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Gestion des établissements d’hébergement et la pratique du yield managementpar Wenceslas LUKEKA KASESHI Université de Lubumbashi - Licence 2019 |
II.1.2. Fondements et principes du revenu managementa) Gestion de la capacité fixe (ou gestion de l'inventaire et intangibilité du service) L'entreprise de tourisme est confrontée à un double problème : elle gère des capacités fixes et ses prestations sont intangibles. Considérons l'exemple suivant : un avion part un jour J de Paris vers New York. Nous disposons de 100 places. Si 90 clients achètent un billet, alors nous partirons en J avec 10 sièges vides dont la vente est définitivement perdue. Même si l'avion revient en J+1 avec 100 passagers à bord, cela ne compense en rien la perte des sièges invendus, car les vols en J et en J+1 sont deux produits différents. De la mêmefaçon, si 110 clients demandent des billets de Paris vers New York, nous devrons refuser 10 ventes. De nouveau, nous perdons du revenu. La difficulté pour l'entreprise de service gérant une capacité fixe est d'ajuster l'offre à la demande et de vendre l'ensemble de ses capacités fixes en respectant un niveau acceptable de revenu pour l'entreprise. Si la demande était parfaitement linéaire, le problème ne se poserait pas, mais la demande est parfaitement fluctuante dans les secteurs de tourisme et des transports. Certaines pratiques permettent d'ajuster partiellement l'offre à la demande. Par exemple, un voyagiste constatant une demande faible pour un circuit peut fermer quelques dates ou regrouper les clients de plusieurs circuits pour « remplir » l'avion au départ de France (en modifiant les lieux de départ d'une partie des clients). Mais ces arrangements génèrent souvent une insatisfaction des consommateurs. La règle actuelle est de considérer la variable prix comme l'outil le plus efficace d'ajustement de l'offre à la demande, par le biais d'offres tarifaires adaptées et attractives pour les consommateurs (en déplaçant la demande, en freinant la demande de certains consommateurs à certaines dates ou, au contraire, en stimulant la demande à des périodes les plus faibles activé). b) Le revenu par unité disponible Les entreprises de tourisme utilisent traditionnellement deux indicateurs pour évaluer leur efficacité commerciale. Le taux d'occupation était (et reste) l'information privilégiéepar la majorité des entreprises. La politique de maximisation du taux de remplissage implique l'exploitation presque systématique de pratiques de prix bas destinées à vendre les unités qui resteraient invendues peu de temps avant le jour où la prestation est délivrée. D'autres entreprises, généralement dans des segments haut de gamme, seront plus attentives au prix moyen des unités vendues, dans un souci de préservation de l'image et du positionnement du produit sur son marché. La pratique de discount pourrait donner à la clientèle habituelle l'impression que la prestation se dégrade. Les hôtels de luxe ont longtemps suivi ces politiquescommerciales en acceptant parfois des taux d'occupation faibles. Aujourd'hui, aucune des deux pratiques commerciales ne sera considérée comme acceptable car elles ne conduisent pas à un accroissement du revenu global. La stratégie désormais recherchée par les entreprises consiste à trouver le bon dosage entre « vendre un maximum d'unités de vente » et conserver un niveau tarifaire acceptable ». Le revenu par unité disponible appelé RevPAR (Revenue Per Avalable Room) en hôtellerie, est considéré comme un bon indicateur de la performance commerciale des entreprises de tourisme et de transport. Il s'obtient en divisant le chiffre d'affaires par le nombre d'unités de vente disponible ou en multipliant le taux d'occupation par le prix moyen (sur une période de référence à déterminer). « Plus on a un taux d'occupation faible, plus on va développer son taux d'occupation et faire du revenue management pour maintenir le prix moyen. Plus on est fort en taux d'occupation, plus on fait du Yield management pour prioriser les clientèles à forte contribution et développer son prix moyen ». c) définitions Une des premières définitions a été proposée par Smith, Leimkhuler, Darrow et Samules (1992) : « le Yield management est une forme sophistiquée de gestion de l'offre et de la demande par l'action simultanée sur les tarifs et sur la capacité disponible. C'est un processus d'allocation du meilleur service au meilleur client, au meilleur prix et au meilleur moment ». D'autres auteurs ont proposé des définitions similaires : le revenu management est l'art et la science de prévoir la demande des clients en temps réel au niveau du micromarché et d'optimiser l'offre en termes de prix et de quantité. L'objectif du revenu management estde vendre le bon produit au bon moment au bon client et au bon prix. Le Yield correspond à la recette unitaire procurée par une vente (par exemple : la recette par kilomètre par passager dans le secteur de l'aérien). La notion de Yield management fait donc référence à la maximisation de la recette d'un produit (par exemple : un vol) en louant sur les prix et les contingentements par classe. À un niveau plus global, le revenu management est associé à la maximisation des revenus de l'entreprise. Dans la pratique, les expressions Yield management, revenue management ou management du revenu (en version française), sont employés sans réelle distinction sur le fond. Du point de vue organisationnel, le revenu management est considéré comme une mission plutôt stratégique, intégrant la vision globale des orientations et des objectifs de l'entreprise.Le Yield est associé à une mission plus opérationnelle de gestion au quotidien, d'analyse des données et de maximisation du revenu d'un produit. Ainsi, un groupe hôtelier aura au niveau régional et/ou au siège, une direction du revenu management. Des Yield managers seront positionnés au niveau de chaque hôtel (ou en charge de regroupement d'hôtels). d) Principes du Yield management Le Yield repose sur une sélection renforcée des clientèles. Le premier niveau « marketing » de la sélection des clients consiste à segmenter le marché et à destiner ses produits à des profils déterminés de clientèle.La segmentation tarifaire intègre la réalisation aux prix des consommateurs et tend vers de segmentations de plus en plus fines et homogènes. Le second niveau de sélection typiquement lié aux pratiques de Yield consiste à ne plusservir tous ces clients, mais en priorité les clients à forte contribution qui acceptent les prix les plus élevés. C'est la fin du « premier arrivé, premier servi ». Dorénavant, les clients sont sélectionnés en fonction de leur profil et de leur contribution potentielle ; et il faut toujours garder une « porte ouverte » pour les meilleurs clients. Dans ce contexte, et pour permettre une véritable réaction des consommateurs aux prix, les tarifs des prestations de service sont fixés en tenant compte de l'analyse de la demande. Par ailleurs, le Yield management, outil d'aide à la décision, concourt à une réduction partielle du risque inhérent à toute décision commerciale en se fondant sur une accumulation de données (passées, présentes et futures). Notons que le rôle du Yield manager ou des personnels de vente (compétence commerciale) resteprépondérant en complément du support réel procuré par les outils informatisés d'aide à la décision. « Le yield managment tente de gérer la demande pour qu'elle colle au mieux à la capacité endécidant quelle part de la capacité sera vendue à quel prix, à quel segment de marché, dans lebut de maximiser les revenus lors d'une période donnée57(*) ».Pour comprendre comment les systèmes de yield management permettent d'augmenter lesrevenus de l'entreprise il convient de voir dans un premier temps ce qu'est le rendement.Leyield, ou rendement, est défini par la formule suivante : Revenu actuel ?????????????????? = ?????????????????????????????? Où - Revenu actuel= capacité actuellement utilisée x le prix moyen - Revenu potentiel = capacité totale x le prix maximum Il apparaît alors clairement que le rendement est
fonction de la capacité et du prix. Cerendement sera alors d'autant plus
grand que le prix et le taux d'occupation sont élevés.
En « Le service est par nature intangible. Il est non
stockable. La conséquence directe est la synchronisation obligatoire
entre production et consommation.58(*)» Ces techniques de tarification
différenciée ne sont pas adaptées à tous les
secteurs. En effet, l'hôtellerie est un Comme nous l'avons vu, le yield management est avant tout un outil d'aide à la décision. Autissier précise que « l'objectif est d'optimiser les capacités de production/distribution en cherchant à vendre à un prix différent lorsque le niveau de la demande et de l'offre sont différents59(*)». Tardieu rappelle « qu'il permet la gestion simultanée des tarifs et des capacités afin de maximiser les revenus60(*)». De ce fait cela nécessite une parfaite connaissance des besoins des clients et de leurs comportements. Cependant, les auteurs s'accordent à dire qu'une pratique efficace et rentable duyield management doit répondre à un certain nombre de conditions. Si l'onprend les différentes conditions proposées par Capiez, Kimes,Berman, Legohérel, Sinsou, Tardieu, Dubois et Frendo, nous pouvons en faire la classificationsuivante : Ø Une offre périssable : en
effet une chambre non vendue le jour J ne pourra Ø Le volume de l'offre est inchangeable : La capacité est fixe et l'on peut donc attribuerle produit au plus méritant car on ne peut augmenter le nombre de chambres. Ø Une capacité fixe à gérer : ce qui peut entraîner une offre supérieure à lademande. « Au lieu de chercher à vendre plus il s'agit de vendre mieux »61(*). Ø Des coûts fixes importants et des coûts variables faibles : le coût d'uneunité vendue supplémentaire est relativement faible. Les coûts fixes sont élevés, et renforcent la nécessité de rentabilité puisqu'une petiteaugmentation du chiffre d'affaires entraîne une augmentation importante de lamarge nette. Ø Une demande fluctuante ou saisonnière : le yield management va permettred'ajuster la demande, en activant le levier prix. Cela se traduit par des tarifs avantageux en période creuse et une augmentation des tarifs en période deforte demande. Ø Le marché est saturé : les principes de concurrence pure et parfaite sont appliqués. Ø Un marché pouvant être segmenté : possibilité de segmenter la demandeen micro marchés ayant des comportements similaires : sensibilité au prix,date de réservation... Ø Possibilité de vendre le produit ou le service à l'avance : cela passe parl'exploitation de système de réservation, permettant de vendre le produitavant même qu'il ne soit utilisé. Ø Produits pouvant se différencier afin de justifier des niveaux de prixdifférenciés. Si les conditions sont réunies, alors une pratique de yield management estenvisageable.Le yield management est une forme de discrimination par les prix. Celle-ci passe par une tarification différenciée. Selon Capiez, « c'estune tarification basée sur les conditions d'utilisation du service et une tarification adaptée à chaque catégorie de clientèle avec des besoins spécifiques». Ce pourquoi il est nécessaire de connaître parfaitement la demande pour mettre en placeson système de tarification62(*). En effet, l'application du Yield management
intervient souvent après une guerre * 57ZEITHAML V., & BITNER M. J., Marketing Services. New-York: McGraw-Hill, 1996, p402. * 58GUILLOUX Véronique,
LEHU Jean-Marc, L'encyclopédie du Marketing: Commenté et
illustrée, éditions * 59AUTISSIER David, Le Yield Management ou la problématique du pilotage dans lesentreprises de services. 21ème congrès de l'AFC, 2000 * 60TARDIEU Jean-Michel, Marketing et gestion des services, Éditions Chirons , Paris, 2004, p281. * 61 SELMI Nourredine. Le revenu management, de la gestion optimisée des revenus à la gestion des conflits, 2e`me Journée du Marketing IRIS « La relation client dans les activités de service ». Lyon, 15 mars 2007. * 62CAPIEZ, op. cit., p17. * 63BOYD, E. Andrew. Revenue
management and dynamic pricing. Presentation slides, PROS
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