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L'execution par l' administration des décisions du juge administratif, en droit français et en droit grec.

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par Antonia HOUHOULIDAKI
Université Paris I Sorbonne - DEA de droit public comparé des pays européens 2002
  

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B) Une intervention strictement encadrée.

La validation législative, étant un procédé assez contesté, il a fallu le rendre exceptionnel et surtout l'encadrer.

En Grèce, il est presque totalement interdit, et en France, alors, qu'au passé son utilisation était fréquente, ainsi que peu contrôlée, ces dernières années le juge, notamment constitutionnel est devenu plus exigeant.(1)

De plus, il faut veiller à ce que les lois de validation ne portent pas atteinte aux règles du « procès équitable », lorsque sont en cause des contestations de caractère « civil » ou des accusations en matière « pénale », au sens de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme.

À ce titre, la Cour européen des droits de l'homme, opère, à son tour, un contrôle sur les différentes validations législatives.( 2)

1) Les conditions exigées pour l'exercice du pouvoir de validation.

Avant de procéder à l'examen des conditions exigées par le juge constitutionnel, il paraît nécessaire d'exposer, en quelques lignes, la situation hellénique.

Actuellement en Grèce, on distingue deux hypothèses. D'un côté, celle d'une affaire pendante devant la juridiction administrative. Dans ce cas, la validation législative peut être tolérée, sous condition que la réglementation soit générale et abstraite.182(*)

De l'autre côté, il est rappelé qu'aucune loi de validation ne peut intervenir, une fois que le juge administratif a prononcé un jugement, devenu définitif. Un argument utilisé à cet égard, est le fait que le recours pour excès de pouvoir, qui constitue une forme de protection juridictionnelle des administrés, est expressément prévu par la Constitution hellénique, dans son article 95. Ce qui veut dire qu'une éventuelle validation après l'annulation d'un acte administratif, serait contraire à la Constitution.

De son côté, son homologue français, a lui aussi, apporter des limites à l'intervention du législateur.

En premier lieu, le législateur doit respecter les exigences du principe de la séparation des pouvoirs, ce qui veut dire, qu'il doit s'abstenir de faire obstacle à l'exécution des actes annulés par les décisions juridictionnelles « passées en force de chose jugée ».183(*)

En second lieu, doit être respecté le principe constitutionnel de la non-rétroactivité des peines et des sanctions plus sévères.

En troisième lieu, l'acte annulé ne doit méconnaître aucun principe de valeur constitutionnelle. On doit, pourtant, mettre à part le cas où « le but d'intérêt général visé par la validation serait lui-même de valeur constitutionnelle ».184(*)

En outre, il est nécessaire que la validation soit justifiée par un « but d'intérêt général suffisant », tel que la préservation du fonctionnement continu du service public, ou même, la sauvegarde du déroulement normal des carrières du personnel, dans le domaine de la fonction publique.185(*)

Enfin, le législateur doit définir strictement la portée de la validation, afin de permettre l'exercice du contrôle de la juridiction administrative sur les suites des actes annulés.186(*)

Par ailleurs, le Conseil d'État français, a apporté, lui aussi, certaines clarifications en la matière.

Il a, ainsi, refusé de reconnaître au gouvernement, agissant pas ordonnances en vertu d'une loi d'habilitation, le pouvoir de prononcer des validations, lorsque la loi ne le lui a pas conféré.187(*)

De plus, il a jugé « qu'en l'absence de dispositions expresses de la loi de validation ou d'indication précise des travaux préparatoires », les personnes auxquelles la validation est préjudiciable ont droit à réparation « sur le fondement du principe de l'égalité des citoyens devant les charges publiques ». Cela suppose, évidemment, que le préjudice allégué doit être certain et suffisamment grave.188(*)

En somme, on constate que ce fameux procédé, est loin d'être librement utilisé dans les deux pays. Pourtant, il ne faut pas oublier la pression apportée par le juge européen.

2) Le contrôle opéré par la Cour européenne des droits de l'homme.

Les lois de validation, constituent une pratique législative ancienne. Ces vingt dernières années, la liberté totale dont jouissait le législateur français, a été singulièrement restreinte. La première étape a été la décision du Conseil Constitutionnel, du 22 juillet 1980, qu'on a déjà examiné.

Par la suite, le Conseil d'État français, a décidé, dans le fameux arrêt   Nicolo du 20 octobre 1989, d'examiner la conformité aux conventions internationales des lois qui leur sont postérieures. 189(*) Ainsi, dans des décisions postérieures, il a prononcé la conformité d'une loi de validation au droit communautaire,190(*) ou à la Convention européenne des droits de l'homme191(*) et plus particulièrement à l'article 6 §1 de cette dernière, relatif au procès équitable.192(*)

Néanmoins, c'est l'évolution de la jurisprudence de la Cour de Strasbourg, depuis sa décision du 9 septembre 1994,  Raffineries grecques Stran et Stratis Andreadis c/ Grèce, qui a contribué à resserrer le contrôle que le Conseil Constitutionnel avait introduit en 1980.193(*) Notons, que le droit hellénique fut, lui aussi, largement influencé par cette évolution.

En effet, la Cour européenne des droits de l'homme, dans l'affaire des « Raffineries grecques »194(*) précitée, a jugé que l'action du législateur grec a eu pour objectif et pour effet de rendre impossible l'exécution d'une sentence arbitrale constatant une créance de l'État. Finalement, l'État grec avait par deux fois violé le principe de prééminence de droit, non seulement en n'exécutant pas la sentence, mais encore en intervenant, par le biais d'une loi de circonstance, pour dicter ce qui lui était favorable, dans le contentieux l'opposant au requérant.

Cette attitude constituait une violation de l'article 6 §1de la CEDH et de l'article 1 du protocole additionnel, qui consacre le droit au respect de ses biens.

Cependant, un peu plus tard, la Cour européenne a nuancé sa position. Plus particulièrement, dans la décision du 23 octobre 1997,  National and Provincial building society v/ Royaume Uni , 195(*) elle a énoncé que « l'article 6 §1 ne saurait s'interpréter comme empêchant toute ingérence des pouvoirs publics, dans une procédure juridictionnelle pendante, à laquelle ils sont parties ».

Désormais, trois conditions doivent être remplies afin que l'intervention du législateur soit admise. D'une part, le caractère non- définitif de la procédure juridictionnelle. D'autre part, la proportionnalité de l'atteinte au droit d'accès à un tribunal, et enfin, l'existence d'un « motif d'intérêt général impérieux ».

En outre, le contrôle du juge sur l'existence d'un intérêt général justifiant une loi de validation, s'est encore resserré, depuis la décision  Zielenski Prada Gonzales  du 28 octobre 1999 de la Cour européenne, qui a écarté une loi de validation, comme incompatible avec l'article 6§1.

Cette affaire a mis en lumière la difficulté que soulèvent les appréciations divergentes des juridictions, puisque cette loi de validation avait été jugée conforme à la Constitution française, par le Conseil constitutionnel et conforme à la CEDH par la Cour de cassation.

Néanmoins, aujourd'hui, la jurisprudence des différentes cours suprêmes est en voie de convergence vers une plus grande sévérité. On peut citer, à titre d'exemple, le décision du Conseil constitutionnel du 29 décembre 1999, celle de la Cour de cassation du 20 juin 2000  Crédit Lyonnais et M.et.Mme Lecarpentier, et enfin, celle du Conseil d'État, du 28 juillet 2000  Tête.196(*)

Dans cette dernière, pour la première fois, le Conseil d'État écarte, pour violation de l'article 6§1 de la CEDH, une loi de validation. En l'espèce, l'appréciation, par la Haute juridiction, de l'existence d'un intérêt général a été faite d'une manière absolue.

En somme, le contrôle opéré, tant par la Cour européenne, que par les juridictions françaises et helléniques, porte essentiellement, sur le respect d'exigences liées à la sécurité juridique et qui découlent des notions de prééminence du droit et du procès équitable.

Toutefois, la sécurité juridique, peut être utilisée, en ce qui concerne les validations législatives, soit comme élément justifiant l'intervention du législateur, soit, enfin, comme facteur de limitation de cette dernière.

Au nom du principe de l'indépendance de l'administration, on débouche vers une aberration. En effet, peut- on concevoir que la personne publique, avec la complicité du législateur, refuse d'appliquer la loi, voir la Constitution, alors qu'ils sont les « représentants » de ce qu'on appelle l'État de droit.

Face à cet état de fait, des techniques ont été mises en place, afin de remédier à cette contradiction.

* 182 ÓÅ 542 /1999 ; Il est important de noter qu'en Grèce, il n'existe pas un Conseil Constitutionnel et par conséquent, tous les tribunaux peuvent procéder à un contrôle de constitutionnalité des lois de validation.

* 183 Voir CC 29 décembre 1988, Loi fin. pour 1988, p.267, RFDA 1989, p.862, note B.Mathieu.

* 184 R.Chapus, Droit du contentieux administratif, précité p.1016.

* 185 CC 9 avril 1996, Dispositions d'ordre écon. et fin., p.60, AJ 1996, p.369, chron. O.Schrameck ,

LPA septembre 1996, n° 107, note B.Mathieu, RDP 1996, p.1147, note X.Prétot, RFDA 1996,

p.1598, note P.Gaia.

* 186 CC 11 janvier 1995, Financement de la vie politique, JO 14 janvier, p.733.

* 187 CE 24 septembre 1961, Fédérat. des synd. de police, p.658, D 1962, p.424, note M. Fromont.

* 188 CE Ass. 1er décembre 1961, Lacombe, p.674, AJ 1961, p.24, chron. J- M Galabert et M. Gentot, S 1962, p.89, concl. A. Dutheillet de Lamothe.

* 189 CE Ass. 20 octobre 1989, Nicolo, Rec.p.190.

* 190 CE 5 mai 1995, Ministre de l'équipement c/ SARL DER, Rec. P.192.

* 191 CE 30 novembre 1994, SCI Résidence Dauphine, Rec .p.515.

* 192 CE Ass.5 décembre 1997, Ministre de l'Education c/ OGEC de Saint-Sauveur-le- Vicomte, Rec .p.464 ; même jour, Mme Lambert, Rec.p.446.

* 193 Évolution de la jurisprudence de la Cour de Strasbourg : 20 novembre 1995, Presos naviera c/ Belgique ; 28 octobre 1999, Zielenski Prada Gonzales c/France ; 14 décembre 1999, Antonakopoulos c/Grèce ; 28 décembre 2000, D.Georgiadis c/ Grèce.

* 194 Cour EDH, décision A 301-B

* 195 Le commentaire : Rétroactivité et Convention européenne des droits de l'homme, L.Sermet, RFDA 1998, p.990.

* 196 CE 28 juillet 2000, Tête et Assoc. du collectif pour la gratuité contre le racket, AJ 2000, p.796, chron. M. Guyomar et P. Collin : à propos de la validation de l'institution d'une redevance pour l'usage d'un ouvrage d'art.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand