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Procédures collectives et voies d'exécution

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par Guy Jules KOUNGA
Université de Yaoundé II - DEA en Droit des Affaires 2003
  

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Paragraphe 2 : Les voies d'exécution spécialement admises

Il est des voies d'exécution dont l'exercice peut ne pas être perturbé par la procédure collective, notamment si elles sont exercées pendant la période suspecte. Il en est ainsi de la saisie conservatoire des créances (A) et de la saisie-attribution (B).

A- La saisie conservatoire des créances

Une saisie conservatoire est une procédure dont l'objectif est de placer sous main de justice des biens du débiteur, afin que celui-ci n'en dispose pas ou ne les fasse pas disparaître. Cette saisie peut aux termes de l'article 54 AUPSRVE être exercée par toute personne dont la créance paraît fondée en son principe si elle justifie de circonstances de nature à en menacer le recouvrement. Cette saisie peut être pratiquée sur des biens meubles corporels ou incorporels du débiteur. Sur les biens meubles incorporels, il peut s'agir soit de la saisie des droits d'associés et des valeurs mobilières, soit de la saisie des créances. La saisie des créances qui nous intéresse ici se déroule en plusieurs phases, principalement la phase conservatoire et la phase exécutoire. Schématiquement la procédure est l'acte de saisie, la dénonciation de la saisie et la conversion en saisie-attribution. La question qui se pose est celle de savoir si une saisie conservatoire des créances pratiquée pendant la période suspecte et convertie pendant la même période peut être perturbée par l'ouverture des procédures collectives.

Aux termes de l'article 82 AUPSRVE, « Muni d'un titre exécutoire constatant l'existence de sa créance, le créancier signifie au tiers saisi un acte de conversion ». Le même article 82 in fine dispose que l'acte informe le tiers que, dans cette limite, « la demande entraîne attribution immédiate de la créance saisie au profit du créancier ». L'article 84

ajoute que Les dispositions des articles 158 et 159, 165 à 168, des 2e et 3e alinéas de l'article 170, des articles 171 et 172 ci-après sont applicables. Ces dispositions renvoient à l'acte de la saisie-attribution, au paiement par le tiers saisi et aux contestations relatives à la saisieattribution. A l'analyse de ces dispositions, on déduit qu'après la conversion, la saisie produit les effets d'une saisie-attribution.

Cette réflexion devrait valider que la saisie conservatoire des créances convertie pendant la période suspecte est indifférente aux inopposabilités de la période suspecte. La jurisprudence française104 n'adhère pas à cette position en décidant que si la saisie conservatoire portant sur une créance faite pendant la période suspecte est nulle, le paiement obtenu par le créancier saisissant, doit lui-même être annulé. Cette solution donnée par la Cour de cassation est faite en réponse à un moyen de cassation qui soutenait que la conversion de la saisie conservatoire en saisie-attribution transformait une mesure conservatoire en mesure d'exécution, à l'abri des nullités de la période suspecte. Nous ne soutenons pas cette position de la cour de cassation car si on l'applique à l'Acte uniforme elle risque d'anéantir l'effet attributif immédiat de la saisie conservatoire des créances convertie en saisieattribution. Cet effet attributif immédiat qui caractérise aussi la saisie-attribution s'impose d'ailleurs malgré l'ouverture d'une procédure collective.

B- La saisie-attribution

La saisie-attribution est la voie d'exécution forcée qui permet à un créancier de saisir entre les mains d'un tiers, appelé tiers saisi, les créances portant sur une somme d'argent autres que les créances de rémunération du travail et de se faire attribuer lesdites sommes dès

104 Cass. Com., 12 octobre 1999, Bull. n° 166.

l'exploit de saisie105. La saisie-attribution, selon l'article 154 AUPSRVE, emporte, à concurrence des sommes pour lesquelles elle est pratiquée ainsi que tous ses accessoires, mais pour ce montant seulement, attribution immédiate au profit du saisissant de la créance saisie, disponible entre les mains du tiers. A la lecture de cette disposition, il importe de faire une analyse textuelle (1) avant de se pencher sur ses différentes applications (2).

1- L'effet immédiat de la saisie attribution, cause de son admission législative dans les procédures collectives

L'acte de saisie de la saisie-attribution emporte attribution immédiate au profit du saisissant de la créance saisie. Cette règle de l'article 154 AUPSRVE permet d'envisager la force de la saisie-attribution face à l'ouverture d'une procédure collective. Il s'agit bien évidemment d'une saisie-attribution pratiquée pendant la période suspecte.

Il y a plus, la procédure collective s'analysant en une saisie, l'Acte uniforme sur les voies d'exécution envisage l'hypothèse de la pluralité des saisies. A ce propos, l'article 155 alinéa 1er dispose que les actes de saisie signifiés au cours de la même journée entre les mains du même tiers sont réputés faits simultanément. Si les sommes disponibles ne permettent pas de désintéresser la totalité des créanciers ainsi saisissants, ceux-ci viennent en concours. Que se passe t- il alors lorsque une voie d'exécution, spécialement une saisie-attribution, est effectuée le jour même du prononcé du jugement d'ouverture. Il s'agit ici de deux saisies faites simultanément ; doit-on pourtant en conclure que les créanciers de la procédure et le ou les créancier(s) saisissant(s) viendront en concours ? Evidemment non. Dans ce cas, la décision d'ouverture de la procédure collective doit primer et, par voie de conséquence suspendre la saisie-attribution exercée.

105 Cf. ASSI-ESSO (A-M.), NIA W DIOUF, OHADA, Recouvrement des créances, collection droit uniforme africain, Juriscope, Bruylant, 2002, n° 367

L'alinéa 2 de l'article 155 AUPSRVE mentionne un autre problème. Il dispose en effet que La signification ultérieure d'autres saisies ou de toute autre mesure de prélèvement, même émanant de créanciers privilégiés, ne remettent pas en cause cette attribution, « sans préjudice des dispositions organisant les procédures collectives ». Malgré une position doctrinale qui semble tranchée106, l'expression « sans préjudice des dispositions organisant les procédures collectives » devrait être interprétée de deux façons. D'abord, elle doit s'entendre comme le notent ASSI-ESSO et NIAW DIOUF que l'ouverture d'une procédure collective d'apurement du passif est une limite au privilège du premier saisissant et par conséquent anéantit l'attribution immédiate de la créance saisie attribuée. Nous ne sommes pas allié à cette interprétation.

Ensuite, elle doit s'entendre que le privilège du premier saisissant conserve sa portée en cas d'ouverture des procédures collectives. Cette expression devrait s'orienter dans ce sens pour au moins deux raisons : d'abord parce que la décision de suspension des voies d'exécution ne spécifie pas les voies d'exécution concernées ; or cette disposition de l'article 155 in fine est l'unique règle de l'Acte uniforme sur les voies d'exécution qui mentionne expressément le terme procédure collective, une façon de préciser la résistance de la saisieattribution face aux effets de l'ouverture de la procédure collective. Ensuite, à titre de droit comparé notamment le droit français dont le droit OHADA est l'émanation, l'expression devrait être comprise au sens de l'article 43 de la loi française sur les procédures civiles d'exécution qui énonce que « la survenance ultérieure d 'un jugement portant ouverture d 'un redressement ou d'une liquidation judiciaire ne remet pas en cause cette attribution «. En plus il faut relever que soumettre cette expression à la première interprétation serait anéantir

106 ASSI-ESSO et NIA W DIOUF en particulier énoncent que la seule limite au privilège du premier saisissant est l 'existence d 'une procédure collective survenue postérieurement contre le débiteur saisi en citant l 'art. 155 al. 2 : lire leur ouvrage précité, n° 369.

totalement les voies d'exécution par l'ouverture des procédures collectives au lieu de les déformer simplement lorsqu'elles sont admises107.

L'admission des saisies-attributions dans les procédures collectives fait l'objet de plusieurs applications.

2- Les différentes applications

L'admission des saisies-attributions dans les procédures collectives a fait l'objet de plusieurs applications dans la jurisprudence. La jurisprudence française s'en démarque particulièrement. Elle applique cette admission différemment suivant la période d'intervention de la procédure collective.

Elle adopte une position contraire par rapport à ce que prévoit l'Acte uniforme lorsqu'une voie d'exécution, spécialement une saisie-attribution, est effectuée le jour même du prononcé du jugement d'ouverture. Ainsi, la Cour d'appel de Caen a statué sur cette hypothèse dans un arrêt du 10 octobre 1995108. En l'espèce, une saisie-attribution du compte bancaire du débiteur avait été pratiquée le 11 mars 1993 à 10 heure 10 (l'article 56 du décret de 1992 imposant d'indiquer l'heure de la saisie). Le même jour, dans l'après midi, une procédure collective a été ouverte à l'encontre de ce même débiteur. La banque, tiers saisi, soutenait que la saisie fut nulle car effectuée en cours de procédure ; l'effet du jugement d'ouverture devant être reporté au jour du prononcé à 0 heure 00. Par une interprétation littérale de l'article 43 alinéa 2 de la loi de 1991109 et spécialement de la notion de « survenance », la Cour d'appel fait prévaloir l'effet attributif de la saisie en considérant que celui ci fait exception à la prise d'effet rétroactif du jugement d'ouverture. Cette interprétation

107 V. Section 2 de ce chapitre.

108 CA CAEN, 10 Oct 1995 , Rev. Proc. Coll. 1998 , p 91, obs CANET .

109 Il s 'agit ici de la loi fran çaise sur les procédures civiles d 'exécution. Cet article est l 'équivalent de l 'article 155 al. 2. AUPSRVE.

des textes ne peut qu'être regrettée ; la doctrine soulignant unanimement que la saisieattribution doit être exercée au plus tard la veille du jugement d'ouverture110.

Il faut surtout relever que les articles 169 à 172 AUPSRVE organisent une procédure de contestation mais celle-ci n'a pas de caractère suspensif. L'ouverture d'une procédure collective pendant le délai de contestation ne remet pas en cause l'effet attributif ; les organes ne peuvent demander la suspension de la saisie. C'est en ce sens qu'a statué un arrêt de la Cour d'appel de Lyon en date du 8 février 1995111.

La situation est donc parfaitement claire. Dès lors que la saisie-attribution est signifiée la veille du jugement d'ouverture au plus tard ; elle sera achevée et ne pourra être remise en cause. En tout état de cause, la saisie-attribution, contrairement à l'ancienne saisie arrêt, ne peut être inachevée : soit elle a produit son effet légal ; soit elle ne peut plus intervenir.

La saisie-attribution produit bien ses effets pendant la période suspecte. En effet la survenance d'une procédure ne remet pas en cause l'effet attributif de la saisie-attribution nous indique l'article 155 AUPSRVE. Le juge de l'exécution de Lyon a statué précisément en

ce sens 112

; précédé déjà par d'autres décisions113. La Cour d'appel de Rennes dans un arrêt du

3 mars 1994114, puis la Cour d'appel d'Amiens dans un arrêt du 4 avril 1997115 , ont cependant successivement refusé l'annulation sur ce fondement car le paiement est forcé et n'est pas effectué par le débiteur, soulignent ces arrêts.

Il est donc louable que le législateur intervienne à défaut d'une prise de position par la jurisprudence Ohada, pour donner l'efficacité souhaitée à la saisie-attribution pratiquée pendant la période suspecte.

110 obs CANET, sous arrêt précité.

111 C.A. Lyon, 8 février 1995, Rev. Proc. Coll. 1998, p 89, obs. CANET.

112 JEX Lyon, 2 Avril 1996 et 23 Avril 1996, D. 1997, JP p. 43, note Prévault.

113 JEX Clermont Ferrand, 27 janvier 1994, Rev. Huis. 1994 p. 954 ; JEX Dijon, 1er Février 1994, ibid, p. 954 ; JEX Quimper, 3 février 1994, ibid, p. 703, note Dahan ; C. A. Rennes 3 Mars 1994, ibid, p. 946.

114 C. A. Rennes, 3 Mars 1994, Juris data n° 046238 ; JCP ed E 1995, pana 10 ; JCP ed E 1995, I, 457 n° 10, obs. Cabrillac.

115 C. A. Amiens, 4 Avril 1997, BRDA 1997, N° 12 p. 12.

Les voies d'exécutions indifférentes à l'ouverture des procédures collectives sont admises soit selon la qualité des créanciers qui les exercent, soit selon les effets attachés auxdites voies d'exécution. Ces voies d'exécution indifférentes aux procédures collectives produisent en principe les effets que leur attache le droit commun des voies d'exécution. Ces effets et même la procédure de droit commun se trouvent modifiés lorsqu'elles servent à la réalisation de l'actif de l'entreprise.

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway