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Problématique de l'égalité des droits des enfants légitime et naturel dans le nouveau régime des successions du Bénin

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par Julien HOUNKPE
Université d'Abomey Calavi (Bénin) - Maitrise en Droit 2006
  

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CHAPITRE II :

NOS SUGGESTIONS

Par respect pour les droits de l'homme et au nom de l'intérêt supérieur de l'enfant béninois, nous devons aller vers une vision de justice à l'égard de l'enfant naturel. En passant par une rénovation du droit de la filiation au Bénin lui accordant ainsi des droits successoraux et ne perdant pas de vue qu'il faut une équité de la loi envers l'enfant incestueux. Et puisque «légiférer c'est choisir, choisir c'est éliminer »41(*), le législateur du CPF devra choisir de supprimer les divergences du droit telles qu'elles sont contenues dans le code.

Il s'agit pour nous à présent, d'apprécier le principe d'égalité entre les enfants et de nous projeter dans l'avenir afin d'examiner ce que serait sa mise en oeuvre concrète.

Dans une première section intitulée: Pour la prévalence d'une justice sociale en matière successorale, nous ferons des propositions adéquates et préciserons leur intérêt au regard du sort des enfants adultérins et incestueux - l'enfant naturel simple, étant lui, assimilé désormais à un enfant légitime.

Dans une seconde section qui portera: La nécessité de révision de certaine dispositions du code, nous montrerons que le CPF recèle de dispositions discriminatoires et controversées à l'égard des enfants naturels qu'il convient de réviser.

SECTION I : POUR LA PREVALENCE D'UNE JUSTICE

SOCIALE EN MATIERE SUCCESSORALE

Les analyses faites jusque-là de la situation des enfants nés hors mariage révèlent que l'enfant incestueux est toujours victime d'une certaine discrimination. Il urge alors que la loi corrige cette situation en lui permettant d'établir normalement sa filiation et de jouir totalement des droits qui lui reviennent en tant qu'enfant (paragraphe I).

Au lieu de s'en prendre à des innocents, elle devrait veiller à prévoir des normes assez sévères pour décourager toute personne tentée de commettre, soit l'adultère, soit l'inceste ou pour punir ceux qui s'en seraient rendus coupables. Non seulement cela éviterait les injustices, mais ce serait la meilleure façon de combattre le mal à la racine (paragraphe II).

Paragraphe 1 - Pour une équité de la loi envers l'enfant naturel

Contrairement aux autres enfants qui peuvent librement établir leur filiation et bénéficier des droits découlant de cette filiation, l'enfant incestueux se trouve obligé de ne faire constater la sienne qu'à l'égard d'un seul de ses auteurs, et implicitement, de ne pouvoir prétendre à des droits qu'envers celui-là qui l'a reconnu.

Non seulement, il se trouve privé de la moitié de ses droits successoraux, mais il ne peut prétendre à des aliments que vis-à-vis d'un seul parent, celui qui l'a reconnu, conformément aux dispositions de l'article 392 du code des personnes et de la famille.

Il faut avoir le courage de reconnaître que c'est là une situation défavorable et fort ennuyeuse pour des êtres qui n'ont pas demandé à naître, encore moins dans des circonstances aussi infamantes que l'inceste.

C'est un point qui, comme nous essayons de le démontrer, est difficile à accepter pour nous, compte tenu des diverses raisons évoquées.

Bien entendu nous comprenons le dilemme des auteurs de la réforme qui devaient penser en même temps aux intérêts de la famille légitime et à ceux des enfants nés hors de ce cadre légal : promouvoir la famille légitime et établir en même temps une égalité stricte entre enfants naturels et légitimes ; accepter la double filiation de l'enfant incestueux sans mettre en péril la morale collective n'est pas chose aisée, c'est certain.

Mais il faut bien pouvoir aller au-delà de ces difficultés qui, dans le fond, sont beaucoup plus le fruit de la morale trop souvent hypocrite, malheureusement. Il est préférable de mettre la société face à ses responsabilités sans trop de ménagement ; autrement dit, la forcer à diagnostiquer elle-même ses problèmes et à les résoudre courageusement.

Jusque-là, la société béninoise n'a rien fait d'autre que de fuir les questions brûlantes et en faire des tabous : nous n'en voulons pour prouver que la question même d'inceste qui reste inabordable ; à croire qu'elle engendre un malaise difficile à supporter.

Pourtant, il faudra bien un jour regarder la réalité en face et nous pensons qu'il en est temps ; ce serait stupide et regrettable de se leurrer plus longtemps, soi-disant pour préserver une morale aux dessous hypocrites.

D'un autre côté, il faut dire que le dilemme auquel ont fait face les concepteurs de notre CPF, au-delà de son ampleur, n'était pas difficile à surmonter.

En effet, préserver la famille légitime et protéger les enfants naturels en même temps est une chose tout à fait possible, car s'il faut combattre la famille naturelle, c'est à ceux qui la créent qu'il faut s'en prendre et non aux enfants qui n'en sont que des dérivés et aussi des victimes innocentes.

En leur état actuel, les dispositions relatives spécifiquement aux enfants incestueux ont quelque chose d'anormal et une relecture s'impose.

D'ailleurs, notre pays a bien consenti à ratifier le traité sur les droits de l'enfant et il n'y a pas de raison à ce qu'une catégorie d'enfant soit écartée et privée d'une part de ses droits : ce ne serait pas logique ; de plus, ce serait injuste.

Mieux, le Bénin pourrait bien aller jusqu'à se faire condamner pour les discriminations contenues dans son CPF, un peu à l'exemple de la France qui s'est vue condamnée par la cour européenne des droits l'homme et des libertés fondamentales par l'Arrêt Mazurek du 1er février 200042(*) pour les discriminations contenues dan sa législation à l'encontre de certains enfants adultérins.

On a pu considérer en effet que le but poursuivi par le gouvernement français, qui est la protection de la famille, ne peut être considéré comme légitime qu'à la condition que les moyens employés pour y parvenir soient proportionnés et adéquats ; or, la discrimination résultant de la différence de traitement entre les enfants adultérins et les enfants légitimes, quant à la succession de leurs auteurs, ne traduisait pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé43(*).

Le parlement béninois devrait donc veiller à ce que les textes indexés soient effectivement relus et corrigés en faveur des enfants incestueux. Parce que «Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits»44(*), et que le Bénin a ratifié la plupart des conventions régionales et internationales portant sur la lutte contre les discriminations à l'égard des enfants45(*).

Ces derniers demeurent en effet des enfants, au même titre que les autres, et de ce point de vue, ils ont tout autant besoin de sécurité, d'une famille normale, de parents qui puissent les reconnaître et les aimer ; ce que ne pourra jamais leur procurer un environnement aussi discriminatoire que celle actuellement générée par l'article 319 du CPF en son alinéa 3.

Les enfants incestueux devraient donc pouvoir bénéficier de la totalité de leurs droits à l'égard de chacun de leurs auteurs, sans aucune restriction comme c'est aujourd'hui le cas. Il est nécessaire que la loi les réintègre totalement dans leurs droits, qu'il s'agisse des droits successoraux ou des droits alimentaires.

L'état béninois en a le devoir et aussi les moyens : une législation non discriminatoire. Pour ce faire, les dispositions du code relatives à l'établissement de la filiation incestueuse, en l'occurrence l'article 319, alinéa 3 du CPF doivent être revues et rectifiées dans ce sens. C'est en effet, à ce niveau que se joue l'essentiel, c'est-à-dire le fondement juridique de la filiation.

A défaut, il faudrait tout au moins que le législateur opte pour la légitimation par autorité de justice, ainsi d'ailleurs que son homologue français l'a fait46(*), car il s'agit là d'une véritable « solution de secours » pour tous les enfants naturels en général et pour l'enfant incestueux en particulier.

C'est pour cela que, rester indifférent à la situation actuelle de ces enfants et appliquer le code en l'état serait regrettable à notre avis. Il nous semblerait en effet plus juste que ceux-là même qui se sont rendus coupables d'actes prohibés par la loi soient plutôt directement punis, c'est-à-dire personnellement sanctionnés (paragraphe 2).

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* 41 Claire NDOKO «Les marques du droit de la famille en Afrique noire» Revue Internationale de Droit Civil (RIDC) n° 1 1991 P.89.

* 42 Dans l'affaire Mazurek un enfant adultérin ayant reçu la moitié de ce qu'il aurait reçu s'il avait été légitime dans une succession, a saisi la Cour européenne des droits de l'homme pour violation du principe de l'égalité de tous devant la loi. Il a obtenu gain de cause et la France a été condamnée à lui verser des dommages-intérêts. http://www.credho.org/cedh/session / pages / mazurek

* 43 HAUSER Jean et CASEY Jérôme (sous la direction de), Code des Personnes et de la Famille. Textes-commentaires-conseils pratiques-biliographies, Jurisclasseur, Juriscode, Editions Litec 2002, Groupe.

* 44 Article 1er de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme adoptée par Résolution 217 A (III) de l'Assemblée Générale des Nations Unies le 10 décembre 1948.

* 45 Il s'agit au plan universel de la Déclaration universel des droits de l'homme du 10 décembre 1948, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966 et plus spécialement, la Déclaration des droits de l'enfant du 20 novembre 1989 ; au plan régional de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples du 18 juin 1981 et plus spécialement la Charte africaine des droits du bien-être de l'enfant ratifiée par le Bénin le 02 juin 1996.

* 46 Articles 333 à 333-6 du Code civil, Dalloz 2002.

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