 Ibid.

fournisseurs en tenant compte de la richesse d'information et d'expertise qu'ils peuvent lui apporter, et tâchera d'en faire des partenaires dans son activité de veille stratégique50. Ainsi, cette démarche ouvre la porte à un véritable partenariat d'affaires et s'inscrit dans une philosophie de collaboration à long terme entre l'acheteur des biens et services et ses fournisseurs.

Dans un tel contexte, Hydro-Québec a annoncé, le 13 août 2004, dans les principes généraux de ses politiques, que le coût le plus avantageux remplacera désormais le moindre coût. Car le choix systématique du plus bas soumissionnaire s'est souvent soldé par des coûts afférents importants pour Hydro-Québec, notamment au niveau des frais d'exploitation.

Par ailleurs, la société d'État évolue dans un contexte qui est déterminé par la cadre de la Loi sur la Régie de l'énergie, par ses engagements envers ses clients, par l'environnement compétitif des marchées de l'énergie et par les politiques de son actionnaire principal, le gouvernement du Québec. Aussi, Hydro-Québec occupe une place du premier plan sur la scène québécoise. Cela tient à la fois au caractère essentiel du service qu'elle fournit, à l'ampleur de son réseau et au rôle important qu'elle joue dans la création de la richesse et dans le développement économique du Québec. Pour remplir sa mission, la société d'État opère dans un contexte réglementaire et elle est soumise à des enjeux sociaux, économiques et technologiques qui sont en perpétuelle mutation.

1.2 Le partenariat, un choix stratégique dans la politique d'approvisionnement d'Hydro-Québec

Pour bien saisir le sens du partenariat visé par cette recherche, il est important de savoir qu'il existe deux types de partenariat d'affaires : le partenariat d'alliance horizontale comme celle signée entre Hydro-Québec et les Cris de la Baie-James et le partenariat d'alliance verticale, client-fournisseur, comme celle qui existe entre Hydro-Québec et son fournisseur. C'est ce dernier type de partenariat qui est l'objet d'examen dans cette étude. Le partenariat client-fournisseur est défini comme étant l'organisation, voulu optimale, des relations d'affaires de deux sociétés décidant de travailler ensemble dans la durée, l'une

50 Ibid.

vendant la marchandise qu'elle produit, et l'autre la lui achetant pour la transformer ou la consommer51. Le partenariat client-fournisseur est donc une relation d'affaires verticale privilégiée qui se définit selon l'association française de normalisation AFNOR comme étant « Un état d'esprit rendant possible la création entre partenaires de relations privilégiées, fondées sur une recherche en commun d'objectifs à moyens termes, menées dans des conditions permettant d'assurer la réciprocité des avantages ». Ainsi, le partenariat bouleverse les relations classiques basées sur les rapports de force entre un grand donneur d'ouvrage et un fournisseur. Cette relation traditionnelle des jeux à somme nulle52, où une entreprise gagne ce que l'autre perd, n'est plus d'actualité dans le monde des affaires d'aujourd'hui.

La littérature managériale d'aujourd'hui accorde plus d'importance au partenariat défini par Lambert et al. (1996), à savoir :

« Une relation d'affaire bâtie sur mesure qui repose sur la confiance mutuelle, l'ouverture, le partage des risques et des bénéfices et dont l'objectif est de procurer un avantage concurrentiel résultant d'une meilleure performance d'affaires que ce qu'auraient pu obtenir individuellement les partenaires. »53

Certes, cette conception du partenariat a été la source d'inspiration des décideurs d'HydroQuébec dans leur réflexion sur le mode d'acquisition pour faire face aux défis croissants imposés par le marché dans lequel la Société d'Etat évolue.

Pour remplir sa mission, Hydro-Québec se trouve confrontée à un défi de taille. D'une part, elle doit assurer une bonne gestion du denier public et des biens communs, et d'autre part, elle doit se comporter comme un bon citoyen corporatif en favorisant le développement au Québec d'une infrastructure industrielle spécialisée capable de fournir des biens et services indispensables à la réalisation de sa mission fondamentale. Projeter une bonne image corporative est essentiel pour la société d'Etat, car de plus en plus elle a besoin de l'approbation du corps social pour faire accepter ses projets de développement lors des audiences publiques.

51 Christophe Leclercq, Xavier Leclercq (1993). Gestion stratégique de la concurrence en temps de crise, Le partenariat, une stratégie de la relation client-fournisseur. Editions Maxima, ISBN 284001445.

52 Carole Donada et Alex Kesseler (1997). Partenariat : Mythes et réalité pour les fournisseurs. Etude empirique dans l'industrie automobile. France, Centre de recherche en gestion.

53 Frank Brulhart et Christophe Favreau (2003). Les modes de coordination et d'organisation des partenariats, XIIème Conférence de l'Association internationale de management stratégique, Les Côtes de Carthage, France.

À cet effet, la société d'État a senti le besoin de se rapprocher davantage de la communauté et de développer une relation de partenariat, avec le milieu et avec ses fournisseurs, basée sur le respect mutuel, la transparence et un partage équitable et durable des risques et des bénéfices. Cette politique est définie par un document54 intitulé Le partenariat avec les fournisseurs : une relation gagnant-gagnant où le directeur principal approvisionnement et services, M. Philippe Biron, déclare : « Hydro-Québec, qui compte parmi les plus importants acheteurs de biens et services du Québec, souhaite maintenir des relations dynamiques et durables avec ses fournisseurs ».

Cette politique est motivée par le volume important d'acquisition de biens et services d'une grande importance stratégique pour Hydro-Québec et dont le marché est tenu par des fournisseurs spécialisés, en nombre relativement restreint. Avec une telle politique, la société d'État a une ferme volonté et un intérêt particulier à favoriser le développement au Québec d'une infrastructure industrielle spécialisée capable de fournir des biens et services indispensables à la réalisation de la mission fondamentale de l'entreprise. Cette forme de partenariat est définie comme étant une relation d'affaires durable basée sur la confiance mutuelle entre Hydro-Québec et un partenaire qui unissent leurs efforts pour atteindre des objectifs partagées55. Cette orientation a été approuvée par le Conseil d'administration, le 1er octobre 199856, afin de confirmer l'engagement de l'entreprise envers ses partenaires d'affaires en vue d'établir des relations « basées sur le respect mutuel et un partage équitable et durable des risques et des bénéfices »57.

En 2004, les acquisitions d'Hydro-Québec de biens et services ont atteint 2 394 millions $ dont 94 % provenait des fournisseurs établis au Québec58. À cette fin, la société d'État a établi des partenariats pour assurer le déroulement harmonieux de ses projets et de ses activités59. Les achats des biens et services prévus pour la période 2006-2010 sont évalués à 10 milliards $ et les retombées sont estimées, en termes de création d'emploi, à la création de 236 000 années-personnes en emplois directs et indirects60.

54 Hydro-Québec (1998). Le partenariat avec les fournisseurs : une relation gagnant-gagnant. Montréal, Direction principale approvisionnement et services, ISBN2-550-33157-5, 98G027.

55 Ibid.

56 Hydro-Québec (1998). Conseil d'administration, politique approuvée le 11 septembre 1998.

57 Ibid.

58 Hydro-Québec (2004). Rapport annuel, page 52.

59 Ibid.

60 Hydro-Québec (2006). Plan stratégique 2006-2010. Montréal.

En plus, Hydro-Québec annonce ses valeurs d'une manière générale dans le Code de Conduite61 intitulé Nos valeurs, notre responsabilité. Ainsi, la Société d'État annonce : « Agir avec intégrité, c'est, par exemple : éviter tout conflit d'intérêts et toute apparence de conflit d'intérêts; faire preuve de transparence en toute circonstances >>62. Dans un autre chapitre, elle annonce qu'il faut traiter avec équité et courtoisie ses clients, fournisseurs et partenaires : « Cultiver de bonnes relations avec les clients, fournisseurs et partenaires de l'entreprise; considérer nos fournisseurs et partenaires comme des alliés essentiels; traiter les clients, fournisseurs et partenaires avec équité.>>63 Bref, les principes directeurs et les valeurs partenariales déclarés par Hydro-Québec s'articulent autour des objectifs communs partagés, d'une relation gagnant-gagnant, dynamique, durable, créatrice de valeur, basée sur la confiance, la transparence et l'intégrité, le partage des risques et des bénéfices, l'équité et le respect mutuel.

Une relation guidée par des objectifs communs partagés : Selon Hydro-Québec, le partenariat est une relation d'affaires entre la société d'État et un partenaire, qui unissent leurs efforts pour atteindre des objectifs partagés. Dans la plupart des cas, la réussite d'un projet de construction ou d'un développement technologique performant constitue des désirs communs partagés. Ainsi, la réussite d'une percée technologique assure à HydroQuébec des équipements performants, à la fine pointe de la technologie, lui permettant de bien accomplir sa mission et de satisfaire ses clients; en même temps, cela permet aux fournisseurs de conserver un marché stable à Hydro-Québec et d'être en bonne position pour pénétrer de nouveaux marchés. À titre d'exemple, on peut évoquer le développement et la mise en oeuvre du système de déglaçage, des lignes électriques de haute tension, pour faire face à une éventuelle tempête de verglas comme celle qui a plongé le Québec dans le noir pour plusieurs jours en 1998. La réussite de ce projet assure à la société d'État une bonne protection de son réseau et permet au fournisseur d'exporter cette nouvelle technologie dans tous les pays nordiques dont le réseau est soumis aux mêmes conditions climatiques que celui d'Hydro-Québec. Bref, la réussite de n'importe quel projet est toujours bénéfique autant pour le client que pour le fournisseur.

61 Hydro-Québec (2006). Code de Conduite 2006, Nos valeurs, notre Responsabilité, Groupe Affaires corporatives et Secrétariat général, Bibliothèque et Archives nationales du Québec, ISBN 2-550-47189-X, ISBN 2-550-47190-3, (PDF) 2006G035.

62 Ibid. page 5.

63 Ibid. page 20.

Relation gagnant-gagnant : Il s'agit d'une relation (Win-Win Game) où chaque partenaire, en plus de veiller à ses propres intérêts, se préoccupe aussi des intérêts de l'autre partenaire dans le but d'augmenter les gains de chacun. Cette relation se traduit concrètement par le fait qu'Hydro-Québec offre à son partenaire une part importante de son marché; elle peut aussi proposer d'assumer une certaine partie de la contribution aux investissements requis64 pour la recherche et le développement d'équipements de haute technologie. En contrepartie, le partenaire offre l'assurance des meilleurs coûts et de la sécurité d'approvisionnement des produits performants sur un horizon de temps défini.

En plus, dans une relation du partenariat, Hydro-Québec et son fournisseur utilisent la complémentarité de leurs expertises et compétences pour développer de nouveaux produits et de nouvelles conceptions d'ouvrage. Ainsi, la société d'État offre son expérience d'exploitation et de gestion intégrale de projets alors que le partenaire contribue par son savoir-faire en fabrication et en mise en oeuvre des ouvrages. Ceci assure à Hydro-Québec des fournisseurs disponibles et compétents pour réaliser ses projets et, au fournisseur, en plus du marché de son partenaire, une meilleure solidité pour affronter la concurrence et pénétrer de nouveaux marchés dans son domaine d'activités. De sorte qu'Hydro-Québec et certains de ses principaux fournisseurs oeuvrent conjointement à la réalisation de divers projets depuis les années 60. La mise en commun de leurs intérêts conduit au développement d'une infrastructure industrielle spécialisée et diversifiée au Québec65 et au développement de firmes de génie-conseil d'une renommée mondiale.

Relation dynamique : La société d'état désire maintenir avec ses fournisseurs une relation dynamique flexible en mesure de s'adapter à tous les contextes66 où les façons de faire évoluent continuellement. Hydro-Québec considère le partenariat comme une démarche dynamique et évolutive. À cet effet, elle réalise des activités de balisage (Benchmarking) afin de s'assurer que ses pratiques demeurent à la fine pointe de meilleures façons de faire67. Elle considère que c'est tout à l'avantage de ses clients et de ses partenaires fournisseurs de vérifier la position des produits émanant du partenariat par rapport au marché. Aussi, la société d'État attend de son partenaire une vision compatible et une

64 Hydro-Québec (1998). Le partenariat avec les fournisseurs : une relation gagnant-gagnant. ISBN 2-550- 33157-5, 98G027.

65 Ibid. page 2.

66 Ibid.

67 Ibid.

capacité d'adaptation au changement et l'engagement dans un processus d'amélioration continue68.

Relation durable : Hydro-Québec propose à ses fournisseurs une relation d'affaires privilégiée durable, car elle considère que l'engagement réciproque entre le donneur d'ouvrage et le fournisseur va de pair avec le travail à long terme69. Le contexte et la nature des activités conduisent la société d'État à optimiser le nombre de ses fournisseurs et à entretenir des relations d'affaires étroites et à long terme avec ces derniers : << On ne sait pas ce que nous réserve l'avenir, mais des relations d'affaires privilégiées et à long terme constituent le meilleur moyen d'en tirer parti »70. Ainsi, dans une telle relation, les deux partenaires ont la même volonté de travailler sur un horizon à long terme. L'engagement mutuel doit s'étendre sur une période de temps suffisamment longue pour assurer l'atteinte des objectifs partagés71, ce qui fait en sorte que les deux partenaires sont assurés que le courant d'affaires ne sera pas remis en cause facilement et, conséquemment, cette certitude conditionne la réalisation d'une bonne partie des avantages attendus72.

Relation créatrice de valeur : La relation de partenariat n'est envisageable que si elle représente aussi une valeur ajoutée potentielle73 au sujet de la réduction du coût global, de l'amélioration de la qualité ou de l'apport au développement technologique. En effet, la connaissance, pierre angulaire de l'innovation technologique, est un élément primordial dans le développement d'Hydro-Québec, ce qui fait que la création de valeur s'appuie sur l'apprentissage dans les échanges de connaissance entre la société d'État et son fournisseur partenaire. D'ailleurs, les auteurs Blankenburg, Holm, Erikson et Johanson voient la création de valeur issue d'une relation partenariale comme étant la conséquence d'échanges mutuels entre le client et le fournisseur. Abordant dans le même sens, un groupe de chercheurs français en management stratégique des achats déclare : << Une vision trop financière de la compétitivité ignore les complémentarités interentreprises et les synergies

68 Ibid.

69 Ibid.

70 Ibid. page 3.

71 Ibid. page 9.

72 Christophe Leclercq, Xavier Leclercq (1993). Gestion stratégique de la concurrence en temps de crise, le partenariat, une stratégie de la relation client-fournisseur, Éditions Maxima, ISBN 284001445.

73 Hydro-Québec (1998). Le partenariat avec les fournisseurs : une relation gagnant-gagnant, Montréal : Direction principale approvisionnement et services, ISBN2-550-33157-5, 98G027

qui en découlent >>74. Ce qui veut dire qu'il existe des opportunités importantes de création de la valeur au sein de la relation partenariale client-fournisseur par les apprentissages croisés qui émanent de leur coopération. En effet, le partenariat d'affaires client-fournisseur semble répondre aux enjeux actuels des entreprises75 en dépassant le « sacro-saint triptyque "coût-délai-qualité" >> pour se concentrer sur la sélection et l'articulation des compétences client-fournisseur.

Une relation basée sur la confiance : D'après Bennis76, « la confiance est l'huile qui fait tourner en douceur les rouages de l'organisation >>. Cette citation peut s'appliquer autant sur l'organisation que sur la relation du partenariat. En effet, la confiance est au centre des relations d'affaires entre Hydro-Québec et ses fournisseurs : « Le partenariat est une relation d'affaires durable basée sur la confiance mutuelle entre Hydro-Québec et un partenaire >>77. La société d'État considère que les mécanismes de gestion du partenariat sont essentiels pour évaluer l'atteinte des objectifs visés, identifier les réajustements nécessaires et assurer l'évolution du partenariat lors de changements contextuels. En plus, ils assurent et renforcent la confiance mutuelle, condition essentielle au succès d'un partenariat d'affaires78. Brulhart et Favreau79 abondent dans le même sens en affirmant que la littérature managériale, dans sa grande majorité, accorde à la confiance un rôle primordial en la plaçant au sommet de la hiérarchie des facteurs clés de succès du partenariat. La confiance est ainsi considérée comme la pierre angulaire, le socle sur lequel s'appuie et se développe toute relation de partenariat entre un client et un fournisseur (Lorentz, 1988; Beaudry, 1992; Nooteboom, 1996; Ring et Van de Ven, 1994)80. De même, Brousseau et al (1997) définit la confiance dans une relation de partenariat comme étant « la croyance dans un certain degré de bonne volonté du partenaire, la conviction qu'il tiendra compte dans ses actes des intérêts de l'autre partie >>. Aussi, la confiance est

74 DESMA (2005). Desrouene A., Dreano V., Gauvrit R., Le Coz Y., Romano F. et Thomas Reverdy,

La création de la valeur dans la relation client/fournisseur, IAE de Grenoble, France, Université Pierre Mendès (Recherche collective).

75 Ibid. Conclusion de l'étude.

76 Warren Bennis (2008). Tiré d'une conférence à Hydro-Québec le 27 février 2008 sur la confiance. Il s'agit d'un résumé du livre « Speed of Trust >> de Stephen M. R. Covey. M. Bennis est un universitaire américain, professeur à l'université de Southern California.

77 Hydro-Québec (1998). Le partenariat avec les fournisseurs : une relation gagnant-gagnant, Montréal : Direction principale approvisionnement et services, ISBN2-550-33157-5, 98G027.

78 Ibid.

79 Frank Brulhart et Christophe Favreau (2003). Les modes de coordination et d'organisation des partenariats, XXIIème Conférence de l'association internationale de management stratégique, Les Côtes de Carthage. 3, 4, 5 et 6 juin 2003.

80 Ibid.

présentée par Trousseau (1994) comme étant un substitut aux formes contractuelles classiques considérées comme génératrices de coûts de transaction et d'inefficience organisationnelle. Brousseau (2000)81 renchérit en laissant entendre que l'opposition entre le partenariat et la relation classique client-fournisseur conduit à des recommandations normatives simplistes et radicales : « Le praticien doit choisir entre la logique de confiance assise sur la négociation permanente, informelle et empathique et celle de la méfiance basée sur la contractualisation et la gestion procédurière d'une relation conflictuelle »82.

Relation basée sur la transparence : Hydro-Québec instaure des moyens de communication clairs83 pour gérer ses relations de partenariat. Une communication adéquate assure le maximum d'échanges d'information pour ne pas perdre de vue les objectifs fixés en commun. Ainsi, la transparence dans les affaires d'Hydro-Québec est une préoccupation majeure en raison du statut de l'entreprise comme société d'État québécoise, de sorte qu'elle se trouve responsable, d'une certaine façon, de la gestion des deniers publics et du bien commun. Par conséquent, elle est appelée à gérer la chose publique en bon père de famille84, car les administrateurs de la société d'État représentent les intérêts de la collectivité.

Compte tenu du degré de confiance que le public leur témoigne et des lourdes responsabilités qui se rattachent à l'administration de la chose publique, les administrateurs de la société d'État se sentent le devoir de baser leurs interventions sur un sens plus aigu des valeurs morales qui guideront leurs actions. Il est tout à fait normal que les administrateurs doivent se conformer à des codes d'éthique qui, pour un simple citoyen, seraient très sévères85. En plus, les administrateurs des fonds publics sont imputables devant l'Assemblée nationale de leur gestion administrative86. Donc, ils doivent exercer leurs fonctions avec transparence et intégrité totale. Enfin, Hydro-Québec peut être appelée

81 Brousseau E. (2000). Confiance ou contrat, confiance et contrat, dans Aubert F., Sylvestre J-P., Confiance et rationalité, INRA.

82 Ibid.

83 Hydro-Québec (1998). Le partenariat avec les fournisseurs : une relation gagnant-gagnant. Direction principale approvisionnement et services, ISBN2-550-33157-5, 98G027.

84 Cooper, Terry L. (1991). An Ethic of Citizenship for Public Administration, Enblewood Cliffs, Prentice Hall.

Plamondon, Jacques A. (2002). Fonder l'éthique de l'administration publique, dans Télescope, ENAP, vol. 9, no 1, Québec.

85 Cour suprême du Canada (1996). R. C. Hinchey, 3 R.C.S. 1128 (Juge L'Heureux-Dubé), Canada.

86 Loi sur l'Administration publique du Québec, L.R.Q., chapitre A-6.01, Article 29.

à tenir compte de la politique du gouvernement du Québec en matière de marchés publics87.

Par ailleurs, une étude88 menée par le Groupe CGI en 2006 conclut que pour établir un partenariat mutuellement avantageux, il est indispensable de créer un environnement où dominent la confiance et la transparence. En plus, cette étude montre que lorsque deux entreprises s'engagent dans une relation de partenariat centrée sur les gains réciproques, les mécanismes de reddition de comptes doivent forcément mettre l'accent sur la transparence, de sorte que les deux partenaires s'engagent à manifester beaucoup d'ouverture et de transparence dans leur communication.

Relation basée sur le partage équitable des risques et des bénéfices : Par sa politique intitulée Nos partenaires d'affaires, en vigueur le 1er octobre 1998 et approuvée par le Conseil d'administration le 11 septembre 1998, Hydro-Québec s'engage envers ses partenaires d'affaires à établir des partenariats basés sur un partage équitable et durable des risques et des bénéfices. Cette volonté de partage de risque est motivée par le fait qu'il est rare de pouvoir se lancer dans des innovations technologiques ou de mettre en oeuvre des projets complexes et d'envergure sans courir certains risques d'affaires. En effet, ces éléments de risque peuvent être associés à une pénurie possible de la main-d'oeuvre qualifiée, à la fluctuation des prix de la matière première, au succès ou à l'échec dans le développement des nouvelles technologies et aux fluctuations des marchés financiers qui influencent les coûts de financement des composantes du projet avant sa mise en service. Il ne faut oublier non plus le risque relatif aux conditions du chantier et du terrain lors de la construction d'un projet. Nous n'avons qu'à penser aux données géotechniques qui comportent souvent un certain degré d'incertitude quant à l'état réel rencontré lors de la mise en oeuvre des projets.

Relation basée sur le respect mutuel : Selon le professeur Legault, le respect est l'actualisation de la dignité qui est considérée comme la valeur la plus importante de chaque être humain. Et on peut en dire autant pour les entreprises, car la dimension humaine est au coeur de toute relation d'affaires. À cet effet, Hydro-Québec annonce dans

87 Québec, Québec, Loi sur l'administration publique du Québec, L.R.Q., chapitre A-6.01, article 61.

88 Groupe CGI inc. (2006). Impartition : Etude technique, comment forger des partenariats gagnants en fondant la relation client-fournisseur sur des principes directeurs, Montréal.

sa politique qu'elle s'engage à reconnaître et à respecter le degré d'autonomie conféré par l'entente de partenariat convenue89. De la sorte, cela revêt une importance particulière de respecter la culture de gestion propre à chaque entreprise au lieu de tenter à tout prix d'imposer la culture du client au fournisseur.

Enfin, il est tout à fait naïf de croire que le partenariat d'affaires se déroule sans différends malgré tous les principes et valeurs vertueuses mises de l'avant par ce genre de relation d'affaires. À cet égard, Jean-Philippe Neuville90, docteur de l'Institut d'études politiques de Paris, déclare que les mots sont convergents et le message inlassablement répété : les entreprises sont désormais des « partenaires » amenés à « coopérer » sur la base de la « confiance » pour satisfaire un « intérêt partagé » et sortir « gagnant-gagnant ». « Les chefs d'entreprise seraient-ils devenus adeptes du mouvement New Age? », demande-t-il. Pas si sûr, répond-t-il.

Se basant sur son expérience d'observation en profondeur des pratiques partenariales dans l'industrie automobile européenne, il a constaté l'existence d'un écart qui sépare la pratique du discours politiquement correct et il révèle les paradoxes d'une coopération où les intérêts individuels persistent. Il ajoute que, lors de son étude, un des fournisseurs lui disait que « dans un partenariat, il y a le "partenarieur" et les "partenariés" ». En effet, dans la plupart des cas, le partenariat client-fournisseur s'apparente à un contrat de travail qu'un donneur d'ouvrage possède avec ses employés, de sorte qu'il existe une asymétrie des statuts entre le client acheteur et son fournisseur, qui repose en quelque sorte sur une base de subordination. Car, souvent, c'est le client donneur d'ouvrage qui organise le partenariat, qui met en concurrence, qui évalue et sélectionne les partenaires. Donc, il est tout à fait normal que derrière la coopération qui cimente le partenariat se dissimulent, malgré tout, des intérêts individuels parfois divergents. Cela fait en sorte que le client acheteur cherche à se procurer des produits performants tout en payant moins cher tandis que le fournisseur vise à maximiser ses profits directs en augmentant les prix de ses prestations. Il faut donc admettre que des différends peuvent surgir lors de la mise en oeuvre d'une relation de partenariat. Ainsi, afin de protéger l'alliance établie par les partenaires, il est important

89 Hydro-Québec (1998). Nos partenaires d'affaires. Politique.

90 Jean-Philippe Neuville, maître de conférences en sociologie à l'INSA de Lyon; il est chercheur associé au Centre de sociologie des organisations (CNRS) et membre de l'équipe de recherche ICTT centrée sur les NTIC; il est également membre du comité de rédaction de la revue Gérer & Comprendre, Annales des mines, Il était une fois le partenariat, Réalités méconnues.

d'adopter un mode de règlement des différends approprié en mesure de consolider le partenariat.

1.3 La médiation, un mode de règlement des différends dans le cadre d'un partenariat

Avant de présenter le modèle de médiation que nous considérons approprié pour régler les conflits qui émanent d'une pratique partenariale entre un client et ses fournisseurs, il est utile de présenter les insuffisances du mode usuel qui consiste à résoudre le conflit par négociation sur position ou selon le mode judiciaire. Ensuite, on dévoile les besoins d'une alliance partenariale en matière de règlement des différends commerciaux pour enfin situer le mode proposé avec tout son potentiel.

1.3.1 Les insuffisances du mode usuel de règlement des différends

La pénurie de main-d'oeuvre et de sous-traitants spécialisés poussent les grands donneurs d'ouvrage à former des alliances partenariales avec des fournisseurs de biens et services stratégiques afin de sécuriser l'approvisionnement en produits performants et à la fine pointe de la technologie. Pour la plupart des grandes entreprises, cette relation de partenariat vertical client-fournisseur est vue comme une relation gagnant-gagnant, durable, basée sur la confiance mutuelle, l'équité et le respect91.

Comme les relations de partenariat d'affaires sont des sources de conflits contractuels, les entreprises préfèrent régler leurs différends par voie de négociation, et la voie judiciaire n'est pas considérée que comme un dernier recours. Car avec les expériences vécues en justice, on peut constater l'insuffisance du Droit à satisfaire les attentes des entreprises acheteuses ou celles de ses fournisseurs.

D'abord, le raté du système de justice se manifeste par l'inégalité d'accès à la justice entre
le grand client et ses fournisseurs, ce qui va à l'encontre de l'esprit d'équité mis de l'avant
dans les valeurs partenariales. Ainsi, dans un jugement célèbre relatif à l'affaire Banque de

91 Hydro-Québec, Conseil d'administration, Politique approuvée le 11 septembre 1998 et en vigueur le 1er octobre 1998.

Montréal c, Bail Ltée92, le sous-traitant n'était pas en mesure de supporter les coûts du procès ni d'attendre ce long délai pour régler le conflit en question. Or, ce genre de situation a déjà été révélé par la Juge Otis lorsqu'elle disait, dans un reportage télévisé93 : << Qui peut, aujourd'hui, se payer un procès? ». En conséquence, cet acharnement judicaire, avec son débat juridique impitoyable, a brisé à jamais les relations d'affaires entre HydroQuébec et le fournisseur impliqué dans le procès. Il apparaît donc que le judiciaire demeure insuffisant pour préserver les relations entre les partenaires d'affaires.

Dans d'autres cas, le climat de confiance a cédé la place à une atmosphère de méfiance entre les deux parties condamnées à poursuivre ensemble la réalisation d'un projet. Dans un tel climat où les gestionnaires sont rendus à administrer le contrat comme un gendarme, la vie du chantier devient insupportable tant pour les gestionnaires que pour les travailleurs oeuvrant sur le site. Or, il est faux de prétendre que les conflits commerciaux sont uniquement des litiges de position, car en général, la dimension humaine est omniprésente dans toute relation d'affaires.

Ensuite, le raté du système réside dans la brisure entre Droit et Morale de la communauté qui est en faveur de la protection du plus faible contre l'abus de pouvoir qui peut être exercé par le plus fort. De plus, le recours aux tribunaux contre un petit fournisseur ne respecte pas la valeur partenariale d'équité, ni la morale de la communauté, car le grand donneur d'ouvrage risque d'être perçu par ses fournisseurs comme un partenaire qui abuse de son rapport de forces pour faire plier le plus petit. Il y a fort à parier que c'est cette insuffisance du Droit à régler les différends commerciaux en respectant la morale sociale qui a poussé la communauté des affaires et en particulier le principal partenaire d'HydroQuébec, la ACRGTQ, l'Association des Constructeurs des Routes et Grands Travaux du Québec, à demander l'instauration d'une clause de médiation dans les contrats d'HydroQuébec.

92 Cour Suprême du Canada (1992). Banque de Montréal c. Bail Ltée, 1992-2 R.C.S. 554, Nos du greffe 21748, 21747, Canada.

93 Georges A. Legault (2001) . Les modes de règlement des différends: vers une autre << justice »? Collection essais et conférences, document 11, les Éditions G.G.C. Ltée, Université de Sherbrooke, ISBN 2-89444- 127-4.

Enfin, le raté du système judiciaire se trouve dans le problème de brisure entre le Droit et les valeurs et intérêts communs entre un client et ses fournisseurs : ce sont la réalisation efficace du projet à réaliser, l'équité, le partage de risque, la confiance, la satisfaction de la clientèle et la dignité des personnes impliquées dans le projet. À titre d'exemple, ce problème pourrait très bien surgir lors de la réalisation d'un projet comme celui qui a trait au système de déglaçage des conducteurs réalisé par Hydro-Québec, pour faire face à une éventuelle tempête de verglas. À cet effet, la société d'État s'est associée à un partenaire pour développer un système de déglaçage des conducteurs de son réseau afin de prévenir à une telle situation dans le futur. Après avoir développé le système, un contrat a été signé entre Hydro-Québec et un partenaire pour fabriquer, fournir et installer une nouvelle technologie visant à protéger son réseau contre l'accumulation des glaces sur les conducteurs électriques de haute tension. Advenant qu'en cours de réalisation du contrat, le fournisseur partenaire connaisse des difficultés l'empêchant de respecter le contrat en cours, le donneur d'ouvrage dispose d'une clause de pénalité et d'un engagement du fournisseur à livrer le projet à une date précise et à un coût forfaitaire ferme et global. Au point de vue légal, Hydro-Québec peut appliquer la clause de pénalité pour le retard ou résilier le contrat et appliquer le cautionnement d'exécution.

Le résultat débouchera sur le retrait du fournisseur du projet sans être en mesure de trouver un remplaçant capable de fournir le même système ou un équivalent pour l'hiver en cours. Si une autre tempête de verglas se pointe l'hiver suivant sans un tel système pour protéger le réseau, la situation sera catastrophique pour tous. Donc, détenir un système qui fonctionne pour le prochain hiver est l'objectif commun qui doit être considéré avant les clauses normatives du contrat. À cet effet, la norme juridique (le contrat) est insuffisante pour régler ce différend, car elle risque de provoquer une brisure entre le Droit et les valeurs et intérêts communs partagés.

D'une part, Hydro-Québec a intérêt à ce que le fournisseur poursuive les travaux, car il lui est très difficile de le remplacer, et d'autre part l'entrepreneur est intéressé à poursuivre les travaux pour mettre en service son système (innovation technologique) et prouver son efficacité, ce que va lui permettre de l'installer partout au Québec et même l'exporter dans les pays nordiques. En même temps, Hydro-Québec est intéressée à posséder un système efficace pour faire face à une éventuelle tempête de verglas avant l'hiver prochain. Ainsi, une éventuelle décision judiciaire basée uniquement sur le droit contractuel ne tiendra pas

compte des valeurs communes des partenaires tel que l'équité, le partage de risque, la confiance et la satisfaction de la clientèle (la population du Québec) qui n'est pas prête à vivre une autre tempête de verglas. Ces valeurs ne sont pas inscrites dans les clauses contractuelles et par conséquent n'ont aucune valeur légale.

Pour conclure, le mode judiciaire n'est pas suffisant pour régler les conflits entre un client et ses partenaires en raison du problème d'accès à la justice, du problème de brisure entre Droit et morale de la communauté et du problème de brisure entre Droit et valeurs partenariales. D'où l'émergence d'un mode de règlement non judiciaire qui va permettre de prendre en compte les valeurs et les intérêts communs des partenaires pour prévenir et régler les différends entre un donneur d'ouvrage et ses partenaires commerciaux.

1.3.2 Les besoins

Le partenariat est une démarche dialogique créatrice94 de valeur et une forme de coordination des actions où vivre ensemble est un élément particulier des relations complexes entre un grand donneur d'ouvrage et ses fournisseurs. Ainsi, dans un contexte de partenariat à long terme où les deux partenaires s'engagent dans une véritable collaboration, le judiciaire cède la place à un mode de résolution des conflits en mesure de préserver et de renforcer la relation d'affaires. Abordant dans le même sens, Madame I. Mercedes Gloksein de l'Université McGill énonce que :

« Nous n'entendons pas ici un simple lien mais bien une relation privilégiée entre deux parties qui poussent la collaboration au point d'établir une réelle obligation. L'avènement d'un tel devoir obligera les parties à revoir la méthode de résolution en cas de conflit. Abandonnant le litige à caractère hargneux et optant pour une solution qui se veut plus équitable dans le but de préserver ce privilège. »95

Cela démontre que le judiciaire n'est pas un mode idéal pour assurer et renforcer une bonne alliance d'affaires, car ce mode traite uniquement le litige selon la normativité légale basée sur le contrat, sans tenir compte du contexte et des besoins du partenariat. Par contre, la médiation prend en compte les préoccupations réelles des parties et permet une solution

94 Desrouene Anthony, Dreano Valéry, Gauvrit, Richard, Le Coz Yann et Romano Frédérique (2005). La création de la valeur dans la relation client/fournisseur IAE Grenoble, France : Université Pierre Mendès.

95 I. Mercedes Glockseisen (2000). L'amiable composition : instrument fragile ou assise du renouveau juridique? Université McGill, Faculté de droit.

contextualisée selon une internormativité particulière au partenariat. Cette affirmation est confirmée par les propos de Guillaume Huchet, docteur en droit, à savoir que :

« Cette inclination en faveur de la négociation ne garantit certes aucun aboutissement favorable mais offre la possibilité d'appréhender plus globalement le conflit dans ses dimensions technique, économique, sociale et juridique. Une solution imposée et nécessairement juridique ne résout généralement pas la réalité intrinsèque du conflit opposant deux parties dans une relation certes contractuelle mais avant tout économique. »96

D'autre part, les insuffisances du mode judiciaire se manifestent par le manque d'une certaine expertise recherchée par les partenaires d'affaires en raison de la complexité du conflit : « Les gens d'affaires sont aussi à la quête d'une justice privée confidentielle et offrant une expertise souvent absente chez les juges. »97 Dans une relation de partenariat, les partenaires voudront assurer le maintien de leur relation d'affaires en la recherche d'une décision équitable.98 À cet effet, certains auteurs recommandent même de donner une interprétation large et non rigide au contrat qui lie les parties afin de rechercher une meilleure solution selon les circonstances : « Les contrat doivent s'interpréter avec bon sens, justice et équité. »99

En effet, le judicaire s'apparente à un mode curatif pour régler un litige particulier sans se préoccuper des problèmes sous-jacents au litige comme la poursuite des relations d'affaires à long terme : « Dans un climat où le recours aux tribunaux est la méthode de résolution des conflits, le partenariat qui unissait auparavant les parties ne peut plus reprendre. »100 Tandis que la médiation se présente comme un mode à la fois curatif et préventif, car elle embrasse le conflit avec toute son amplitude, ce qui contribue à renforcer le partenariat et à prévenir que d'autres litiges surviennent dans le futur :

« Les relations commerciales s'inscrivent aujourd'hui dans des logiques de partenariat à long terme. Elles sont sujettes à de multiples incidents de parcours, insatisfactions, litiges qui bien gérés peuvent cimenter durablement la relation ou au contraire la fragiliser de la désaffection progressive à la rupture. La capacité à

96 Guillaume Huchet (2007). Les clauses favorisant un rapprochement amiable, Village de la justice, 13 novembre 2007.

97 I. Mercedes Gloksein (2000). L'amiable composition : Instrument fragile ou assise du renouveau juridique? Université McGill : Faculté de droit, 19 avril 2000.

98 Ibid.

99 Ibid.

100 Arnaud Stimec (2001). Avocats et médiateur: état des lieux et perspectives. Médiateur, formateur et enseignant-chercheur, Nantes, 31 janvier 2001.

intervenir comme médiateur pour trouver des solutions à valeur ajoutée devient une compétence clé pour toutes les fonctions commerciales de l'entreprise. >>101

En ce sens, les travaux de recherche menées par Arnaud Stimec confirment que 76 % des répondants sont d'avis que << la médiation externe semble plus acceptable en situation de relation externe (relations clients-fournisseurs) >>102 et qu'il est souhaitable que ce mode de règlement soit géré par un tiers neutre provenant de l'extérieur : << Les situations externes (relations commerciales par exemple) devraient être plus propices à l'intervention d'un médiateur externe >>103. Ainsi le mode de médiation replace la loi non pas comme une finalité, mais comme un moyen parmi d'autres d'assurer une finalité : des relations équilibrées, de préservation de la paix sociale104 et du bien vivre ensemble.

Cela explique que dans une alliance partenariale d'affaires, il est important d'adopter un mode de règlement de différends compatible avec la vision du partenariat et en conformité avec ces valeurs énoncées précédemment. En premier lieu, il est utile, dans une relation de partenariat, de se doter d'un mode de règlement équitable qui neutralise le rapport de forces afin de résoudre le problème d'accès à la justice des petits fournisseurs : << L'asymétrie des pouvoirs et les tendances qui en résultent sont problématiques pour la négociation >>105. Car souvent, le partenaire qui a plus de pouvoir et de ressources a tendance à user de son pouvoir pour faire accepter sa position par son fournisseur qui n'est pas dans une position lui permettant de la refuser. À ce sujet, Jean Poitras, Ph.D. Professeur agrégé au HEC Montréal, se basant sur des études antérieures, dénote que :

<< Les personnes détenant plus de pouvoir sont habituellement moins intéressées à tenir compte des besoins de celles ayant moins de pouvoir. De plus une personne en meilleure position de pouvoir sera moins intéressée à accepter une solution conjointe pouvant satisfaire toutes les parties. >>106

D'ailleurs, des auteurs comme Jacques Caillouette de l'université de Sherbrooke sont d'avis
que la médiation va de pair avec le partenariat : << Nous invitons le lecteur à saisir les

101 Institut français de la médiation (2005). La médiation commerciale.

102 Arnaud Stimec (2001). La médiation et l'entreprise en France : État des lieux et perspectives. Université Paris I, Panthéon, Sorbonne. Courriel : arnaud.stimec@laposte.net.

103 Ibid.

104 Arnaud Stimec (2001). Avocats et médiateur: état des lieux et perspectives. Médiateur, formateur et enseignant-chercheur, Nantes, 31 janvier 2001.

105 Jean Poitras (2008). Conflits & Stratégies, développez votre leadership en gestion des conflits. [En ligne] http://jeanpoitras.blogspot.com (Page consultée le 6 janvier 2008).

106 Ibid.

partenariats en tant qu'espace à la fois de conflit, de négociation et de médiation »107. En cas de conflit, chaque partie a tendance à demeurer sur sa position et manifeste peu d'ouverture envers le partenaire d'affaires : << La médiation tient du fait que les pratiques de partenariat mettent en communication des gens, des organismes, des systèmes d'action qui, laissés à eux-mêmes, tendent au repli sur soi. »108 D'où l'utilité de prévoir dans une alliance de partenariat d'affaires un mode de résolution de conflits en mesure d'atténuer la méfiance afin de permettre aux partenaires de s'engager dans une collaboration basée sur la confiance et le respect mutuel : << L'existence de méthodes de résolution des conflits réduit les réticences et pousse les différents acteurs à s'impliquer pleinement dans le partenariat. »109 Ce mode de règlement de conflit gagnant-gagnant doit être en mesure d'écarter tout doute de favoritisme ou de perception d'iniquité vis-à-vis les petits fournisseurs.

En deuxième lieu, le mode de règlement des différends doit être en mesure de développer et de préserver de bonnes relations à long terme entre un grand acteur économique et ses fournisseurs de la même manière qu'avec ses employés. Une grande entreprise comme Hydro-Québec est un grand donneur d'ouvrage sur une base permanente et elle achète des produits et services stratégiques spécialisés dont les fournisseurs sont de plus en plus en nombre restreint. En plus, lors de la réalisation d'un projet, les priorités sont d'abord accordées à la qualité du produit livré et à la fiabilité du fournisseur avant l'aspect financier, car en cas de défaillance du produit ou de retard dans la livraison, le manque à gagner dépasse largement le montant d'argent en litige. Donc, elle a tout intérêt à encourager les bons nouveaux fournisseurs à faire affaires avec elle et à aider les fournisseurs habituels fiables et compétents à rester sur le marché.

Le mode de règlement doit donc tenir compte des valeurs communes partagées telles que la transparence, l'équité, le partage de risque, la confiance, la satisfaction de la clientèle et la dignité des personnes impliquées dans le projet.

107 Caillouette, Jacques (2001). Pratique de partenariat, pratique d'articulation identitaire et mouvement communautaire, NPS, vol, no1, Sherbrooke, Université de Sherbrooke, page 83.

108 Ibid. page 93.

109 Brulhart, Frank et Favreau, Christophe (2003). Les modes de coordination et d'organisation des partenariats interfirmes. XIIème Conférence de l'Association Internationale de Management Stratégique, Les Côtes de Carthage. 3, 4, 5, et 6 Juin 2003.

1.3.3 Une approche de pratique suggérée : Médiation URI-FISHER-Plus

Une grande entreprise comme Bombardier, Hydro-Québec ou autre est un important donneur d'ouvrage permanent dont les relations avec ses fournisseurs sont primordiales pour accomplir sa mission fondamentale. En raison de la particularité et de l'importance stratégique des produits et services achetés et de la fréquence des contrats octroyés par l'entreprise, de nombreux individus, des entreprises commerciales et des corporations doivent leur subsistance et leur prospérité aux contrats accordés par ce grand acheteur. De même, une grande entreprise a besoin de fournisseurs qualifiés, permanents et fiables en mesure de l'accompagner dans la réalisation de ses projets de développement. Cette vision a été à l'origine de l'approche de partenariat gagnant-gagnant qu'Hydro-Québec a mis de l'avant dans sa politique d'approvisionnement.

Donc, le désir d'entretenir des relations d'affaires basées sur la confiance, le partage de risque et l'équité témoigne d'une réalité qui s'impose en raison du nombre de plus en plus restreint de fournisseurs spécialisés dans les produits stratégiques. En cas de conflit avec un fournisseur, le grand donneur d'ouvrage a donc besoin d'un mode de règlement qui prend en compte cette réalité et qui préserve les relations à long terme avec ses partenaires. Dans le cas d'Hydro-Québec, un tel mode doit aussi être en mesure d'assurer les impératifs propres à la gestion de la chose publique, l'intégrité, l'équité et la transparence.

D'où le modèle de médiation proposé par Ury-Fisher Plus, c'est-à-dire un mode gagnantgagnant qui amène les parties à définir et reconnaître le conflit comme étant un problème commun à résoudre et à identifier leurs intérêts communs légitimés par les besoins et les valeurs communes partagées afin de pouvoir définir, selon les circonstances, la meilleure solution en appréhendant le conflit avec toute son amplitude. Donc, il s'agit d'une approche qui s'appuie sur la théorie de négociation raisonnée de Ury et Fisher110 et sur le concept d'une médiation transformatrice par une approche éthique telle que proposée par Georges A. Legault111.

110 Fisher, Roger et Ury William (1982). Comment réussir une négociation, Éditions du Seuil, Paris, traduit par Léon Brahem, ISBN 2-02-006259-3.

111 Legault, Georges A. (2001). L'hypothèse de l'éthicisation du droit. Les modes de règlement des différends: vers une autre « justice »? Collection Essais et conférences, Document 11, Chaire d'Éthique appliquée, Université de Sherbrooke, Éditions G.G.C., 2001, ISBN 2-89444-127-4.

Ainsi, une solution sera recherchée qui permettra de régler le litige et ses causes profondes par la convergence des normes juridiques, des valeurs partenariales et des normes d'éthique. D'abord, la norme juridique, qui est le contrat, sera évoquée pour qualifier le litige et ses conséquences. Elle peut être employée pour situer le droit de chacune des parties en litige ainsi que ses obligations contractuelles. Ensuite, comme dans la plupart des cas le litige est issu d'une mauvaise pratique qui se perpétue depuis longtemps de part et d'autre des parties, des solutions peuvent être discutées afin de prévenir d'autres conflits dans le futur. Dans une médiation où on cherche une solution, le fournisseur, en l'absence du rapport des forces, peut faire part ouvertement de ses doléances relatives aux documents contractuels ambigus et aux clauses jugées abusives dans un contrat par adhésion comme celui d'Hydro-Québec. De même, le grand client peut trouver une solution qui saura à la fois répondre à ses contraintes en matière d'échéancier et de qualité, et tenir compte de la préoccupation de son partenaire pour lui permettre de prospérer et de demeurer sur le marché.

Aussi, la présence d'un tiers neutre crédible, dans une médiation, rassurera le corps social d'une intégrité de gestion et écartera toute apparence de favoritisme ou de conflit d'intérêts; ce qui n'est pas le cas lors d'une négociation bipartite. Quant à l'entente, en plus de la solution du litige, elle peut inclure des éléments successibles d'améliorer les opportunités et les relations d'affaires à long terme.

Le processus

Dans le cas d'un grand acteur économique comme Hydro-Québec, le conflit se présente souvent sous forme d'une réclamation pécuniaire présentée par l'entrepreneur ou le fournisseur qui prétend avoir subi des préjudices lors de l'exécution de son contrat. Parfois, le conflit sera causé par une obligation que l'un ou l'autre n'est pas en mesure d'honorer pour différentes raisons. Selon Ury et Fisher112, les revendications commencent généralement par des positions où « chaque partie en présence adopte une position, présente des arguments en sa faveur, puis fait des concessions afin de parvenir à un

112 Fisher, Roger et Ury, William (1982). Comment réussir une négociation, Éditions du Seuil, Paris, traduit par Léon Brahem, ISBN 2-02-006259-3.

compromis ». Il s'agit d'un marchandage de compromis : c'est ainsi que Legault qualifie la négociation sur position. Ce genre de négociation est insuffisant pour parvenir à une entente satisfaisante dans le conflit en cause.

Le concept de la médiation proposée par cet essai repose sur un processus volontaire, non contraignant et confidentiel, qui appréhende le conflit comme une opportunité de parfaire et de consolider le partenariat113, par une démarche dialogique en trois étapes soit : la définition du conflit, la recherche des solutions et le choix de la meilleure solution selon les circonstances. Pour y arriver, le processus sera animé et géré par un médiateur qui sera considéré comme un agent de changement et qui interviendra dans le processus pour aider les parties à définir le conflit et à trouver une entente satisfaisante.

Définition du conflit

En premier lieu, il faut amener les parties à dépasser leurs premières positions pour reconnaître le conflit comme un problème commun à résoudre, de sorte que dans le cas de notre exemple du projet du système de déglaçage, les parties pourront identifier et comprendre les enjeux et les objectifs communs partagés. Par la suite, le processus leur permet de reconnaître les intérêts mutuels légitimés par les besoins et les valeurs partagés du partenariat. À cette occasion, les parties, en plus d'exposer les causes profondes du litige, peuvent s'exprimer librement sur les irritants qui peuvent être des ambigüités qui se perpétuent depuis longtemps au sujet des documents contractuels, des clauses jugées abusives, des risques à partager, du problème de disponibilité de la main-d'oeuvre qualifiée, etc.

Pour qualifier le conflit, les parties peuvent dépasser la normativité juridique qui est le contrat pour faire appel à une internormativité, juridique, administrative, scientifique, éthique et partenariale. Ainsi, si des normativités rentrent en conflit avec la relation de partenariat, les parties peuvent établir une normativité propre à elles selon les

113 Legault,Georges A. (2001). L'hypothèse de l'éthicisation du droit. Les modes de règlement des différends: vers une autre « justice »? Collection Essais et conférences, Document 11, Chaire d'Éthique appliquée, Université de Sherbrooke, Éditions G.G.C., 2001, ISBN 2-89444-127-4.

« La médiation serait un processus d'intervention visant à favoriser des rapports harmonieux [...] à la place des rapports conflictuels ».

circonstances114. Dans ce cas, la normativité énoncée par les valeurs du partenariat pourra être reconnue par les parties pour résoudre le problème identifié. Ainsi, le processus, en permettant aux parties de choisir le mode et la normativité, permet de voir le conflit sous un angle plus large et amène les parties à définir le plus clairement possible la nature de leur différend. L'identification du problème à résoudre par le processus permet d'envisager de multiples options avec beaucoup de créativité. Cela fait en sorte que l'enjeu, dans ce cas, demeure la consolidation de la relation du partenariat, en réparant les failles pour la rendre plus performante : « L'enjeu de la médiation n'est pas l'entente mais le processus qui y conduit »115. Dans le contexte d'aujourd'hui, que ce soit Hydro-Québec, Bombardier ou d'autres entreprises de ce genre, qui peut se permettre une rupture de relation avec un fournisseur stratégique, fiable et performant?

La recherche de solutions

Au stade de la recherche de solution, on dresse une liste des solutions possibles selon les besoins et en conformité avec les valeurs de chacune des parties, sans jugement et sans se soucier de leur vraisemblance. Car, selon Ury et Fisher (1982), les obstacles qui empêchent la recherche d'une solution créative résident dans le fait que les parties choisissent une solution hâtivement et ne sont pas en mesure de voir d'autres alternatives. Pour cette raison, il est important de séparer la recherche des options de l'évaluation des solutions. Donc, dans une atmosphère détendue et informelle, on amène les parties à proposer, par des échanges de vues et par un remue-méninge, le plus grand nombre possible de solutions. Une fois la liste des solutions dressée, les parties peuvent commencer à évaluer chacune des solutions proposées.

Le choix de la solution

Ensuite, les solutions doivent être évaluées selon des critères objectifs, légitimés par les besoins et les valeurs communes partagées. Dans le cas présent, on cherche les valeurs partagées qui s'inscrivent dans la relation de partenariat. Ainsi, on amène une partie à reconnaître la légitimité de certains points de vue de l'autre pour évaluer une proposition. En effet, il s'agit d'une démarche qui s'appuie sur la sollicitude, en reconnaissant les valeurs

114 Ibid.

115 Ibid.

de l'autre. La médiation n'est possible que par l'acceptation des valeurs de l'autre116, qui sont parfois différentes des nôtres, dans la mesure où elles sont partagées en vue de la résolution du problème identifié. Par cette approche qui fait intervenir les valeurs pour légitimer les intérêts en jeu, on peut actualiser les principes et les valeurs annoncées du partenariat qui consiste principalement à préserver les relations d'affaires durables qui s'articulent autour de la réussite du projet.

Dans la situation d'Hydro-Québec, réussir un projet performant est primordial, car celui-ci s'insère souvent dans un vaste réseau, et l'impact d'un projet non réussi est majeur en raison du manque à gagner et de la répercussion négative sur la réputation de l'entreprise en matière de fiabilité. La qualité de l'ouvrage et la date de la mise en service ont souvent préséance sur le dépassement des coûts d'un projet.

Ensuite, le choix d'une solution satisfaisante implique le rejet des autres solutions proposées. Dans ce cas, il faut amener les parties à établir un ordre de priorité en examinant l'option en fonction des besoins et en distinguant les choses désirables des choses essentielles. Ce qui amène à trouver la meilleure solution selon les circonstances, c'est-à-dire selon le contexte qui est propre à chaque cas présenté. À titre d'exemple, le contexte d'un projet de développement technologique peut être différent d'un projet de construction d'un bâtiment administratif qui n'a pas de conséquence sur le réseau électrique. Cette démarche propose des solutions contextuelles en tenant compte des diverses normativités en jeu comme celle du partenariat ou la normativité juridique.

Le médiateur

Dans le modèle de la médiation proposée, le médiateur sera un agent de changement qui intervient dans le processus pour amener les parties d'une position de confrontation basée sur leur position à un état de collaboration conforme aux valeurs partenariales. D'abord, le médiateur doit poser un diagnostic sur la nature de la relation d'affaires entre les parties et sur les intérêts en jeu afin de cerner l'ensemble des intérêts qui se cachent derrière la position de chacune des parties. Une fois l'ensemble des intérêts connus, il sera plus facile d'envisager des options créatives qui serviront pour le choix de la solution au problème

116 Legault, Georges A. (2004). Modèle théorique, les émotions, les valeurs et la médiation, dans Revue de prévention et de règlement des différends, vol. 2, no 1, 2004.

commun défini par les partenaires. Ensuite, le médiateur doit aider chacune des parties à établir des priorités afin de choisir la plus essentielle dans le contexte et tout en prenant en considération les intérêts du partenaire. De sorte que le médiateur jouera un rôle essentiel pour amener chacune des parties à prendre conscience des raisons de la partie adverse présentées comme légitimes.

Toutefois, il est important que le médiateur comprenne très bien son rôle et qu'il dissipe toute confusion des participants par rapport à son statut. En effet, selon Legault (2004), à l'instar du médecin, le médiateur n'a pas d'obligation de résultats, mais une obligation de moyens. Sa responsabilité par rapport aux parties qui le mandatent ne consiste pas en venir absolument à une entente ni à négocier pour elles117, mais plutôt à leur donner tous les moyens pour qu'elles soient en mesure de comprendre tous les enjeux du conflit afin qu'elles puissent trouver elles-mêmes la meilleure solution, satisfaisante, selon les circonstances.

A cet effet, le médiateur doit gérer l'échange d'information afin de permettre aux partenaires de comprendre le conflit dans toute son amplitude. Même si la médiation est un processus qui permet aux parties d'être autonomes, d'exprimer librement leurs opinions sur le conflit, de chercher elles-mêmes leurs besoins et intérêts communs et de trouver la solution, l'expérience montre << que si elles n'ont pas l'aide dirigée et persévérante du médiateur pour les y amener, il ne se passera pas grand-chose >>118. Donc, son rôle dans le processus est primordial pour obtenir la << matière première >>119 nécessaire à mieux définir le conflit et construire des options de solution. A ce niveau, le médiateur doit être dynamique et directif dans la gestion du processus qui lui appartient afin d'obtenir le maximum d'informations et amener les parties à voir le conflit avec toutes ses facettes. En ce sens, il est important de comprendre que dans une médiation, la gestion du processus appartient au médiateur tandis que le conflit et la solution appartient aux parties en litige.

D'autre part, le médiateur doit intégrer l'information délivrée fragmentée par les parties et
aider à définir les termes afin d'éliminer les fausses compréhensions entre les personnes
durant le processus : << Il n'y a rien de plus néfaste que d'aborder l'analyse d'un litige avec

117 Bourcheix, Dominique F. (2001). Développements récents en médiation. Le rôle du médiateur : évolution et tendances, les Éditions Yvon Blais Inc., 2001, ISBN2-89451-545-6.

118 Ibid.

119 Ibid.

de l'information sélective et hermétique.»120. Cependant, le médiateur ne doit pas user de son influence et être directif quant aux réponses données par les parties en litige. Il doit être à l'écoute sans porter un jugement de valeur sur la perception du conflit des personnes présentes. Il doit toujours montrer son intérêt à tout ce qui est dit avec respect et d'une façon impartiale. Ainsi, il gagnera la confiance des parties, élément essentiel pour la bonne marche du processus.

Pour bien jouer son rôle dans un conflit commercial entre partenaires d'affaires, le médiateur doit être neutre, transparent, crédible, intègre et posséder les compétences nécessaires afin de comprendre les enjeux du conflit et le vocabulaire propres au domaine du conflit. Ainsi, dans un conflit complexe et spécialisé comme celui d'Hydro-Québec et ses fournisseurs, en plus d'une solide formation en médiation, il sera utile d'employer un médiateur ayant des connaissances techniques dans le domaine. Selon la pratique, le premier choix des parties consiste souvent à faire intervenir « quelqu'un du métier »121, car il permet aux parties de mieux exploiter leur créativité quant aux options de solutions possibles.

La relation entre le partenariat et le modèle de médiation proposé

Pour bien saisir la relation entre le modèle du mode de règlement des différends proposé et le concept de médiation décrit précédemment, il faut penser le processus de la médiation comme étant une démarche dialogique qui actualise les valeurs partenariales, et qui permet d'appréhender le conflit comme un élément dans le cycle de l'amélioration continue122 visant à consolider et cimenter la relation de partenariat, et non pas comme un espace de confrontation entre deux adversaires ayant des intérêts conflictuels.

D'abord, la solution qui sera trouvée par le processus de la médiation est une solution
équitable et contextuelle qui donne satisfaction à la relation partenariale qui est décrite
comme étant dynamique, s'adapte à tous les contextes et basée sur l'équité entre les

120 Ibid.

121 Fortin, Jacques (2004). Médiateur accrédité LL.M., (5) Comment choisir son médiateur, 18 décembre 2004. [En ligne] http://www.jfortinmediation.qc.ca.

122 Hydro-Québec (1998). Le partenariat avec les fournisseurs : une relation gagnant-gagnant. Direction principale approvisionnement et services, ISBN2-550-33157-5, 98G027.

"L'engagement dans un processus d'amélioration continue est une valeur requise pour travailler en mode partenariat."

partenaires. Ensuite, la médiation proposée intervient sur les relations afin de les préserver et de les améliorer, ce qui contribue à renforcer davantage le partenariat basé sur des relations d'affaires à long terme. En plus, le mode de médiation proposé est une démarche gagnant-gagnant qui est tout à fait compatible avec la relation gagnant-gagnant souhaitée par le concept du partenariat préconisé. Enfin, avec le concept de règlement préconisé, toute recherche d'un règlement est guidée par les valeurs et intérêts partagés.

Ainsi, dans le mode de règlement des différends proposé, le médiateur, au lieu de gérer un compromis, mobilise les parties en conflit par les valeurs et les intérêts du partenariat annoncés et reconnus par les partenaires et il les amène à élaborer ensemble une entente satisfaisante :

« Ainsi, les mécanismes informels qui remplacent progressivement les dispositifs formels (Ring et Ven, 1994) permettent aux parties de se coordonner et d'atteindre des buts communs à long terme dans une perspective où ce qui les unit est plus fort que ce qui peut les diviser. »123

On peut donc conclure qu'au point de vue théorique, il y a un lien évident entre le partenariat et la médiation dans la mesure où ce mode de règlement est le mieux indiqué pour actualiser les principes et les valeurs du partenariat. Par conséquent, on peut affirmer que, théoriquement, il existe une incohérence entre l'absence de médiation comme mode de règlement des différends et le partenariat.

123 Nogatchewsky Gwenaëlle (2005). Seigneurie, vassalité, partenariat et marché dans les relations clientfournisseur, ATER, CREFIGE-DRM, 205, Université Paris-Dauphine, XIVème Conférence Internationale de Management Stratégique, Pays de la Loire, Angers.

CHAPITRE 2 PRÉSENTATION DES DONNÉES RECUEILLIES IN SITU

Ce chapitre est consacré à la présentation des données recueillies sur le terrain à l'aide des entrevues semi-dirigées. À cet effet, une grille est établie sous forme d'un texte avec des paragraphes construits pour chacun des acteurs à partir du guide d'entrevue de ce projet de recherche. Pour chacun des acteurs interviewés, on présente d'abord la perception du partenariat; ensuite, on expose la conception du mode de règlement des différends et enfin on présente la lecture que fait l'acteur de la dynamique entre le partenariat et le mode de règlement des différends. Cette étape va permettre de répondre à la deuxième question spécifique de recherche et de connaître la perception des acteurs chez Hydro-Québec, devant une éventuelle incohérence entre l'absence de médiation et le partenariat.

Il est d'une importance capitale de connaître la lecture que font les acteurs interviewés de la politique d'acquisition énoncée par Hydro-Québec et de la conception du partenariat avec sa signification d'après leur expérience pratique au sein de la société d'État. Il est essentiel de situer la perception et la conception des acteurs clefs qui interviennent en première ligne dans la stratégie de gestion d'acquisition d'Hydro-Québec. Ces éléments permettent de mesurer l'écart entre le partenariat tel que perçu par les acteurs et celui présenté dans le cadre de référence afin de comprendre dans quelle mesure le partenariat tel que perçu est mobilisateur pour implanter de nouveaux modes de règlement des différends.

2.1 Acteur D-01

L'acteur D-01 est ingénieur de formation, cadre relevant du PDG et membre du comité de gestion de la Direction qui oriente les politiques de l'entreprise dans le domaine de l'approvisionnement et de la réalisation des grands projets. Il a consacré 27 ans à la gestion et la réalisation des projets majeurs dans le domaine de l'énergie hydroélectrique dont 15 ans à Hydro-Québec et plus de 12 ans dans le secteur privé. Avec une culture de gestion hybride publique/privée, ses opinions sont susceptibles de contribuer d'une manière significative aux réponses aux questions posées par ce projet de recherche.

2.1.1 La perception du partenariat

Pour l'acteur D-01, le terme partenariat dans le domaine des affaires est très général et il peut avoir des significations et interprétations multiples dépendamment des personnes et du milieu où il est pratiqué : << On a trop charrié le mot partenariat, [...] La notion de partenariat, j'ai de la difficulté avec ça.. » (Acteur D-01). D'après lui, il est très difficile de considérer la relation avec l'entrepreneur de construction comme du partenariat en raison du caractère publique des appels d'offres où la société d'État est souvent tenu de prendre la plus bas soumissionnaire conforme : << Quand on me parle du partenariat avec nos entrepreneurs, pour moi ce n'est pas du partenariat. C'est de la collaboration qu'on doit avoir. » (Acteur D-01).

Il ajoute que les contrats sont octroyés selon un appel d'offres public et par conséquent, il n'y a pas de partage des pertes ou des profits entre le donneur d'ouvrage et l'entrepreneur. Pour cette raison, il perçoit la relation entre le client et le fournisseur comme une relation d'affaires normale où chacun tente de maximiser ses profits. En conséquence, ce genre de relation est loin d'être vue comme une relation de partenariat, mais plutôt comme de la bonne collaboration qui facilite la tâche pour tous afin de réussir le projet entrepris : << Dans notre système avec le plus bas soumissionnaire, ce n'est plus du partenariat. Tu ne peux pas être partenaire avec lui car tu ne partages pas ses profits, tu ne partages pas ses pertes et tu ne partages pas ses décisions. » (Acteur D-01)

En plus, le discours de ce gestionnaire laisse entendre que dans un appel d'offres public, le donneur d'ouvrage ne participe pas à la prise de décision du fournisseur. Ce qui fait en sorte que la relation de partenariat cède la place à une relation commerciale où les intérêts des parties ne sont pas toujours convergents : << Le partenariat est lorsque tu es capable de t'asseoir et négocier avec l'entrepreneur : T1Voici ce qu'on va faire s'il arrive telle ou telle chose, on fait telle ou telle chose » (Acteur D-01).

Pour cet acteur, dans le domaine de la construction des grands projets à Hydro-Québec, le partenariat est vécu comme une relation gagnant-gagnant où chaque solution recherchée doit apporter des bénéfices ou un plus valu à chacune des parties en relation d'affaires :

<< On a était obligé de renégocier à la baisse le prix unitaire avec l'entrepreneur et nous avons obtenu une réduction importante des coûts de réalisation. C'est rare pour un entrepreneur accepte de redonner pour le donneur d'ouvrage un crédit de six millions. C'était une négociation gagnant-gagnant. » (Acteur D-01)

La confiance, qui est difficile à gagner en relation d'affaire, s'est imposée comme l'élément clef d'une relation de partenariat pratiqué par ce gestionnaire du premier niveau. Selon lui, les partenaires doivent faire preuve d'une bonne attitude où la confiance et le respect mutuel doivent prévaloir dans leur négociation et dans leur approche pour résoudre leurs différends : << L'entrepreneur a ouvert ses livres ce qui lui a permis de faire des profits raisonnables et consentir à Hydro-Québec un crédit substantiel. La communication était très bonne tout au long du projet. » (Acteur D-01)

Parlant d'une expérience d'un partenariat qui a mal réussi, il mentionnait : << Cet entrepreneur, même si tu essayais de l'aider, il n'était pas capable de prendre tes commentaires » (Acteur D-01). On peut lire à travers cet extrait que le manque de confiance est l'élément perturbateur d'une relation de partenariat.

Selon ce décideur, la transparence dans le milieu des affaires est essentielle pour le bon déroulement d'un partenariat. Car en cas d'une mauvaise décision de la part d'un partenaire, l'autre partie sera incitée à partager les difficultés et à lui aider à redresser la situation et limiter les préjudices. En plus la transparence aide à la prise des décisions sans trop d'hésitation : << Les gens qui sont transparents sont confiants que ça va bien aller, mais les gens qui ne sont pas transparents et qui ne sont pas confiants de leur décision ne sont pas capables de supporter leur décision » (Acteur D-01).

Aussi, la transparence est perçue par cet acteur comme l'admission de nos erreurs ce qui évite les longues discussions et les délais interminables en restant campés sur nos positions. Cette attitude ne contribue pas à préserver une bonne relation de partenariat : << Si je fais une erreur, il faut vivre avec. Ma philosophie : il faut admettre nos erreurs. » (Acteur D-01)

De plus, il voit dans le partenariat un partage des risques d'affaires entre le donneur d'ouvrage et le fournisseur : « Quand on me parle de partenariat avec nos entrepreneurs, pour moi, un partenaire doit partager le risque » (Acteur D-01). Il considère, en outre, que l'équité est au centre de la relation commerciale entre Hydro-Québec et ses partenaires. Il s'agit d'une valeur d'entreprise énoncées par sa politique et à laquelle on attache beaucoup d'importance. L'équité, perçue par cet acteur, est surtout celle qui a trait aux fournisseurs qui ont participé à la soumission. Dans ce cas, il considère que la société d'État doit se comporter comme un bon père de famille pour traiter équitablement ses fournisseurs. Ainsi, le souci de protéger les soumissionnaires qui n'ont pas eu le contrat est omniprésent dans chaque décision pour de question d'équité : « Tu peux faciliter l'exécution du contrat à l'entrepreneur sans être préjudiciable au deuxième plus bas soumissionnaire. Si tu favorises le plus bas, tu peux léser les autres qui n'ont pas eu le contrat. » (Acteur D-01) À cet égard, l'acteur D-01 n'a pas manifesté de désir de fondre l'identité du fournisseur en l'intégrant à Hydro-Québec, ce qui laisse croire que l'interviewé est en faveur du respect du degré d'autonomie du partenaire avec sa propre culture de gestion. Par ailleurs, il fait connaître sa manière directe de manifester le respect envers l'entrepreneur lors de la réalisation d'un projet de construction. Il s'agit de bien accueillir avec une grande ouverture les demandes et les arguments de l'entrepreneur :

« Il ne faut pas prendre le document présenté par l'entrepreneur et essayer seulement de voir comment je peux le détruire. On n'y ira pas nulle part avec ça. Si c'est fondé, il faut que je trouve le moyen pour le compenser. » (Acteur D-01)

« J'explique aux gens qui travaillent pour moi : T'Vous n'êtes pas là pour démolir l'entrepreneur.T' » (Acteur D-01)

2.1.2 La perception du mode de règlement des différends

2.1.2.1 Les modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

En ce qui a trait aux modes usuels de règlement des différends, l'analyse du discours de ce gestionnaire laisse entendre que lorsque l'entrepreneur rencontre des conditions qu'il considère imprévisibles et qu'il juge avoir subi des préjudices, en premier lieu, il présente un dossier de demande de compensation à l'administrateur du contrat désigné par la Société d'État dans l'avis d'attribution. Ce dernier étudie le dossier et tente de négocier

avec le représentant de l'entrepreneur un règlement. Il s'agit le plus souvent d'une négociation bipartite que le représentant d'Hydro-Québec doit conduire avec équité et transparence, en se basant sur les clauses contractuelles, les lois et les règlements en vigueurs. À cet effet, des directives sont données aux administrateurs des contrats pour être réceptifs aux demandes de l'entrepreneur et pour analyser la demande selon des critères objectifs bien fondés en droit :

<< Il rencontre des conditions autres, imprévisibles. L'entrepreneur présente un dossier. Après avoir étudié le dossier, je trouve que sa demande est fondée. Je pose la question c'est quoi les préjudices que je peux lui être causés ? Si c'est vrai, c'est quoi l'impact? Tu essaies de le quantifier le plus possible. » (Acteur D01)

Le fait qu'il existe un guide d'entreprise qui encadre la façon de régler les différends avec le fournisseur montre la volonté de la société d'État de garder le contrôle du processus.

Selon la conception de cet acteur, les négociations avec l'entrepreneur et l'analyse du dossier de réclamation présenté par l'entrepreneur sont faites en équité et avec transparence en s'appuyant sur des critères objectifs où le dossier doit être bien fondé en droit. Les clauses contractuelles, les lois et règlements demeurent la source de toute justification pour la prise de décision. À cet effet, un avis préalable du contentieux de la société d'État est nécessaire pour conclure toute entente concernant le règlement d'une réclamation par un gestionnaire. Le fardeau de la justification incombe à l'entrepreneur où il doit présenter sa demande de compensation avec une bonne argumentation détaillée et basée sur le contrat qui lie les parties :

« Si ce que présente l'entrepreneur n'est pas fondé, il faut être capable de dire à l'entrepreneur pourquoi ceci n'est pas fondé. » (Acteur D-01)

« Tu essayes de voir c'est quoi la vérité? Et si c'est fondé » (Acteur D-01)

« Si l'entrepreneur t'amène suffisamment d'arguments du bien fondé de son dossier, tu vas le quantifier. » (Acteur D-01)

Toutefois, il affirme que dans la plupart des cas, on fini par s'entendre et par trouver une solution sans qu'il soit nécessaire de se rendre devant les tribunaux. Selon les procédures, s'il n'y a pas d'entente après avoir fait appel au Directeur, usuellement le dossier sera transmis au contentieux afin de se préparer de le débattre devant les tribunaux de droit commun. Mais l'interviewé s'entend pour dire que la poursuite d'un dossier en justice est très rare, car il préfère trouver une solution avant d'en arriver à se trouver devant un juge : << Les cas où HQ va en cour sont très rares. » (Acteur D-01). Il ajoute :

« Si tu essaies de lui expliquer pourquoi ce n'est pas bien fondé? Et s'il persiste avec sa demande parce qu'il a perdu de l'argent avec son contrat? Le raisonnement est rendu irrationnel. A ce moment-là, tu vas lui dire "On va aller voir le contentieux parce qu'on n'est plus capable de se parler d'une façon rationnelle". » (Acteur D-01)

Les forces des modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

En ce qui a trait aux forces des modes usuels, l'acteur D-01 n'a fait aucun commentaire.

Les faiblesses des modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

Les faiblesses des modes usuels n'ont pas été invoquées par l'acteur D-01.

2.1.2.2 Les modes alternatifs de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

L'analyse du discours de l'acteur D-01 a fait ressortir que la société d'État fait un recourt occasionnel et exceptionnel, aux modes alternatifs pour résoudre les conflits commerciaux avec ses fournisseurs : « Le conciliateur, on l'a utilisé une fois dans ma carrière. Sur ce contrat-là car il était vraiment gros. » (Acteur D-01)

L'acteur D-01 ne cache pas sa préférence pour le mode judicaire par rapport au mode d'arbitrage. L'interviewé demeure très réticent à choisir l'arbitrage pour régler les différends avec les fournisseurs. Cette position est motivée par le fait qu'une décision d'arbitre est exécutoire, elle lie les parties et elle est sans appel. Tandis devant une décision de la cour, on a toute la liberté de la porter en appel si on le juge nécessaire : « Moi je pense personnellement qu'il faudrait... encore une fois, je ne tranche pas le débat entre l'arbitrage et les tribunaux... HQ a fait son lit là-dessus, c'est les tribunaux. » (Acteur D01)

Pour lui, les fonctions principales du médiateur sont de rapprocher les parties. Il doit
rétablir un climat de confiance entre les parties afin de permettre un bon flux de

communication entre les belligérants : << Le conciliateur ce qu'il essaye de faire est de rapprocher les deux parties. Si ça ne marche pas on donne ça à notre contentieux. » (Acteur D-01). Aussi, il considère qu'un des rôles principaux du médiateur est de bien gérer la partie émotionnelle du conflit. Il mentionne qu'un conflit commercial renferme dans la plupart des cas un conflit de personnalité entre les gestionnaires responsables des deux parties en conflit. D'où l'importance pour le médiateur de sortir les belligérants de l'émotionnel pour se concentrer sur le rationnel. Des arguments objectifs et rationnels doivent être mis de l'avant dans la recherche d'une solution satisfaisante pour les parties :

<< Essayer de convaincre chaque partie à partir des arguments rationnels. Le médiateur, il faut qu'il demeure rationnel. Il ne peut pas aller avec des sentiments. Des fois tu en veux au gars qui est face de toi. Et tu dis cette fois ci il ne m'aura pas. Comme c'est tes sentiments qui ressortent. Tandis que le médiateur, son rôle est de sortir toutes les émotions que tu peux avoir dans le dossier, et agir d'une façon rationnelle. Il faut qu'il ramène les deux parties à des rationnels. » (Acteur D-01)

Il apparait d'une manière spontanée que, selon l'acteur D-01, la finalité du processus est d'avoir une entente de règlement. Ce qui laisse dégager que la responsabilité de l'échec ou de la réussite incombe en bonne parti au médiateur et à son talent. Donc selon lui, le médiateur a une obligation des résultats : << Le but d'avoir un conciliateur ou un facilitateur est d'avoir un règlement » (Acteur D-01) Selon son expérience, cet acteur voit dans les fonctions du médiateur un messager fidèle qui peut faciliter la transmission des informations entre les parties. Il espère aussi qu'il joue un rôle d'évaluateur neutre capable d'éclairer les parties et de leur recommander des pistes de solution au conflit :

<< Pour être capable de fermer le dossier on a été cherché un conciliateur, ou un médiateur. Il avait le rôle d'essayer de nous présenter la position de l'entrepreneur et par la suite de présenter notre position à l'entrepreneur en nous disant le pour et le contre. Nous, on voyait le dossier d'une certaine façon. Avec l'explication qu'avait l'entrepreneur, et avec son expérience qu'il a, le conciliateur, il essayait de nous influencer en nous disant "il faut essayer peut-être d'aller vers ça pour un telle raison". À cause d'un certain fait ou certaines données que vous n'aviez pas, vous ne le perceviez pas de cette façon-là. Mais si vous le regardez de cette façonlà, ça pourrait être acceptable. » (Acteur D-01)

La médiation est perçue par cet interviewé comme faisant partie d'un continuum et elle est l'étape avant de s'adresser à la cour. De sorte qu'il voit un rôle important du médiateur dans l'évaluation du risque advenant que le dossier d'une réclamation soit entendu par un juge. Il souhaite que le médiateur soit en mesure de donner une appréciation juste des

résultats probables suite à une éventuelle poursuite en cour de justice. Selon l'acteur D-01, le médiateur doit pouvoir intervenir et convaincre les parties de la meilleure solution selon les circonstances :

<< Le médiateur, il va essayer de les ramener et leur dire peut être tu fais une erreur et ne te battre pas la dessus car tu perds ton temps. Et si tu vas en cour tu va perdre. Le médiateur c'est l'étape avant de te rendre en cour. Il va essayer de te dire tes points forts et tes points faibles et si tu vas devant un juge tu vas te faire planter. Pense y comme il faut avant et regarde l'argument de l'autre partie. Il y a des gens avec un certain recul vont admettre certaines choses. C'est ça la médiation dans le fond. » (Acteur D-01)

Les forces (les satisfactions) du mode alternatif de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

L'acteur D-01 trouve que le processus de médiation, même s'il ne réussit pas à trouver une solution au conflit, permet d'avoir une réflexion et de voir le conflit sous un autre angle. Ce qui permet parfois de reconsidérer sa position : << S'il n'y a pas de possibilité de rapprochement, du côté de l'entrepreneur, c'est de faire valoir ses droits vis-à-vis les tribunaux et de notre côté, c'est peut-être, suite à la médiation, de reconsidérer le dossier et la démarche qu'on devra faire pour trouver un règlement » (Acteur D-01)

Les faiblesses (les déceptions) du mode alternatif de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

Aucun commentaire de la part de l'acteur D-01 pour les faiblesses du mode alternatif.

2.1.3 La perception de la relation entre le partenariat et le mode de règlement des différends

L'acteur D-01 ne voit pas une relation évidente entre le partenariat tel que pratiqué par Hydro-Québec avec ses fournisseurs et le mode de règlement des différends. Le statut de l'entreprise comme société d'État est l'élément montré du doigt comme étant le plus contraignant pour établir un vrai partenariat avec les fournisseurs et pour adopter la médiation comme mode de règlement des différends. À cet effet, le règlement d'un conflit avec un fournisseur se fait selon les mêmes procédures indépendamment de la nature de relation avec le fournisseur et ce qu'il soit un partenaire ou non :

<< La notion du partenariat, j'ai beaucoup de difficulté avec ça. Je peux faire la collaboration. Tu peux faciliter l'exécution du contrat à l'entrepreneur sans être préjudiciable au deuxième plus bas soumissionnaire. Car le deuxième plus bas soumissionnaire a vu des choses que le plus bas n'a pas vues. Si tu favorises le plus bas tu peux léser les autres qui n'ont pas eu le contrat. Tu dis à l'entrepreneur tu as soumissionné pour faire le projet et tant pis si tu ne l'as pas vu. On est dans un système le plus soumissionnaire conforme. Les règles sont établies et il faut que tu les respectes. Si non, tu pénalises les autres. » (Acteur D-01)

D'après lui, le partenariat véritable s'établit en dehors des appels d'offres publics où on peut choisir librement les fournisseurs et les contrats seront négociés à l'amiable de gré à gré. Ainsi, les sociétés privées ont plus de marge de manoeuvre pour opérer sans craindre la pression de l'opinion publique quant à l'apparence de conflit d'intérêt ou la justification de transactions ou des gestes administratives : << Avec les Indiens de la Baie James, on ne fonctionne pas avec la plus basse soumission conforme. C'est une négociation de gré à gré. Dans un tel cas, tu peux être partenaire. J'en fais des contrats négociés avec les Indiens » (Acteur D-01)

Il croit qu'une clause de médiation introduite dans un contrat va diminuer la possibilité de régler les réclamations en chantier entre les personnes directement concernées. Une telle situation va faire en sorte que tous les conflits seront peltés dans le court du médiateur et les administrateurs des contrats ne seront pas incités à résoudre leurs problèmes sur le terrain : << Si on inclut une clause de médiation, ma crainte est que les gents se déresponsabilisent. Au lieu de chercher à régler les dossiers ils vont aller chercher des gens pour les régler à leur place. » et il ajoute :

<< S'il y a vraiment des dossiers qui requièrent un médiateur il faut aller le chercher. Il faut que tu fasses l'effort pour régler ton dossier toi-même avant. Une des réclamations que j'ai négociées ça pris deux ans mais ça fini pour être réglée. On n'a pas eu de conciliateur. Mettre une clause dans nos contrats je ne vois pas la nécessité. On les règle nos dossiers. » (Acteur D-01)

2.2 Acteur D-02

L'acteur D-02 est un avocat de formation avec une pratique de 10 ans comme avocat de litige à Hydro-Québec. Il a consacré 27 ans de sa carrière à Hydro-Québec et un an dans le secteur privé. Il occupe présentement une position du premier niveau et agit comme cadre dans le domaine de l'approvisionnement des biens et services d'Hydro-Québec. Il s'agit

d'un acteur important et influent qui siège au comité de gestion de l'entreprise. Ses opinions sont susceptibles de contribuer à donner un peu d'éclairage sur les questions posées par ce projet de recherche.

2.2.1 La perception du partenariat

Pour cet acteur, la notion du partenariat à Hydro-Québec peut couvrir une interprétation multiple à un tel point que tous les fournisseurs peuvent se considérer partenaires. Donc le sens du terme partenariat est tributaire à la situation de chaque fournisseur et du domaine où il est pratiqué : « La notion de partenariat a été très galvaudée, ça peut prendre différents formes, à la limite tous les fournisseurs d'Hydro-Québec peuvent se dire on est partenaires d'Hydro-Québec, [...] ça dépend de la personne qui le dit, ça peut être des choses très différentes... » (Acteur D-02)

Une relation guidée par des objectifs communs partagés

Il s'avère clair chez l'acteur D-02, que tout partenariat doit être fondé sur des désirs communs partagés par Hydro-Québec et son fournisseur. Les deux parties ont intérêt à réussir la réalisation d'un projet surtout lorsqu'on fait appel à des nouvelles technologies qui peuvent servir à développer d'autre marchés et réaliser des retombés économiques au Québec. Selon cette personne, la politique d'Hydro-Québec en matière d'acquisition est guidée par quatre orientations principales : la sécurité d'approvisionnement, la qualité du matériel acheté, l'efficacité par laquelle on acquiert le bien et les retombées économiques au Québec : « Telle relation permet de développer des objectifs communs comme réduction des coûts, efficacité ou permettre des développements technologiques et la rentabilité. » (Acteur D-02)

Il considère que le partenariat permet aussi la participation de chacun des partenaires à la définition et à la planification des objectifs communs afin de d'établir une orientation claire qui répond aux besoins de chacune des parties et de s'assurer d'une réalisation efficace des objectifs fixés : « Je m'assoie avec eux deux ou trois fois par année. J'ai un comité d'orientation à très haut niveau avec des vice-présidents du fournisseur fabricant où on détermine les objectifs. » (Acteur D-02)

Selon ce gestionnaire, dans une relation de partenariat entre Hydro-Québec et un fabricant fournisseur d'équipements stratégiques, les objectifs communs s'articulent souvent autour d'un développement technique afin de se maintenir à la fine pointe de la technologie, d'augmenter la performance d'un produit et de diminuer les coûts d'installation : << C'est quoi nos objectifs? Par exemple cette année, l'objectif est de faire du développement technologique pour ce produit pour arriver à réduire les coûts de construction. On a déjà fait des économies appréciables en développant des produits plus performants. » (Acteur D-02).

Ainsi, la relation partenariale entre le client et le fournisseur est un incitatif pour que les partenaires travaillent en fonction des besoins communs et acceptent d'investir dans la recherche et développement car ils sont assuré des relations d'affaires stables basées sur les compétences mutuelles : << Ça c'est un vrai partenariat parce que j'ai investi du temps avec cette entreprise pour définir ensemble nos besoins et eux acceptent d'investir parce qu'ils savent que nous sommes en partenariat. » (Acteur D-02)

Relation gagnant-gagnant

Selon l'acteur D-02, dans le domaine de la fabrication et de fourniture d'équipements la
relation du partenariat est perçue comme une relation gagnant-gagnant dans la mesure Hydro-Québec investis avec son partenaire d'affaires pour développer des produits

performant. Ce qui assure à la société d'État une sécurité d'approvisionnement et une disponibilité d'expertise et en même temps le fournisseur est assuré d'un marché lucratif stable en plus le nouveau produit développé le met dans une meilleure position pour pénétrer des nouveaux marchés avec le produit développé : << Si on prend en exemple les câbles souterrains, PPP, on a développé avec lui un nouveau câble plus performant et en plus l'usine est à Québec. Ce qui donne des retombées économiques importantes. » (Acteur D-02)

Ainsi, en raison du développement technologique, le partenariat est considéré comme une relation gagnant-gagnant car elle produit des retombés économiques pour les deux parties telles que la réduction des coûts pour Hydro-Québec et le développement des nouveaux marchés pour le fabricant fournisseur : << On va vraiment cheminer dans ce marché-là afin

de réduire les coûts et de développer un nouveau marché. C'est du développement technologique qu'on a fait avec PPP. On va être un partenaire parce qu'il y a du développement et de recherche à faire. » (Acteur D-02)

Relation dynamique

La relation du partenariat est perçue par l'acteur D-02 comme une démarche dialogique on doit toujours se questionner sur les besoins et regarder l'avenir avec une vision critique afin de suivre et anticiper le développement technologique. Il s'agit des enjeux importants pour une entreprise comme Hydro-Québec qui fournit un produit à fort teneur technologique : << Discuter avec lui c'est quoi le besoin dans le futur d'HQ./SEBJ des équipements, ça évolue avec la technologie. » (Acteur D-02)

Malgré que la relation commerciale peut être améliorée avec le partenariat, il n'en demeure pas moins que le partenariat, selon cet interviewé, présente encore des défis et des difficultés à surmonter pour une entreprise publique comme Hydro-Québec. La difficulté réside dans le balisage commercial (Benchmarking) afin de s'assurer que ce que propose le partenaire est toujours compétitif par rapport au marché :

<< La difficulté avec le partenariat est l'enjeu du prix. Comment je peux m'assurer que le prix du partenaire est concurrentiel par rapport au marché? Tu n'as pas allé sur le marché pour le valider. La difficulté comme entreprise publique avec un partenaire pas la première année mais plutôt plus loin comment peux-tu t'assurer que son prix est toujours concurrentiel? Même si tu es satisfait de la qualité. La relation commerciale peut être améliorée avec le partenariat. » (Acteur D-02)

Relation durable

L'acteur D-02 souligne qu'à Hydro-Québec, dans le domaine d'acquisition d'équipements spécialisés provenant des fabricants particuliers, des relations durables sont développées avec ces fournisseurs des biens stratégiques surtout lorsqu'il y a de la recherche et du développement. Les nouvelles technologies sont indispensables pour maintenir la société d'État à la fine pointe de la technologie et pour la permettre d'affronter les défis technologiques particuliers à son réseau électrique : << Développer des relations durables avec ses fournisseurs [...] C'est un peu la notion de partenariat qu'on a développé avec nos fournisseurs des biens stratégiques. » (Acteur D-02)

Ainsi, selon lui, les relations durables incitent les fabricants d'investir dans la recherche et développement afin de trouver des produits performants qui répondent aux besoins de la société d'État et qui permettent aux fournisseurs de pénétrer des nouveaux marchés et de conserver leurs positions concurrentielles dans un domaine de plus en plus compétitif :

<< Par exemple, on a déjà établi avec un fournisseur de câbles souterrains, mondialement connu, un partenariat à long terme pour développer un nouveau produit qui répond à nos besoins spécifiques. On se dit, toutes les éléments sont là pour faire un partenariat. C'est du développement technologique qu'on a fait avec ce fournisseur. Pour eux, ça vaut la peine d'investir dans une RDD quand ils sachent qu'ils ont une relation durable avec nous. » (Acteur D-02)

Ainsi, sans une relation d'affaires à long terme garantissant un marché certain, le fournisseur ne sera pas enclin d'investir et de développer un nouveau produit et HydroQuébec sera forcé à se contenter des produits moins performants disponibles sur le marché au lieu des biens fabriqués sur mesure selon ses propres besoins : << Si je n'avais pas avec eux un partenariat à long terme, ils ne seront pas intéressés d'investir dans la recherche et le développement. Ca vaut la peine quand ils savent qu'ils ont une relation durable avec nous. » (Acteur D-02) Il ajoute : << Pourquoi ils ont accepté de faire dans le fond du développement et d'investir? Parce qu'on était dans une relation partenariale. » (Acteur D02)

Toutefois, selon l'acteur D-02, pour s'approvisionner en matériel et équipements qui ne requièrent pas de la recherche et du développement technologique, Hydro-Québec procède via des ententes à long terme qui ne sont pas considérées comme du partenariat proprement dit. Ces ententes sont faites suite à des appels d'offres sur invitation où des fournisseurs préqualifiés sont invités en raison de leurs compétences, de leur fiabilité et de la qualité de leurs produits sollicités :

<< On a le mode des ententes cadres où j'ai beaucoup des petits fournisseurs où j'ai une entente à long terme avec eux. Sur une base d'appel de proposition avec une entente de trois 4 ou 5 ans. Il y en a qui peuvent penser que ça c'est du partenariat. Moi j'appel ça une entente à long terme. » (Acteur D-02)

Relation créatrice de la valeur

L'interviewé D-02 fait la distinction entre les contrats de construction avec l'entrepreneur,
les contrats de fabrication d'équipements stratégiques où il y a du développement

technologique et les contrats de service professionnel avec les consultants en ingénierie. Ils soulignent qu'il est plus approprié de travailler en partenariat lorsqu'il s'agit de l'ingénierie ou de la fabrication d'équipements qui impliquent de la recherche et du développement : « Où il y a du développent technologique, on a intérêt à être en mode partenariat » (Acteur D-02)

De la sorte, l'expertise d'Hydro-Québec conjuguée avec l'expérience du fournisseur contribue de réaliser du développement technologique qui crée de la valeur en permettant de produire des équipements plus performants et conformes aux exigences du réseau électrique qui sont en perpétuelle évolution : « Avec ce fabricant, on va être un partenaire parce qu'il y a du développement et de recherche à faire. » (Acteur D-02)

Relation basée sur la transparence

Selon cet interviewé, si le fournisseur n'est pas en relation de partenariat avec HydroQuébec, il n'est pas enclin à manifester une transparence lors d'une négociation : « Ils savent aussi qu'ils sont en partenariat avec nous pour longtemps. Pour un contrat de 1 an ou 2, les fournisseurs ne veulent pas ouvrir leurs livres. Ils ne seront pas aussi transparents. » (Acteur D-02)

Relation basée sur le partage équitable des risques et des bénéfices

Les risques d'affaire, selon ce gestionnaire du premier niveau, peuvent être dus à une augmentation des coûts causée par des contraintes extérieures telles que les coûts des matières premières qui rentrent dans la réalisation d'un produit en fabrication ou dans un ouvrage en construction :

« Quand il y a eu des grosses augmentations des coûts de la matière première acier, cuivre et aluminium, ces dernière années, nous avons accepté de s'assoir avec nos fouisseurs pour essayer de voir qu'est ce qu'on peut faire. Dans certain cas on s'est assis avec nos fournisseurs et on a dit oui on accepte certain augmentation des coûts imprévus. » (Acteur D-02)

Relation basée sur le respect mutuel

Le respect est perçu par cet acteur comme le modèle japonais lorsqu'il s'agit d'une relation client-fournisseur. L'écoute aux demandes du client et le respect dégager par les fournisseurs du Japon envers leur client a laissé sa marque chez un cet acteur clef qui a eu l'occasion de transiger à plusieurs reprises avec ces fournisseurs asiatiques. En effet c'est cette culture de samouraï qui fait parti des meurs qui est recherchée en terme du respect dans une relation partenariale : << Les Japonais sont très sensibles à la notion de partenariat. Pour eux c'est une question d'image et du respect. » (Acteur D-02)

2.2.2 La perception du mode de règlement des différends

2.2.2.1 Les modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

Pour l'acteur D-02, les modes usuels de règlement des différends, qui sont mis souvent de l'avant pour régler les conflits commerciaux avec les fournisseurs, sont similaires que ce soit dans le domaine des contrats de construction ou dans le domaine des ententes de partenariat avec les fabricants fournisseurs d'équipements stratégiques. À cet effet, il existe une clause normalisée de procédures en cas de différends insérée dans les clauses générales de chaque contrat d'approvisionnement où le recourt à la médiation n'est pas spécifié d'une façon formelle : << Les clauses générales ne préconisent pas une médiation automatique ou l'arbitrage. » (Acteur-D-02)

Il est en faveur de régler les litiges commerciaux au fur et à mesure par des négociations directes entre les administrateurs des contrats et les représentants des fournisseurs : << Selon moi, je trouve qu'on a intérêt à régler au fur et à mesure. » (Acteur D-02) Cette volonté de régler promptement les conflits existe aussi pour les chantiers de construction afin de ne pas laisser les dossiers s'accumuler : << Il y a une volonté, en mode chantier, de régler les cas au fur et à mesure, pas trop pelleter en avant les problèmes pour se retrouver avec des gros affaires finalement. » (Acteur D-02)

Démarche quasi-judiciaire

Toutefois, selon l'interviewé, dans la plupart des cas, on a fini par s'entendre et par trouver une solution sans qu'il soit nécessaire de se rendre devant les tribunaux. Selon les procédures, s'il n'y a pas d'entente après avoir fait appel au Directeur, usuellement le dossier sera transmis au contentieux afin de se préparer de le débattre devant les tribunaux de droit commun. Mais, selon lui, la poursuite d'un dossier en justice est très rare car ils préfèrent trouver une solution avant d'en arriver à s'adresser à la cour pour des raisons de confidentialité et pour n'a pas établir une jurisprudence défavorable pour Hydro-Québec :

<< On ne préfère pas aller devant le tribunal pour des raisons de confidentialité. [...] Moi, je dis toujours : le plus mauvais règlement vaut mieux qu'un bon jugement; d'après mon expérience, après avoir fait des litiges pendant plus de 10 ans. C'est vrai pour beaucoup des cas mais pas pour des cas de principe. >> (Acteur D-02)

Les forces des modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec.

Selon l'acteur D-02, les forces du mode usuel réside dans la liberté de choisir le mode qui convient le mieux à une situation donnée, au lieu de se trouver dans l'obligation de passer par un quelconque mode pour régler leurs conflits commerciaux avec leurs fournisseurs :

<< Les forces du mode usuel actuel permettent d'adapter le mode de résolution des problèmes aux dossiers. Des fois quand on pense qu'il faut aller en arbitrage pour des raisons de confidentialité on va avoir la liberté d'y aller. Et on ne préfère pas aller devant le tribunal pour des raisons de confidentialité on est prêt à vivre avec la décision de l'arbitre. Il y a des dossiers où on juge qu'il est avantageux d'aller en médiation. Pour d'autre dossier on dit l'écart est très grand on veut aller devant les tribunaux pour des questions de principes. >> (Acteur D-02)

Un comité interne de l'entreprise s'est déjà penché sur la question à savoir s'il faut changer le processus de règlement habituel par un nouveau qui inclut la médiation commerciale. Après mure réflexion, les décideurs ont préféré préserver le statu quo qui a déjà fait ses preuves et a été jugé adéquat pour répondre aux besoins de la société d'État :

<< C'est la recommandation qu'on avait faite à l'époque. Ils ont dit non. Nous en aimerait garder le statu quo. D'y aller avec une approche où on se réserve la possibilité de le faire au moment opportun selon la nature du dossier. >> (Acteur D-02)

Rapport de forces favorable

Selon l'acteur D-02, il existe un rapport des forces favorable à la société d'État qui peut servir comme force dissuasive pour inciter les belligérants à se rapprocher et trouver une solution au lieu de se lancer dans un processus périlleux et coûteux :

« Comme on est une entreprise publique dans certain cas on doit se tenir debout et faire établir des principes. On a les moyens de le faire. Oui pour la médiation pour l'entreprise privé. Mais pour l'entreprise publique qui a les moyens de se tenir debout et au point de vu financier elle est capable de supporter une position de principe. Moi, je pense dans certain cas la médiation ce n'est pas la solution. » (Acteur D-02)

Cet avantage par rapport au fournisseur peut servir à supporter une position de principe ou faire face à un fournisseur de mauvaise foi lors des négociations. À cet effet, HydroQuébec dispose des ressources financières et humaines importantes en mesure de supporter les coûts et le délai d'une poursuite devant les tribunaux où peu des fournisseurs peuvent le faire.

Validation des clauses contractuelles

Les forces des modes usuelles de règlements, selon ce gestionnaire, réside dans la possibilité de tester certaines décisions devant les tribunaux afin d'établir une jurisprudence sur une question de principe. Lesquelles jurisprudences sont considérées comme une source précieuse de droit pour faire évoluer les clauses contractuelles :

« Il y a des dossiers où on préfère aller en cour où l'opinion juridique est tellement tranchée pour établir à la limite de la jurisprudence. Dans certain cas on va aller devant les tribunaux pour trancher. On est convaincu que nous ne sommes pas responsables et le fournisseur dit oui. Il faut trancher oui ou non. C'est un point de principe pour l'entreprise. » (Acteur D-02)

Les faiblesses des modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec.

Malgré certaines satisfactions du processus usuel, il en demeure pas moins que ce gestionnaire est d'avis que la façon de faire actuelle en matière de règlement des différends est longue, surtout lorsque la valeur de la réclamation provenant d'un fournisseur est importante : « Je trouve que le processus actuel est quand même un peu long. Il y a des réclamations où c'est long avant que cela se règle. » (Acteur D-02)

L'interviewé mentionne aussi que le mode judiciaire est coûteux en frais de contentieux et d'experts engagés pour préparer et défendre les dossiers en litige devant les tribunaux de droit commun :

« Quand tu sais qu'il s'agit d'un enjeu essentiellement monétaire et tu sais que cela coûte cher pour aller devant les tribunaux et trainer des litiges pendant des années de temps. Moi, je dis toujours le plus mauvais règlement vaut mieux qu'un bon jugement d'après mon expérience après avoir fait des litiges pendant plus de 10 ans. C'est vrai pour beaucoup des cas. » (Acteur D-02)

Selon lui, dans certains cas, surtout pour une petite et moyenne entreprise, l'accumulation des réclamations non réglées peut affecter la capacité financière du fournisseur à poursuivre les travaux ce qui peut provoquer une rupture dans la relation d'affaires : << Si les réclamations s'accumulent, dépendamment de la capacité financière du fournisseur cela peut lui mettre en difficulté. » (Acteur D-02)

Il explique que lors de l'exécution des travaux en chantier, l'échéancier des travaux est très important car le projet s'inscrit souvent à l'intérieur d'un grand projet ou un programme stratégique d'une importance capitale pour Hydro-Québec. Ce qui fait que les priorités et les efforts des gestionnaires en chantier sont consacrés pour réaliser les travaux selon les dates clefs prévues dans le programme global du projet. Ainsi, on demande souvent à l'entrepreneur d'exécuter les travaux avant même d'avoir une entente sur les incidences de ces travaux sur les activités contractuelles de l'entrepreneur. Pour cette raison, on arrive à la fin du chantier avec un cumul de changements non réglés où il faut redoubler d'efforts pour trouver les informations manquantes afin de compléter les dossiers et négocier les règlements. Une telle situation, est une source importante des conflits dont la négociation d'un règlement devient plus ardue et plus difficile : << Dans la plupart des cas, on veut que le chantier avance et on dit "on réglera cela après..." Tu as un cumul de changements et le dossier grossit [...] Je pense que c'est ça la difficulté. » (Acteur D-02)

2.2.2.2 Les modes alternatifs de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

L'acteur D-02 confirme que les clauses contractuelles ne stipulent pas un recours à la
médiation ou à l'arbitrage en cas de conflit avec les fournisseurs. Ce qui donne le libre

choix à Hydro-Québec d'avoir recours au mode qu'elle juge opportun selon la situation. En plus, la société d'État fait un recourt occasionnel et exceptionnel, aux modes alternatifs pour résoudre les conflits commerciaux avec ses fournisseurs : << Les clauses générales ne préconisent pas une médiation automatique ou l'arbitrage. >>. Il ajoute << On préfère se garder la possibilité d'y avoir recours ou non >> (Acteur D-02)

L'acteur D-02 n'a laissé dégager aucune opinion relative aux attentes par rapport au processus des modes alternatifs. Il insiste pour que le médiateur soit neutre, à égale distance par rapport aux parties en conflit. Il ajoute que le rôle du médiateur doit être conciliateur qui consiste à écouter et comprendre les positions des parties pour ensuite tenter de trouver un terrain d'entente satisfaisant pour les belligérants en conflit :

<< Pour moi le médiateur il est neutre au départ, donc au niveau de perception, il doit aller avec les faits. Il doit être à l'écoute des parties. Il n'est pas biaisé au départ. Des fois, nous regardons la chose selon notre vision à nous. Nous avons la difficulté de se mettre à la place de l'autre. Le rôle du médiateur, le juge même affaire, c'est de comprendre la position de chacune des parties puis d'être capable à partir de cela de réconcilier la position des parties. [...] Être capable d'écouter les parties et identifier les points où il peut avoir de rapprochement entre les parties. Parce que, des fois, les relations sont devenues très difficiles et les belligérants ont de la difficulté de voir les points où ils peuvent se rapprocher. C'est le médiateur de voir dans quelle mesure il sera capable d'identifier les points que les parties n'ont pas vus. Il y a peut être des zones de rapprochement qui vont permettre de régler le dossier. >> (Acteur D-02)

Cette personne est d'avis que le médiateur possède certaines compétences techniques compatibles avec la nature du conflit. Ces compétences, selon lui, sont très utiles pour le médiateur qui veut intervenir dans des dossiers complexes à forte teneur technique afin qu'il puisse saisir adéquatement le conflit :

<< Dans certains dossiers techniques, je crois que le médiateur doit avoir une certaine notion, par exemple dans un gros contrat de construction. Le médiateur, il faut qu'il soit adapté dans sa propre expertise au marché dans lequel il va faire une médiation et doit être capable de comprendre c'est quoi le problème. >> (Acteur D-02)

Il semble qu'il existe, chez ce gestionnaire, une volonté que le médiateur intervienne et use de sa position, qui est en retrait par rapport au conflit, pour proposer des pistes de solution au conflit : << Il peut dire au donneur d'ouvrage, je comprends votre position mais avezvous regardé telle ou telle chose dont vous devriez tenir compte? >> (Acteur D-02)

Les forces (les satisfactions) du mode alternatif de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec.

L'acteur D-02 considère qu'une des forces du processus de la médiation est le fait qu'il est non contraignant. Par conséquent, il devient intéressant d'y avoir recours dans certain cas :

<< Avec la médiation, on n'est pas lié. Si tu n'es pas d'accord avec le médiateur parce qu'il n'a pas compris le problématique, tu n'es pas lié. Cela peut être aidant, compte tenu des particularités des dossiers ou des enjeux, ou des projets ou de l'envergure de certaine réclamations avec certain entrepreneur. » (Acteur D-02)

De plus, il considère que le processus de la médiation, même s'il ne réussit pas à trouver une solution au conflit, permet toutefois d'avoir une réflexion et de voir le conflit sous un autre angle. Ce qui permet parfois aux belligérants de reconsidérer leurs positions :

<< S'il n'y a pas de possibilité de rapprochement, du côté de l'entrepreneur c'est de faire valoir ses droit pour vis-à-vis les tribunaux et de notre côté, c'est peut être suite à la médiation de reconsidérer le dossier et la démarche qu'on devra faire pour trouver un règlement. » (Acteur D-02)

Les faiblesses (les déceptions) du mode alternatif de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec.

Pas d'opinion de cet acteur concernant les faiblesses du mode alternatif.

2.2.3 La perception de la relation entre le partenariat et le mode de règlement des différends

Pour l'interviewé D-02, il n'y a pas une << plus value » évidente pour Hydro-Québec d'inclure dans les contrats avec les fournisseurs, une clause de règlement des différends incorporant le processus de la médiation. Inclure une telle clause dans les contrats devient contraignant pour la société d'État qui préfère garder sa liberté d'action et l'utiliser cas par cas.

<< Il y a eu déjà des hauts gestionnaires, à Hydro-Québec, qui ont évoqué d'inclure une clause de médiation dans nos contrats. Donc, il y a beaucoup d'ouverture de la part de la haute direction pour la médiation. Mais on ne veut pas être pris avec une clause obligatoire dans nos contrats. On va s'en servir comme outil potentiel comme une façon de résoudre la problématique qui peut être intéressante on ne va pas être obligé à la regarder dans toutes les causes. » Acteur D-02)

Selon l'acteur de la première ligne D-02, la question à savoir s'il faut inclure une clause de médiation dans les contrats d'Hydro-Québec a déjà été débattue par un comité de la haute direction il y a quelques années. Après une mure réflexion, la réponse était non en raison, que dans la plupart des cas, l'écart qui sépare la demande de l'entrepreneur et l'offre de la société d'État est très important. Il y a une crainte que le médiateur coupe la poire en deux. Dans ce cas, Hydro-Québec se trouve dans l'obligation d'accepter un règlement défavorisé :

<< Est-ce que oui ou non on devra inclure une clause de médiation dans nos contrats ? À l'époque la position d'équipement, il n'en voulait pas. Parce qu'ils estimaient que dans les réclamations, avec les entrepreneurs, les écarts sont souvent très importants. Car des réclamations sont faites pour 40 millions $ qui valent selon nous 4 millions $ : dix fois moins à titre exemple. L'écart entre la réclamation et le bien fondé est énorme. Dans ce cas, on ne veut pas se lancer dans un processus de médiation, qui va finir par couter cher. [...] Pour d'autres dossiers on dit l'écart est très grand on veut aller devant les tribunaux pour des questions de principes. Une fois on est allé en médiation et je me suis dit par après on n'aurait pas dû aller en médiation. Par définition, la médiation il faut que tu acceptes de mettre un peu d'eau dans ton vin et l'autre aussi, afin d'arriver à une solution mitoyenne. Il faut que tu sois prêt à concéder. » (Acteur D-02)

Toutefois, selon le gestionnaire, l'entreprise est tout à fait ouverte pour l'utilisation de la médiation lorsqu'elle juge que l'enjeu du conflit est discutable. Lorsque le bien fondé n'est pas évident ou l'écart n'est pas très éloigné Hydro-Québec accepte de participer à un processus de médiation sur une base volontaire selon le cas :

<< Quand on jugera qu'il faut aller en médiation on y ira. Ils en font de temps en temps. On a fait de la médiation dans le passé dans les gros litiges où on a préféré de ne pas aller en cours avec cela. [...] Oui, la médiation est un outil intéressant mais pas pour tous les cas. On a pris la décision à l'époque de ne pas l'introduire systématique dans la clause générale. » (Acteur D-02)

L'acteur D-02 explique qu'il préfère avoir la liberté d'aller en médiation ou non. Car il y a des cas où il n'est pas avantageux d'aller en médiation surtout lorsqu'il s'agit d'une affaire de principe où on est sûr d'avoir gain de cause. Selon lui, il faut adapter le processus de règlement au conflit et non l'inverse :

<< Il faut adapter le mode de résolution des problèmes aux dossiers. Des fois quand on pense qu'il faut aller en arbitrage pour des raisons de confidentialité on va avoir la liberté d'y aller. On ne préfère pas aller devant le tribunal pour des raisons de confidentialité on est prêt à vivre avec la décision. Il y a des dossiers où on juge qu'il est avantageux d'aller en médiation. [...] Quand tu vas en médiation

tu es obligé de faire la concession. On a fini par régler ce dossier en médiation. Mais, moi, je n'étais pas à l'aise. C'est une question de principe. Moi j'aurai aimé mieux aller en cour que concéder. [...] En médiation il faut aller avec un dossier ou tu pense qu'il y a quelque chose à concéder ou ce n'est pas une question de principe pour toi. » (Acteur D-02)

L'acteur D-02 est d'avis que la décision de la société d'État relative au refus d'introduire une clause de médiation dans ses contrats avec les fournisseurs, qui date depuis quelques années peut être reconsidérée et voir une possibilité de le faire à titre expérimental dans quelques contrats. Ensuite on pourra évaluer la pertinence de poursuivre ou de revenir à la position du départ. Ainsi on peut apprécier le plus valu qui sera apporté par une telle clause à la gestion des différends issus des contrats d'Hydro-Québec avec ses fournisseurs :

<< Ca ne veut pas dire que cette position qui date il y trois ans ne peut pas évoluer dans le futur. [...] Cela étant dit, on s'est déjà posé la question pourquoi on le test pas ? On pourra peut être la tester dans un marché au lieu (at large). Puis, voir qu'est ce que ça donne? Puis, faire un poste mortem dans trois, quatre ou cinq ans. Là, on pourra dire on l'a testée. C'est la recommandation qu'on avait faite à l'époque. [...] Moi j'aurai aimé la tester, pour avoir vu quelques articles la dessus et quelque expériences ailleurs dans d'autres entreprise. [...] Pourrons-nous l'essayer pour un secteur? Justement pour faire une idée qu'est-ce que ça représente? Pour justement faire un business case et pour dire c'est rentable ou pas rentable. Pour cela J'ai de la difficulté à se positionner. L'essayer pour pouvoir quantifier les inconvénients et les avantages, rentable ou pas. J'ai un penchant favorable pour l'essayer. » (Acteur D-02)

Selon l'opinion de l'acteur D-02, une clause de médiation incluse dans les contrats risque de se trouver très souvent en médiation. Ainsi, il y aura moins de réclamations qui seront réglées pour négociation entre les administrateurs directement concernés sur le terrain en chantier. Selon lui, l'inclusion d'une telle clause dans les contrats va augmenter les coûts et peut même entraver le règlement hors cour des différends :

<< C'est la faisabilité d'être toujours en médiation. On a des grosses réclamations où très peu d'entreprises au Québec se trouvent dans une telle situation, on a des gros contrats qui amènent potentiellement des grosses réclamations. On a des conditions de réalisation qui sont particulières. Ce ne sont pas des conditions usuelle ni des réclamations usuelles. On a des réclamations dont l'envergure et la complexité sont importantes. Si on était en médiation dans toutes nos réclamations, on as-tu la capacité de supporter les coûts de tout ça? Comment cela coûterait par rapport à notre façon de faire habituelle? Je pense qu'il faudrait faire cette analyse en profondeur car ça n'a jamais été fait. » (Acteur D-02)

Selon ce gestionnaire, d'autre acteurs résistent même à essayer d'introduire une clause de médiation à titre expérimental. Car ils sont convaincus que l'introduction d'une telle clause nuira à la bonne gestion des différends à Hydro-Québec où il y aura une forte augmentation des réclamations qui vont se trouver en processus de médiation. HydroQuébec perdra l'élément dissuasif qui presse les administrateurs directement impliqués dans le conflit à trouver un règlement :

« Ils ont dit non, nous, on aimerait garder le statu quo. D'y aller avec une approche où on se réserve la possibilité de le faire au moment opportun selon la nature du dossier. C'est un peu l'historique à Hydro-Québec concernant la médiation. On le saurait jamais si c'était la meilleure solution ou pas. On n'a pas fait le test. Pour cela, moi, je ne sais pas. Comme on ne l'a pas testé, je ne peux pas dire si c'est une bonne chose. » (Acteur D-02)

2.3 Acteur D-03

L'acteur D-03 est un avocat de formation, il fait partie de l'équipe du service juridique d'Hydro-Québec. Il a déjà été mandaté pour régler des litiges dans des dossiers provenant des activités de construction des projets de l'entreprise. Il est à l'emploi d'Hydro-Québec depuis plus de 8 ans; il a passé 13 ans dans le secteur privé auparavant. Ses opinions sont importantes car le service juridique agit comme conseiller du premier choix pour les gestionnaires qui ont à traiter des conflits avec les fournisseurs.

2.3.1 La perception du partenariat

Selon l'acteur D-03, il arrive des fois où on s'interroge si le mode de réalisation d'un certain projet est considéré comme du partenariat ou comme une simple relation d'affaire entre deux acteurs économiques oeuvrant dans un marché particulier : « Je ne sais pas si on peut qualifier ce projet du partenariat. » (Acteur D-03)

Il explique que de plus en plus pour réaliser des projets spécialisés on laisse les appels d'offres publics pour des appels de propositions où on invite un nombre très restreins de fournisseurs spécialisés en mesure de réaliser des projets particuliers dans des conditions propres à Hydro-Québec. Il s'agit souvent des travaux dans des installations en services avec tous les impératifs de la présence des courants électriques de haute tension : « Je ne sais pas si on peut qualifier ça de partenariat. Contractuellement ce sont des appels de

propositions. » (Acteur D-03) Aussi, selon lui, d'autres risques peuvent être associés aux développements technologiques qui parfois n'aboutissent pas aux résultats attendus malgré les efforts investis : << Tu me parles de partenariat dans le contexte de recherche et de développement. C'est sûr il y a toujours des risques de part et d'autre, dépendamment des conditions du marché. » (Acteur D-03)

2.3.2 La perception du mode de règlement des différends

2.3.2.1 Les modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

L'acteur D-03 confirme que le mode usuel de règlement des différends est décrit dans les clauses générales de l'appel d'offres. Ce mode ne fait pas mention d'une clause de médiation ou d'arbitrage : << Donc il n'y a pas des clauses d'arbitrage obligatoire comme on peut rencontrer ailleurs à l'occasion. Pas des clauses de médiation obligatoire. Il y a une clause des procédures en cas de différends qui prévoit un processus d'appel au supérieur hiérarchique. » (Acteur D-03)

Toutefois, l'acteur D-03 mentionne que si l'entrepreneur n'arrive pas à s'entendre avec l'administrateur désigné du contrat, la procédure inscrite dans le contrat lui permet de s'adresser à un niveau hiérarchique plus haut avec un dossier complet justifiant sa demande dans le but de trouver une entente et changer la décision de l'administrateur. Ainsi, le supérieur hiérarchique reçoit le dossier de l'entrepreneur comme un appel de la décision de son employé et tente de trouver un règlement, mais toujours en se basant sur la normativité juridique du contrat : << Il y a une clause de procédures en cas de différends qui prévoit un processus d'appel au supérieur hiérarchique. » (Acteur D-03)

Selon sa conception, les négociations avec l'entrepreneur et l'analyse du dossier de réclamation présenté par l'entrepreneur sont faites en équité et avec transparence en s'appuyant sur des critères objectifs où le dossier doit être bien fondé en droit. Les clauses contractuelles, les lois et règlements demeurent la source de toute justification pour la prise de décision. À cet effet, un avis préalable du contentieux de la société d'État est nécessaire pour conclure toute entente concernant le règlement d'une réclamation par un gestionnaire. Le fardeau de la justification incombe à l'entrepreneur où il doit présenter sa demande de

compensation avec une bonne argumentation détaillée et basée sur le contrat qui lie les parties :

<< C'est sûr il y a toute une phase de présentation et d'analyse de la réclamation. Il arrive des situations où on dit à l'entrepreneur, qu'il faut qu'il refasse ses devoirs parce que la réclamation telle que présentée n'est pas justifiée. Elle n'inclut pas les pièces justificatives. [...] Quand il s'agit d'un dossier qu'on peut qualifier de réclamation selon le pouvoir des décisions. L'affaire juridique est consultés à ce niveau là on va intervenir. » (Acteur D-03)

Toutefois, il est d'avis que dans la plupart des cas, on fini par s'entendre et par trouver une solution sans qu'il soit nécessaire de se rendre devant les tribunaux. Selon les procédures, s'il n'y a pas d'entente après avoir fait appel au Directeur, usuellement le dossier sera transmis au contentieux afin de se préparer de le débattre devant les tribunaux de droit commun. Mais l'interviewé s'entend pour dire que la poursuite d'un dossier en justice est très rare car il préfère trouver une solution avant d'en arriver à se faire dicter une décision par un juge : << À défaut d'entente, on va aux tribunaux de juridiction de droit commun. » (Acteur D-03)

Les forces des modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

Selon l'acteur D-03, il existe un rapport des forces favorable à la société d'État qui peut servir comme force dissuasive pour inciter les belligérants à se rapprocher et trouver une solution au lieu de se lancer dans un processus périlleux et coûteux. À cet effet, HydroQuébec dispose des ressources financières et humaines importantes en mesure de supporter les coûts et le délai d'une poursuite devant les tribunaux où peu des fournisseurs peuvent le faire :

<< Puisque les tribunaux ont juridiction, la force dans le fond est une force dissuasive. Parce que les tribunaux sont coûteux et imposent des délais importants de telle sorte que souvent les parties vont tenter de se rapprocher pour éviter de s'en aller dans ce processus là (judiciaire) dont l'issue est incertaine. Car la décision du tribunal des premières instances, par exemple à la cour supérieure, tu as un droit d'appel. Ce qui peut prolonger encore d'avantage. Alors, c'est d'une certaine manière dissuasive. » (Acteur D-03)

Le discours de l'acteur D-03 laisse entendre que la gestion des deniers publiques impose un
rendre compte au corps social. Ce qui n'est pas le cas dans la gestion des affaires privées.

Il paraît plus facile de faire de compromis lorsqu'on gère des intérêts privés que des fonds publics. Ce qui laisse entendre que la gestion des compromis dans les négociations des affaires de la société d'État est très fastidieuse en raison des justifications qui doivent supporter chaque décision ou chaque entente conclue pour un règlement : << Dans la vaste majorité des cas, je vois dans la négociation des compromis. Je remarque une recrudescence des dossiers qui se judiciarisent. Pourquoi ? » (Acteur D-03)

Les faiblesses des modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec.

Une des faiblesses du mode usuel est le problème d'accès à la justice qui se pose en raison de délais long et des coûts de plus en plus importants pour supporter un procès : << Parce que les tribunaux sont coûteux et imposent des délais importants, [...], la décision du tribunal des premières instances, par exemple à la cour supérieure, tu as un droit d'appel. Ce qui peut prolonger encore d'avantage. » (Acteur D-02)

Malgré la satisfaction du mode usuel, il en demeure pas moins que l'acteur D-03 est d'avis que la façon de faire actuelle en matière de règlement des différends est longue, surtout lorsque la valeur de la réclamation provenant d'un fournisseur est importante : << L'autre faiblesse est le recours aux tribunaux qui est long. » (Acteur D-03) L'interviewé souligne que le mode judiciaire est coûteux en frais de contentieux et d'experts engagés pour préparer et défendre les dossiers en litige devant les tribunaux de droit commun : << Ce ne sont pas des mécanismes qui favorisent le rapprochement. C'est l'antithèse de la médiation et de la négociation. » (Acteur D-03)

2.3.1.2 Les modes alternatifs de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec.

Sur la question << Est-ce que vous avez-vous-même expérimenté les méthodes alternatives de règlement des différends? », l'interviewé D-03 répond par l'affirmative en prenant bien garde de faire la distinction entre la médiation et l'arbitrage qui est plus contraignant qu'un tribunal car il n'y pas un droit d'appel sur le fond de la décision arbitrale rendue : << Oui. Je vous dirais en quelques occasions la médiation. Ma première remarque il faut être extrêmes précis, on parle de la médiation et non de l'arbitrage. » (Acteur D-03)

L'acteur D-03 affiche sa préférence pour le mode judicaire au détriment du mode arbitrage. Il est très réticent à choisir l'arbitrage pour régler les différends avec les fournisseurs. Cette position est motivée par le fait qu'une décision d'arbitre est exécutoire, elle lie les parties et elle est sans appel. Tandis devant une décision de la cour, on a toute la liberté de la porter en appel si on le juge nécessaire. Il ajoute que la bonne foi et les bonnes attitudes de communication doivent être la pierre angulaire du processus de la médiation : << Moi je crois que la médiation basée sur les prémisses que j'ai expliqué tantôt, bonne foi, ouverture discussion, ca ne peut pas nuire. » (Acteur D-03)

Toutefois, cet intervenant voit un processus où il y a des procureurs, pour chacune des parties, qui les conseillent et qui peuvent influencer le déroulement du processus et son issue. Il s'attend à ce que le processus prévoie une façon de pallier les problèmes qui peuvent être créés par les procureurs qui désirent prolonger inutilement le débat et entraver la possibilité de conclure une entente :

<< Il faut éviter qu'il soit un exercice bidon. Les chances de succès sont aussi tributaires d'objectivité et d'honnêteté intellectuelle des avocats qui représentent les intérêts des parties, ils ont parfois des comportements plus antagonistes conflictuelles, ce qui a pour effet de prolonger le mandat et les honoraires qui en découlent. » (Acteur D-03)

Il s'attend à ce que le processus garantisse que toute discussion et information ne soient pas acceptées ou interprétées comme admission par l'une des parties advenant une poursuite devant les tribunaux. À cet effet, selon lui, le processus doit prévoir un protocole clair qu'il soit signé par les parties garantissant la confidentialité de tout ce qui est dit, entendu ou dévoilé durant le processus de la médiation :

<< Il y a certains fournisseurs entrepreneurs ou donneurs d'ouvrages qui vont être retissant par rapport à la médiation par rapport à une certaine concession documents échangés paroles dites, argument soulevé, soient les interpréter comme des admissions. Des faiblesses qui peuvent être invoquées contre la partie advenant qu'il n'y a pas d'entente, devant la cour de la justice. Or, dans tous les cas de médiation, les parties ont tout avantage à compléter un protocole de médiation. Qui entre autre prévoit que le processus est entouré ou englobé d'un privilège de confidentialité. Que toute les paroles dites, proposition de règlement, documents, concession pièces et documents déposés, le sont sans admission et ne pourrons en aucune façon invoqué ou relégués advenant qu'il n'y a pas d'entente. Ainsi, cette crainte là devra être dissipée. Ça, c'est la médiation réelle. » (Acteur D-03)

L'acteur D-03 accorde une importance à la crédibilité du médiateur par les deux parties en conflit. Ce que, selon lui, doit être un critère important à considérer lors de la sélection du médiateur : << Il faut prendre certaines précautions, compétences, connaissances techniques, connaissance juridiques, crédibilité, reconnus par toutes les parties, dans le choix du médiateur. » (Acteur D-03) Il est également d'avis que le médiateur doit posséder certaines compétences techniques compatibles avec la nature du conflit. Ces compétences, selon lui, sont très utiles pour le médiateur qui veut intervenir dans des dossiers complexes à forte teneur technique afin qu'il puisse saisir adéquatement le conflit :

<< Je vous dirais que la personnalité du médiateur et ses connaissances des enjeux techniques sont des facteurs extrêmement importants pour augmenter les chances de succès de la démarche. D'une part le médiateur doit être techniquement capable de comprendre l'enjeu technique et d'autre part les forces du médiateur résident dans sa capacité de rapprocher les parties en expliquant les forces et les faiblesses de chacune des deux parties. [...] Si je simplifie cela, je dirais au fond le médiateur qui est compétant techniquement, qui maitrise l'art de convaincre et qui a un bon jugement devrait être aussi bon et aussi compétant que le décideur lui-même qui est le juge. [...] La faiblesse est ce que le décideur, en l'occurrence le juge, n'a pas d'expérience particulière en construction. Donc sur le plan technique, tu ne peux plus qu'autrement manquer d'expérience dans le domaine. Ce qui donnent une plus grande importance aux experts d'un coté et de l'autre. » (Acteur D-03)

La médiation est perçue par l'interviewé D-03 comme faisant partie d'un continuum et elle est l'étape avant de s'adresser à la cour. De sorte qu'il voit un rôle important du médiateur dans l'évaluation du risque advenant que le dossier d'une réclamation soit entendu par un juge. Il souhaite que le médiateur soit en mesure de donner une appréciation juste des résultats probables suite à une éventuelle poursuite en cour de justice. Selon lui, il doit pouvoir intervenir et convaincre les parties de la meilleure solution selon les circonstances :

<< Il devrait pouvoir convaincre les parties du résultat probable du litige. S'il réussit à convaincre les parties du résultat probable du litige, pourquoi les parties iraient pour se le faire dire par le tribunal, trois ans plus tard, après avoir investi des sommes importantes. En d'autres termes, un bon médiateur est aussi bon si non meilleur qu'un juge. Il devrait pouvoir faire entendre la raison aux deux parties. Par exemple une cause n'est jamais gagnée d'avance mais il y a une part de gestion et d'évaluation du risque. » (Acteur D-03)

Comme le fait remarquer cet intervenant, le médiateur doit être en mesure de faire face aux
procureurs qui représentent les parties en conflit, qui parfois ont d'autre agenda ou d'autres
intérêts non compatibles avec la recherche d'une solution. Il doit bien gérer la présence de

ces avocats afin qu'ils contribuent au rapprochement des parties au lieu d'entraver le processus qui est différents d'un débat en cour :

<< Le rôle de représentants de chacune des parties est de capital. L'objectivité de l'avocat qui conseil le client est également un ingrédient important au succès. Parce que le médiateur, même s'il est objectif compétent et impartial soit-il, lorsqu'il fait son exposé il peut être convaincant mais derrière les portes clauses l'avocat de l'un des parties donne une évaluation toute autre à son client pour des motifs variables. Cela peut mettre en péril le processus. Moi je suis un ardant penseur de l'approche qui consiste à dire tout simplement, que le juge de la cour supérieur n'est pas mieux placé pour analyser un dossier que le médiateur. Si le médiateur passe bien le message il devrait avoir une entente négociée et rien ne peut me convaincre du contraire. » (Acteur D-03)

Les forces (les satisfactions) du mode alternatif de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

L'acteur D-03 est d'avis que le processus de médiation, même s'il ne réussit pas à trouver une solution au conflit, il permet, toutefois, d'avoir une réflexion et de voir le conflit sous un autre angle. Ce qui permet parfois de reconsidérer sa position.

<< S'il n'y a pas de possibilité de rapprochement, du côté de l'entrepreneur c'est de faire valoir ses droit pour vis-à-vis les tribunaux et de notre côté, c'est peut être suite à la médiation de reconsidérer le dossier et la démarche qu'on devra faire pour trouver un règlement. » (Acteur D-03)

Les faiblesses (les déceptions) du mode alternatif de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

Pas d'opinion en ce qui a trait aux faiblesses du mode de règlement des différends.

2.3.3 La perception de la relation entre le partenariat et le mode de règlement des différends

L'acteur D-03 est en faveur de la médiation comme mode de règlement des différends à condition qu'il ne soit pas obligatoire. Dans ce cas, il ne voit pas la nécessité de l'introduire par une clause dans les contrats d'Hydro-Québec avec ses fournisseurs :

<< Je pense que oui, toute la question à savoir est-ce une clause de médiation où toutes les parties sont obligées d'y adhérer. Ou est-ce que cela demeure un mécanisme de médiation au libre choix? Dans le fond, une clause de médiation au libre choix, on n'a pas besoin de l'écrire car les parties elles peuvent toujours se

parler. Si tu peux mettre une clause et ce n'est pas l'opinion majoritaire, mon impression moi, est ce que les parties s'obligent de passer par la médiation ou se donner cette possibilité d'une façon libre. Je ne peux pas dire que je suis totalement favorable à une clause de médiation qui oblige les parties. » (Acteur D03)

L'ensemble du discours de l'Acteur D-03 dégage une crainte que l'introduction d'une clause de médiation dans les contrats va rendre obligatoire le passage par la médiation à chaque fois qu'il se présente un conflit entre la société d'État et son fournisseur. Selon lui, une telle décision risque de créer une lourdeur administrative dans le règlement de la plupart des dossiers en litiges : « Parce que cela pourra imposer sur l'ensemble des dossiers une lourdeur administrative. Je ne peux pas recommander la médiation obligatoire dans tous les dossiers. » (Acteur D-03)

Toutefois, il croit qu'une clause incluant la médiation dans certain contrats spécifique pourra être utile, surtout lorsqu'on s'attend à un nombre important des réclamations qui pourraient survenir en raison de la nature d'un projet :

« Peut-être que certains marchés peuvent être ciblés pour les inclure dans certains dossiers obligatoires. Peut-être qu'on pourra statiquement identifier le type de contrats où elle sera obligatoire, où il y a un taux de réclamation plus important. Avec des enjeux techniquement plus complexes (excavation des travaux civils, des travaux majeurs, des travaux de production), peut-être dans ces contrats-là, on pourra inclure une clause de médiation.» (Acteur D-03)

L'acteur D-03 est confiant et affirme que la société d'État traite ses fournisseurs avec équité et transparence. Il affirme que les procédures mises en place sont adéquates pour actualiser les valeurs énoncées par l'entreprise et particulièrement les valeurs mises de l'avant avec ses relation avec les fournisseurs des biens et services :

« Ce que je peux vous dire, d'une manière assez générale, à ma connaissance quand Hydro-Québec doit de l'argent, elle le paye. Puis elle le paye plus tôt que tard. Ça c'est la prémisse. Évidement, ça ne nous met pas à l'abri des situations où un administrateur de contrat peut être en relation difficile avec un entrepreneur. Puis... soit plus dur, à tort ou à raison. L'erreur est humaine. Donc d'une manière générale et globale, je pense qu'Hydro-Québec n'a jamais eu comme attitude ou approche d'alimenter les débats, de prolonger les débats, ni d'avoir un entrepreneur ou un fournisseur à l'usure. Je n'ai pas vu ça, du moins très rare. » (Acteur D-03)

2.4 Acteur D-04

L'acteur D-04 est un cadre de première ligne et siège au comité de gestion de la Direction. Il a passé plus de 13 ans à Hydro-Québec dans la gestion des projets majeurs de construction. Avant de rejoindre la société d'État, il a oeuvré 12 ans avec des entrepreneurs du secteur privé. Ses opinions sont appréciées pour ce projet de recherche en raison de sa position et de son expérience dans le secteur public comme donneur d'ouvrage et dans le secteur privé comme fournisseur d'Hydro-Québec.

2.4.1 La perception du partenariat

Selon l'acteur D-04, dans le domaine de la construction des grands travaux, les objectifs communs partagés entre le donneur d'ouvrage et l'entrepreneur sont perçus à un certain égard comme une relation commerciale normale plutôt qu'une relation de partenariat : << Avec les entrepreneurs, je considère que ce sont des relations commerciales dans lesquelles on devrait éviter de parler de partenariat; on devra plutôt parler d'objectifs communs. » (Acteur D-04) Ce qui amène cet interviewé à adopter une position prudente quant à la définition même du partenariat que l'entreprise souhaite mettre de l'avant dans ses politiques d'acquisition : << Je pense qu'il faut faire attention avec la définition du partenariat, j'entends beaucoup parler du partenariat par les années qui courent. » (Acteur D-04)

Il ajoute qu'étant donné que, dans un appel d'offres public, le donneur d'ouvrage ne participe pas à la prise de décision du fournisseur, la relation du partenariat cède la place à une relation commerciale où les intérêts des parties ne sont pas toujours convergents. << Lorsqu'on entre dans une relation d'affaires avec un entrepreneur dans le cadre d'un appel d'offres public, c'est difficile de parler de partenariat. On est dans une relation commerciale, on n'est pas dans une relation de partenariat. » (Acteur D-04) À cet effet, selon lui, dans le domaine des contrats de construction, il est important de bien définir les objectifs communs entre l'entrepreneur et Hydro-Québec afin d'orienter et d'harmoniser les actions et les décisions au cours des travaux : << On devra mettre sur la table des objectifs communs du projet. » (Acteur D-04)

Ces objectifs communs peuvent être le respect des dates clefs d'un échéancier ou la qualité de l'ouvrage construit. Il est à remarquer que cet acteur n'a pas mentionné les coûts, ce qui démontre que dans la réalisation de ses projets, Hydro-Québec attache plus d'importance à la qualité et à l'échéancier d'un projet en raison du manque à gagner important en cas du non qualité ou du retard dans la mise en service de l'ouvrage qui s'intègre dans un réseau complexe et interdépendant : << Ces objectifs-là, on les partage d'une façon commune entre l'entrepreneur et le donneur d'ouvrage, que se soit au niveau de l'échéancier, que ce soit au niveau de la qualité. » (Acteur D-04)

Selon la conception de ce décideur oeuvrant dans le domaine de la construction des grands projets, le vrai partenariat réside surtout dans la relation horizontale entre deux acteurs économiques ou sociaux plutôt que dans la relation verticale client-fournisseur :

<< À mon avis, par exemple, le partenariat que l'on vit, c'est le projet EASTMAIN A-1 avec la signature de la Paix des braves. La relation de partenariat qui se met en place avec les CRIS, la façon que ça déroule présentement, c'est réellement un partenariat. Parce que HQ/SEBJ ont décidé avec les CRIS d'un commun accord de réaliser le projet EASTMAIN. Il y avait des intérêts d'un coté comme de l'autre, pas nécessairement sur la même base. Alors, je pense, le plus bel exemple du partenariat selon moi, c'est le projet EASTMAIN A-1 avec les autochtones.» (Acteur D-04)

Ainsi, les ententes avec les communautés qui ne sont pas sous forme des contrats de fourniture et qui ne sont pas considérées comme une relation client fournisseur, sont perçu comme une vraie relation de partenariat motivée par des objectifs communs partagés qui sont dans le cas du projet EASTMAIN A-1, le développement d'un projet hydroélectrique d'envergure. Associer les communautés locales comme promoteur d'un projet de développement économique, est un virage qu'Hydro-Québec a pris pour atténuer les critiques négatives, faire face à l'opposition non constructive à ses projets et pour mieux concilier ses objectifs avec ceux des communautés locales directement touchées par le projet.

De même, cet acteur influant dans le domaine de réalisation des grands ouvrages hydroélectriques perçoit le partenariat avec un gain mutuel entre le donneur d'ouvrage et l'entrepreneur : << Pour qu'un partenariat se tienne, il faut qu'il y ait des gains d'un côté comme d'un autre des partenaires. » (Acteur D-04).

Toutefois, cet interviewé persiste et rappelle que les projets de construction ne requièrent pas de la recherche et du développement de la part de l'entrepreneur et par conséquent il ne considère pas qu'un entrepreneur en construction des grands travaux puisse contribuer à la création de la valeur : « Avec les fabricants, peut-être on s'est rapproché un peu du partenariat. Mais avec nos entrepreneurs, je ne sens pas que nous sommes là. » (Acteur D04) Cette opportunité peut se traduire par le raffinement du design en fonction des conditions du chantier .

Ce gestionnaire considère que la relation avec l'entrepreneur en construction ne peut pas être une vraie relation de partenariat car il n'y a pas de partage des bénéfices entre le donneur d'ouvrage et le fournisseur : « L'entrepreneur est là pour faire du profit et dans sa tête il n'est pas question de partager ces profits avec le donneur d'ouvrage. Donc il n'y a pas de partenariat là car il n'y a pas de partage. » (Acteur D-04)

2.4.2 La perception du mode de règlement des différends

2.4.2.1 Les modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec.

L'acteur D-04 confirme qu'en premier lieu, il encourage et souhaite que les gestionnaires des contrats règlent les conflits sur le terrain entre les premiers intervenants soient entre le représentant d'Hydro-Québec désigné comme administrateur du contrat et le représentant de l'entrepreneur :

« Les méthodes usuelles utilisées le plus, c'est... Moi je pars du principe : le moment où il y a un différend, il doit se régler entre les responsables au chantier. S'il y un différend entre un entrepreneur et la SEBJ, il doit se régler entre les premiers intervenants, donc l'administrateur du contrat. » (Acteur D-04)

L'acteur D-04 confirme qu'il existe un mode de règlement des différends dans les contrats de la société d'État avec les fournisseurs. Il mentionne que si l'entrepreneur n'arrive pas à s'entendre avec l'administrateur désigné du contrat, la procédure inscrite dans le contrat lui permet de s'adresser à un niveau hiérarchique plus haut avec un dossier complet justifiant sa demande dans le but de trouver une entente et changer la décision de l'administrateur. Ainsi, le supérieur hiérarchique reçoit le dossier de l'entrepreneur comme un appel de la

décision de son employé et tente de trouver un règlement, mais toujours en se basant sur la normativité juridique du contrat :

<< Si le différend ne se règle pas à ce niveau-là, c'est à ce moment ce qu'on met en place un processus d'appel à une instance hiérarchique supérieure, qui fait en sorte que cette instance a la possibilité de faire une analyse du dossier, de voir de part et d'autre s'il y a des éléments qui n'ont pas été considérés. À ce moment-là, on peut décider soit réviser une décision, soit commander des analyses additionnelles du dossier. » (Acteur D-04)

Selon lui, une fois la demande de compensation est rendue au niveau du directeur, elle sera considérée comme une réclamation et elle sera traitée selon une procédure interne non inscrite au contrat. Cette procédure consiste à faire entendre la demande de l'entrepreneur par un comité de réclamation formé par des personnes, d'Hydro-Québec, qui sont en dehors du contexte du chantier. Ce comité, formé des cadres de la société d'État, agit comme un tribunal interne pour entendre les réclamations présentées par les fournisseurs :

<< Si suite à l'analyse de la demande de compensation, il n'y a pas entente entre les parties, à ce moment là, il y a une petite équipe qui relève de l'administrateur de projet et qui est détachée du chantier. Elle va refaire l'analyse de la demande de compensation. Elle va, en collaboration avec le chantier, se rassoir avec l'entrepreneur et renégocier ou tenter de renégocier une entente. » (Acteur D-04)

Selon la conception de ce décideur, les négociations avec l'entrepreneur et l'analyse du dossier de réclamation présenté par l'entrepreneur sont faites en équité et avec transparence en s'appuyant sur des critères objectifs où le dossier doit être bien fondé en droit. Les clauses contractuelles, les lois et règlements demeurent la source de toute justification pour la prise de décision. À cet effet, un avis préalable du contentieux de la société d'État est nécessaire pour conclure toute entente concernant le règlement d'une réclamation par un gestionnaire. Le fardeau de la justification incombe à l'entrepreneur où il doit présenter sa demande de compensation avec une bonne argumentation détaillée et basée sur le contrat qui lie les parties :

<< C'est toujours à l'entrepreneur, quand il présente son dossier, de faire la démonstration premièrement qu'elle est bien fondée. Je pense que le premier élément que tout entrepreneur doit faire est de fonder son dossier c'est de démontrer le bien fondé de sa demande par rapport à son contrat. [...] À ce moment-là, l'entrepreneur doit démontrer que le différend ou le préjudice a créé un coût additionnel ou qu'il y a eu un impact sur la réalisation de son contrat. Donc il doit nous faire la démonstration du préjudice et nous présenter son analyse d'impact. » (Acteur D-04)

Toutefois, il mentionne que dans la plupart des cas, on fini par s'entendre et par trouver une solution sans qu'il soit nécessaire de se rendre devant les tribunaux. Selon les procédures, s'il n'y a pas d'entente après avoir fait appel au Directeur, usuellement le dossier sera transmis au contentieux afin de se préparer de le débattre devant les tribunaux. Mais l'interviewé D-o4 s'entend pour dire que la poursuite d'un dossier en justice est très rare et exceptionnel car il préfère il favorise une solution négociée : << On ne devrait que très rarement avoir à se rendre devant les tribunaux. » (Acteur D-04)

Les forces des modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec.

L'acteur D-04 accorde une importance capitale à la transparence en raison du caractère publique de la société d'État. Ses commentaires recueillies laissent ressortir que le mode usuel de règlement des différends assure une transparence et une équité dans les relations d'affaire entre Hydro-Québec et son fournisseur. Des telles valeurs sont inscrites dans les politiques de la société d'État et elles sont impératives à la gestion des affaires publiques :

<< A cause de la transparence vis-à-vis des contribuables, on a des obligations de transparence, on a des obligations de démontrer que l'on ne favorise pas l'entrepreneur par rapport à un autre ou un fournisseur par rapport à un autre. À cause de ces obligations là, on doit se donner des processus qui sont plus contraignants en termes de gestion des différends. » (Acteur D-04)

Les faiblesses des modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec.

L'acteur D-04 ne voit pas une faiblesse dans le mode usuel et le problème réside surtout dans la recrudescence des cas de conflit en raison des conditions difficiles d'un marché très concurrentiel : << Du mode de règlement, moi en ce qui me concerne, je ne suis pas sûr qu'il y a de faiblesse en tant que du mode de règlement. Je dirai qu'on vit des années où on vie des relations commerciales qui sont difficiles en raison des contraintes du marché. » (Acteur D-04)

2.4.2.2 Les modes alternatifs de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

L'acteur D-04 mentionne que le recours à la médiation est occasionnel et il s'inscrit dans un continuum après l'échec d'une négociation bipartite :

« S'il n'y a pas des résultats à la négociation et pas d'entente. À ce moment là, on peut d'un côté comme de l'autre regarder s'il y a possibilité de faire intervenir un médiateur. Ce n'est pas quelque chose qu'on utilise fréquemment. Je dirai dans les dernière années il y a peut-être eu quelques cas de médiation dans les contrats HQ/SEBJ. Par contre on tend de plus en plus, si les parties s'entendent, à faire intervenir un médiateur. [...] A date, il s'en est vécu trois, et on va en avoir un quatrième prochainement... » (Acteur D-04)

L'acteur D-04 exprime également une nette préférence pour le mode judicaire par rapport au mode arbitrage. Il est très réticent à choisir l'arbitrage pour régler les différends avec les fournisseurs. Cette position est motivée par le fait qu'une décision d'arbitre est exécutoire, elle lie les parties et elle est sans appel. Tandis devant une décision de la cour, on a toute la liberté de la porter en appel si on le juge nécessaire :

« À date on n'a pas considéré l'arbitrage comme moyen de règlement de différends ou de litige principalement pour trois grandes raisons. Premièrement l'arbitrage est couteux, deuxièmement c'est long, puis troisièmement l'arbitrage est décisionnel et sans appel. Alors tu es mieux d'aller dans le processus du tribunal. De toute façon, il est aussi couteux et plus long. Et à ce moment-là, vis-à-vis un tribunal, c'est le contrat qui prime et non l'interprétation d'un arbitre. » (Acteur D-04)

Ce gestionnaire de la première ligne s'attend à ce que le médiateur aplanisse les difficultés et éclaircisse certaines éléments du conflit afin d'assurer un rapprochement entre les parties. Souvent, le médiateur est appelé à intervenir dans des conflits dont les causes dépassent parfois les critères objectifs, tel que les clauses contractuelles ou les lois et règlements en vigueur :

« Moi je pense que la plus grande attente, vis-à-vis un médiateur, serait de trouver l'élément qui permet aux parties de reconsidérer le positionnement surtout si le positionnement n'est pas appuyé sur des faits ou des éléments contractuelles. Le médiateur doit travailler dans les zones grises, quand c'est blanc c'est blanc, quand c'est noir c'est noir, mais quand il y a du gris, le médiateur doit trouver les moyens de rapprocher les parties dans les zones grises. » (Acteur D-04)

Selon le discours entendu de l'acteur D-04, le médiateur doit être crédible, impartial et compétant pour bien gérer le processus et pour gagner la confiance des parties en conflit. Il s'agit des éléments fondamentaux qu'on doit trouver chez les médiateurs : « ... que les médiateurs soient des gens qui sont sérieux, compétents, qui n'ont surtout pas de partie pris. » (Acteur D-04)

Il s'attend à ce que le médiateur soit neutre et regarde le dossier avec un recul et avec une vision qui vient de l'extérieur du contexte sans voir des idées préconçues au départ. Il doit être en mesure d'écouter attentivement les parties en conflit et tenter de voir s'il y des ouvertures de rapprochement entre les positions des antagonistes :

« L'avantage d'un médiateur est le fait que l'individu est complètement à l'extérieur du contexte cherche de se positionner par rapport à l'événement du litige, d'écouter les parties et de voir s'il est possible au partie de se rapprocher. Si c'est possible, il fait en sorte que les parties se rapprochent. Par contre s'il n'y a aucune possibilité que les parties se rapprochent, à ce moment là, chacun retourne de son côté et évalue l'étape suivant. » (Acteur D-04)

Les forces (les satisfactions) du mode alternatif de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

Pas d'opinion de l'acteur D-04 concernant les forces du mode alternatif de règlement des différends.

Les faiblesses (les déceptions) du mode alternatif de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

Pas d'opinion.

2.4.3 La perception de la relation entre le partenariat et le mode de règlement des différends

Le discours de l'acteur D-04 laisse entendre que le partenariat véritable s'établisse en dehors des appels d'offres publics où on peut choisir librement les fournisseurs et les contrats seront négociés à l'amiable de gré à gré. Ainsi, les sociétés privées ont plus de marge de manoeuvre pour opérer sans craindre la pression de l'opinion publique quant à

l'apparence de conflit d'intérêt ou la justification de transactions ou des gestes administratives :

« J'ai une expérience du privé j'ai travaillé avec des clients directement et choisi par le client. Dans le domaine du privé quand tu travailles avec un entrepreneur, c'est très rare que tu vas te trouver dans une situation de réclamation devant les tribunaux. Parce que de toute façon si tu te retrouves là, tu ne peux plus travailler pour ce donneur d'ouvrage-là, parce que le monde du privé ça ne pardonne pas. Si tu fais affaires avec les tribunaux, eux vont faire affaires avec d'autres fournisseurs. » (Acteur D-04)

Selon l'acteur D-04, la relation d'Hydro-Québec avec les fournisseurs est plus contraignante que celle du secteur privé en raison du caractère public de la société d'État. Cette situation exige plus de rigueur et de transparence afin de dissiper toute apparence de conflit d'intérêt ou de favoriser un fournisseur par rapport un autre. Ainsi Hydro-Québec doit toujours rendre compte au corps social de ses décisions d'affaires :

« Dans le domaine du public et du parapublic, comme nos règles d'approvisionnement stipulent que tu vas aller en appel d'offres public, même si tu as un mauvais fournisseur, il a toujours la possibilité de soumissionner et tu as toujours l'obligation de faire affaires avec lui. Donc, comme donneur d'ouvrage, on se trouve toujours dans une situation où on fait toujours affaires avec le plus bas soumissionnaire. Tandis que si on est dans le privé, on n'a pas l'obligation de faire affaires avec lui du tout. C'est plus contraignant dans le domaine du public et parapublic de faire du partenariat en affaires. C'est beaucoup plus demandant que dans le domaine du privé. A cause de la transparence vis-à-vis des contribuables, on a des obligations de transparence, on a des obligations de démontrer que l'on ne favorise pas l'entrepreneur par rapport à un autre ou un fournisseur par rapport à un autre. Ces obligations-là on doit se donner des processus qui sont plus contraignants en termes d'équité et de transparence. » (Acteur D-04)

Il croit qu'une clause de médiation introduite dans un contrat va diminuer la possibilité de régler les réclamations en chantier entre les personnes directement concernées. Une telle situation va faire en sorte que tous les conflits seront peltés dans le court du médiateur et les administrateurs des contrats ne seront pas incités à résoudre leurs problèmes sur le terrain. Par conséquent, il n'est pas en faveur d'insérer une clause de médiation dans les contrats, il préfère garder le libre choix :

« Nous actuellement, la SEBJ/EQUIPEMENT, ce qu'on préconise, c'est on est loin d'être contre la médiation mais on ne croit pas qu'en mettant une clause dans les contrats, on va avoir plus d'ouverture à la médiation qu'actuellement. Parce lorsqu'on juge nécessaire d'utiliser la médiation on l'offre et on la met sur la table et on la fait. » (Acteur D-04)

Toutefois, ce décideur de la première ligne est d'avis que la décision de la société d'État relative au refus d'introduire une clause de médiation dans ses contrats avec les fournisseurs, qui date depuis quelques années, peut être reconsidérée et voir une possibilité de le faire à titre expérimental dans quelques contrats. Ensuite on pourra évaluer la pertinence de poursuivre ou de revenir à la position du départ. Ainsi on peut apprécier le plus valu qui sera apporté par une telle clause à la gestion des différends issus des contrats d'Hydro-Québec avec ses fournisseurs :

<< Je pense avant de mettre des clauses il faut commencer par l'expérimenter la médiation, puis si effectivement cela donne des résultats à 80 % peut être qu'on pourra mettre une clause. Mais moi je pense qu'avec la bonne volonté de toute façon pour que la médiation marche cela prend la bonne volonté. Ça fait que déjà en partant si tu n'as pas de bonne volonté, la médiation ne va pas plus loin. » (Acteur D-04)

L'ensemble du discours de l'acteur D-04 dégage une crainte pour l'introduction d'une clause de médiation dans les contrats car il croit que cela va rendre obligatoire le passage par la médiation à chaque fois qu'il se présente un conflit entre la société d'État et son fournisseur. Selon lui, une telle décision risque de créer une lourdeur administrative dans le règlement de la plupart des dossiers en litiges :

<< A un moment donné là-dessus, pas nécessairement parce que de toute façon, je dirai que le plus grand problème que l'on a, les contrats sont toujours trop épais. [...] Je pense qu'à partir du moment où il y a une volonté de régler un différend, si la médiation est un moyen, les deux parties vont adhérer à la médiation. S'il y a une clause qui oblige la médiation, ça peut aider mais ça peut d'un autre côté créer des abus, un petit différend peut se ramasser devant un médiateur, alors que ca sera pas nécessaire. » (Acteur D-04)

2.5 Acteur D-05

L'acteur D-05 est comptable de formation. C'est un cadre de première ligne et il joue un rôle important dans le contrôle de gestion de l'administration générale et de l'approvisionnement. Il encadre les négociations des contrats et des règlements des différends. Il a passé 22 ans à Hydro-Québec et 10 ans dans le secteur privé. Ses opinions contribuent au développement des réponses aux questions posées par cette recherche.

2.5.1 La perception du partenariat

L'acteur D-05 considère que le terme partenariat couvre un espace très important dans les relations commerciales. Cependant, à Hydro-Québec, le fonctionnement en mode de partenariat avec les fournisseurs est très limité pour des multiples raisons : << La question est très large lorsqu'on dit partenariat réussi, quand on parle de partenariat, j'ai de la difficulté à amener ça à l'interne de notre entreprise. C'est sûr qu'avec certains fournisseurs ou certains entrepreneurs, on est plus en mode de partenariat. » (Acteur D-05) Il considère que l'acquisition des biens et services par appel d'offres public risque d'entraver un vrai partenariat entre l'acheteur des biens et services, et le fournisseur. D'après ce décideur, il n'est pas certain qu'on pratique à Hydro-Québec un vrai partenariat avec les fournisseurs à l'exception des ententes de fabrication avec des fournisseurs des équipements stratégiques : << Des vrais partenariats... est-ce qu'on a des partenariats à HQ ? Je ne suis pas sûr. Pas sûr du tout. ». Il ajoute : « Avec les fabricants peut-être on s'est rapproché un peu du partenariat. Mais avec nos entrepreneurs, je ne sens pas que nous sommes là. » (Acteur D-05)

Il fait la distinction entre les contrats de construction avec l'entrepreneur et les contrats de fabrication d'équipements stratégiques où il y a du développement technologique et les contrats de service professionnel avec les consultants en ingénierie. Il souligne qu'il est plus approprié de travailler en partenariat lorsqu'il s'agit de l'ingénierie ou de la fabrication des équipements qui implique de la recherche et du développement. L'expertise d'Hydro-Québec conjuguée avec l'expérience du fournisseur contribue de réaliser du développement technologique qui crée de la valeur en permettant de produire des équipements plus performants et conforme aux exigences du réseau électrique qui sont en perpétuelle évolution :

<< C'est sûr qu'il y a certains fournisseurs ou certains entrepreneurs où on est plus en relation de partenariat. Je veux penser aux turbiniers qui fabriquent nos turbines, là je vois un certain partenariat. C'est un appel d'offres restreint. Là, on s'assoit avec le fournisseur et on essaye de s'entendre sur un design et sur un prix et on réalise des travaux. » (Acteur D-05)

2.5.2 La perception du mode de règlement des différends

2.5.2.1 Les modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec.

L'analyse du discours de l'acteur D-05 laisse entendre que lorsque l'entrepreneur rencontre des conditions qu'il considère imprévisibles et qu'il juge avoir subi des préjudices, en premier lieu, il présente un dossier de demande de compensation à l'administrateur du contrat désigné par la société d'État dans l'avis d'attribution. Ce dernier étudie le dossier et tente de négocier avec le représentant de l'entrepreneur un règlement. Il s'agit le plus souvent d'une négociation bipartite que le représentant d'Hydro-Québec doit conduire avec équité et transparence, en se basant sur les clauses contractuelles, les lois et les règlements en vigueurs. À cet effet, des directives sont données aux administrateurs des contrats pour être réceptifs aux demandes de l'entrepreneur et pour analyser la demande selon des critères objectifs bien fondés en droit : « Si on a eu de plus sur nos ouvrages quelque part et on a une valeur ajoutée sur nos ouvrages on lui doit. Alors, c'est le principe de base. Tu nous as fait des travaux ça fait améliorer nos actifs, on te doit quelque chose. » (Acteur D05)

Si l'entrepreneur n'arrive pas à s'entendre avec l'administrateur désigné du contrat, la procédure inscrite dans le contrat lui permet de s'adresser à un niveau hiérarchique plus haut avec un dossier complet justifiant sa demande dans le but de trouver une entente et changer la décision de l'administrateur. Ainsi, le supérieur hiérarchique reçoit le dossier de l'entrepreneur comme un appel de la décision de son employé et tente de trouver un règlement, mais toujours en se basant sur la normativité juridique du contrat : « S'il n'est pas satisfait de cela, il peut faire appel au directeur, il va chercher un niveau hiérarchique plus élevé que celui de l'administrateur de son contrat. » (Acteur D-05)

Selon la conception de ce gestionnaire, les négociations avec l'entrepreneur et l'analyse du dossier de réclamation présenté par l'entrepreneur sont faites en équité et avec transparence en s'appuyant sur des critères objectifs où le dossier doit être bien fondé en droit. Les clauses contractuelles, les lois et règlements demeurent la source de toute justification pour la prise de décision : « Il y a toujours le Code civil qui lui permet dans les trois ans qui suivent la date de l'événement de pouvoir nous poursuivre. [...] À mesure où l'entrepreneur

soulève une problématique, la première chose qu'on regarde : est-ce que c'est prévu au contrat? » (Acteur D-05) À cet effet, un avis préalable du contentieux de la société d'État est nécessaire pour conclure toute entente concernant le règlement d'une réclamation par un gestionnaire. Le fardeau de la justification incombe à l'entrepreneur où il doit présenter sa demande de compensation avec une bonne argumentation détaillée et basée sur le contrat qui lie les parties.

Les forces des modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

L'acteur D-05 croie que les modes, tel que pratiqués, sont satisfaisants car ils ont démontré leur efficacité dans les règlements de plusieurs demandes des fournisseurs au niveau de chantier avant que ces demandes se retrouvent devant le comité du Directeur sous forme des réclamations. Pour appuyer cette satisfaction, le gestionnaire invoque le règlement de tous les changements qui surviennent pendant l'exécution d'un contrat. Il mentionne que les réclamations qui sont difficiles à régler représentent environ 5 % du montant du contrat et la durée moyenne pour régler une réclamation est d'environ deux ans :

« Mais j'ai des réclamations là-dedans qui datent en moyenne de 24 à 18 mois. Alors quand je regarde cela, toute proportion gardée, je me dis les réclamations dans le coût final d'un projet vont représenter entre 4 % à 5 % du projet. Mais ce n'est pas si pire que cela. [...] Actuellement avec notre mode de fonctionnement, quand on a des changements contractuels à faire, on finit par les régler à 95 %. On finit par les régler dans des délais qui paraissent acceptables de part et d'autre. Il en reste un petit bout et ça, c'est le mode de fonctionnement actuel qui nous a amené là» (Acteur D-05)

Selon lui, la gestion des deniers publics impose un compte rendu au corps social. Ce qui n'est pas le cas dans la gestion des affaires privées. Il paraît qu'il est plus facile de faire de compromis lorsqu'on gère des intérêts privés que des fonds publics. Ce qui laisse entendre que la gestion des compromis dans les négociations des affaires de la société d'État est très fastidieuse en raison des justifications qui doivent supporter chaque décision ou chaque entente conclue pour un règlement :

« Chez nous, il faut toujours être capable d'expliquer à un moment donné à l'externe, pourquoi est-ce qu'on l'a réglé à 70 % de ce qu'il nous réclamait. [...] Dans le privé, j'ai déjà connu et travaillé dans une entreprise qui avait une liste restreinte d'entrepreneurs. Quand c'est le temps de régler un litige à un moment donné, on fait le break down de tout cela. On s'entend sur un montant forfaitaire X. Selon mon jugement, je pense que c'est correct, aussi selon le jugement de

l'entrepreneur, on pense tous les deux que c'est correct. Tandis qu'Hydro-Québec est une société d'État, la règle de transparence est de rigueur, je ne peux pas dire qu'on a réglé à soixante dix pourcent, je dois être capable de dire 70% est composé de ça, ça, ça. » (Acteur D-05)

Selon ce gestionnaire de première ligne, le statut d'Hydro-Québec comme société d'État exige un traitement équitable, avec rigueur et transparence, de toute demande provenant d'un fournisseur et toute négociation pour trouver une solution à un différend doit être guidée par ces valeurs fondamentales de la gestion de la chose publique. Il associe l'équité à l'honnêteté. Ainsi, il considère que son offre est équitable car il est sûr de sa façon de voir les choses et de la justesse de son évaluation de la demande du fournisseur :

<< On est une société d'État, alors on doit faire beaucoup de transparence. Je me rappelais souvent à dire qu'il faillait beaucoup plus de rigueur, comme n'importe quelle entreprise privée avec un astérisque de plus. [...] Il y a des règles d'équité par rapport à l'entrepreneur, et il y a des règles de transparence par rapport à l'ensemble du public québécois. » (Acteur D-05)

Les faiblesses des modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

Selon l'acteur D-05 qui a vécu le conflit, il fait part de ses déceptions du mode judiciaire où toutes les parties en conflit se sont engouffrées dans une démarche coûteuse et sans fin. La médiation a permis de trouver une solution en achetant la paix :

<< C'est difficile à dire pace que nous avons appliqué une pénalité. Juste pour te mettre dans le contexte, 371 000 $ en 1990. En 1991, il y a eu une poursuite de l'entrepreneur général contre nous pour le montant plus les intérêts. Il y a eu une poursuite d'un sous-traitant contre l'entrepreneur général. Il y a eu la caution, le bureau d'avocat tout cela a fait une grosse boule. On était imbriqué là-dedans. À tous les six mois, un an, ils sortaient une procédure. Au bout de dix ans, [nous avions] changé d'avocat 2 à 3 fois. Au bout de dix ans, tu dis : on veut-tu se débarrasser de cela? Tu sais, cela finit par faire de l'usure. Puis quand il y a eu l'idée de la médiation, on avait offert 50 000 $, dans ma tête on avait trop offert, On avait offert d'acheter la paix. » (Acteur D-05)

2.5.2.2 Les modes alternatifs de règlement des différends civils et

commerciaux à Hydro-Québec.

L'acteur D-05 a déjà vécu une expérience où on a eu recours au mode alternatif pour régler
un différend. Toutefois il fait la distinction entre la facilitation qu'il a utilisée et la

médiation et l'arbitrage : << Ce qu'on a utilisé depuis un certain nombre des mois, c'est : dans des cas bien particuliers à un moment donné, on engage un facilitateur, pas un arbitrage ou une médiation comme telle, dans notre langage un facilitateur. » (Acteur D05)

Ainsi, on trouve chez lui une ouverture timide à la médiation où Hydro-Québec et le représentant de ses partenaires, l'Association des Constructeurs de routes et Grands Travaux du Québec (ACRGTQ) ont établi une liste de facilitateurs qui seront appelés occasionnellement pour agir dans les dossiers de réclamations relatifs aux contrats de construction. L'ACRGTQ, qui représente les entrepreneurs en construction qui font affaire avec la société d'État, a souvent exprimé le souhait de faire intervenir un médiateur pour résoudre les conflits commerciaux entre Hydro-Québec et ses membres :

<< On s'est déjà entendu avec l'ACRGTQ sur une liste de facilitateurs, 4 ou 5 personnes. [...] À un moment donné, j'ai vécu cela, une fois c'était suite à notre demande, les trois autres c'était à la demande de l'entrepreneur. Il a dit, vous offrez les services de facilitation cela m'intéresse. Alors, on a sorti la liste il a fait un choix. » (Acteur D-05)

L'interviewé D-05 fait aussi savoir que l'exercice devient inutile si l'écart entre la demande de l'entrepreneur et ce que peut offrir Hydro-Québec est très grand. Surtout si on maîtrise très bien le dossier et qu'on est confiant de notre position :

<< Il y a des cas où l'entrepreneur nous demandait, où on était tellement éloigné, cela ne servait à rien. On ne voyait pas comment on arriverait à se rapprocher? Quand tu t'embarques là dedans, il faut toujours embarquer quelqu'un sur une base exploratoire. Mais habituellement quand tu connais bien ton dossier à l'interne, parce que tu sais que les parties sont très éloignées, cela ne sert à rien. On va juste gaspiller de l'argent, et à la fin de cela, chacun va sortir frustré, et qu'il ne voudra plus s'embarquer la dedans. Malheureusement des cas comme cela conduit à des procédures légales. Bon c'est le risque. » (Acteur D-05)

Selon l'interviewé D-05, pour une société d'État, parfois la pression de l'opinion publique va le contraindre à accepter un règlement, d'une médiation, qui lui est défavorable en terme de décision d'affaire. Pour cette raison, il préfère le mode non contraignant et informel de la facilitation : << L'opinion publique va se prendre à nous d'une façon ou d'une autre. À quelque part, on risque d'être obligé de dire on va payer on ne va pas s'embarquer là-dedans. Fondamentalement, la raison de fond c'est juste cela. Alors on préfère quelque chose de vraiment informel, la facilitation. » Ainsi, il considère que le processus de la

médiation est formel et contraignant tandis que celui de la facilitation est informel et non contraignant. Ce qui fait apparaître chez lui une ambigüité et une méconnaissance par rapport à la médiation comme mode de règlement non contraignant pour régler les différends.

Cet acteur semble avoir une compréhension vague de la médiation qu'il associe, dans une certaine mesure, à l'arbitrage. Il préfère qu'on parle plutôt d'une facilitation car, selon lui, le mode de facilitation répond mieux aux besoins en raison de son caractère informel. Il considère la médiation comme un exercice contraignant où la société d'État se trouve dans l'obligation de défendre son refus de la recommandation du médiateur face aux pressions de l'opinion publique. Ce qui n'est pas le cas pour une entreprise privée lors d'un règlement d'un différend avec son fournisseur :

« L'arbitrage à HQ, à ce que je sache, je regarde les quinze dernières années, on n'est pas là. La médiation dans sa forme qu'on connaît, on n'en est pas vu. Pourquoi qu'on essaye de se tenir loin de ça? On est le gros donneur d'ouvrage et dès qu'on va avoir un médiateur ou un arbitre qui va prononcer dans une position ou dans l'autre, dès que cela devient publique, cela devient difficile pour nous d'expliquer qu'on ne suivra pas la position de l'arbitre ou la position du médiateur. Cela peut faire en sorte que ceci ne peut pas faire notre affaire, pas du tout. Même si on nous présente que l'arbitrage ne rend pas la sentence exécutoire, la médiation rend la sentence exécutoire. Alors, nous, on dit non. À partir où un arbitre va se prononcer contre nous, ou le médiateur qui va se prononcer contre nous, on va être pris avec cette décision là. Il faut expliquer sur la place publique après, pourquoi on ne va pas dans cette direction là? » (Acteur D-05)

L'attente par rapport au processus de règlement, selon l'acteur D-05, est principalement la flexibilité qui caractérise ce mode informel et non contraignant où la société d'État peut préserver sa liberté d'action concernant tout règlement qui risque de ne pas convenir à ses objectifs :

« Alors le facilitateur rencontre les deux parties, un peu comme un médiateur le fait. Il les rencontre d'une façon individuelle. Par après, il les rencontre autour d'une table. On n'a pas besoin de rapport écrit. L'objectif est en sorte que entre les deux parties, on l'appelle pas médiation mais cela le ressemble, on ne veut pas s'y coller. C'est la facilitation. » (Acteur D-05)

L'acteur D-05 souligne également que le médiateur peut être issu des différents corps professionnels. Dépendamment du dossier, il peut venir du milieu juridique, d'un domaine technique, d'un secteur des affaires avec une formation en PRD ou une bonne expérience dans le domaine :

<< On utilise le service d'un facilitateur; quand je regarde parmi la liste des personnes qu'on a, il y a des gens qui ont fait la maitrise PRD comme celle que tu est en train de faire, puis il y a des avocats d'origine là-dedans, des ingénieurs, même des comptables là-dedans; à date, dans les trois ou quatre cas, ça a bien fonctionné. » (Acteur D-05)

Ce gestionnaire est d'avis que le médiateur doit se maintenir à son rôle et gérer le processus en toute confidentialité. Il ne doit pas jouer le rôle d'un juge car il ne s'agit pas d'un processus judicaire mais plutôt un exercice volontaire non contraignant : << Il ne faut pas qu'il sorte de son rôle et qui se donne un peu un rôle du justicier. Parce qu'il a vu une voie de règlement et que nous, on ne le voit peut être pas. » (Acteur D-05)

Les forces (les satisfactions) du mode alternatif de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

L'acteur D-05 voit que l'avantage d'avoir recourt au processus de médiation est la possibilité de choisir un médiateur spécialisé avec une expertise compatible avec la nature du conflit :

<< La principale force est qu'on peut aller chercher un facilitateur par domaine. Là j'ai parlé des différents domaines d'activités. Un problème des fois de type contractuel, on va aller chercher quelqu'un comme avocat de base. Pour un problème un peu plus technique, on va aller chercher quelqu'un formé comme ingénieur. » (Acteur D-05)

Ainsi les décideurs se sentent plus en confiance si le médiateur connaît le domaine d'activité du milieu où le conflit s'est produit. Ce qui n'est pas le cas dans un processus judiciaire. En effet, les juges qui président les tribunaux n'ont qu'une formation en droit. Pour cette raison, ce gestionnaire rencontré considère que le manque des connaissances techniques est parfois une lacune qui ne permet pas les juges de bien comprendre le conflit avec tous ses détails.

Cette liberté de mettre fin au processus et de discuter dans un cadre informel sans procureurs est très apprécié par l'acteur D-05 car il créera un dynamique d'échange d'informations plus important et essentiel pour trouver une solution au conflit : << Le facilitateur peut jouer un peu le rôle du médiateur. En médiation les parties peuvent arrêter le processus n'importe quand. On peut faire cela dans un cadre très informel où on ne veut pas des procureurs de chaque coté. » (Acteur D-05)

Toujours selon cet acteur, la présence du médiateur crée une dynamique dans les négociations et sort les parties de leur isolement où chacun souvent se replie sur sa position. Toutefois, l'acteur voit toujours la solution à travers un compromis sur le litige et non une solution qui embrase le conflit avec toutes ses dimensions : << Je dirai dans les quatre causes qu'on a faites, on l'a utilisée parce qu'on n'arrivait pas à s'entendre autour de la table, seul avec l'entrepreneur. Cela a porté fruit. On a fini par avoir un compromis qui faisait consensus des deux cotés de la table. » (Acteur D-05)

L'acteur D-05 trouve que le processus de la médiation, même s'il ne réussit pas à trouver une solution au conflit, permet d'avoir une réflexion et de voir le conflit sous un autre angle, ce qui permet parfois de reconsidérer sa position : << S'il n'y a pas de possibilité de rapprochement, du côté de l'entrepreneur, c'est de faire valoir ses droits vis-à-vis les tribunaux et de notre côté, c'est peut-être suite à la médiation de reconsidérer le dossier et la démarche qu'on devra faire pour trouver un règlement. »

Les faiblesses (les déceptions) du mode alternatif de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

Par ailleurs, ce décideur trouve, d'après son expérience, que le processus de médiation est long en raison des négociations interminables conduites durant un cas vécu. Cette perception dégage une méconnaissance du processus de la médiation qui est connu comme un processus beaucoup plus court que le processus judicaire.

<< En termes de mauvais côté, moi, je trouve toujours, c'est le temps que ça prend. Il faut que cela prenne le temps qu'il faut. Mais, je trouve parfois que c'est long. Je trouve cela long à chaque fois. Je suis conscient que cela fait partie du processus. Cela fait partie aussi du rôle du facilitateur, que chacun doit lâcher un petit bout, et cela, ça prend un certain temps avant que chacune des parties accepte de le faire. Moi, le facteur temps, je trouve que c'est long. Il faut vivre avec cela. Cela fait partie du processus de résolution des conflits. » (Acteur D-05)

Comme le fait remarquer ce gestionnaire de première ligne, il est important que le processus reste sous le contrôle de la société d'État. Selon son discours, il se dégage une crainte de déléguer certains pouvoirs d'un organisme public comme Hydro-Québec qui jouit d'un rôle aussi noble et prestigieux comme gardien des deniers publics. La bonne

gestion des fonds publics appartient à la société d'État et non au médiateur. Il souhaite que tout processus en vue d'un règlement demeure en dehors de la place publique :

« J'ai un cas qui a donné ce que je n'ai pas aimé. On est une société d'État, une société publique, il faut absolument, quand quelque chose qui se passe ou quand quelqu'un intervient chez nous, il faut que cela reste chez nous. Lorsqu'une personne part comme médiateur ou comme facilitateur et qu'il s'en va ailleurs pour essayer d'avoir des appuis ailleurs et essayer de régler cela...! Alors je veux dire : tant que cela reste à l'interne entre l'entrepreneur et HQE, cela va bien aller. » (Acteur D-05)

2.5.3 La perception de la relation entre le partenariat et le mode de règlement des différends

L'acteur D-05 voit la médiation commerciale entre Hydro-Québec et son fournisseur à partir d'un cadre de référence issue de la médiation imposée souvent par le gouvernement pour débloquer des négociations lors d'une grève dans le secteur public entre le syndicat et l'employeur. Dans ce cas, il s'agit dans la plupart des cas d'un exercice très médiatisé et politisé où la pression de l'opinion publique est omni présente dans le processus. Ainsi cet acteur semble craindre les pressions qui pourraient provenir du public pour forcer la société d'État à accepte des règlements qu'elle juge contraires à une seine gestion en affaire : « Il ne faut pas oublier qu'à partir du moment où vous l'avez à l'intérieur d'un contrat, la clause de médiation, je devine de l'impact qu'elle a sur Hydro-Québec. Comme société d'État, on risque le plus souvent d'être perdant en termes d'image médiatique. » (Acteur D-05)

Aussi il croit qu'une clause de médiation introduite dans un contrat va diminuer la possibilité de régler les réclamations en chantier entre les personnes directement concernées. Une telle situation va faire en sorte que tous les conflits seront peltés dans le court du médiateur et les administrateurs des contrats ne seront pas incités à résoudre leurs problèmes sur le terrain :

« Moi ce que je craindrais, c'est le fait de rendre les clauses obligatoires pour chacune des parties, ce que je craindrais... ce qui reste à la fin... que ce soit encore plus gros, alors que là comme il y a une pression, les lois du marché d'une certaine façon, font en sorte que chacun d'entre nous, on avance puis on en règle et on en règle, alors que quand les gens voient qu'il y a une autre possibilité de recours : T1Je ne réglera pas tout de suite, je peux m'y prendre ailleursT1, alors ce que je dis... ça prendrait plus de temps, c'est pas 100 % qui nous reste à la fin

mais peut-être 7 % ou 8 %, c'est ma crainte. Fondamentalement c'est ma crainte. » (Acteur D-05)

L'ensemble du discours de l'acteur D-05 dégage une crainte que l'introduction d'une clause de médiation dans les contrats va rendre obligatoire le passage par la médiation à chaque fois qu'il se présente un conflit entre la société d'État et son fournisseur. Selon lui une telle décision risque de créer une lourdeur administrative dans le règlement de la plupart des dossiers en litiges :

<< Nos fournisseurs nous dit, on sait que vous ne voulez pas avoirs des clauses d'arbitrage on sait que vous ne voulez pas avoir des clauses de médiation pourquoi vous ne mettez pas une clause en terme de facilitation, c'est du pareil au même ou presque. On ne veut pas s'y obligé. Bon, le fait d'essayer de faire appel sur une base régulière à une clause de facilitation imagines-tu du temps que ça prend? » (Acteur-D-05)

Il confirme que l'instauration d'une clause de procédure de règlement en cas de différends incluant la médiation a été revendiquée par les fournisseurs d'Hydro-Québec à plusieurs reprises. Mais la société d'État préfère garder le statu quo car elle le juge satisfaisant et répond bien à ses besoins :

<< Oui ça a été demandé par l'Association des entrepreneurs des grands travaux du Québec. Puis je dirai que... eux autres ne jurent que par ça. [...] Je peux comprendre... on en a besoin pour régler notre dernier petit 5 % mais tout ce qu'on règle avant, ça je veux garder ça. Parce que ça marche à date, ça marche, alors pourquoi je prendrais le risque de changer quelque chose qui a fait ses preuves? Alors, de considérer quelque chose de plus lourd à gérer, au moment où on se parle, je ne sens pas l'urgence, le processus actuel marche. » (Acteur D-05)

L'acteur D-05 croit qu'on peut utiliser la facilitation à titre préventif surtout lorsqu'il y a un conflit de personnalité entre le représentant de l'entrepreneur et celui d'Hydro-Québec au chantier. Le recours à un facilitateur peut contribuer à restaurer un climat positif dans ce genre du milieu du travail qui s trouve souvent isolé :

<< La facilitation n'est pas seulement à la fin, on peut juger opportun à un moment donné en cour du contrat à titre préventif, pour des situations où ça nous prendra peut être un facilitateur tout de suite, une animosité entre le gérant de l'entrepreneur et le chef projet. On aura peut être juste besoin que les deux se rapprochent un peu mieux ou tous les deux apprendre à se parler, un facilitateur peut être aidant. » (Acteur D-05)

De même, il perçoit que souvent dans les relations d'affaires, le fournisseur ne partage pas les mêmes objectifs que ceux de la société d'État :

<< On a rarement des objectifs communs, par définition de part et d'autre on a des objectifs divergeant. Alors lorsque ça va mal, il faut essayer de trouver des zones communes pour essayer de régler le conflit qui est en train de s'envenimer. Mais on a toujours quand même trouvé le temps de régler un conflit où chacun était entrain de s'en aller dans sa direction opposée ainsi va le monde. » (Acteur D-05)

2.6 Acteur D-06

L'acteur D-06 est un décideur très influent de première ligne. Il siège au comité de gestion qui oriente la politique de l'entreprise en matière d'approvisionnement. Il a une formation technique et a passé plus de 37 ans à Hydro-Québec dans la gestion de projets. Ses opinions sont indispensables pour ce projet de recherche, car il est réputé connaître tout le rouage de l'entreprise en raison de la durée de ses états de service et de son passage dans différents secteurs de la société d'État.

2.6.1 La perception du partenariat

Selon l'acteur D-06, dans certains cas, on n'a pas hésité à intervenir d'une façon décisive pour redresser une situation où la non qualité n'était pas tolérée, surtout lorsqu'il s'agit des produits stratégiques qui se placent comme un maillon sensible dans le réseau électrique d'Hydro-Québec. Dans ce cas selon lui, il s'agit d'une mauvaise expérience vécue d'un partenariat : << Il y a certains biens manufacturés qui nous ont amené, suite à des expériences de mauvaise qualité du produit, à les exclure. » (Acteur D-06)

Selon ce décideur, cette relation partenariale, on la trouve à Hydro-Québec dans les ententes de fabrication des biens essentiels à sa mission fondamentale. Ces ententes de fabrication s'échelonnent sur une période suffisamment longue. Ce qui permet au fournisseur de s'engager dans le développement des nouveaux produits répondant aux besoins particuliers de la société d'État et de rentabiliser ses investissements en recherche et développement :

<< Avec des partenaires des produits manufacturiers, on travaille beaucoup avec des ententes de fabrication. On a des ententes de fabrication, des ententes de partenariat, à long terme, c'est-à-dire que, on s'entend sur des spécifications techniques, on s'entend sur des prix, ça devient une entente de fabrication donc, ce que j'appelle moi une entente de partenariat. » (Acteur D-06).

Le discours de l'acteur D-06 laisse entendre que dans le domaine de fourniture d'équipement où il y a du développement technologique, Hydro-Québec considère ses fournisseurs comme des alliés stratégiques pour développer des équipements qui sont en perpétuelle évolution afin de se maintenir à la fine pointe de la technologie. En plus HydroQuébec va s'allier avec ces fournisseurs pour maximiser les retombées économiques au Québec. Lesquelles retombées sont des préoccupations majeures pour l'actionnaire principal de l'entreprise, Le gouvernement du Québec. Donc, considérer ses fournisseurs comme des alliés stratégiques, témoigne de la confiance que la société d'État accorde à ses partenaires d'affaires.

En effet, cette confiance est traduite par l'établissement d'une liste d'entrepreneurs et des fournisseurs préqualifiés et homologués où ils seront invités à soumissionner sur des appels d'offres restreints pour la fourniture d'équipements, pour des contrats de construction ou ils seront nommés comme consultants pour réaliser l'ingénierie d'un projet :

<< Si on parle des entrepreneurs de construction des lignes, on a la même affaire. On a quatre entrepreneurs qui sont homologués. Ils soumissionnent en compétition. Mais c'est un appel d'offres sur invitation. À partir du moment où c'est un appel d'offres sur invitation, pour moi c'est un partenariat. Avec les firmes d'ingénierie, c'est le même principe. Ce sont des firmes qui sont homologuées ; donc on va en appel d'offre sur invitation. » (Acteur D-06)

Ainsi, selon lui, une fois accrédité, le fournisseur devient un allié privilégié et gagne la confiance d'Hydro-Québec pour réaliser des travaux très spécialisés dans des conditions critiques :

<< Je te dirai à HQ que se soit avec les manufacturiers ou avec les entrepreneurs de construction, on fonctionne un peu comme ça en mode partenariat avec les fabricants, avec les entrepreneurs ou avec les services professionnels, dans le sens que on travaille beaucoup avec les firmes ou des entreprises qui sont homologuées. » (Acteur D-06)

2.6.2 La perception du mode de règlement des différends

2.6.2.1 Les modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec.

L'acteur D-06 confirme qu'il existe des procédures de règlement en cas des différends
entre Hydro-Québec et ses fournisseurs. Lesquelles procédures est incluses dans les

contrats et elle est encadrée par des guides administratifs. Advenant un différend, on procède selon une voie hiérarchique. C'est-à-dire le fournisseur tente en premier lieu de régler le conflit par des négociations bipartite avec le représentant d'Hydro-Québec désigné comme administrateur de son contrat. Ensuite, s'il n'y a pas d'entente, il peut faire appel au directeur et par après au comité de la direction avant de se rendre devant le tribunal : « Actuellement ce qu'on a comme mode de règlement des différends, ce que on y va de façon hiérarchique. Donc quand il y a un différend il y a des négociations qui se font entre les administrateurs des projets pour essayer d'en arriver à une entente. » (Acteur D06)

Si l'entrepreneur n'arrive pas à s'entendre avec l'administrateur désigné du contrat, la procédure inscrite dans le contrat lui permet de s'adresser à un niveau hiérarchique plus haut avec un dossier complet justifiant sa demande dans le but de trouver une entente et changer la décision de l'administrateur. Ainsi, le supérieur hiérarchique reçoit le dossier de l'entrepreneur comme un appel de la décision de son employé et tente de trouver un règlement, mais toujours en se basant sur la normativité juridique du contrat : « S'il y a mésentente dans nos contrats, il y a un processus qui permet au fournisseur d'avoir recours à un niveau hiérarchique plus élevé, jusqu'au niveau du directeur. » (Acteur D-06)

Une fois la demande de compensation est rendue au niveau du directeur, elle sera considérée comme une réclamation et elle sera traitée selon une procédure interne non inscrite au contrat. Cette procédure, pour le gestionnaire D-06 rencontré, consiste à faire entendre la demande de l'entrepreneur par un comité de réclamation formé par des personnes, d'Hydro-Québec, qui sont en dehors du contexte du chantier. Ce comité, formé des cadres de la société d'État, agit comme un tribunal interne pour entendre les réclamations présentées par les fournisseurs :

« On a aussi mis en place ce qu'on appelle un comité de réclamation, qui est composé des directeurs principaux. Il y a le contentieux qui est présent. Lorsqu' il y a un différend entre un fournisseur puis l'administrateur des contrats, on lui (l'administrateur) demande de venir nous expliquer; C'est quoi la nature du différend? C'est quoi le bien fondé du fournisseur? C'est quoi qui l'amène à prendre une décision d'être en désaccord avec la position du fournisseur, et de ne pas approuver ce que le requérant demande? » (Acteur D-06)

Selon la conception de cet acteur, les négociations avec l'entrepreneur et l'analyse du dossier de réclamation présenté par l'entrepreneur sont faites en équité et avec transparence en s'appuyant sur des critères objectifs où le dossier doit être bien fondé en droit :

<< Les fournisseurs peuvent dire qu'Hydro-Québec est sévère dans l'application de ses clauses contractuelles, et on est un client exigeant. Mais on est aussi un client équitable. Les fournisseurs qui font affaire avec Hydro-Québec ils le savent. [...] Je te dirai : le principal critère c'est sur le bien fondé de la réclamation, ou de la demande du requérant. De base, si un fournisseur se sent lésé, s'il a subi un préjudice, c'est lui qui doit nous faire la démonstration, et nous expliquer le bien fondé. » (Acteur D-06)

Les clauses contractuelles, les lois et règlements demeurent la source de toute justification pour la prise de décision. À cet effet, un avis préalable du contentieux de la société d'État est nécessaire pour conclure toute entente concernant le règlement d'une réclamation par un gestionnaire. Le fardeau de la justification incombe à l'entrepreneur où il doit présenter sa demande de compensation avec une bonne argumentation détaillée et basée sur le contrat qui lie les parties.

Toutefois, selon lui, dans la plupart des cas, on arrive à s'entendre et à trouver une solution sans qu'il soit nécessaire de se rendre devant les tribunaux. Selon les procédures, s'il n'y a pas d'entente après avoir fait appel au Directeur, usuellement le dossier sera transmis aux contentieux de la société d'État afin de se préparer de le débattre devant les tribunaux de droit commun. Mais l'interviewé s'entend pour dire que la poursuite d'un dossier en justice est très rare car il préfère trouver une solution avant d'en arriver devant les tribunaux : << Je n'ai jamais eu des dossiers qui se sont réglés en cours pendant mes 37 ans de service. On a toujours réglé avec les négociations. » (Acteur D-06)

Les forces des modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec.

Selon l'acteur D-06, le statut d'Hydro-Québec comme société d'État exige un traitement équitable, avec rigueur et transparence, de toute demande provenant d'un fournisseur et toute négociation pour trouver une solution à un différend doit être guidée par ces valeurs fondamentales de la gestion de la chose publique. Certain administrateur associe l'équité à l'honnêteté. Ainsi, il considère que son offre est équitable car il est sûr de sa façon de voir les choses et de la justesse de son évaluation de la demande du fournisseur :

<< On a quand même à HQ une philosophie qui fait en sorte on veut travailler en équité, jamais on va demander à un administrateur de contrats, regardes, lui il demande tant, toi tu penses ça vaut tant, puis on va essayer d'aller chercher un peu plus d'argent. Un principe qu'on dit à nos administrateurs, il faut être équitable. Si vous pensez qu'on lui doit, faites pas du marchandage, offrez-lui ce qu'on pense qu'on lui doit. » (Acteur D-06)

Les faiblesses des modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec.

L'acteur D-06 n'a pas d'opinion sur cet élément.

2.6.2.2 Les modes alternatifs de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

L'acteur D-06 mentionne que les partenaires d'Hydro-Québec demandent souvent d'avoir recourt à la médiation commerciale pour résoudre les conflits qui sont souvent des réclamations issues de l'exécution d'un contrat :

<< La médiation, nos fournisseurs nous demande beaucoup d'avoir recourt à cette méthode là. Ce qu'on leur dit, ce que, actuellement, on l'a à l'interne via le comité de réclamation. Donc, on a dit ce qu'on a mis en place à Hydro-Québec, c'est à peu près équivalent d'un comité de médiation que vous avez en tant que fournisseurs. » (Acteur D-06)

La position de l'entreprise est favorable à l'utilisation du mode de médiation entre l'administrateur désigné par Hydro-Québec et le fournisseur. Toutefois, selon lui, il est important que la société d'État garde le contrôle du processus de règlement des différends avec ses fournisseurs. À cet effet, on a créé à l'interne un comité de réclamation qu'il le considère comme l'équivalent d'un comité de médiation car les membres de ce comité sont détachés du contexte du projet où le litige à eu lieu et il considère que ce comité est à égale distance par rapport à l'administrateur du contrat et au fournisseur.

Cependant, selon lui, les fournisseurs demande d'être entendu par le comité de réclamation afin qu'ils puissent plaider leurs dossiers et participer d'une façon active à cette médiation interne :

<< La seule chose qu'ils nous demandent de plus, c'est dire : T1Bon, c'est beau là, oui
on sait qu'il y a quelqu'un qui regarde cela d'un autre oeil, un oeil plus élevé dans

la hiérarchie. Mais, nous, on voudrait avoir accès à ce comité-là. C'est-à-dire... on voudrait être capable d'aller présenter nos causes". » (Acteur D-06)

L'acteur D-06 mentionne que face à cette demande, la société d'État résiste à faire participer directement le fournisseur à ce comité de réclamation ou de changer son fonctionnement qu'elle juge satisfaisant. Ce gestionnaire influent ne trouve pas une urgence d'agir car il considère que cette façon de faire répond aux besoins de l'entreprise en raison des résultats obtenues et qu'il y a très peu des cas qui se rendent devant les tribunaux :

« Nous, à l'heure actuelle, on hésite. Parce qu'on dit, actuellement, ça rapporte des fruits ce comité là de réclamation. Ça fait en sorte, très peu des cas se traduisent par des jugements en cour. Ce qu'on a mis en place, cela se traduit par des bons résultats. C'est à peu près l'équivalent d'un comité de médiation. Nous, on dit le comité de réclamation supérieur c'est l'équivalent d'un comité de médiation. Donc, sur ta question si on l'a utilisée je pense qu'on l'a à l'interne. » (Acteur D-06)

L'acteur D-06 n'avait pas d'opinion concernant les attentes par rapport au processus ou au médiateur.

Les forces (les satisfactions) du mode alternatif de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec.

L'acteur D-06 n'avait pas d'opinion sur cet élément.

Les faiblesses (les déceptions) du mode alternatif de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec.

L'acteur D-06 n'avait pas d'opinion sur cet élément.

2.6.3 La perception de la relation entre le partenariat et le mode de règlement des différends

L'acteur D-06 est d'avis que la décision, de la société d'État relative au refus d'introduire une clause de médiation dans ses contrats avec les fournisseurs, qui date depuis quelques années peut être reconsidérée et voir une possibilité de le faire à titre expérimental dans quelques contrats. Ensuite on pourra évaluer la pertinence de poursuivre ou de revenir à la

position du départ. Ainsi on peut apprécier le plus valu qui sera apporté par une telle clause à la gestion des différends issus des contrats d'Hydro-Québec avec ses fournisseurs :

<< Pour le moment, nous on pense que non, c'est pour cela on le met pas en application. Ce qu'on pense que, s'il aurai une clause de médiation obligatoire pour Hydro-Québec et pour l'entrepreneur, et pour le fournisseur de services, on pense que compte tenu des quantité des contrats, qu'on a en cours que se soit des biens de fournisseurs ou d'entrepreneur ou des firmes, ça retarderai un règlement de dossiers et ça accentuerai le nombre des dossiers qui iraient en médiation. Parce que les fournisseurs diraient on a rien à perdre on va aller en médiation, et ça retarderait le règlement. [...] Quand on parle de médiation ça veut dire que le contrat est fini tu traines le dossier, les gestionnaires affectés au projet sont affectés à d'autres projets, ou qui sont carrément plus présents dans le dossier, ça traine en longueur. Puis on pense que ça retarde le règlement de nos dossiers. Ça peut se traduire par des nombreux dossiers qui s'en iraient en médiation. >> (Acteur D-06)

Le gestionnaire D-06 est d'avis qu'avant d'instaurer une clause de médiation dans les contrats, il faut faire la démonstration que la nouvelle façon de faire apportera un plus valu par rapport à la pratique usuelle. Il résiste aux changements parce qu'ils considèrent que le monde usuelle est adéquat et ils ne voient pas l'urgence d'agir : << Donc là il faut que faire la démonstration>> et <<Quand même, avec la quantité des dossiers qui sont traités, il a été démontré que le processus qu'on a en place livre la marchandise. >> (Acteur D-06) L'opinion de l'acteur D-06 laisse entendre que la société d'État encourage les administrateurs sur le terrain à régler les conflits avec le fournisseur directement sans passer par un intermédiaire. Pour ce faire, selon lui, Hydro-Québec met à la disposition des administrateurs désignés directement pour gérer les contrats des fournisseurs tous les outils nécessaires pour bien accomplir cette tâche :

<< On donne comme directive à nos gestionnaires et on leur donne tous les outils pour s'entendre avec le fournisseur, on limite le règlement au niveau des intervenants directs, les administrateurs des contrats, les gestionnaires des projets, et ceux qui gèrent et le fournisseur des services. Donc, ils savent que le dossier, il faut qu'il se règle à leur niveau et ils savent qu'ils ont tout intérêt à le régler. Nous, on pense que l'administrateur de contrat et le gestionnaire du projet a tous les outils pour régler son contrat. Aussi, on pense que le fournisseur a la même chose, chez lui, donc on dit : T1Essayons de régler les différends chez les gens qui sont impliquésT1. >> (Acteur D-06)

Selon l'interviewé D-06, la société d'État n'a pas besoin d'inclure dans ses contrats une
clause de médiation car il considère qu'il est en mesure, avec les spécialistes et les équipes
internes, d'offrir l'équivalent d'une médiation aux fournisseurs pour garantir qu'ils seront

traités avec équité. Si ces spécialistes n'existaient pas à l'intérieur de l'entreprise d'une façon permanente, on pourra justifier l'instauration d'une clause de médiation dans les contrats de fourniture des biens et services. Dans ce cas, une telle clause peut contribuer à résoudre et à prévenir les conflits qui peuvent découler de l'exécution du contrat :

<<Je te dirais que si on n'avait pas les ressources permanentes à Hydro-Québec les spécialistes en administration de contrats, moi, si j'avais un bâtiment à faire comme la Bibliothèque Nationale, comme le projet de l'Université du Québec ou les trois hôpitaux qu'ils vont faire, je te dirais que je mettrais cela (clause incluant la médiation) dans mon appel d'offres. Car on s'en va avec un contrat, je n'ai pas des spécialistes en gestion des différends, donc on va prévoir le processus de médiation si jamais on ne s'entend pas. Puis je pense que cela serait de mise de mettre ça en place. Tandis qu'à Hydro-Québec, on travaille avec des fournisseurs en continu répétitif, on travaille avec des gestionnaires en continu répétitif, je pense qu'on a l'équivalent du processus de médiation à l'interne. » (Acteur D-06)

2.7 Acteur D-07

L'acteur D-07 a une formation technique. Il a consacré 30 ans de sa carrière à HydroQuébec comme gestionnaire des travaux et administrateur des contrats. Il est à la tête d'une équipe qui se trouve en première ligne au point de vue contact avec les fournisseurs. Donc ses perceptions et commentaires sont importants en raison de sa position et sa vaste expérience vécue dans l'administration des contrats de construction.

2.7.1 La perception du partenariat

La perception du partenariat n'est pas tout à fait claire pour l'acteur D-07. Selon lui, une relation de partenariat peut se présenter sous différents degrés, fort, moyen et faible selon les circonstances : << On était dans un espèce de partenariat. » (Acteur D-07)

Selon lui, la compétence de l'entrepreneur devient un enjeu important dans la réalisation des projets forts complexes et propres à la société d'État. Souvent, la qualité du produit et l'échéancier sont de loin plus important que le dépassement des coûts d'un projet. Car, la fiabilité d'un réseau aussi vaste comme celui d'Hydro-Québec est tributaire du projet réalisé ou du produit installé :

<< Quand on négocie de gré à gré avec quelqu'un on n'a pas l'assurance que on a le
meilleur prix si on veut. Mais un des objectifs importants de ce projet là était
l'échéancier, le prix s'en est un, mais le prix était moins important que

l'échéancier, pour réussir de le mener à bien il fallait s'assurer de la compétence dans le personnel. » (Acteur D-07)

Ainsi, selon lui, l'absence du facteur confiance dans une relation d'affaire affecte d'une façon significative le bon déroulent d'un projet : << La job est mal parti parce que nous étions comme méfiants mais par après ça s'est replacé, on s'est expliqué. » (Acteur D-07). Il ajoute que le partage des frais des imprévus sur un projet a contribué à surmonter les difficultés et les travaux ont été complétés avec succès : << Je pense que tout le monde a mis du sien, puis c'était une réussite. » (Acteur D-07)

2.7.2 La perception du mode de règlement des différends

Cet acteur n'avait pas d'opinion précise concernant le mode de règlement général des différends. Par contre, ses commentaires ont fait ressortir des opinions sur certains éléments.

2.7.2.1 Les modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec.

L'acteur D-07 n'avait pas d'opinion générale sur les modes usuels, quoiqu'il a mentionné quelques éléments qui peuvent être rattachés aux forces et faiblesses de ce mode.

Les forces des modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

Les données recueillies par le discours de l'acteur D-07 laissent ressortir que le mode usuel de règlement des différends assure une transparence et une équité dans les relations d'affaire entre Hydro-Québec et son fournisseur. Des telles valeurs sont inscrites dans les politiques de la société d'État et elles sont impératives à la gestion des affaires publiques :

<< On est une société d'État qui doit faire preuve de transparence puis d'éthique, d'équité, mais il n'y a pas obligation des résultats, à régler dans tant de jours de ci de ça. On peut dire à un fournisseur non et c'est non et il fera appel aux procédures légales, Je ne sais pas si c'est une force mais c'est un fait. » (Acteur D07)

Les faiblesses des modes usuels de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

Avec le discours de l'acteur D-07, on peut comprendre que le raté du système réside dans la brisure entre Droit et Morale de la communauté qui est en faveur de la protection de plus faible contre l'abus de pouvoir qui peut être exercé par le plus fort en abusant de son rapport de forces pour faire plier le plus petit :

« Nous sommes comme principal donneur d'ouvrage. Nous avons une certaine force de frappe, dans le sens qu'on peut refuser et s'assoir bien confortablement sur un libellé. On peut dire à l'entrepreneur : "Si tu veux t'adresser à la cour, vas-y, on a des avocats et on a tout." [Est-ce] une force? Je ne suis pas certain, mais c'est ça. On peut l'utiliser comme force de dissuasion lorsqu'un entrepreneur est de mauvaise foi et qu'il joue sur tous les tableaux. » (Acteur D-07)

Ce qui se traduit par une inégalité d'accès à la justice entre une société d'État possédant des ressources importantes pour faire valoir et supporter sa position et un petit fournisseur avec des moyens nettement inférieurs pour supporter un procès long et couteux.

2.7.2.2 Les modes alternatifs de règlement des différends civils et

commerciaux à Hydro-Québec.

Selon l'acteur D-07, ce mode de règlement demeure un exercice exceptionnel, toutefois il a eu l'occasion de vivre l'expérience d'une médiation lors d'un conflit assez complexe survenu durant sa vie professionnelle à Hydro-Québec : « Mais je pense [que] ce sont des cas très rares. Puis avant d'arriver là, on a vraiment passer par plusieurs autres étapes avant. » (Acteur D-07) Ce mode de règlement est perçu, par l'acteur D-07, comme une gestion des compromis financiers où chacune des parties doit faire des concessions pour enfin arriver à une solution satisfaisante :

« Cela donnait une dynamique différente. Puis, tant qu'à moi, c'était très bien. On a réglé. Avec cela, on a bonifié ce qu'on a offert avant. Parce que, justement, on voulait régler. Mais tout le monde a mis de l'eau dans son vin. L'entrepreneur, il fallait qu'il mette de l'argent pour finalement aboutir un à montant de règlement. » (Acteur D-07)

La médiation commerciale est vue, par l'acteur D-07, comme un débat judiciaire mais non contraignant. Où les procureurs de chacune des parties en conflit sont omniprésents et occupent beaucoup d'espace lors de l'exercice :

<< Il y avait neuf parties représentées, les sous-traitants tout le monde poursuivait tout le monde. Puis, il y a eu trois séances de médiation. Une première séance juste les avocats entre eux. Puis, après cela, ils ont embarqué les administrateurs, chef travaux, l'entrepreneur et les sous-traitants. >> (Acteur D-07)

Il ne semble pas saisir la différence entre facilitation et médiation. Il n'est pas sûr de la définition de chacun de ces termes dans le domaine de règlement des différends commerciaux : « Le cas s'est terminé, je ne sais pas comment cela s'appelle, est-ce de la médiation ou de la facilitation, je crois que c'était de la médiation mais sans être engagé. >> (Acteur D-07)

La médiation est perçue comme faisant partie d'un continuum et elle est l'étape avant de s'adresser à la cour, de sorte qu'il voit un rôle important du médiateur dans l'évaluation du risque advenant que le dossier d'une réclamation soit entendu par un juge. Il souhaite que le médiateur soit en mesure de donner une appréciation juste des résultats probables suite à une éventuelle poursuite en cour de justice. Selon lui, il doit pouvoir intervenir et convaincre les parties de la meilleure solution selon les circonstances :

<< Ils ont engagé un médiateur, un ancien juge en chef de la cours supérieur du Québec. Je ne me souviens plus de son nom, très sympathique comme médiateur. [...] On n'était pas contraint d'accepter les recommandations ni les offres qui ont étaient faites... Le médiateur a dit : T'Regardez! Si vous n'acceptez pas cela, si vous ne réglez pas cela de même, moi, je ne peux pas vous recommander autre chose que cela.T' C'est ainsi que cela a fini par se régler. >> (Acteur D-07)

Les forces (les satisfactions) du mode alternatif de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

L'acteur D-07 souligne que ce qui l'a marqué dans une expérience vécue de médiation est l'attitude du médiateur qui s'est comporté de la même façon qu'un juge. Pour l'exercice en question, le médiateur était un ancien juge à la retraite et ses attitudes sont restées imprimées dans ses comportements pendant ses fonctions comme médiateur. Pour plusieurs, le processus de médiation est semblable à un processus judiciaire avec la seule différence qu'il est volontaire et non contraignant : << Il regarde cela d'une façon impartiale. Puis, il analyse les faits et il se prononce sur les faits, puis ce qui était sur la table c'est tout. Je l'ai trouvé très bon. >> (Acteur D-07)

Comme le fait remarquer ce gestionnaire, le fait d'avoir des gens détachés du contexte du conflit permet de jeter un regard extérieur différent de celui des personnes impliquées directement et qui ont vécu le conflit. Il attache beaucoup d'importance aux points de Droit. Car, pour lui, les critères objectifs doivent demeurées la référence principale pour tout règlement :

<< Au départ, je n'étais d'accord avec la démarche, par contre j'ai vu comment cela pouvait se passer. La façon que les gens, les avocats, les médiateurs, comment ils sont détachés du quotidien. Puis comment ils font juste regarder des points de droit, etc. Puis, pour moi, c'était bénéfique en termes d'apprentissage. Puis, je pense que l'entrepreneur croyait sincèrement qu'il avait raison. Puis nous, on croyait sincèrement qu'on avait raison. Puis, dans des cas comme cela, je trouve que c'est une bonne démarche. » (Acteur D-07)

L'acteur D-07 trouve que le processus de médiation, même s'il ne réussit pas à trouver une solution au conflit, il permet d'avoir une réflexion et de voir le conflit sous un autre angle. Ce qui permet parfois de reconsidérer sa position : << S'il n'y a pas de possibilité de rapprochement, du côté de l'entrepreneur c'est de faire valoir ses droit pour vis-à-vis les tribunaux et de notre côté, c'est peut être suite à la médiation de reconsidérer le dossier et la démarche qu'on devra faire pour trouver un règlement. » (Acteur D-07)

Les faiblesses (les déceptions) du mode alternatif de règlement des différends civils et commerciaux à Hydro-Québec

L'acteur D-07 souligne sa déception concernant le comportement des procureurs lors d'un processus de médiation qu'il l'a vécu avec un ancien juge comme médiateur. Il déplore que les procureurs confondent souvent leur rôle comme conseillers de leurs clients en médiation avec leur rôle comme procureurs dans un processus judicaire devant les tribunaux :

<< Les déceptions, c'est dû plus aux avocats qu'au médiateur. Si on avait été en cour, il aurait été un peu pareil. Ce que les avocats sont détachés. Mais, des fois ils disent des affaires ça pas d'allure. Ils empruntent des voies légales qui n'ont pas rapport. Ils posent des questions après dix ans des faits. Puis ils te demandent, par exemple, le 13 mai 1990, il y a eu un tel événement, parce qu'ils ont vu cela dans un rapport, qu'est- ce que vous pensez ? Ils sont un peu ratoureux. Je trouve cela un peu exagéré. Mais le médiateur, qui est un ancien juge, il les ramenait un peu à la réalité. » (Acteur D-07)

2.7.3 La perception de la relation entre le partenariat et le mode de règlement des différends

Les opinions de l'acteur D-07 sont à l'effet qu'il n'existe pas une relation évidente entre le partenariat tel que pratiqué par Hydro-Québec avec ses fournisseurs et le mode de règlement des différends :

« Actuellement, il n'y en a pas de relation entre partenariat et règlement des différends. Comme société publique, c'est le plus bas soumissionnaire conforme qui est choisi, le règlement des litiges est fait sur une base égalitaire. Ça fait que la relation entre le partenariat et le mode de règlement n'est pas là. » (Acteur D-07)

Selon ce gestionnaire, le statut de l'entreprise comme société d'État est l'élément montré du doigt comme étant le plus contraignant pour établir un vrai partenariat avec les fournisseurs et pour adopter la médiation comme mode de règlement des différends. À cet effet, le règlement d'un conflit avec un fournisseur se fait selon les mêmes procédures indépendamment de la nature de relation avec le fournisseur et ce qu'il soit un partenaire ou non.

Il croit qu'une clause de médiation introduite dans un contrat va diminuer la possibilité de régler les réclamations en chantier entre les personnes directement concernées. Une telle situation va faire en sorte que tous les conflits seront peltés dans le court du médiateur et les administrateurs des contrats ne seront pas incités à résoudre leurs problèmes sur le terrain : « Je ne suis pas un fervent d'avoir un chemin rapide à cela. Peut être j'ai peur des changements. Mais je trouve que cela est trop facile. Il ne faut pas qu'il se soit trop facile. L'entrepreneur nous a amené là. Je pense qu'il a réussi à avoir un règlement plus intéressant. » (Acteur D-07)

CHAPITRE 3 INTERPRÉTATION ET EXPLICATION DES DONNÉES

Le présent chapitre a pour but principal de répondre à la troisième question spécifique de recherche à savoir : Dans quelle mesure la méconnaissance de la médiation avec tout son potentiel est la cause de l'écart? Pour ce faire, une validation du contenu des énoncés du départ sera faite par une réflexion et une compréhension des données recueillies. Donc, à partir du survol théorique et de l'étude in situ, on tente de dégager les écarts et les causes profondes de l'écart constaté entre le cadre conceptuel et la perception des acteurs clefs.

D'abord, une analyse de la conception du partenariat par les acteurs clés va permettre de savoir dans quelle mesure cette conception est mobilisatrice pour implanter de nouveaux modes de résolution des différends. Ensuite, l'examen de la perception de ces acteurs par rapport à la médiation permet de comprendre dans quelle mesure les avantages de la médiation dans un tel contexte ne sont pas perçus par les décideurs. Enfin, on tente de voir dans quelle mesure la méconnaissance de la médiation avec tout son potentiel est la cause de l'écart.

3.1. Analyse de la perception du partenariat

La perception et la conception que font les sept acteurs interviewés du partenariat tel que pratiqué s'écartent des valeurs énoncées par Hydro-Québec. Six acteurs sur sept s'accordent pour dire que le partenariat à Hydro-Québec est un terme très général et qu'il est sujet à interprétations multiples dépendamment des personnes ou du milieu où il est pratiqué. Néanmoins, les positions exprimées par ces décideurs demeurent dans les grandes lignes convergentes malgré certains points de vue divergents.

En effet, la convergence s'articule autour du statut d'Hydro-Québec comme entité publique où six acteurs sont d'avis qu'il devient difficile de pratiquer avec les fournisseurs un vrai partenariat en raison de l'utilisation, sur une base régulière, des appels d'offres publics pour acquérir les biens et services, où, dans la plupart des cas, le plus bas soumissionnaire conforme est retenu. De telle sorte qu'il n'existe pas de partage des bénéfices entre les partenaires et dans ce cas, selon ces gestionnaires, on parle d'une relation d'affaires plutôt

qu'une relation de partenariat. Cette obligation de procéder par appel d'offres public est dictée par le fait que la société d'État se considère fiduciaire du bien commun, et qu'on doit gérer la chose publique en bon père de famille124, avec une transparence totale. C'est ainsi qu'on peut expliquer cette convergence dans la perception du partenariat.

Toutefois, quatre acteurs sur sept s'entendent pour dire que la nature du partenariat est fonction de la nature du produit ou du service à acquérir ou du domaine d'affaire concerné. En effet, dans le domaine de la construction des grands projets à Hydro-Québec, les acteurs considèrent qu'il est très difficile de considérer la relation avec l'entrepreneur de construction comme du partenariat en raison du caractère public des appels d'offres. La relation d'affaires est plutôt perçue comme une bonne collaboration commerciale, car le donneur d'ouvrage ne participe pas à la prise de décision du fournisseur, dans un contexte où chacun cherche ses profits et où les intérêts ne sont pas toujours convergents. Cependant, on a découvert une position unanime chez les gestionnaires rencontrés à l'effet que l'équité est au centre de leur relation commerciale avec leurs partenaires. Il s'agit d'une valeur que l'entreprise énonce dans sa politique et à laquelle on attache une importance capitale. Cette unanimité trouve son explication dans le degré de confiance que le public leur témoigne et des lourdes responsabilités qui se rattachent à l'administration de la chose publique. Les administrateurs de la société d'État se sentent le devoir d'entretenir un sens aigu des valeurs morales qui doivent guider leurs actions.

Par ailleurs, dans le domaine d'acquisition d'équipements spécialisés provenant de fabricants particuliers, la relation avec les fournisseurs s'apparente à une relation de partenariat en raison de l'existence de la recherche et du développement pour acquérir des biens stratégiques selon des spécifications propres à Hydro-Québec. Il s'agit donc de relations durables où des compétences complémentaires sont mises à contribution pour atteindre des objectifs partagés qui sont des biens stratégiques performants et à la fine pointe de la technologie. Ainsi, deux acteurs soulignent qu'il est plus approprié de travailler en partenariat lorsqu'il s'agit de l'ingénierie ou de la fabrication des équipements qui impliquent de la recherche et du développement. Ces opinions sont conformes à la politique annoncée par Hydro-Québec en matière d'acquisition, laquelle politique est

124 Cooper, Terry L. (1991). An Ethic of Citizenship for Public Administration, in Plamondon, Jacques A., Fonder l'éthique de l'administration publique, Télescope, ENAP, Québec, vol. 9, no 1, novembre 2002.

guidée principalement par quatre orientations, soient : la sécurité d'approvisionnement, la qualité du matériel acheté, l'efficacité par laquelle on acquiert le bien et les retombées économiques au Québec. Cette dernière préoccupation, de favoriser les retombées économiques, s'explique par le caractère public de la société d'État, annoncé dans le cadre de référence où cette dernière est appelée à tenir compte de la politique du gouvernement du Québec en matière de marchés publics.

Quant au domaine des projets spécialisés, trois acteurs considèrent que les relations avec les fournisseurs sont une forme de partenariat, car on procède par appels d'offres restreints où les soumissionnaires sont des fournisseurs préqualifiés et homologués. De plus en plus, on fait appel à des compétences particulières pour réaliser des projets de plus en plus complexes. Cette réalité amène la société d'État à faire plus de place à des appels de propositions où on invite un nombre très restreint de fournisseurs spécialisés en mesure de réaliser des projets particuliers dans des conditions propres à Hydro-Québec. Ainsi, les appels d'offres restreints ou sur invitation imposent de travailler en partenariat avec les fournisseurs, dans un climat où la confiance, qui est difficile à gagner en relation d'affaires régulière, est l'élément clef de la relation avec les entrepreneurs. Cette position partagée par trois gestionnaires s'explique par des politiques125 d'Hydro-Québec adoptées par le conseil d'administration lors de la séance du vendredi 11 septembre 1998, à savoir qu'à partir du 1er octobre 1998, le coût le plus avantageux remplace le moindre coût comme critère de sélection des soumissions. Cette façon de faire permet à la société d'État d'effectuer un choix en considérant d'autres paramètres que le strict moindre coût.

Toutefois, deux acteurs sont d'avis que la pratique d'un partenariat idéal se présente plus dans les ententes avec la collectivité pour partager le développement d'un projet local. Il s'agit d'un autre type de partenariat gagnant-gagnant où le partenaire n'est pas un fournisseur, mais plutôt une collectivité régionale très influente et souvent touchée d'une façon importante par un projet de développement. Ces types d'ententes ne sont pas sous formes d'un contrat de fournitures ni de relations client-fournisseur, ce sont plutôt des contrats sociaux qui engagent les parties dans une coopération mutuelle pour réaliser des projets spécifiques. L'actualisation de ce type d'entente est perçue comme une vraie

125 Hydro-Québec (2006). Politiques, nos acquisitions des biens meubles et de services, 11 septembre 1998 [En ligne] http://www.hydroquebec.com/soumissionnez/pdf/brochure.pdf

relation de partenariat motivée par des objectifs communs partagés qui sont, dans le cas du projet EASTMAIN A-1, le développement d'un projet hydroélectrique d'envergure. Cette position des acteurs est expliquée par le fait que dans ce genre de partenariat, on trouve toutes les valeurs du partenariat annoncées par l'entreprise y compris le partage réel des bénéfices. En plus, l'existence d'intérêts communs partagés, qui est le développement du projet en harmonie avec le milieu, démontre bien les points de vue de ces trois acteurs à cet égard.

Par ailleurs, les avis sont partagés en ce qui trait au partage des bénéfices entre le donneur d'ouvrage et l'entrepreneur. Ainsi, il y a deux acteurs qui croient au partage des bénéfices et lors d'un différend, ils mettent de l'avant l'option gagnant-gagnant où chaque solution recherchée doit apporter des bénéfices ou une plus-value à chacune des parties en relation d'affaires. Tandis que deux autres gestionnaires considèrent que la relation avec les fournisseurs est une relation d'affaires où il y a très peu de place au partage des bénéfices. De même, les objectifs communs partagés avec les entrepreneurs sont perçus par deux acteurs comme une relation commerciale normale plutôt qu'une relation de partenariat. Ce point de vue divergent est expliqué par une vision étroite des bénéfices qui sont réduits au gain financier direct. Pourtant, les bénéfices peuvent être une multitude de gains tels que l'amélioration du savoir-faire, l'ouverture de nouveaux marchés ou tout autre avantage de ce genre.

Un gestionnaire mentionne que malgré que la relation commerciale puisse être améliorée avec le partenariat, il n'en demeure pas moins que le partenariat représente encore des défis et des difficultés à surmonter pour une entreprise publique comme Hydro-Québec. La difficulté réside dans le balisage commercial (Benchmarking) qui demande de s'assurer que ce que propose le partenaire est toujours compétitif par rapport au marché. Cette préoccupation confirme la particularité d'une entreprise publique où les administrateurs d'Hydro-Québec se considèrent gardiens des deniers publics.

Enfin dans l'ensemble, la conception du partenariat s'écarte un peu du partenariat idéal énoncée par Hydro-Québec en raison de l'utilisation des appels d'offres publics où le plus bas soumissionnaire conforme ne partage pas nécessairement les pertes et les bénéfices avec la société d'État. Cela fait en sorte que la relation entre le donneur d'ouvrage et le fournisseur est perçue comme une relation d'affaires où chaque partie est préoccupée à

maximiser ses profits et où les intérêts ne sont pas toujours convergents. Malgré que deux acteurs soient ouverts à l'utilisation de la médiation comme mode de règlement des différends dans certain cas, il y a presque un consensus pour dire que le partenariat tel que pratiqué n'est pas tout à fait mobilisateur pour implanter de nouveaux modes de résolution des différends dans les contrats d'Hydro-Québec.

3.2. Analyse de la perception par rapport à la médiation

À l'instar d'une grande entreprise, les procédures administratives d'Hydro-Québec sont règlementées par des politiques et des directives internes, de telle sorte que le mode usuel de règlement des différends entre Hydro-Québec et ses fournisseurs est encadré par une clause normalisée insérée dans les clauses générales des contrats et par un guide administratif de gestion des réclamations126. La lecture de la perception des acteurs clés par rapport à la médiation est faite à travers leur pratique et leur conception du mode usuel, avec ses forces et ses faiblesses, ainsi qu'à travers leur expérience de la médiation qui inclut leurs attentes et leurs déceptions par rapport au processus et au médiateur. Ainsi, l'analyse documentaire en accord avec les données recueillies va permettre d'expliquer dans quelle mesure les avantages de la médiation dans un tel contexte ne sont pas perçus par les décideurs.

En premier lieu, les acteurs rencontrés sont unanimes à dire que la pratique usuelle de règlement des différends est presque uniforme en raison des procédures internes normalisées et de l'existence d'un comité interne consacré à la gestion des réclamations afin d'assurer une pratique homogène de traitement des différends commerciaux. Tous les gestionnaires s'entendent pour affirmer que le recours aux modes alternatifs des règlements des différends comme la médiation, la facilitation ou l'arbitrage n'est pratiqué qu'exceptionnellement, dans des cas particuliers.

Cependant, les acteurs mentionnent que toutes les mesures sont prises pour inciter leurs employés à régler le conflit dès son apparition, en négociant directement avec le fournisseur une entente à l'amiable. À cet effet, selon les gestionnaires, des directives sont données aux administrateurs des contrats afin qu'ils soient réceptifs aux requêtes de

126 R. Charbonneau, M. Marcotte et J. p. Pellerin (2007). Hydro-Québec, Guide de gestion des réclamations, Unité contrôle Direction-Administration et Contrôle HQE/SEBJ, révision 2 mai 2007.

l'entrepreneur et qu'ils étudient toute demande selon des critères objectifs bien fondés en droit. Selon les acteurs, il s'agit, le plus souvent, d'une négociation bipartite que le représentant d'Hydro-Québec conduit avec équité et transparence, en se basant sur les clauses contractuelles, les lois et les règlements en vigueur.

On peut expliquer cette attitude par le sentiment de lourde responsabilité qui anime le responsable d'Hydro-Québec en tant administrateur de la chose publique. Cette directive donnée à l'administrateur de la société d'État, d'être réceptif, s'explique par le devoir de posséder un sens plus aigu des valeurs morales qui doivent guider ses actions. Donc, il doit exercer ses fonctions avec transparence et intégrité totale, de même que l'administrateur de la société voit, dans les critères objectifs des négociations, une équité par rapport au deuxième plus bas soumissionnaire qui n'a pas eu le contrat. Cependant, les discours des acteurs rencontrés laissent sous-entendre que l'équité est subjective. Ainsi, le représentant d'Hydro-Québec considère que son offre de règlement est équitable, car il est confiant dans sa façon de voir les choses et de la justesse de son appréciation de la demande de compensation présentée par l'entrepreneur. Cette attitude de très grande confiance s'explique par le caractère bureaucratique qu'on trouve chez les employés en pouvoir dans une fonction étatique. Ce genre de comportement est expliqué par la théorie de Mathiot127 où le bureaucrate, fier de ses connaissances, se glorifie et devient peu sensible aux arguments provenant de l'extérieur.

Ainsi, tous les acteurs interviewés se voient comme des gestionnaires des fonds publics dont le mode de gestion diffère de celui des entreprises privées. De sorte que la gestion de la chose publique exige une imputabilité au corps social qui est en mesure de questionner toute entente et toute prise de décision. Pour cette raison, il paraît clair qu'on est plus libre de faire de compromis lorsqu'on négocie des intérêts privés que lorsqu'il s'agit des deniers publics. Par la suite, si l'entrepreneur et l'administrateur du contrat désigné par HydroQuébec ne parviennent pas à s'entendre, le conflit sera alors entendu par un comité de réclamation interne à Hydro-Québec. Pour ce faire, l'entrepreneur doit déposer un dossier bien argumenté à partir de critères basés sur la normativité juridique tels que le contrat, les lois et les règlements en vigueur.

127 A. Mathiot (s. d.) La pathologie de la bureaucratie. Article.

Ainsi, ce comité formé des cadres d'Hydro-Québec agit à l'instar d'un tribunal interne d'arbitrage pour intervenir entre l'administrateur du contrat désigné par Hydro-Québec et le fournisseur. En conséquence, le comité examine le dossier présenté par l'entrepreneur ainsi que la réponse de l'administrateur du contrat à cet effet. L'analyse du cas et la décision qui en découle sont faites selon des critères objectifs où les clauses contractuelles, les lois et règlements demeurent la source de toute justification pour la prise de décision. Donc, il s'agit d'un processus quasi judiciaire, car un avis préalable du contentieux de la société d'État est un pré requis à la conclusion de toute entente avec le fournisseur.

Ainsi, selon trois acteurs interviewés, on arrive à régler la majorité des cas présentés au comité et très peu des cas se rendent devant les tribunaux. Néanmoins, les interviewés s'entendent pour révéler que la poursuite d'un dossier en justice est très rare, car les parties préfèrent toujours trouver une entente avant d'en arriver à se faire dicter une décision par un officier de la justice. Cette recherche révèle que la volonté de la société d'État est de régler ses conflits avec ses fournisseurs par des ententes hors cours. Toutefois, elle tient à préserver le contrôle de tout processus de règlement extrajudiciaire, ce qui explique la formation de ce comité interne de réclamation. Cette attitude ainsi que cette pratique usuelle de règlement des différends sont expliquées par le souci de bien gérer les biens communs.

3.2.1 Les forces du mode usuel

Par ailleurs, un acteur croit que, dans certains cas, le recours judiciaire est préférable à la médiation pour valider une question de principe. La jurisprudence qui en découle deviendra alors une source importante pour parfaire les clauses contractuelles et les rendre plus étanches aux interprétations subjectives de la part des fournisseurs. Ainsi, la préférence du mode judiciaire à la médiation s'explique par le fait que, parfois, le donneur d'ouvrage use des jugements des tribunaux pour faire avancer le Droit128 et développer un savoir-faire qui servira dans des contrats futurs. À cet effet, Hydro-Québec dispose de ressources importantes en mesure de supporter une poursuite devant les tribunaux où peu

128 Commission du Droit du Canada (s. d.) La transformation des rapports humains par la justice participative. ISBN 0-662-89974-1, Catalogue JL2-22/2003F, page 158.

de fournisseurs sont en mesure de soutenir un long procès en justice, dont les résultats sont d'ailleurs incertains.

Selon trois acteurs, ce rapport de forces favorable à la société d'État est utile comme force dissuasive pour inciter les concernés à trouver une solution au lieu de se lancer dans un processus périlleux et coûteux. Cet avantage, selon un interviewé, peut aussi servir à supporter une position de principe et à faire face à un fournisseur récalcitrant et de mauvaise foi. Cette position, à savoir « le pouvoir de soumettre le petit acteur économique au diktat des grands producteurs de contrats en situation de pouvoir »129 s'explique par les travaux de Perrault et Beaudry. Ainsi, dans l'ensemble, tous les acteurs sont satisfais de la pratique actuelle à Hydro-Québec car, selon eux, 95 % des demandes sont réglées directement au chantier pendant la réalisation des travaux. Donc, le rapport de forces favorable à la société d'État est un élément non négligeable pour assurer cette efficacité.

Les acteurs révèlent également, à l'unanimité, que la force principale du mode usuel se trouve dans sa flexibilité où la médiation n'est pas indiquée comme un passage obligatoire pour régler un différend. Les gestionnaires préfèrent le libre choix de recourir au mode qu'il convient selon la situation au lieu de se trouver dans l'obligation de passer par un quelconque mode pour régler leurs conflits commerciaux avec leurs fournisseurs.

D'ailleurs, un comité interne de l'entreprise a déjà étudié une requête des partenaires pour réviser la clause contractuelle normalisée, concernant le processus de règlement habituel, afin d'introduire la médiation commerciale comme mode de règlement des différends. Après mure réflexion, les décideurs ont opté pour le statu quo qui a déjà fait ses preuves et qui est jugé satisfaisant pour répondre aux besoins de la société d'État. Cette position s'explique par la résistance au changement telle que décrit dans Approches Stratégiques de John Kotter, professeur à la Harvard Business School, le mieux connu des auteurs sur le changement. Ainsi, les décideurs ne sont pas tout à fait convaincus des changements à apporter au mode usuel et ne sentent pas qu'il est urgent d'agir130. Selon monsieur Kotter, la résistance des acteurs au changement est un phénomène courant dans toute organisation en raison des inquiétudes face à l'invasion d'un nouveau mode inconnu, et le plus grand

129 Perrault, C. et F. Beaudry (s.d.) Récents développements en matière d'abus de droit : où sommes-nous? 3.2 La nouvelle moralité contractuelle. EYB2005DEV1078. Le pouvoir de soumettre le petit acteur économique au diktat des grands producteurs de contrats en situation de pouvoir.

130 John Kotter (s. d.) Approches stratégiques, Harvard, Harvard Business School.

défi pour implanter le changement réside dans l'atténuation de la peur chez les acteurs concernés.

3.2.2 Les faiblesses du mode usuel

Malgré la satisfaction au sujet du processus usuel manifestée par six acteurs rencontrés, il n'en demeure pas moins que, selon eux, ce mode présente toutefois des limites et des faiblesses. Ainsi, les acteurs manifestent leur insatisfaction par rapport au délai jugé trop long pour régler une réclamation comportant un important impact financier. Cette situation s'explique par le fait que les réclamations de cette nature traversent toutes les procédures incluant celles de la justice avant qu'un règlement aboutisse. Par exemple, les récentes poursuites de près de 200 millions $ déposées contre Hydro-Québec et sa filiale SEBJ par les entrepreneurs du projet Eastmain-1 à la Baie James131, qui démontrent bien les limites du mode usuel à régler les conflits dans des délais acceptables.

D'autre part, l'accumulation des dossiers non réglés fait l'unanimité des acteurs comme étant l'irritant le plus courant de la pratique actuelle en raison des priorités des administrateurs des contrats où on met plus d'effort à réaliser les travaux selon les échéanciers prévus que sur les règlements des réclamations. Ce phénomène est dû au fait que les dates clefs du projet sont très importantes, car souvent, le projet s'inscrit à l'intérieur d'un programme stratégique d'une importance capitale pour Hydro-Québec. Souvent on demande à l'entrepreneur d'exécuter les travaux avant même d'avoir conclu une entente sur le volet financier de compensation relative aux changements contractuels. Ainsi, l'accumulation de dossiers non réglés devient, à la fin du chantier, une source importante de conflits dont la négociation d'un règlement devient plus ardue et plus difficile en raison des documents manquants ou des personnes affectées ailleurs sur d'autres projets.

Il existe également une convergence d'opinions des personnes interviewées où quatre acteurs sur sept sont d'avis que le mode actuel présente une déficience relativement à la compétence de la tierce personne qui intervient dans le processus de règlement. Or, selon ces acteurs, on risque de se retrouver devant un juge qui, dans la plupart des cas, ne

131 Grammond, Stéphanie (2007). Poursuite de 200 millions $ contre Hydro-Québec, Journal La Presse, Cahier La Presse Affaires, Montréal, 14 septembre 2007.

possède pas les connaissances techniques nécessaires pour comprendre les dossiers appartenant à des domaines spécialisés et de plus en plus complexes. Ces opinions expriment l'insatisfaction par rapport au mode judiciaire qui s'acharne sur la normativité juridique en faisant passer au second plan la normativité technique qui est plus accessible aux parties pour trouver un sens au règlement du conflit ordonné par le juge. En plus, les décideurs sont unanimes pour dire que le recours au mode judiciaire est coûteux en frais de contentieux et d'experts engagés pour préparer et défendre les dossiers en litige devant les tribunaux de droit commun. Cette affirmation est démontrée par le cas présenté au chapitre 1 concernant la Banque de Montréal contre Hydro-Québec.

3.2.3 La pratique du mode alternatif

En deuxième lieu, les acteurs clés révèlent que la société d'État ne recourt qu'occasionnellement aux modes alternatifs tels que la facilitation, la médiation ou l'arbitrage, pour régler ses différends avec les fournisseurs. A cet effet, les gestionnaires sont unanimes pour écarter l'arbitrage, car ce processus est jugé plus contraignant par le fait qu'une sentence arbitrale demeure sans appel sur le fond par rapport à un jugement de la cour où on jouit toujours d'un droit d'appel par rapport à la décision rendue.

Bien que le recours aux modes alternatifs ne s'effectue qu'à titre exceptionnel, selon les acteurs, la société d'État reste toutefois favorable à l'utilisation du mode de la médiation entre l'administrateur désigné par Hydro-Québec et le fournisseur. Cependant, cette ouverture à la médiation est conditionnelle à ce que le processus soit totalement sous le contrôle d'Hydro-Québec. Pour cette raison, on a créé à l'interne un comité de réclamation que les acteurs considèrent comme l'équivalent d'un comité de médiation car, selon eux, les membres de ce comité sont des gestionnaires d'Hydro-Québec détachés du contexte du projet où le litige à eu lieu et ce comité est considéré comme neutre par rapport à l'administrateur du contrat et le fournisseur. Cette conception de la médiation témoigne d'une méconnaissance de la médiation dont un des buts est de neutraliser le rapport de forces pour que les parties deviennent égales dans un processus où elles participent librement à la construction d'une entente satisfaisante.

Donc, ce comité interne de réclamations conserve le rapport de forces favorable à Hydro-
Québec et prive d'une certaine manière le fournisseur d'une liberté de consentir essentielle

à tout règlement satisfaisant. C'est ainsi que les fournisseurs ont manifesté leur désir d'être entendus par le comité de réclamation afin qu'ils puissent plaider leurs dossiers et participer d'une façon active à ce processus interne de médiation. Cette requête est restée sans réponse, car la société d'État hésite à faire participer directement les fournisseurs à ce comité de réclamation ou à changer son fonctionnement qu'elle juge efficace et satisfaisant. Selon un acteur clé, il n'y a pas une urgence d'agir, car il considère que cette façon de faire répond aux besoins de l'entreprise en raison des multiples succès enregistrés et où il y a très peu des cas qui se rendent devant les tribunaux. Cette position de l'entreprise est expliquée par la résistance au changement132.

En conséquence, de plus en plus de fournisseurs réclament la médiation comme mode de règlement des différends qui les opposent à la société d'État. Dans ce contexte, HydroQuébec et l'Association des Constructeurs de routes et Grands Travaux du Québec (ACRGTQ) ont établi une liste de facilitateurs qui seront appelés occasionnellement pour agir dans les dossiers de réclamations relatifs aux contrats de construction. Toutefois, l'ACRGTQ, qui représente les entrepreneurs en construction qui font affaires avec la société d'État, a souvent manifesté, sans succès, le désir d'une révision par Hydro-Québec de la clause contractuelle du processus de règlement en cas de différends afin d'introduire la médiation comme mode de règlement des réclamations. Ce refus de la part de la société d'État d'acquiescer à la requête du partenaire trouve son explication dans les travaux de recherche de Mathiot (s. d.), où les personnes en pouvoir d'une organisation publique sont confiants et orgueilleux de bien gérer les deniers publics et deviennent, par le fait même, « insensible aux désirs et aux vibrations du corps social. »133

3.2.4 Attentes par rapport au processus

Néanmoins, les intervenants voient dans la médiation un processus de règlement volontaire, non contraignant et fondé sur la bonne foi et le respect réciproque des parties en conflit. Ce faisant, ils s'attendent à ce que le déroulement du processus demeure confidentiel et que tout ce qui est dit, entendu ou dévoilé ne sera pas interprété comme une admission ni admis comme preuve par le juge advenant une poursuite devant les tribunaux.

132 John Kotter (s. d.) Approches stratégiques, Harvard Business School, Harvard..

133 Mathiot. A. (s. d.). La pathologie de la bureaucratie, La notion de la bureaucratie. [En ligne] http://web.upmf-grenoble.fr/cours/scadmi/Fiche7.htm, Fiche no 8.

Malgré l'existence d'un protocole de médiation garantissant l'immunité du processus, les acteurs demeurent réticents face à ces garanties, et la crainte de dévoiler son jeu et d'être pénalisé au procès, advenant une action en justice, est toujours omniprésente dans l'esprit des gens qui participent à la médiation. Il n'en demeure pas moins que les intervenants rencontrés associent à un certain degré la médiation à un processus judiciaire en raison de la présence des avocats qui conseillent les parties et qui peuvent influencer le déroulement du processus. Ainsi, pour contrer les embuches qui peuvent être créées par les procureurs pour faire durer le débat, les acteurs expriment le désir que le processus soit en mesure de pallier cette préoccupation.

Cette perception du processus démontre bien la méconnaissance de la médiation qui est souvent interprétée à travers les médiations imposées par le gouvernent pour régler un conflit de travail qui perdure. Les gestionnaires associent souvent la médiation à un processus quasi-judiciaire comme l'arbitrage en raison de la présence des avocats dans l'exercice. Pour cette raison, deux des personnes rencontrées se sentent plus confortables avec la facilitation qu'ils considèrent comme un processus tout à fait informel et non contraignant. Ainsi, l'attente par rapport au processus de règlement, selon un acteur, est de faire en sorte que la société d'État préserve la liberté de choisir le mode de règlement convenable selon les circonstances qu'elle juge favorables.

Il apparaît que la crainte de perdre la liberté de choix n'est pas étrangère à la volonté d'une société d'État de garder le contrôle de l'action afin de sauvegarder son autorité morale dans l'orientation des évènements. Cette position est expliquée par une culture juridique où certains auteurs de l'école française croient qu'il est impensable qu'une autorité publique puisse s'asseoir avec le sujet et négocier un compromis134. Les acteurs ne voient pas non plus l'utilité de la médiation lorsque l'écart entre la demande du fournisseur et l'offre du donneur d'ouvrage est important et lorsque le représentant d'Hydro-Québec maîtrise très bien le dossier du litige et demeure confiant de la justesse de sa position. Cette manière de voir la chose est expliquée par la pensée que la médiation ne peut pas faire mieux que la

134 Emile Tyan, Beyrouth (1972). Droit de l'arbitrage, Librairie Antoine, no. 63.

Professeur en droit à l'Université St-Joseph (Jésuite). Théorie de Droit fortement inspirée par le Droit Français : « Il est contraire à la nature des choses d'admettre, pour les personnes morales de droit public en tant que puissance publique, la possibilité de compromettre dans les litiges internes nés de leur activités. »

négociation bipartite où un bon gestionnaire peut négocier lui-même un bon règlement : pourquoi intégrer alors un médiateur étranger au dossier?

3.2.5 Attentes par rapport au médiateur

Concernant le rôle du médiateur, divers points de vue émergent malgré un consensus sur certains éléments. Par exemple, tous les acteurs s'attendent à ce que le médiateur soit crédible, impartial et compétent pour bien gérer le processus et pour gagner la confiance des parties en conflit. Ils croient aussi que le médiateur doit intervenir pour convaincre les parties d'adhérer à une solution qu'il juge la meilleure selon les circonstances. D'un autre côté, un acteur a exprimé clairement que le médiateur détient une obligation de résultats et que la finalité du processus consiste à obtenir une entente de règlement où la responsabilité de l'échec ou de la réussite incombe en bonne partie au médiateur. Cette attitude par rapport au médiateur confirme la méconnaissance du rôle du médiateur comme étant un intervenant qui a une obligation de moyens afin de transformer une situation conflictuelle en un problème commun à résoudre et dont la solution sera la meilleure chose à faire selon les circonstances.

Aussi, les gestionnaires rencontrés considèrent que le médiateur doit posséder les habiletés requises pour rapprocher les parties et établir un climat de confiance entre les belligérants. De même, il doit être compétent pour orienter les parties sur des pistes de solution et pour évaluer avec neutralité les conséquences pour chaque partie advenant une éventuelle poursuite devant les tribunaux. Le besoin de ce genre de médiation appelée « évaluation neutre » est très courant dans l'industrie de la construction, surtout aux États-Unis où elle est perçue comme la dernière étape d'un continuum avant de s'adresser au tribunal. Pour cette raison, les gestionnaires interviewés s'attendent à ce que le médiateur possède certaines compétences techniques compatibles avec la nature du conflit afin qu'il puisse donner une appréciation neutre des solutions possibles du conflit. Il doit donc posséder les capacités de convaincre les parties de la meilleure solution selon les circonstances.

Par ailleurs, trois acteurs sur sept s'attendent à ce que le médiateur soit en mesure de bien gérer le volet émotionnel du conflit, car dans certains cas, derrière une position tenue par une partie se cache un conflit de personnalité avec son vis-à-vis. Pour cette raison, il est primordial en premier lieu de régler la partie émotionnelle afin de se consacrer à la partie

rationnelle du différend. Ainsi, selon les acteurs, la recherche de toute solution doit s'appuyer sur des arguments écrits, objectifs et rationnels. Cette obsession de toujours mettre de l'avant les arguments rationnels et d'associer la médiation à un processus quasijudiciaire où on parle souvent des faits, des pièces justificatives, etc., s'explique par la culture juridique québécoise qui est fortement influencée par une culture romaine, latine, française qui a le culte de la Loi135 écrite, par rapport à la culture anglo-saxonne du Commun Law basée sur la négociation et la jurisprudence. Ceci peut expliquer d'ailleurs pourquoi la médiation est plus utilisée dans le reste de Canada et aux États-Unis qu'au Québec et en France.

3.2.6 Les forces (satisfactions) du mode alternatif

En outre, les acteurs voient dans le processus de la médiation un avantage en raison de la possibilité de faire intervenir dans le dossier un tiers avec des compétences techniques compatibles avec la nature du conflit. De cette façon, les gestionnaire se sentent rassurés de voir un médiateur qui maîtrise le domaine du conflit et qui est en mesure de les écouter et comprendre leurs besoins, ce qui n'est pas le cas dans un processus judiciaire. Cette situation s'inscrit par l'insuffisance de la justice de répondre aux besoins des citoyens qui réclament de plus en plus de faire intervenir d'autres normativités que celles du monde judiciaire afin qu'ils puissent donner un sens à toute solution du différend.

Par ailleurs, un autre acteur a vu un aspect négatif dans la présence d'un ex-juge comme médiateur lors d'un conflit vécu, car il a agi selon son cadre de référence judiciaire et a usé de son autorité de juge et de ses arguments pour convaincre les parties de la meilleure solution selon les circonstances. Cette perception témoigne de la méconnaissance du processus de la médiation qui est souvent attribué à un processus judiciaire sauf qu'il est volontaire et non contraignant, et permet à un tiers de jeter sur le conflit un regard extérieur différent de celui des personnes impliquées directement dans le conflit. Ce qui explique que les gestionnaires s'attendent à ce que le médiateur fasse plus que de la facilitation en intervenant pour convaincre les parties à adhérer à une entente qu'il considère la meilleure dans les circonstances.

135Jean-Pierre Bonafé-Schmitt. La médiation: une alternative à la justice, page 146.

Les acteurs sont unanimes pour dire que, même si le processus n'aboutit pas à une solution, il permet toutefois de voir le différend sous un nouvel angle afin que les parties reconsidèrent leur position respective. Cette façon de voir le processus rejoint la conclusion du comité ontarien chargé d'évaluer le recours obligatoire à la médiation, à savoir que le fait de rendre obligatoire le processus, même s'il est volontaire, a eu des retombées positives sur l'accélération du règlement des conflits.

3.2.7 Les faiblesses (déceptions) du mode alternatif

Cependant, les acteurs sont unanimes pour dire que le processus doit demeurer sous la gouverne et sous le contrôle de la société d'État. L'analyse des discours dégage une crainte de la part de la société d'État de se départir d'un pouvoir qui lui revient comme entité publique qui joue un rôle, aussi noble et prestigieux, que celui du fiduciaire du bien commun. Ainsi, la majorité des gestionnaires rencontrés considèrent que la bonne gestion des fonds publics appartient à la société d'État et non au médiateur. Par conséquent, tout processus en vue d'un règlement demeure sous son contrôle et en dehors de la place publique. Cette façon de concevoir le processus de règlement s'explique, selon la recherche documentaire, par une culture profondément enracinée à l'effet que la société d'État est assujettie au Droit administratif québécois qu'on associe au Droit administratif français dont l'origine remonte à la monarchie. Comme disait madame Louise Lalonde, professeure : « À un certain égard en France, on a remplacé la monarchie par la république, mais on a gardé ses lettres de noblesse. »

Cette analyse de la perception des acteurs clés révèle que les décideurs conçoivent la médiation comme un mode de gestion des compromis sur les positions des parties en conflit où toute recherche de solution est faite dans le cadre de la normativité juridique, à savoir le contrat, la loi et les règlements en vigueur. D'une certaine manière, les acteurs associent la médiation à un processus quasi-judicaire où il est indispensable que les parties soient accompagnées par leurs procureurs respectifs. En plus, ils croient que le médiateur détient une obligation de résultats qui se présente par une entente de règlement où tout échec ou réussite est imputé au médiateur. Il appert que le processus est souvent vu à travers les médiations décrétées par le gouvernent pour régler un conflit de travail qui perdure. Par conséquent, les acteurs craignent qu'en acceptant de participer à un processus géré par un médiateur externe, la société d'État concède à un tiers un pouvoir qui lui

revient comme entité publique qui joue un rôle, aussi noble et prestigieux, que celui du fiduciaire du bien commun.

Or, le nouveau contexte impose à Hydro-Québec un défi de taille en raison de la pénurie qui se pointe à l'horizon dans le marché de la construction et des revendications sociales qui se font entendre lors de la réalisation de ses projets de développement. Elle doit donc assurer une bonne gestion de la chose publique et participer au développement du Québec comme un bon citoyen corporatif. Pour cette raison, elle a senti le besoin de modifier ses politiques pour favoriser une relation d'affaires à long terme, fondée sur la confiance, le partage de risque, l'équité, l'intégrité et la transparence qui sont essentielles à l'administration des fonds publics. En conséquence, il est nécessaire d'adopter un mode de règlement des différends commerciaux compatible avec cette vision de partenariat et en conformité avec ces valeurs mises de l'avant par la société d'État.

D'où un modèle de médiation comme celui d'Ury et Fisher qui est le plus indiqué, et dans lequel une solution sera recherchée en se basant sur les intérêts et les valeurs communs et les relations à long terme, en considérant le conflit avec toute son amplitude. De cette façon, on pourra régler le litige et ses causes profondes par la convergence des normes juridiques, de partenariat d'affaires et d'éthique propres à la gestion de la chose publique. D'abord, la norme juridique, qui est le contrat, sera évoquée pour qualifier le litige et ses conséquences. Elle peut être employée pour situer le droit de chacune des parties en litige ainsi que ses obligations contractuelles.

Ensuite, comme dans la plupart des cas le litige est issu d'une mauvaise pratique qui se perpétue depuis longtemps de part et d'autre des parties, des solutions peuvent être discutées afin de prévenir d'autres conflits dans le futur. Ainsi, dans une médiation où on cherche une solution, le fournisseur, en l'absence du rapport de forces, peut faire part ouvertement de ses doléances relatives aux documents contractuels ambigus et aux clauses jugées abusives dans un contrat par adhésion comme celui d'Hydro-Québec. De même, Hydro-Québec peut trouver une solution qui saura à la fois répondre à ses contraintes en matière d'échéancier et de qualité tout en tenant compte de la préoccupation de son partenaire, lui permettant de prospérer et de demeurer sur le marché. De la sorte, elle assure du même souffle sa sécurité d'approvisionnement en équipements stratégiques.

D'autre part, la présence d'un tiers neutre crédible, dans une médiation, rassure le corps social d'une intégrité de gestion et écarte toute apparence de favoritisme ou de conflit d'intérêts, ce qui n'est pas le cas lors d'une négociation bipartite. Quant à l'entente, en plus de la solution du litige, elle peut inclure des éléments susceptibles d'améliorer les opportunités et les relations d'affaires à long terme. Il appert que la perception des acteurs clés par rapport à la médiation dans ce sens diffère. La médiation est vue à travers un cadre purement juridique (contrat) qui est insuffisant pour régler un conflit sans provoquer une brisure entre le Droit et les intérêts et les valeurs communs énoncés. Ce qui fait que les avantages de la médiation dans un tel contexte ne sont pas perçus par les décideurs.

3.3. Analyse de la perception de la dynamique entre partenariat et règlement des différends

La recherche documentaire révèle que dans l'entente de partenariat entre la société d'État et la collectivité, en récurrence les Cris de la Baie-James, le règlement d'éventuels différends est encadré par une clause prévoyant la médiation comme mode de règlement. De même que l'entente de partenariat appelée la Paix des braves, entre le Gouvernement du Québec et la communauté Cris de la Baie-James, prévoit une clause de médiation pour le règlement des différends. Or, les ententes et les contrats avec les fournisseurs partenaires d'Hydro-Québec ainsi qu'avec ceux du Gouvernement du Québec ne prévoient pas la médiation comme mode de règlement des différends, malgré que les fournisseurs soient unanimes à le réclamer. En plus, l'analyse de la perception du partenariat et l'analyse de la perception du mode de règlement des différends montre un écart en raison des valeurs du partenariat qui ne sont pas actualisées par les acteurs lors d'un règlement d'un conflit commercial. Pour cette raison, il est important d'identifier dans quelle mesure la méconnaissance de la médiation avec tout son potentiel cause cet écart.

On tente donc de trouver une réponse à cette question à travers l'analyse documentaire et la lecture que font les acteurs de la relation entre le partenariat et le mode de règlement des différends. A cet effet, tous les acteurs rencontrés sont d'avis qu'il n'existe pas une relation évidente entre le partenariat pratiqué à la société d'État et le mode de règlement des différends en raison du mode d'approvisionnement par appel d'offres publics. De sorte que souvent, le plus bas soumissionnaire est retenu et le règlement d'un conflit avec un fournisseur se fait selon les mêmes procédures et avec la même philosophie

indépendamment de la nature de relation avec ce dernier. Ainsi, peu importe la nature de la relation d'affaires, la gestion de la chose publique exige une rigueur plus aigue que la gestion des intérêts privés, de telle manière que toute négociation et toute recherche de règlement doivent être faites selon des critères objectifs et positifs. Toute entente acceptable doit être justifiée par les clauses contractuelles, la Loi et les règlements en vigueur. D'un autre côté, toute concession non justifiée en droit doit être évitée par souci d'équité par rapport aux autres soumissionnaires qui n'ont pas été retenus pendant l'analyse de soumissions. Dans un tel contexte, selon les gestionnaires, il est difficile de parler du partenariat, on y voit plutôt une relation d'affaires basée sur la maximisation des profits.

Par contre, selon trois acteurs, l'exercice d'une véritable relation du partenariat est possible lorsqu'on choisit librement les fournisseurs et lorsqu'on négocie avec ces derniers des contrats à l'amiable, de gré à gré. À ce moment, on peut envisager la médiation comme mode de règlement des différends. Dans un tel cas, il est exigé de la société d'État qu'elle soit en mesure de faire face à l'apparence de conflit d'intérêts en justifiant toute transaction et tout geste administratif dans ce sens. Par ailleurs, un acteur affiche une méconnaissance de la médiation commerciale à un point tel qu'il l'associe à la médiation imposée souvent par le gouvernement pour débloquer des négociations lors d'un conflit de travail. Dans ce cas, il la voit comme un exercice contraignant où le médiateur intervient directement, d'une façon accrue, dans la recherche d'une solution au conflit.

En conséquence, les acteurs ne voient pas la valeur ajoutée d'inclure une clause de médiation dans les contrats, car ils craignent d'être obligés de passer par la médiation pour régler chaque conflit, de telle sorte que l'entrepreneur ne sente plus l'urgence de régler ses demandes avec l'administrateur des contrats, étant donné qu'il a la possibilité de les régler en médiation. En effet, selon l'opinion de trois gestionnaires, une clause de médiation incluse dans les contrats risque de faire en sorte que les gestionnaires vont de se trouver très souvent en médiation. Selon eux, l'inclusion d'une telle clause dans les contrats va augmenter les coûts et peut même entraver le règlement hors cour des différends. De plus, six interviewés sur sept considèrent que la relation avec les fournisseurs constitue plutôt une relation d'affaires dont les objectifs sont plus divergents que convergents en raison de la maximisation des profits. Ainsi, trois gestionnaires rencontrés sont d'avis qu'avant d'instaurer une clause de médiation dans les contrats, il faut faire la démonstration que la

nouvelle façon de faire apportera une valeur ajoutée par rapport à la pratique usuelle. Ils résistent au changement parce qu'ils considèrent que le mode usuel est adéquat et ils ne voient pas l'urgence d'agir.

Cette position s'explique d'une part par la méconnaissance du potentiel de la médiation comme processus de transformation d'une situation conflictuelle en une situation de recherche d'une solution d'un problème commun. D'ailleurs, la société d'État a manifesté cette position à ses partenaires lorsqu'ils ont exprimé à plusieurs reprises leur désir d'ajouter dans les contrats d'Hydro-Québec une clause de procédure de règlement en cas de différends incluant la médiation.

L'analyse des discours sous-tend que souvent le médiateur tente de réconcilier les positions des parties en divisant la poire en deux. Pour cette raison, trois décideurs restent réticents à aller en médiation lorsque l'écart est important entre la demande de l'entrepreneur et l'offre raisonnable d'Hydro-Québec. Ainsi, une clause de médiation instaurée dans les contrats risque de contraindre la société d'État à accepter un règlement qu'elle juge défavorable. Cette façon de voir une clause de médiation dans les contrats témoigne de l'insuffisance de la représentation de ce mode en émergence.

De même, tous les acteurs clés expriment la crainte que l'introduction d'une clause de médiation dans les contrats crée une lourdeur administrative et qu'en plus, Hydro-Québec perdre l'élément dissuasif pour régler directement sur le terrain par négociation. Cette attitude s'explique par la volonté naturelle d'une entité publique de préserver le pouvoir assuré par le rapport de forces. En conséquence, il y a deux décideurs qui n'envisagent même pas d'introduire une clause de médiation à titre expérimental, car ils sont convaincus que l'introduction d'une telle clause nuira à la bonne gestion des différends à HydroQuébec où il y aura une forte augmentation des réclamations qui vont se trouver en processus de médiation. Toutefois, un gestionnaire demeure en faveur de tenter l'expérience d'introduire une clause de médiation dans un contrat particulier et d'évaluer par la suite sa plus-value par rapport au mode usuel. Il apparaît donc que des décideurs de première ligne reconnaissent l'insuffisance des informations véhiculées à propos de la médiation commerciale et son potentiel.

D'ailleurs, selon un gestionnaire, l'entreprise est tout à fait ouverte à recourir au processus de la médiation lorsque l'enjeu du conflit est discutable et lorsque le bien fondé n'est pas évident. Dans ce cas, Hydro-Québec préfère participer à la médiation sur une base volontaire et selon le cas. Car il y a des cas où le processus de la médiation n'est pas avantageux surtout lorsqu'il s'agit d'une affaire de principe où on est sûr d'avoir gain et cause. Donc, selon un acteur, il faut adapter le processus de règlement au conflit et non l'inverse. Cette attitude montre que l'entreprise est plus préoccupée de protéger les deniers publics que de faire des compromis pour assurer une relation durable avec les fournisseurs.

Autre élément non négligeable, un acteur croit qu'on peut recourir à la facilitation à titre préventif pour atténuer les conflits de personnalité entre les individus en charge au chantier, de sorte que le recours à un facilitateur peut contribuer à restaurer un climat positif dans ce milieu de travail qui se trouve souvent isolé. Cette perception démontre bien l'importance des relations humaines dans la relation d'affaires et qu'un climat positif dans ce milieu de travail isolé reste un objectif partagé par les deux parties en affaires.

Enfin, deux interviewés s'entendent pour dire que la société d'État offre déjà, avec le comité des réclamations, l'équivalent d'une médiation aux fournisseurs et que, par conséquent elle n'a pas besoin d'inclure une clause de médiation dans ses contrats. À cet effet, elle possède toutes les ressources pour gérer avec ses spécialistes un processus transparent et équitable réglant les différends avec ses fournisseurs. Cependant, si la société d'État ne dispose pas suffisamment des spécialistes pour gérer un processus équivalent à la médiation, l'instauration d'une clause de médiation dans les contrats sera alors justifiée. Cette perception de la médiation montre bien la crainte des acteurs clés de voir l'entreprise de l'État perdre un pouvoir dans la gestion des affaires des biens communs, ce qui explique l'insuffisance de représentation du médiateur et du processus de la médiation avec tout son potentiel.

Donc, la volonté exprimée par Hydro-Québec de considérer ses fournisseurs comme des alliés et son désir exprimé d'avoir une relation durable de partenariat, fondée sur la confiance, le partage de risque, l'équité, la transparence, la satisfaction de la clientèle et la dignité des personnes impliquées dans le projet, est motivée par les conditions du marché lui permettant d'accomplir sa mission fondamentale. Comme elle fait face de plus en plus à un marché menacé par des pénuries de travailleurs qualifiés, elle a senti récemment le

besoin de tenir des réunions de concertation avec les autres grands donneurs d'ouvrage comme la Ville de Montréal et le Ministère des Transports du Québec pour tenir compte de cette réalité dans la planification de leurs projets de construction. Elle est donc très intéressée à préserver des liens de partenariat avec les bons fournisseurs qualifiés et fiables qui sont en mesure de l'accompagner dans sa mission en garantissant son approvisionnement en biens et services stratégiques.

Comme d'un autre côté, elle résiste à acquiescer à la requête de ses partenaires d'instaurer dans ses contrats une clause prévoyant la médiation comme de règlement des différends, un écart émerge entre la relation de partenariat énoncée et le mode de règlement des différends déployé pour régler les conflits avec les fournisseurs. Cet écart est causé surtout par la méconnaissance du mode de la médiation commerciale avec tout son potentiel. Car les acteurs clés de la société d'État perçoivent la médiation à travers d'un cadre juridique où toute entente de règlement doit être conforme avec le contrat, la Loi et les règlements en vigueur.

Les décideurs interviewés ne perçoivent pas la médiation comme un processus de transformation guidée par les valeurs et intérêts communs partagés entre Hydro-Québec et son partenaire, et où le médiateur sert d'agent de changement pour transformer une situation conflictuelle en une situation où les deux parties seront conscientes de l'existence d'un problème commun à résoudre. Ils ne voient pas clairement que la solution recherchée ne s'arrête pas aux compensations financières directes, mais englobe le conflit avec toute son amplitude afin de préserver les relations futures entre Hydro-Québec et son fournisseur. Ils ne font pas le lien entre ce mode de règlement et les divers aspects du problème qui leur posent difficulté parfois : la recherche d'une solution d'un différend par la médiation, en plus de régler l'aspect financier direct, peut prendre en considération les valeurs du partenariat, la pénurie du marché, le règlement des irritants qui perdurent dans les documents contractuels, les conflits de personnalité des responsables au chantier, la sécurité d'approvisionnement, les impératifs de gestion des fonds publics et l'amélioration des relations à long terme. Donc, la méconnaissance de la médiation avec tout son potentiel par les acteurs clefs apparaît être la cause première de l'écart entre la conception des acteurs et le cadre de référence.

CONCLUSION

Le point de départ de cette recherche est issu de ma pratique comme gestionnaire de projets de construction dans une société d'État. Fort de mon expérience à Hydro-Québec, j'ai constaté que la société d'État affiche une certaine frilosité à introduire la médiation comme mode de règlement de différends malgré sa volonté d'établir une relation de partenariat avec ses fournisseurs. La problématique de cette recherche s'est construite à partir d'un constat d'une apparente incohérence dans le discours de l'entreprise qui prône un partenariat avec des valeurs qui semblent incompatibles avec l'absence de la médiation comme mode de règlement des différends avec les fournisseurs. Ainsi, l'enrichissement de la réflexion des acteurs clefs qui sont appelés à choisir la politique de règlement des différends entre la société d'État et ses fournisseurs définit l'objectif général de la recherche.

La question générale de cette recherche se pose comme suit : Y-a-t-il une incohérence réelle entre la conception du partenariat et l'absence de la médiation chez les acteurs à Hydro-Québec? Pour répondre à cette question, il fallait d'abord vérifier si, théoriquement, il existe un lien entre le partenariat et la médiation. Par la suite, il était important de connaitre la perception des acteurs clefs au sujet de la dynamique entre le partenariat et le mode de règlement des différends, ce qui a permis de voir dans quelle mesure la méconnaissance de la médiation avec son potentiel pouvait être la cause de l'écart.

Donc, les objectifs à atteindre par ce projet de recherche résident principalement dans trois questions spécifiques de recherche à savoir :

· Au point de vue théorique, y a-t-il un lien nécessaire entre le partenariat et la médiation et, si oui, quelle forme de médiation?

· Quelle est la perception des acteurs chez Hydro-Québec devant une éventuelle incohérence entre l'absence de médiation et le partenariat?

· Dans quelle mesure la méconnaissance de la médiation avec tout son potentiel estelle la cause de l'écart?

Le premier chapitre a permis de définir le cadre conceptuel en formulant les variables de
recherche à mesurer par les entrevues in situ. En plus, un survol théorique a permis de

répondre à la première question spécifique de recherche. À cet effet, la recherche dévoile qu'au point de vue théorique, il existe un lien entre le partenariat mis de l'avant par HydroQuébec et la médiation inspirée du concept de la négociation raisonnée de Ury et Fisher et de l'approche éthique de Georges A. Legault. Ainsi, ce modèle de médiation s'est avéré le meilleur mode pour actualiser les valeurs partenariales. Par conséquent, la recherche théorique démontre qu'il existe une incohérence entre l'absence de la médiation et le partenariat souhaité par la société d'État.

Le deuxième chapitre est consacré à obtenir la position des acteurs clefs devant une telle incohérence. À cette fin, des entrevues semi-dirigées ont été réalisées à l'aide d'un questionnaire structuré afin d'avoir une image fidèle des opinions des personnes interviewées. Des questions ouvertes ont permis aux acteurs d'exprimer librement le fond de leur pensée et ont évité les réponses complaisantes (politiquement correctes). Ainsi, à travers une expérience vécue, lorsqu'il était possible, chaque acteur a été questionné d'abord sur sa perception par rapport au partenariat. Ensuite, il a été interrogé sur sa conception du mode de règlement usuel et du mode de règlement alternatif. Par après, nous avons obtenu leur perception concernant la dynamique entre le partenariat et le mode de règlement des différends, ce qui a donné réponse à la deuxième question de recherche. À cet effet, celle-ci révèle que les acteurs consultés ne voient pas une incohérence entre le partenariat prôné par Hydro-Québec et l'absence de la médiation comme mode de règlement des différends en raison du caractère public des appels d'offres d'Hydro-Québec.

Le troisième chapitre a été dédié à analyser et interpréter les résultats obtenus par les entrevues des acteurs clefs. Aujourd'hui, la médiation commerciale s'est imposée comme un mode de règlement des différends commerciaux entre partenaires d'affaires et a acquis ses lettres de noblesse dans le domaine de la construction136. Cependant, Hydro-Québec et sa filiale SEBJ affichent une certaine frilosité à introduire une clause de médiation dans les contrats avec les fournisseurs. Il s'est révélé que la réticence de la société d'État à adopter une telle clause est causée d'une part par l'écart entre le partenariat pratiqué et le partenariat défini par le cadre conceptuel et d'autre part par la méconnaissance de la médiation avec

136 Jean H. Gagnon (2003). Développements récents en droit des affaires Service de la formation permanente du Barreau du Québec, Québec, EYB2003DEV536.

son véritable potentiel surtout dans une relation de partenariat. Ce qui fait qu'en pratique, les acteurs clefs rencontrés ne perçoivent pas une incohérence réelle entre leur conception du partenariat et l'absence de la médiation comme mode de règlement des différends. Toutefois, devant l'émergence de ce phénomène, certains acteurs clés montrent une timide ouverture quant à l'essai et l'instauration d'une clause de médiation dans un contrat à titre expérimental afin d'en évaluer la plus-value.

Enfin, les conditions économiques d'aujourd'hui font en sorte que la pénurie de la maind'oeuvre spécialisée est devenue un enjeu majeur et lance un défi de taille au monde des affaires. Pour faire face à cette nouvelle situation, il est tout à fait pertinent de poursuivre la réflexion pour réinventer de nouvelles relations d'affaires et de nouveaux modes de règlement des différends en mesure de soutenir un monde économique en pleine mutation.

BIBLIOGRAPHIE

Boisclair, Michel (2004). Le Partenariat : principes, définition, enjeux et mise en oeuvre, M.A.P., École nationale d'administration publique, Montréal, 20 pages.

Bonafé-Schmitt, Jean-Pierre (1992) La médiation : une alternative à la justice, Syros, Paris, 279 pages.

Bourcheix, Dominique F. (2001). Développements récents en médiation, Le rôle du médiateur: évolution et tendances, les Éditions Yvon Blais Inc., Québec, 194 pages.

Brousseau E. (2000). Confiance ou contrat, confiance et contrat, in Aubert F., Sylvestre JP., Confiance et rationalité, INRA.

Brulhart, Frank et Favreau Christophe (2003). Les modes de coordination et d'organisation des partenariats. XIIème Conférence de l'Association Internationale de Management Stratégique, Les Côtes de Carthage, 3, 4, 5 et 6 juin 2003.

Canada. Cour Suprême du Canada, Banque de Montréal c. Bail Ltée, 1992-2 R.C.S. 554, Nos du greffe : 21748, 21747.

Canada, Cour suprême du Canada (1996). R.C. Hinchey, 3 R.C.S. 1128 (Juge L'HeureuxDubé).

Caillouette, Jacques (2001). Pratique de partenariat, pratique d'articulation identitaire et
mouvement communautaire, Université de Sherbrooke, NPS, vol. l, no1, page 83.

Charbonneau, R., Marcotte, M. et Pellerin, J. P. (2007). Guide de gestion des réclamations, HQE/SEBJ, Hydro-Québec, Québec, 54 pages.

Cooper, Terry L. (1991). An Ethic of Citizenship for Public Administration, Enblewood Cliffs, Prentice Hall, 284 pages.

Commission du droit du Canada (s. d.). La transformation des rapports humains par la justice participative, ISBN: 0-662-89974-1, Catalogue: JL2-22/2003F.

Covey, Stephen M. R. et Bennis, Warren (s. d.). Speed of Trust, Southern California University, USA, 127 pages.

Desrouene A., Dreano V., Gauvrit R., Le Coz Y., Romano F. et Reverdy Thomas (2005). La création de la valeur dans la relation client/fournisseur, DESMA, IAE de Grenoble, Université Pierre Mendès, France (Recherche collective), juin 2005.

Donada, Carole France et Alex Kesseler, France (1997). Partenariat : Mythes et réalitépour les fournisseurs. Étude empirique dans l'industrie automobile. Groupe HEC et Centre de recherche en gestion, Montréal.

Ebrahimi, Mehran (2007). Communication personnelle, Département de management et de technologie, UQAM, Montréal.

Fisher, Roger et Ury, William (1982). Comment réussir une négociation, Éditions du Seuil, Paris, 224 pages.

Fortin, Jacques (2004). (5) Comment choisir son médiateur, J Fortin Médiation, [En
ligne]. http://www.jfortinmediation.qc.ca, (Page consultée le 18 décembre 2004).

Gagnon, Jean H. (2003). Développements récents en droit des affaires. Service de la formation permanente du Barreau du Québec, EYB2003DEV536.

Glockseisen, I. Mercedes (2000). L'amiable composition: instrument fragile ou assise du
renouveau juridique?
, Faculté de droit, Université McGill, Montréal, 41 pages.

Grammond, Stéphanie (2007). Poursuite de 200 millions $ contre Hydro-Québec, Journal La Presse, Cahier La Presse Affaires, Montréal, 14 septembre 2007.

Groupe CGI inc. (2006). Impartition : Étude technique, comment forger des partenariats gagnants en fondant la relation client-fournisseur sur des principes directeurs. Groupe CGI inc., Montréal, 8 pages.

Huchet, Guillaume (2007). Les clauses favorisant un rapprochement amiable, Village de la justice, [En ligne]. http://www.village-justice.com/articles/clausesfavorisantrapprochement2923.html

Hydro-Québec (1998). Nos partenaires d'affaires. Conseil d'administration, Politique approuvée le 11 septembre 1998 et entrée en vigueur le 1er octobre 1998.

Hydro-Québec (1998). Le partenariat avec les fournisseurs : une relation gagnantgagnant. Direction principale Approvisionnement et Services, ISBN2-550-33157-5, 98G027, 16 pages.

Hydro-Québec (2004). Rapport annuel 2004, Québec, 130 pages..

Hydro-Québec (2005). Clauses générales pour contrat de travaux, Article 19, 1er février 2005.

Hydro-Québec (2006). Plan stratégique 2006-2010, Québec, 62 pages.

Hydro-Québec (s. d.). Code de conduite 2006, Nos valeurs, notre responsabilité, Groupe affaires corporatives et secrétariat général, Bibliothèque et Archives nationales du Québec Montréal, ISBN 2-550-47189-X, ISBN 2-550-47190-3 (PDF), 2006G035.

Hydro-Québec (s. d.) Construction, in Hydro-Québec, Québec [En ligne]. http://www.hydroquebec.com/profil/hqequipement.html. (Page consultée le 10 avril 2008)

Hydro-Québec (s. d.) Nos politiques, in Hydro-Québec, Québec [En ligne]. http://www.hydroquebec.com/publications/fr/politiques/index.html. (Page consultée le 18 avril 2008)

Hydro-Québec (1998). Faire affaire avec Hydro-Québec, in Hydro-Québec, Québec [En ligne] http://www.hydroquebec.com/soumissionnez/pdf/brochure.pdf.

Institut de médiation et d'arbitrage du Québec (2002). Première vaste mobilisation pour implanter la médiation civile et commerciale au Québec, Communiqué de presse, octobre 2002.

Institut français de la médiation (2005). La médiation commerciale, Institut français de la médiation, Paris, 3 pages.

Kotter, John (1996). Leading Change, ISBN-0-87584-747-1, Harvard Business School Press, USA, 187 pages.

KPMG International (2007) Les futurs projets de construction menacés par une pénurie de main d'oeuvre qualifiée, Bruxelles, Belgique.

Leclercq, Christophe et Leclercq, Xavier (1993). Gestion stratégique de la concurrence en temps de crise, Éditions Maxima, Presses universitaires de France, Paris, 310 pages.

Legault, Georges A. (2001). L'hypothèse de l'éthicisation du droit, Les modes de règlement des différends : vers une autre « justice »? Collection Essais et conférences, Document 11, Chaire d'éthique appliquée, Université de Sherbrooke, Éditions G.G.C., ISBN 2-89444-127-4.

Legault, Georges A. (2004). Modèle théorique, les émotions, les valeurs et la médiation, in Revue de prévention et de règlement des différends, vol. 2, no 1, Faculté de droit de l'université de Sherbrooke, Québec, Canada.

Lesaffaires.com (2007). Fournisseur et partenaire. Lesaffaires.com, [En ligne]. http://www.lesaffaires.com (Page consultée le 1er décembre 2007).

Loi Provincial Court Act, Alberta, Canada.

Loi Queens Bench Act, Saskatchewan, Canada.

Loi sur l'Administration publique du Québec, L.R.Q., chapitre A-6.01.

Mathiot, A. (s. d.). La pathologie de la bureaucratie, La notion de la bureaucratie, [En ligne]. http://web.upmf-grenoble.fr/cours/scadmi/Fiche7.htm, Fiche no 8.

Nations Unies (2002). Publication des Nations-Unies, Numéro de vente F.05.V.4, ISBN : 92-1-233409-1.

Neuville, Jean-Philippe (1998). Il était une fois le partenariat, Réalités méconnues, in Gérer & Comprendre, Annales des mines, France.

Nogatchewsky Gwenaëlle (2005). Seigneurie, vassalité, partenariat et marché dans les relations client-fournisseur. XIVème Conférence Internationale de Management Stratégique, Université Paris-Dauphine, Pays de la Loire, Angers.

Perrault, C. et Beaudry, F. (s. d.). Récents développements en matière d'abus de droit: sommes-nous? 3.2 La nouvelle moralité contractuelle. EYB2005DEV1078.

Plamondon, Jacques A. (2002). Fonder l'éthique de l'administration publique, dans Télescope, ENAP, Québec, vol. 9, no1, novembre 2002.

Poitras, Jean (2008). Conflits & Stratégies, Développez votre leadership en gestion des conflits, Jean Poitras, [En ligne]. http://jeanpoitras.blogspot.com (Page consultée le 6 janvier 2008).

Québec, Ministère de la Justice (2005) La médiation civile et commerciale, une bonne façon de s'entendre, Québec, 10 mai 2005.

Québec, Ministre des transports du Québec (2003). Allocution, Colloque sur l'apport de partenariat, Montréal, 31 octobre 2003.

Québec, Transport Québec (2005). Partenariat public-privé, contexte d'application. Centre d'affaires, Québec.

Radio-Canada (2005). Nouvelles, 23 novembre 2005, Montréal.

St-Arnaud, Louis (2005). La construction des ouvrages énergétiques et la pénurie de maind'oeuvre spécialisée, Magazine CHOC, vol. 23, no1, Juin 2005.

Steenland, Peter (1999). Du règlement des litiges dans les tribunaux fédéraux américains, in Revues de l'IIP, USA., décembre 1999.

Stimec, Arnaud (2001). La médiation et l'entreprise en France; État des lieux et perspectives, Université Paris I, Panthéon, Sorbonne, 35 pages.

Tyan, Emile (1972). Droit de l'Arbitrage, Librairie Antoine, Beyrouth, Liban, 552 pages.

Université de Sherbrooke (2001). Pratique de partenariat, pratique d'articulation identitaire et mouvement communautaire, NPS, no1.

USA. (2001). Uniform Mediation Act, National Conference of Commissioners on Uniform State Laws, USA.

ANNEXE 1

QUESTIONNAIRE DE L'ENTREVUE SEMI-DIRIGÉE

Objectif de la question

Sous-thème de
la question

Libellé de la
question

Sonde

1- Variables personnelles

Âge

Quel est votre âge?

Écart générationnel

 

Sexe

Sans question

 
 

Formation

Quelle est votre

formation académique et
professionnelle?

.Technique ou

gestion

.Niveau

universitaire,

collégial ou autre.

 

Position hiérarchique

Quelle est votre

position hiérarchique?

.Degré de pouvoir de changer et d'influencer.

 

Secteur d'activité

Quelle est votre

emploi et votre

secteur d'activité?

.Contrôle de gestion; .Approvisionnement; .Gestion de contrats;

 

Années de

service à HQ

Quel est le nombre de vos années de service à HQ?

. Culture de gestion; .Bureaucratie publique;

 

Années de

service dans le secteur privé

Quel est le nombre de vos années de service dans le secteur privé?

.Culture de gestion; .Capacité

d'ouverture sur les

demandes du corps social.

(Entrepreneurs et

fournisseurs)

2) Écart

partenariat/règlement des différends.

2.1Conception du partenariat.

2.2 Conception
du mode de

-Pourriez-vous à

l'aide d'un

exemple réussi de
partenariat nous

dire comment se
concrétise

l'approche du

partenariat avec les fournisseurs à Hydro-Québec?

-Pourriez-vous

avec un cas non

réussi de

partenariat nous

dire quelles étaient vos attentes et vos déceptions?

Quels sont les

modes usuelles de
règlements des

. Relations durable; .Partage du risque;

.Relation Gagnant-

gagnant;

.Considérer les

fournisseurs comme des alliés;

.Confiance et respect mutuel;

.Désirs partagés;

.Équité et partage

des bénéfices;

. Négociation

 

règlement des

différends.

différends civils et commerciaux entre HQ et ses partenaires?

.C'est quoi pour

vous une
négociation?

bipartite.

. Critères objectives,
clauses du contrat,

normes Lois et
règlements.

. Maximisation des intérêts.

 
 
 

.Gestion des

compromis.

 
 
 

. Résolution d'un

problème commun.

 
 

Selon votre

expérience

pratique, quelles

sont les forces de

. Judiciaires.

.On garde le

 
 

ces modes?

contrôle.

 
 
 

.Utilisation du

rapport de forces
favorable.

 
 
 

. Validation des

clauses

contractuelles.

 
 
 

.Justification de la

décision auprès du
corps social.

 
 
 

.Transparence

 
 

Quelles sont les

.Apparence de

 
 

faiblesses?

conflit d'intérêts.

 
 
 

. Délais.

 
 
 

.Coûts.

 
 
 

.Faillites de

partenaires.

 
 
 

.Création d'une

jurisprudence défavorable.

 
 

Avez-vous expérimenté des
modes alternatifs de règlement des différents civils et commerciaux avec vos partenaires?

Pouvez-vous nous dire quelles étaient vos attentes par rapport au processus?

Pouvez-vous nous dire quelles étaient vos attentes par rapport au médiateur,

facilitateur ou à l'arbitre ?

Pouvez-vous nous faire connaitre en quoi vous étiez satisfait?

Pouvez-vous nous faire part de vos déceptions?

.Relations affectées. .Facilitation. .Médiation.

.Préserver la relation d'affaire.

. Permettre une solution

confidentielle

.Trouver une

solution équitable

pour les deux
parties.

.Trouver la meilleure solution selon les circonstances.

.Délais.

.Coûts.

.Transparence. .Solution d'un
problème commun.

.Degré d'intervention.

.Expertise dans le domaine.

.Création de la

valeur.

.Règlements des

conflits sous-jacents.

 
 

.Degré

d'intervention. .Impossibilité de
trouver une entente.

 
 
 

.Ouvrir son jeu avant procès.

 

2.3

.Quelle relation

Actualisation des

 

Dynamique

trouvez-vous entre

valeurs énoncées par

 

entre

le partenariat et le

HQ relative au

 

partenariat et

mode de règlement

partenariat.

 

règlement des

des différends?

 
 

différends.

 

.Relation durable.

 
 
 

.Confiance.

 
 

.Quelle est selon

.Partage des risques

 
 

vous la nature de

et bénéfices.

 
 

cette relation?

.Objectif commun à atteindre.

 
 

.S'il y a absence de

.Création de la

 
 

relation, Pourquoi?

valeur.

 
 

.Pourquoi vous

préférez un tel mode de règlement de différends plutôt qu'un autre?

 
 
 

.Êtes-vous en

faveur pour

instaurer dans vos

contrats de

fourniture d'une

clause de

réglementent des

différends incluant

la médiation civile et commerciale?

 
 
 

.Pourquoi?

 





Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille