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Incivisme fiscal au burkina faso:etat des lieux et mesures d'atténuation

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par Djibril Sawadogo
Ecole nationale des régies financières (ENAREF) - Diplôme d'Inspecteur des impôts 2002
  

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CHAPITRE I : LES CAUSES DE L'INCIVISME

FISCAL

Les diverses causes de l'incivisme fiscal peuvent être analysées selon qu'elles sont internes ou externes à l'Administration fiscale. La situation du phénomène est du fait soit des autorités publiques, soit des contribuables mêmes.

Section 1 : Les causes imputables aux autorités

publiques

Les autorités publiques s'entendent des personnes, organes et institutions publiques à l'origine ou détentrices, directement ou indirectement, du pouvoir public. De leur conception et de leur gestion de la politique fiscale dépend le comportement du contribuable face à ses obligations fiscales.

Paragraphe 1 : Les problèmes liés à la gestion de l'Etat

A - Les difficultés d'application de la loi

1 - L'interprétation des lois

Au plan formel, les dispositions qui régissent la fiscalité intérieure sont dispersées à travers le C.I., le C.E.T., la R.A.F., le Code des investissements, le Code minier et divers autres textes à portée spécifiques. L'abondance livresque ne facilite pas les recherches de dispositions malgré l'existence d'un recueil de textes relatifs à la fiscalité intérieure.

Par ailleurs, les renvois d'article à article tels que les sanctions en matière d'I.U.T.S. et de T.P.A. créent une certaine confusion dans l'esprit des contribuables quant à la nature de perception de ces deux cédules d'impôt.

Egalement, les lois de Finances qui sont annuellement adoptées perturbent le dispositif législatif de sorte à créer un labyrinthe de normes sur une certaine période fiscale. Ce qui entraîne de sérieuses difficultés de communication lorsque les contribuables désirent des informations avec les agents du fisc qui ne suivent pas « l'actualité fiscale ».

Dans le fonds, les termes utilisés dans les lois de finances paraissent ésotériques pour le contribuable. La juxtaposition d'articles limitatif et non limitatifs ne précise pas l'esprit du législateur27(*). Les interprétations d'un problème à travers les instructions administratives sont quelques fois en conflit avec la loi. Le silence des textes sur certaines activités permettent l'évasion fiscale ou leur sous imposition. Il en est ainsi de l'activité agricole qui est presque ignorée par les dispositions des articles 1 à 40 du CI. L'imprécision de traitement des charges de gestion en matière d'imposition du BIC n'y empêche pas la fraude malgré l'abondance d'IA. Ce flou des textes est l'apanage des dispositions relatives à l'impôt sur les BNC si bien que certains acteurs n'arrivent point à se situer ni en IUTS, ni en BNC, ni en BIC. Les IA émises dans ce cadre désorientent les contribuables. Il ne perçoivent alors que l'aspect coercitif et préfèrent se dérober face à cette imbrication d'obligations qui semblent ne leur accorder aucun avantage.

Aussi, les impôts directs sont-ils régis par deux codes différents alors qu'ils sont souvent payés par un même contribuable. Les dispositions qui les coordonnent respectivement dans chaque législation n'empêchent pas leur gestion distincte par les contribuables.

2 - Le contentieux fiscal

Les voies de recours sont ouvertes aux contribuables pour contester les abus de l'Administration fiscale. Le formalisme cependant imposé aux réclamations allié à la longueur de la procédure décourage les contribuables.

En ce qui concerne les impôts et taxes assimilés relevant du CSI, l'action contentieuse exige une présentation et un contenu de manière rigoureuse. Du temps de l'instruction jusqu'à l'obtention de réponse est assez long car la procédure est très hiérarchisée. L'instruction de la demande est faite par le service à la base de l'imposition objet du contentieux.

Le recours contentieux doit d'abord emprunter l'étape administrative avant que la réclamation aboutisse au tribunal administratif. En effet, il suit une rigueur dans la présentation des réclamations depuis l'instruction jusqu'à la décision du Directeur général des impôts. Cette décision est prise dans suivant une forme et un temps bien précis. L'insatisfaction à la suite amène le contribuable à ester en justice devant les tribunaux administratifs.

En ce qui concerne les droits régis par le CET où le recours semble moins pénible, il n'en pas de même de l'action contentieuse. En effet, la procédure, la forme et le contenu des réclamations puis de la décision de l'Administration convainquent les contribuables de ne pas suivre cette voie pour avoir gain de cause. Le recours qui peut être fait auprès du juge civil avec possibilité de contre-expertise par le fisc déroute le plaignant.

Ainsi, toutes les précautions juridiques qui entourent les différentes voies de recours semblent plus protéger les intérêts de l'Etat plutôt que de permettre aux contribuables de recouvrer leur droit.

Toutefois, la pétition de remise de pénalités et le dégrèvement ou les restitutions d'office demeurent les techniques bien accessibles aux contribuables. Ne trouvant pas de voies légales légères et réellement satisfaisantes ; les contribuables préfèrent emprunter la voie de l'illégalité. C'est également la conséquence de la difficulté qu'a le juge à interpréter la loi fiscale du fait de leur complexité.

B - La gestion des ressources publiques

Une meilleure gestion des ressources publiques suscite plus ou moins l'adhésion des contribuables au prélèvement fiscal. L'Etat doit montrer que l'argent du contribuable est entre de bonnes mains et utilisé aux fins utiles pour tous.

1 - L'opacité dans la gestion des finances publiques

La transparence à ce niveau signifie que la clarté doit subsister depuis la perception de l'impôt jusqu'aux dépenses publiques. L'exécution du budget de l'Etat et de ses démembrements doivent suivre les principes qui gouvernent sa gestion avec toutes ses contraintes. Il y a cependant des difficultés à ce niveau.

D'abord dans la levée et la gestion de l'impôt, des insuffisances imputables au fisc apparaissent. Les difficultés alors évoquées supra traduisent le manque de transparence fiscale.

Ensuite, dans la conservation des fonds et valeurs assurée par la Direction Générale du Trésor et de la Comptabilité Publique, une opacité des opérations explique les difficultés de mises à jour des comptes en terme de proposition de loi de règlement par le gouvernement au niveau de l'Assemblée Nationale. L'imprécision des règles de dépenses et le statut souvent flou des régies de recettes sont des indices du manque de transparence dans l'exécution des missions attribuées à la DGTCP.

Aussi, les difficultés de paiement constatée par les usagers du Trésor public traduisent non seulement la raréfaction des ressources budgétaires mais surtout le l'illisibilité dans les procédures d'exécution de leurs opérations.

Enfin, une meilleure explication des principes budgétaires de gestion traduirait une réelle transparence dans l'exécution du budget de l'Etat. Les citoyens ne perçoivent pas l'utilisation de l'impôt payé en dehors de des frais de personnel puis des matières et fournitures consommées au niveau de l'Administration. Ces constats ne facilitent pas la visibilité des investissements publics.

2 - Le manque de visibilité des investissements publics

La rareté des ressources publiques a beaucoup freiné l'Etat dans l'exécution des investissements à caractère public. Les différents programmes populaires de développement engagés au moment de la Révolution démocratique et populaire ont longuement justifié l'interventionnisme de l'Etat dans l'impulsion du développement. Mais depuis l'entrée du Burkina Faso dans la chaîne des ajustements structurels de son économie, la visibilité des investissements publics n'est plus évidente. Les gouvernements semblent indiquer qu'avant la mise en place des critères de convergence préconisés dans le cadre de l'UEMOA, aucun investissement n'était possible. Les réalisations en infrastructures routières, administratives et sanitaires ne sont pas perçues comme des actions concrètes de l'Etat. Elles sont travesties par la multitude des projets qui les accompagnent, la mauvaise foi des gouvernants dans leur réception est démontrée par la récupération politique qui en est faite. Dans l'esprit de certains agents publics chargés de la gestion de projet, l'argent du contribuable n'y est pour rien. Or, même si ces projets sont obtenus sur financements extérieurs, c'est finalement de la poche du contribuable que se fera, à long terme, le paiement.

L'institution d'une assemblée générale des gestionnaires de projets est la bienvenue mais ne permet pas réellement la perception des investissements effectués. Cette assise s'intéresse plus aux modalités d'intervention des partenaires au développement.

En définitive, une mauvaise gestion des finances publiques par le défaut de transparence et l'invisibilité des réalisations gouvernementales fait douter le contribuable de l'utilisation efficiente de l'impôt qu'il paie. Ce déficit d'informations l'entraîne dans l'incivisme fiscal manifesté par le non paiement spontané de l'impôt.

C - Les interférences politiques dans le fonctionnement de l'administration fiscale

1 - Les influences politiques

Les facteurs, entre autres, qui influence la « mentalité fiscale » du citoyen sont la politique gouvernementale et gestion gouvernementale. Certains agissements du politique infléchissent sensiblement le niveau du civisme fiscal.

D'une part, la confrontation violente des parties politiques crée un climat malsain dans la population et empêche toute action du service des impôts. Ce qui amène souvent à la suspension d'action de recouvrement par exemple. Le traitement alors de certains contribuables politiquement assis devient délicat. Aussi certains contribuables ont la perception que le traitement fiscal des dossiers est fonction de leurs appartenances politiques. L'imposition paraît lourde ou légère lorsque le contribuable considère appartenir ou pas au parti politique de l'agent d'assiette militant. Cet état d'esprit l'entraîne dans le non respect de ses obligations fiscales. Ce qui est accentué par de supposés « intouchables du fisc » parmi eux. Ces allégations prétentieuses sont malheureusement soutenues par les actions de quelques leaders politiques en mal d'assise locale.

En effet, les démarches de quelques hommes politiques, toutes tendances confondues, entravent la bonne gestion du prélèvement fiscal. Ainsi, des responsables de services subissent fréquemment des pressions d'acteurs politiques dans le but d'amoindrir la taxation ou la sanction de leurs protégés fautifs. Il se dégage subséquemment une inégalité de traitement des contribuables devant l'impôt. Cette discrimination dans le traitement, discrédite l'image de l'administration fiscale.

C'est ainsi que certaines villes du Burkina Faso sont fiscalement difficiles à gérer. Il y'en a qui se targuent d'être du même parti politique que leurs rejetons haut placés et croient ne pas être obligés aux injonctions ni de l'administration fiscale, ni de ses agents.

D'autre part, ces leaders politiques utilisent une vieille rengaine héritée des luttes anti-coloniales pour mobiliser leurs militants. Ils promettent ainsi d'épargner de l'effort contributif aux citoyens qui feront aboutir leurs ambitions politiques. Nous reviendrons sur cet aspect au paragraphe suivant. Cette allusion politique sinon démagogique savamment distillée dans les joutes électorales ou à l'occasion de certains quiproquos ; n'est pas de nature à faire accepter les obligations fiscales par les uns et les autres.

Ainsi, depuis la restauration de l'Etat de droit en 1991, les lois fiscales votées sont souvent dévoyées par ces mêmes élus à travers les lois de finances rectificatives ou sur le terrain. Il n'est pas rare d'entendre souvent les contribuables se plaindre d'une application discriminatoire, par la localité, de la mesure fiscale. Une attitude qui dénote leur incivisme fiscal.

Enfin, l'ignorance affichée des contribuables de la valeur institutionnelle de l'impôt permet aux acteurs politiques d'encourager cet incivisme.

2 - La démagogie des acteurs politiques

Le défaut des acteurs de la vie politique est de présenter leur projet de société en occultant le programme financier qui le sous-tend. Or, le débat économique doit être incorporé dans les campagnes électorales afin de fixer les citoyens, potentiels contribuables, sur les coûts financiers de réalisation des programmes proposés. Cette pratique devrait prédisposer leurs électeurs aux prélèvements plausibles de leurs revenus ou richesse. En retour, ils auront le droit de demander des comptes aux élus après leur mandat.

En sus de leur fonction de voter et de consentir l'impôt, les députés se doivent d'assurer la formation citoyenne des militants et sympathisants de leurs formations politiques respectives. En somme, les organes chargés de la formation politique et civique au sein des partis politiques doivent dispenser un volet respect des obligations fiscales.

Cependant, la réalité montre cet aspect est malheureusement négligé. Ces questions semblent démobiliser les militants et sympathisants. Ce qui corrobore le fait que le discours sur l'impôt est mal fait. Les différentes lois fiscales ne sont pas expliquées aux populations. Les alliances sont plutôt faites avec certains groupes d'opérateurs économiques dans le but de modifier les lois fiscales en leur faveur. Il en est ainsi de la taxe de résidence ou de l'impôt sur les revenus fonciers. Ces comportements, à la limite irresponsables, des leaders politiques, réduisent la portée des lois fiscales.

Ces faits ont des répondants au niveau de la structure administrative et ce sont des exemples qui expliquent l'ambiance d'incivisme fiscal.

* 27 Les avantages en matière d'IUTS-TPA, les exemptions et exonérations, les biens concernés par l'amortissement dégressif, la nature des actes sont énumérées tandis que des formules telles : « d'une manière générale... » sont imprécis.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery