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Ordre public et Arbitrage International en Droit du commerce international

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par Rathvisal THARA
Université Lumière Lyon 2 - Master 1 Droit des entreprises en difficulté 2005
  

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§ I. Ordre public étatique

  • Dans cette hypothèse, l'ordre public est une limite à l'autonomie de l'arbitrage international. L'arbitre fait partie du mécanisme contractuel126(*) et dans l'immense majorité des cas, les arbitres respectent la volonté exprimée par les parties sur le droit applicable au différend et s'en tiennent à l'application de ce droit ; mais il n'est pas moins évident que dans certains cas, les parties n'ont pas choisi les règles applicables à leur litige. Toutefois, il ne soulève pas trop de difficultés lorsque la règle d'ordre public se trouve dans la loi choisie tant par les parties qu'éventuellement par les arbitres eux-mêmes (A).
  • Il est également à noter qu'il existe des règles qui ne sont pas autolimitées ; celles-ci posent des problèmes encore plus gravement bien qu'elles ne figurent pas dans la loi choisie du contrat ; il s'agit de l'ordre public étranger à la loi choisie (B).

A. Ordre public dans la loi choisie

1. L'ordre public dans la loi choisie par les parties

  • Au niveau de la terminologie, le droit applicable est synonyme de la lex causae. Selon la définition de M. Cornu, la lex causae est la « loi compétente pour régir la situation litigieuse ou la situation juridique envisagée127(*) ». Mais, l'important et la difficulté ne résultent pas de cette définition.
  • L'important est qu'en déclarant que « l'arbitre tranche le litige conformément aux règles de droit que les parties ont choisies », l'article 1496, alinéa 1 NCPC consacre une solution très largement répandue128(*) ; alors même que le choix opéré par les parties apparaît surprenant, les arbitres se refusent à le remettre en cause129(*). En effet, l'arbitre est un juge investi par un accord de volonté. Sa seule tâche devrait être de réaliser la volonté des parties130(*). En plus, à son égard, le choix du droit applicable prendra le plus souvent la forme d'une clause d'electio juris figurant dans le corps du contrat. Il faut et il suffit dans ce cas que leur accord de volonté soit certain131(*).
  • Cependant, compte tenu de la théorie des lacunes du droit choisi par les parties et de la théorie extensive des usages du commerce international, et en raison de l'application des lois de police, le choix de la loi par les parties connaît néanmoins de véritables limites. La première limite tient au domaine de la loi d'autonomie ; cela veut dire que le fait que certaines questions échappent à l'emprise de la loi d'autonomie en restreint d'autant la portée. Mais, cette question échappe à notre sujet.
  • Il nous reste la deuxième limite à l'efficacité du choix ; c'est le fait que les arbitres puissent évincer la loi normalement applicable au nom de l'ordre public international, ce qui pourra conduire les arbitres à ne pas respecter le choix opéré132(*) bien même que de la sorte, les parties devraient disposer d'une entière liberté dans le choix des règles applicables à leur transaction133(*).
  • Dans ce cas, l'arbitre constate la contrariété des dispositions dans la loi choisie par les parties à l'ordre public international. Au nom du respect de l'ordre public, il a la possibilité d'en écarter l'application. Selon certains auteurs il a même l'obligation de respecter l'ordre public de la lex causae134(*) quand il statue tant en droit qu'en amiable composition. Bien même qu'il soit vrai que l'article 1496 du nouveau Code de procédure civile ne mentionne pas une telle exception à l'application de la loi choisie par les parties, les grands auteurs en la doctrine admettent une telle dérogation135(*). En effet, la prise en compte de l'ordre public peut jouer un rôle dans la détermination du droit applicable : le principe de la recherche de l'efficacité de la volonté des parties conduit parfois en ce sens à considérer toute prohibition du contrat litigieux ou une de ses clauses substantielles, comme l'indice négatif de localisation du rapport dans l'ordre juridique national pressenti136(*).
  • Dans cette hypothèse, il s'agit de savoir l'ordre public dans quel l'ordre juridique devra s'appliquer. Il faut rapidement souligner que l'arbitre n'étant rattaché à aucun for étatique, il n'est pas non plus défenseur des conceptions politiques, morales économiques d'un Etat en particulier137(*). Ainsi, la réponse est que le juge arbitral doit mettre l'accent sur le souci de rendre une décision échappant à la censure des juridictions étatiques du son siège et pouvant être reconnue et exécutée au lieu où se trouvent des biens saisissables138(*). En effet, le fondement de son pouvoir de juger ne résulte pas du droit d'un seul Etat mais de tous ceux qui se déclarent prêt à reconnaître sa sentence. Pour cela, l'ordre public qui doit être pris en compte est l'ordre public international de ces Etats.
  • De surcroît, en raison de caractère international de l'arbitrage, il ne peut pas se borner à appliquer seulement l'ordre public des Etats ayant trait avec la cause ; il faut également qu'il prenne en compte de l'ordre public réellement international ou transnational dont les valeurs sont très largement reconnues par la Communauté internationale. Cet ordre public transnational n'est pas moins prêt à jouer sa fonction d'éviction de la loi normalement compétente.

2. L'ordre public dans la loi choisie par l'arbitre

En l'absence d'un choix exprès par les parties, il revient aux arbitres de déterminer les règles de droit applicables au litige139(*). L'article 1496, alinéa 1er, du nouveau Code de procédure civile leur laisse pour ce faire une très grande liberté. Ce texte se borne en effet à indiquer qu'à défaut de choix des parties, l'arbitre tranche le litige conformément aux règles « qu'il estime appropriées ». Pour cela, il se dit que le pouvoir de déterminer le droit applicable au fond est un des acquis les plus fondamentaux et les plus anciens de l'arbitrage international. Il forme une application du principe d'autonomie qui prévaut dans le domaine contractuel international140(*).

En ce sens, il est vrai qu'il n'existe pas de méthode de détermination imposée aux arbitres car ; ils ne sont pas tenus d'appliquer une règle de conflit spécifique ou ordinaire d'aucun Etat même de son siège. Il peut, par exemple, utiliser la méthode cumulative qui consiste à faire simultanément application des règles de conflit de tous les systèmes présentant un rattachement avec la cause. Il existe aussi d'autres méthodes pour les arbitres de pouvoir déterminer le droit applicable au fond, telles que la méthode des principes généraux du droit international privé, la méthode de libre sélection d'une règle de conflit141(*) ou la méthode de « voie directe » consistant à constater l'insuffisance du rattachement du rapport juridique avec un ou des systèmes étatiques déterminés pour l'assujettir à ce qu'il est convenu d'appeler les usages et pratiques du commerce international142(*).

A cet égard, sur la désignation des règles applicables, il est intéressant de comparer la situation d'un arbitre à celle d'un juge. Le juge et l'arbitre se séparent dans la mesure où, pour le premier, la recherche des règles applicables s'effectue dans un cadre déterminé des règles de conflit de lois alors que le second n'est nullement tenu d'observer une règle de conflit déterminée143(*).

Pour cela, force est de constater que l'efficacité du choix opéré par les arbitres connaît également, comme le cas du droit applicable choisi par les parties, une exception qui est l'exception de l'ordre public. Le même fondement est l'article 1502 5° et 1504 NCPC ; c'est-à-dire qu'en vertu de cet article, le juge arbitral afin de rendre sa sentence internationalement efficace doit se préoccuper de la conception locale de l'ordre public international et de celle qui résulte de l'ordre public transnational ou réellement internationale144(*).

En tout cas, s'il s'agit de la loi choisie tant par les arbitres que par les parties, la limite à l'efficacité du choix ainsi opérée est l'ordre public international étatique et l'ordre public transnational. Ainsi, il est judicieux d'étudier ensuite le cas de l'ordre public étranger à la loi choisie.

B. Ordre public étranger à la loi choisie

Normalement, l'arbitre en tant que juge à part entière a l'obligation également de respecter l'ordre public étranger à la loi choisie précédemment expliquée. Le fondement de ce devoir est toujours la recherche de l'efficacité de la sentence et la pérennité de l'arbitrage international. En conséquence, il obtient le pouvoir de passer outre le choix des parties quant au droit applicable et a le pouvoir de soulever d'office la violation de l'ordre public étranger au droit choisi dans l'hypothèse où aucune des parties ne soulève la violation d'une disposition d'ordre public145(*).

L'ordre public étranger à la loi choisie est, en premier lieu, l'ordre public international étatique puisque la plupart des législations modernes de l'arbitrage international contrôle la sentence arbitrale en se fondant sur l'ordre public international. De même, les lois de police reflétant les exigences de l'ordre public étatique doivent être également prises en compte.

1. L'ordre public international étatique

Quant au juge du for, qui est normalement chargé de vérifier la conformité de la sentence à son ordre public, celui-ci n'a pas à sanctionner un éventuel refus de prise en compte par l'arbitre de son ordre public interne, mais exclusivement de son ordre public international146(*). On précisera à ce point que la violation de l'ordre public interne du for n'est possible que si elle constitue, en même temps une violation de l'ordre public international français. En effet, au regard de la liberté des parties de choisir une autre loi que la loi française, pour les jurisprudences internationales, elles pourraient méconnaître totalement les dispositions d'ordre public de celle-ci.

Au contraire des lois de police, l'exception d'ordre public international étatique est mieux accueillie par les arbitres147(*). Mais, à vrai dire le droit des procédures collectives est la seule véritable hypothèse où l'ordre public international a vocation à intervenir.

En effet, les arbitres sont obligés d'assurer le respect des lois relatives à la faillite sous peine de courir le risque d'un refus d'exequatur. Par exemple, le droit français s'applique lorsqu'une procédure collective touchant l'une des parties a été ouverte en France. La dernière question en cette matière se pose dans le cas où une même société fait l'objet de plusieurs procédures de faillite ouvertes dans plusieurs pays différents. La réponse réside dans la Convention d'Istanbul de février 1990 et la Convention européenne du 23 novembre 1995 signée à Bruxelles qui retiennent les règles du lieu d'ouverture de la faillite principale au détriment de celles secondaires148(*).

2. La question d'application de lois de police

  • N'appartenant pas à la lex contractus, elle peut se poser aux arbitres149(*). Cela veut dire que l'arbitre international doit satisfaire encore aux exigences des lois de police qui constituent des limites d'origine étatique car chaque Etat entend imposer le respect dans l'arbitrage des lois de police du for, et peut-être même de certaines lois de police étrangères. Sa situation, face aux lois de police, est particulière puisqu'il n'est gardien d'aucun intérêt général émanant des Etats150(*) et qu'il se trouve dans une situation de parfaite neutralité à l'égard de toutes les lois de police du monde151(*).
  • En la doctrine, deux conceptions s'affrontent ; l'une est de rejeter le respect des lois de police en raison de l'insécurité juridique dans le cadre des relations d'affaires internationales puisque les intérêts étatiques seraient inappropriés dans ce contexte ; l'autre, étant dominante, est de prendre en compte le respect des lois de police des Etats puisqu'il existe un devoir incombant à l'arbitre de respecter l'ordre public étranger à la Lex Causae dans le but de rechercher l'efficacité d'une sentence arbitrale et la pérennité de l'arbitrage international.
  • Sur le plan international, il ne faut pas oublier qu'en présence d'une loi de police étrangère un juge dispose d'un pouvoir d'appréciation (article 7 de la convention de Rome). Mais à vrai dire, la sentence est peu menacée lorsqu'elle est soumise au contrôle du juge de l'annulation puisque l'ordre public international (prévu par l'article 1502, 5°, NCPC) est loin de rencontrer systématiquement les lois de police. D'un autre point de vue, tant que le champ de l'arbitrabilité du litige ne cesse pas de s'étendre, les arbitres se voient reconnaître par les juridictions étatiques le pouvoir d'appliquer et de sanctionner les réglementations d'ordre public auxquelles appartiennent souvent les lois de police152(*).
  • Selon la conception de la pluralité des sources de l'ordre public du fond, les ordres publics dans les lois choisies, les dispositions de l'ordre public international étatique et des lois de police devraient continuer de régir la validité au fond d'une sentence arbitrale153(*). De surcroît, il se peut que l'intérêt protégé par l'ordre public dans les lois de polices se contredit aux règles d'ordre public transnational. Dans ces cas, deux ordres publics s'opposent, et la solution est l'exclusion de l'application du premier.

* 126 Pierre MAYER, « Le contrat illicite », Rev. Arb. 1984. p. 209.

* 127 G. Cornu « Vocabulaire juridique », Association H. Capitant, PUF, 1987. p. 464.

* 128 Jean-Michel Jacquet et Philippe Delebecque, Droit du commerce international, Dalloz, Cours, édition 3e, 2002. p. 430.

* 129 Philippe FOUCHARD, Emmanuel GAILLARD, Berthold GOLDMAN, Traité de l'arbitrage commercial international, Litec, 1996. p. 854 et p. 854.

* 130 Jean-Baptiste Racine, L'arbitrage commercial international et l'ordre public, LGDJ, 1999, p. 233.

* 131 Jean-Michel Jacquet et Philippe Delebecque, Droit du commerce international, Dalloz, Cours, édition 3e, 2002. p. 430.

* 132 Philippe FOUCHARD, Emmanuel GAILLARD, Berthold GOLDMAN, Traité de l'arbitrage commercial international, Litec, 1996. p. 854 et p. 872.

* 133 Homayoon Arfazadeh, Ordre public et arbitrage international à l'épreuve de mondialisation, LGDJ, 2005. p. 49

* 134 Jean Jean-Baptiste Racine, L'arbitrage commercial international et l'ordre public, LGDJ, 1999, p. 240.

* 135 Philippe FOUCHARD, Emmanuel GAILLARD, Berthold GOLDMAN, Traité de l'arbitrage commercial international, Litec, 1996. p. 854 et p. 874.

* 136 Francis MEGERLIN, Ordre public transnational et arbitrage international de droit privé, essai critique sur la méthode, 2002. p. 125.

* 137 Jean-Baptiste Racine, L'arbitrage commercial international et l'ordre public, LGDJ, 1999, p. 237.

* 138 Philippe FOUCHARD, Emmanuel GAILLARD, Berthold GOLDMAN, Traité de l'arbitrage commercial international, Litec, 1996. p. 854 et p. 875.

* 139 Homayoon Arfazadeh, Ordre public et arbitrage international à l'épreuve de mondialisation, LGDJ, 2005. p. 49.

* 140 Francis MEGERLIN, Ordre public transnational et arbitrage international de droit privé, essai critique sur la méthode, 2002. p. 122.

* 141 Philippe FOUCHARD, Emmanuel GAILLARD, Berthold GOLDMAN, Traité de l'arbitrage commercial international, Litec, 1996. p. 854 et p. 894.

* 142 Francis MEGERLIN, Ordre public transnational et arbitrage international de droit privé, essai critique sur la méthode, 2002. p. 123.

* 143 Jean-Michel Jacquet et Philippe Delebecque, Droit du commerce international, Dalloz, Cours, édition 3e, 2002. p. 433.

* 144 Philippe FOUCHARD, Emmanuel GAILLARD, Berthold GOLDMAN, Traité de l'arbitrage commercial international, Litec, 1996. p. 854 et p. 895.

* 145 Jean-Baptiste Racine, L'arbitrage commercial international et l'ordre public, LGDJ, 1999, p. 284.

* 146 Marie-Noël JOBARD-BACHELLIER, « Ordre public international », Fasc. 534-2, J-CL éditions techniques 1992. p. 11.

* 147 Jean-Michel Jacquet et Philippe Delebecque, Droit du commerce international, Dalloz, Cours, édition 3e, 2002. p. 436.

* 148 Jean-Baptiste Racine, L'arbitrage commercial international et l'ordre public, LGDJ, 1999, pp. 294 à 297.

* 149 Jean-Michel Jacquet et Philippe Delebecque, Droit du commerce international, Dalloz, Cours, édition 3e, 2002. p. 434.

* 150 J. Béguin, G. Bourdeaux, A. Couret, B. Le Bass, D. Mainguy, M. Menjucq, H. Ruiz Fabri, C. Seraglini, J.M. Sorel, Traité du droit du commerce international, Litec, 2005. p. 1059.

* 151 Jean-Michel Jacquet et Philippe Delebecque, Droit du commerce international, Dalloz, Cours, édition 3e, 2002. p. 435.

* 152 Jean-Michel Jacquet et Philippe Delebecque, Droit du commerce international, Dalloz, Cours, édition 3e, 2002. pp. 435et 436.

* 153 Homayoon Arfazadeh, Ordre public et arbitrage international à l'épreuve de mondialisation, LGDJ, 2005. p. 15.

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