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L'encadrement juridique des risques biotechnologiques

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par Faiza Tellissi
Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de tunis - Mastère en Droit 2002
  

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SOMMAIRE

PARTIE I : UN ENCADREMENT JURIDIQUE NECESSAIRE. p13

CHAPITRE 1 : De la Convention sur la Diversité Biologique au Protocole de Carthagène. p14

SECTION 1 : Une difficile maturation. p15

SECTION 2: Le contenu du Protocole de Carthagène. p25

CHAPITRE 2 : Les instruments juridiques spécifiques de mise en oeuvre de l'encadrement p39

SECTION 1: Les modalités de protections prévues par le Protocole. P40

SECTION 2: Les instruments mis en place au plan national: l'exemple tunisien. p54

PARTIE II : UN ENCADREMEMENT JURIDIQUE GENERATEUR DE CONFLITS p70

CHAPITRE 1:La régulation parallèle du commerce international des OGM par le droit de l'OMC p71

SECTION 1: L'OMC: une instance multilatérale régulatrice du commerce

international p72

SECTION 2: Les conflits potentiels résultant de cette régulation parallèle p84

CHAPITRE 2 Les prémices d'une articulation entre les deux systèmes juridiques. p100

SECTION 1: Le champ de l'articulation entre les deux systèmes juridiques p100

SECTION 2 La portée limitée de cette articulation p113

INTRODUCTION

Ensemble de techniques et de connaissances liées à l'utilisation du vivant dans le processus de production, les biotechnologies se trouvent à l'interconnexion de multiples disciplines comme la microbiologie, la génétique, la biochimie, la biophysique ou encore la bio informatique. De ce fait, les applications potentielles de cette technique sont très nombreuses. Les biotechnologies trouvent ainsi application dans les domaines agricole, agroalimentaire, dans les domaines de la santé et de l'industrie.

L'une des créations de ces biotechnologies, sont les organes génétiquement modifiés, définis comme «tout organe dont le matériel génétique a été modifié d'une manière qui ne se reproduit pas naturellement par multiplication ou par recombinaison naturelle».1(*)

En fait, cette technologie s'inscrit dans la continuité de la sélection des variétés agricoles, permettant l'amélioration des qualités génétiques d'une plante ou d'un animal par croisements depuis des siècles.

Deux spécificités de la «transgénèse» (modification génétique) apparaissent: elle est plus précise que les croisements classiques, puisque seul le caractère génétique désiré est transmis; elle permet aussi le transfert, jusqu'alors impossible, de gènes entre des espèces différentes.

Ces techniques, en intervenant au niveau des cellules et non au niveau des mécanismes de la reproduction sexuée, permettent d'obtenir des organes dotés d'une structure génétique inédite.

Ainsi, les biotechnologies permettent de modifier la vie et de produire des micro organes ou organes (plantes, animaux), qui n'auraient jamais existé naturellement.

De ce fait, on en attend d'immenses progrès, par exemple dans le secteur pharmaceutique qui fonde sur eux de grands espoirs. Le secteur agricole, attend de ces nouvelles techniques qu'elles améliorent les végétaux en les rendants résistants aux herbicides, aux maladies..., et qu'elles permettent l'éradication de certaines maladies animales ou encore l'amélioration nutritionnelle animale. Dans le secteur alimentaire, l'introduction d'un gène nouveau peut aussi viser à améliorer la qualité de conservation des aliments, ainsi que des qualités organoleptiques (goût, odeur, aspect, couleur...).

Le développement des biotechnologies, par les perspectives prometteuses qu'elles offrent, représente un enjeu considérable. Cinq principaux enjeux apparaissent liés au développement du génie génétique.

Tout d'abord l'enjeu de la sécurité alimentaire.

Le constat dressé par des organisations internationales comme la FAO est le suivant: la sécurité alimentaire de la planète devrait diminuer au 21ème siècle, sous l'effet conjugué de la population et de la diminution des surfaces cultivées.

En effet, on estime que l'augmentation de la population mondiale devrait atteindre en moyenne 83 millions par an entre 2000 et 2025. De plus, on assiste à la réduction des surfaces cultivées. Le génie génétique pourrait donner un nouveau souffle à l'amélioration des rendements agricoles, selon les experts de la Banque Mondiale. L'accroissement de la productivité, la résistance à la sécheresse et aux conditions climatiques extrêmes sont, par exemple, des perspectives porteuses de solutions pour l'avenir.

L'enjeu environnemental est tout aussi important.

La «révolution verte» ne s'est pas faîte sans dommages pour l'environnement. Les remarquables progrès organiques des dernières décennies sont en partie dûs à l'utilisation accrue des pesticides et des herbicides. L'agriculture est donc devenue fortement consommatrice d'intrants. Les biotechnologies peuvent contribuer à développer une autre logique, plus respectueuse de l'environnement, plus préservatrice des ressources à moyen terme de notre planète: c'est la logique du développement durable.

Des applications agricoles du génie génétique permettent en effet de diminuer massivement l'utilisation des herbicides et insecticides, en instaurant par exemple des «autoprotections» contre les ravageurs dans le génome des plantes.

Autre enjeu, l'enjeu économique lié à l'utilisation des OGM et qui dépasse largement la seule question des échanges agricoles internationaux. Ce sont en effet de nombreux secteurs de l'économie qui pourraient être affectés par la révolution génétique. Le nombre des applications de cette technique, laisse entrevoir l'ampleur des conséquences que les biotechnologies pourraient avoir. Car dans l'économie mondiale, la biotechnologie est en passe de devenir un facteur essentiel de croissance et d'emplois.

Le quatrième enjeu est relatif au statut de l'agriculteur.

De fortes restructurations des filières semencières et agricoles pourraient être induites par l'arrivée des biotechnologies. Si l'industrie semencières est concernée par ce mouvement, le statut de l'agriculteur, sa fonction, sa place dans la chaîne de la valeur entre l'amont et l'aval de sa production, pourrait également être modifiés par l'avènement du génie génétique.

Enfin le questionnement éthique constitue un enjeu considérable.

Le génie génétique révolutionne notre relation au vivant. En ce sens, il est incontestable que l'introduction de la biotechnologie doit s'accompagner d'une réflexion approfondie sur sa signification éthique. Cette réflexion éthique nécessaire doit être approfondie et doit permettre d'éclairer les choix de la société et des décideurs publics.

L'avènement des biotechnologies est donc lourd d'enjeux pour l'économie, l'environnement, la société. Ce défi nouveau nécessite une réponse claire de la part du corps social et des responsables.

Pourtant, l'analyse comparative des attitudes des différents pays du monde met en évidence une géopolitique contrastée.

L'Amérique du Nord dispose d'une avancée importante, puisqu'aux Etats-Unis et au Canada près de ¾ des surfaces transgéniques actuelles sont cultivées. Ce secteur y est perçu comme un enjeu économique aussi important que les technologies de l'information. Il fait l'objet d'une mobilisation des pouvoirs publics et d'une bonne acceptation de la part de l'opinion.

La sphère pacifique s'engage dans cette voie: après la Chine, c'est au tour du Japon qui a fait depuis 1981, du secteur des biotechnologies une priorité nationale.

L'attitude européenne, plus réservée, contraste avec la donne mondiale, même si des différences d'appréciation s'y font jour.

En Europe, l'opinion publique est inquiète et partagée. Pour des raisons culturelles et conjoncturelles, cette technique ne suscite pas beaucoup de sympathie. En outre, le citoyen n'a pas le sentiment de pouvoir exercer librement son choix.

Les Pays en Développement, s'inquiètent quant à eux des conséquences économiques et sociales du développement des biotechnologies sur leurs systèmes de productions locaux.

Ainsi, si les nouvelles techniques issues du génie génétique font naître, par les potentialités qu'elles recèlent, de nombreux espoirs, elles font également naître de grandes inquiétudes, fondées sur les risques potentiels.

En ne connaissant pas les limites du génie génétique, la prudence s'impose.

L'éventail des risques potentiellement liés au développement de la transgénèse, amène à les classer en deux catégories.

Tout d'abord le risque pour l'environnement.

Il tient à l'éventualité d'une transmission, non désirée, du «transgène» à d'autres espèces, ainsi qu'à l'apparition d'éventuelles conséquences non souhaitées sur les insectes ou la rhizosphère, partie du sol située dans l'environnement immédiat des racines. Ce risque tient aussi à la possibilité d'une accélération de l'appauvrissement actuel de la biodiversité génétique.

Ensuite, le risque alimentaire.

Il est indispensable de s'assurer que la consommation d'Organes Génétiquement Modifiés (OGM) ou d'aliments qui en sont issus, ne présente pas de risque toxicologique (en cas notamment de transmission d'un gène provenant d'un aliment lui-même allergène).

Ainsi, les modifications génétiques menacent la santé des personnes ainsi que les équilibres naturels à partir du moment où il y a danger et exposition à ce danger.

En l'occurrence, dans le cadre d'opération faisant appel à la recombinaison d'ADN, celui-ci ne peut résulter que de la pathogénicité du produit issu de la modification génétique.

Quant à l'exposition, celle-ci ne peut dépendre que des conditions d'utilisation de ce nouveau produit, soit en milieu confiné, soit dans le cadre d'une dissémination volontaire. Il convient alors de distinguer entre le micro-organisme utilisé en milieu confiné puis détruit en fin de cycle, du micro-organisme destiné à être libéré dans l'environnement. La gravité du risque présenté par le micro-organisme modifié résulte de la pathogénicité de celui-ci et de l'usage qui en est fait.

Les OGM ont suscités des interrogations, notamment politiques, quant à une possible réglementation afin de prévenir les risques biotechnologiques. Au fur et à mesure de l'évolution des activités basées sur ces technologies, notamment des activités commerciales, la portée des réglementations nationales s'est élargie.

Il n'a pas été facile de concevoir des cadres réglementaires pour les OGM, vu le besoin d'établir un équilibre adapté entre des avantages technologiques potentiellement importants et des mesures de sauvegarde de l'environnement et de la santé humaine.

Progressivement, le rôle du droit en tant que «fournisseur» de mécanismes permettant d'assurer une manipulation, un transport et une utilisation sans risques d'OGM, est venu sur le devant de la scène.

En effet, dans un domaine aussi nouveau, ce ne peut être que le droit qui pose les grands principes régissant les rapports de l'homme et de la science.

Les enjeux de la prévention des risques biotechnologies notamment dans le contexte des mouvements transfrontières d'OGM, ont rendu indispensable un régime international; en effet, la sécurité biologique ne peut être assurée en l'absence d'une démarche concertée entre pays. C'est la raison pour laquelle le Protocole de Carthagène sur la prévention des risques biotechnologiques a été négocié.

La Convention sur la Diversité Biologique (CDB), adoptée en mai 1992 à Nairobi, est la convention «mère» du Protocole et contient un certain nombre de disposition qui restent directement applicables ou qui ont des incidences pour la mise en oeuvre du Protocole.

Les objectifs de la Convention sont la conservation de la diversité biologique, l'utilisation durable des éléments qui la composent et le partage juste et équitable des avantages découlant de l'exportation des ressources génétiques.

Lors de la négociation de la CDB, le débat tournait autour des alternatives suivantes: des dispositions rendant obligatoire la mise au point d'un Protocole sur la sécurité biologique, ou un texte n'appelant pas explicitement à l'élaboration d'un Protocole mais faisant obligation aux Parties d'en examiner le besoin. Cette dernière solution a prévalu.

En 1994, lors de la première session de la Conférence des Parties à la Convention (COP) à Nassau, deux réunions ont été prévues afin d'examiner les besoins et les modalités d'un Protocole relatif à la prévention des risques biotechnologies.

Lors de sa deuxième session en 1995 à Djakarta, la COP a constitué un Groupe de Travail Spécial sur la prévention des risques biotechnologies (GTSPRB) à composition non limitée, afin d'élaborer un Protocole à ce sujet en vue de son examen par la COP.

Ainsi, la nécessité d'un cadre juridique adapté et cohérent s'est rapidement fait sentir, mais les progrès dans sa définition sont particulièrement lents. Plusieurs raisons l'expliquent, parmi lesquelles les contradictions fortes, presque irréductibles, entre les exigences du commerce international et le libre échange.

En effet, les OGM font l'objet de mouvements transfrontières et présentent la particularité de se dissimuler dans l'espace et à franchir les frontières. De ce fait, le droit de l'environnement ainsi que le droit du commerce international sont sollicités.

La tendance du libre échange est-elle alors compatible avec les exigences de protection de l'environnement?

En fait, deux séries de règles juridiques prétendent réglementer le même objet, la circulation internationale des OVM; les premières découlent logiquement du droit du commerce international, très exactement des différents accords relevant de l'OMC, les secondes, du droit international de l'environnement, et plus précisément de la CDB et du Protocole qui la complète.

Jusqu'à l'entrée en vigueur du Protocole, le droit de l'OMC est le seul applicable. Après l'entrée en vigueur du Protocole2(*), les deux systèmes juridiques s'appliqueront de manière concomitante.

Paradoxalement, ils répondent pourtant à des logiques assez contradictoires: faciliter le libre commerce d'un côté, d'un autre côté, le sécuriser en le restreignant si nécessaire pour des motifs environnementaux et sanitaires.

Cette régulation parallèle du commerce des OGM dans le cadre de la CDB et dans le système de l'OMC ne va pas sans susciter dés lors, des difficultés d'articulation.

La dualité des régimes juridiques laisse en effet entrevoir des risques de conflits normatifs à l'issue incertaine, poussant à s'interroger sur les moyens de prévenir ou résoudre les différends entre Etats qui pourraient en découler.

Apres avoir étudié, comment le Protocole de Carthagène encadre les risques issus des biotechnologies (Partie I), nous nous interrogerons sur les conflits potentiels pouvant découler d'une régulation parallèle du commerce international des OGM, par le droit de l'OMC et le Protocole de Carthagène (Partie II)

* 1 Directive 90/200/CEE du 23 avril 1990 relative à la dissémination volontaire d'OGM dans l'environnement.

* 2 Le Protocole de Carthagène est entrée en vigueur le 11 septembre 2003.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry