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Les conventions locales: un outil novateur de gestion des collectivités locales au Sénégal

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par Abdoul Aziz Sow
Université Gaston Berger de Saint louis - DEA Droit de la Décentralisation et gestion des collectivités locales 2005
  

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Section2 : Problématique de l'assise juridique des CL

La problématique majeure posée par les conventions locales est principalement leur assise juridique. En effet, peut on permettre dans un Etat unitaire même décentralisée que des populations puissent prendre des règles faisant office de loi dans des collectivités géographiques données ? C'est tout

le sens et l'intérêt de la controverse sur le caractère légal ou illégal des conventions locales. Après avoir exposé les termes de la controverse (par1), nous tenterons de montrer la nécessité pour les pouvoirs publics de trouver une articulation réussie entre légitimité et légalité (par2) afin de lever définitivement le flou juridique dans lequel se retrouvent très souvent les dites conventions.

Paragraphe1 : Les termes de la controverse

La principale problématique posée de manière spécifique par les conventions locales est la question de leur légalité. Sont elles un compromis juridique ou u contournement de la loi ? Jusqu'à quel degré les textes en vigueur au Sénégal accordent ils la possibilité aux acteurs locaux de mettre

en place des dispositions à caractère réglementaire ? Pour décortiquer cette nébulosité juridique, il serait intéressant de poser les termes de la controverse à travers d'une part l'argumentaire de ceux qui postulent la

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validité des conventions locales d'une part, et d'autre par les négationnistes des référents juridiques. La notion fait l'objet de «pédalages conceptuels»77 laborieux car chacun s'ingéniant à l'accorder à ses propres visions et objectifs. Pour les partisans de la thèse d'une validité juridique des conventions locales, l'ère de la décentralisation ouvre la brèche à une participation des populations dans le processus de développement local particulièrement dans la gestion des ressources naturelles et environnementales. Symbolisée par le principe constitutionnel de la libre administration des collectivités locales78, les conventions entrent donc logiquement dans cette prescription.

Les partisans de la légalité des conventions locales se fondent entre autre texte sur le code forestier79 qui dispose dans l'article R14 que : « pour les forêts relevant de leur compétence, les collectivités locales élaborent ou font élaborer des plans d'aménagement. » Ainsi, rien ne s'oppose à ce que la collectivité locale confie par contrat aux populations, le soin d'élaborer des plans d'aménagement et de gestion des dites parcelles. La durée d'application est, aux termes de l'article R16 du code forestier comprise entre dix et vingt- cinq ans. Ce plan doit, aux termes de l'article R11, comprendre le programme des coupes à exploiter c'est-à-dire (nature, assiette, périodicité et quotité en volume ou en surface, ainsi que les travaux de régénération), le programme des travaux d'amélioration sylvicole (nature, assiette, importance, estimation

et époque de réalisation). De même, au terme des articles R 32 et R 33 ; les collectivités locales peuvent également conclure des contrats de culture avec un tiers dans les forêts relevant de sa compétence. Ces tiers peuvent être constitués par les population locale de façon individuelle ou collectivement à travers une association. Cet état de fait est juridiquement conforté par l'article 3 alinéa 2 de la loi 96-06 portant code des collectivités locales qui dispose que : « ... elles associent en partenariat, le cas échéant, à la réalisation des projets de développement économique, éducatif, social et culturel, les mouvements associatifs et les groupements à caractère

77 Djiré Moussa « les conventions locales au Mali : une grande nébuleuse juridique et un pragmatisme en GRN » ;

IIED 2004 ; page 5.

78 Article 102 de la constitution de janvier 2001.

79 Loi n° 98-03 du 8 janvier 1998 portant Code forestier.

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communautaire.» Les populations peuvent donc en utilisant ces créneaux juridiques mettre en place des conventions locales tout à fait légales.

Ces arguments parmi tant d'autres brandis par les défenseurs des conventions locales sont écartés par les négationnistes. Les plus acerbes critiques viennent de Dicko80 qui souligne que des pratiques erronées administrativement se font dans le processus d'élaboration des conventions locales notamment la signature des autorités déconcentrées et décentralisées. L'auteur fonde cette affirmation essentiellement sur deux arguments : d'abord, la convention locale étant un engagement entre groupes sociaux acceptant de se soumettre selon certaines modalités à des règles de conduite ; la collectivité locale n'étant pas partie prenante aux clauses, rien ne justifie la signature de l'exécutif local. Ensuite, il rappelle que

la tutelle administrative porte non pas sur les organisations locales mais plutôt sur les organes territoriaux ; en d'autres termes, la convention locale

ne constitue pas un acte ressortissant du champ des actes soumis à l'approbation. Les plus radicaux des thésards de l'illégalité des conventions locales se fondent sur le régime général des obligations (article 47 du COCC Sénégalais) qui énonce quatre (4) conditions pour la validité des contrats : la capacité juridique, le consentement, un objet et une cause licite. Si nous prenons une seule de ces conditions par exemple la capacité de contracter et

en suivant la logique de Dicko ; nous pouvons affirmer l'illégalité des conventions conclues par les villages qui ne bénéficient pas d'une personnalité juridique. Dans ce même ordre d'idée, comment expliquer la mise en place de normes à caractère réglementaire par des organismes privés (sous convention) ?

Ces critiques sont juridiquement fondées ; toutefois, nous estimons que toutes les conventions locales ne sont pas illégales dans la mesure où certaines sont expressément prévues par les textes de lois (ex : plans d'occupation des sols). Le noeud du problème se trouve dans le respect des règles de forme et de fond ainsi que du principe de légalité (interne et externe). Si nous nous référons aux textes de la décentralisation, le code prévoit l'ouverture de cadres de concertation (article 14 du décret 1134

80 Dicko A. K « Les conventions locales comme cadre de référence pour l'exercice des compétences des acteurs de la décentralisation dans la GRN au Mali », Rapport d'étude, GTZ, Bamako, 2002 ; page 18.

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portant transfert des compétences) afin de planifier et d'harmoniser les politiques de gestion des ressources naturelles et environnementales. Les principes de base de ce décret rappelle dans l'article 3 alinéa 4 et 5 que : « les collectivités locales veillent à la protection et à la gestion des ressources naturelles et de l'environnement. Elles suscitent la participation de tous les acteurs dans le strict respect des principes, des orientations, des options techniques et de la réglementation en vigueur. Les collectivités locales développent une approche intégrée et participative, favorisent l'interdisciplinarité, et exercent leurs compétences sur la base de plans et schémas.» Remarquons néanmoins, qu'aucunement il n'est fait référence à la possibilité pour les populations locales de signer des conventions locales. Cependant, seule la collectivité locale est habilitée à gérer les ressources naturelles en faisant participer les utilisateurs de la ressource. Ce qui délimite implicitement la procédure d'élaboration d'une convention locale. Pour nous,

la convention locale peut être élaborée et acceptée par les populations elles mêmes ; mais elle n'entre dans l'ordonnancement juridique afin d'être exécutoire qu'après avoir fait l'objet d'une délibération du conseil local et l'approbation du représentant de l'Etat. C'est la procédure qui est suivie par

la SAED (POAS de Rosso et de Gandon) et le PAGERNA (Convention de Mbadakhoune). Dès lors, ce document devient un acte administratif et donc fait force de loi dans les limites géographiques de la localité.

Les diverses tendances remettant en cause la légalité des conventions locales visent à les enfermer dans un cadre juridico institutionnel officiel. Cette démarche met la loi au sommet de l'architecture des normes juridiques

en appréciant les conventions à partir de pré- requis juridiques qui sont des énoncés généraux, non contextualisés. Une approche socio anthropologique nous apprend cependant que le droit est un système en constante interaction avec les autres sous systèmes sociaux81. Cette vision se fonde sur l'idée que

le droit n'est pas uniquement des règles explicites, codifiées et sanctionnées par l'Etat ; « mais aussi des phénomènes concrets qui peuvent être saisis par l'observation directe82 » Ils prônent à l'opposé du monolithisme juridique la prise en compte de ce pluralisme juridique qui fait la spécificité des sociétés

81 Op.cit Djire.Moussa.

82 Rouland N. « Anthropologie juridique », Paris, Puf, 1998 ; 496 p.

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africaines. Et dans cette optique, la légitimité des conventions locales suffit à leur donner une force juridique surtout au niveau local où les règles traditionnelles continuent toujours de réglementer la gestion des ressources naturelles. Cependant, poussée à l'extrême, cette vision anthropologique risque de déboucher vers une anarchie. Car l'individu se trouve pris dans un dualisme de régime (légalité étatique et légitimité traditionnelle) et serait tenté en cas de nécessité, de faire recours à un des systèmes de normes en fonction de ses valeurs et intérêts. D'où cette nécessité d'harmoniser le système en conciliant la légalité, la légitimité et la pratique par un rendez vous réussi83.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand