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Gestion locale des marchés public et service public local: le cas communal

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par Ikram El Qaouti
Université Mohammed V des sciences juridiques économiques et sociales , (Maroc) Rabat Agdal - DESA en droit public 2009
  

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Chapitre deuxième :

Réalité de la commande publique communale : Etat des lieux et perspectives de développement

Si l'étude des cas pratiques explique que le dénuement de la gestion communale des marchés publics a ses causes ; ces explications, à elles seules, ne peuvent élucider tous les obstacles à la contractualisation de bons marchés publics communaux ; les cas pratiques étudiés n'apportent qu'un aperçu limité sur les caractéristiques de la réalité communale. Nonobstant, le cadrage des axes de déficience qu'ils dégagent est bel est bien commun à la gestion décentralisée des marchés publics :

En tout premier lieu, la problématique des capacités humaines paralyse la contractualisation de « bons marchés communaux ».

Là où le représentant de la population locale est guidé par ses intérêts personnels ; l'exercice de ses compétences devient hostile aux intérêts locaux.

Là où il est question du financier ; la tutelle politico-financière s'instaure comme la règle de base.

L'existence d'une échappatoire unique, totale et absolue à ces obstacles ; est une réflexion purement utopiste générée d'un idéalisme imaginaire. En l'occurrence, une réflexion réaliste permettant de se projeter dans une vision développementaliste de la commande publique communale, mène à approcher ces axes dans leur caractéristique intrinsèque :

- La problématique des capacités humaines sévit « en bas ».

- L'atteinte à l'éthique du marché public se fait par « en bas ».

- Et bien évidemment la contractualisation du marché s'effectue « en bas ».

Ceci dit, dériver à ces obstacles se doit par « en bas ». Toutefois, l'approche par « en bas », ne peut nullement être assimilée à un détachement immédiat ou total du central. Celui-ci joue un rôle fondamental pour entraver ou ouvrir la voie à la contractualisation de bons marchés communaux.

C'est cette approche qui guidera la réflexion sur d'éventuelles alternatives permettant de surpasser le dénuement de la gestion communale des marchés publics.

Par ailleurs, il est à priori nécessaire d'approfondir l'étude sur les axes de déficiences et d'esquisser si des éléments connexes à ceux-ci existent, et ce, afin de pouvoir formuler des pistes d'amélioration qui leur seront ajustées

Section première : Les axes de dysfonctions

« Les collectivités locales sont tiraillées entre le désir d'intervenir et le fait de se voir bloquées par des limites »197(*). Ces limites sont de natures diverses et touchent à différents secteurs de l'interventionnisme des collectivités décentralisées. En matière de marchés publics, l'étude des cas pratiques a fournie un cadre de raisonnement et d'analyse ; susceptible de guider l'approche des limites pratiques à la gestion communale des marchés publics que cette section se propose d'en présenter les grandes lignes.

Des marchés payés sans services faits, des marchés résiliés, d'autres réalisés partiellement et payés entièrement, des travaux non exécutés, d'autres mal exécutés, des fournitures non fournies, des écarts entre les montants réels des marchés et ceux payés, le recours aux mêmes fournisseurs, l'émission de bons de commandes sans commande faite ; la liste est la longue et les lacunes sont nombreuses.

Les principales limites qui s'opposent à la « bonne » gestion des marchés communaux ont été ventilées en trois axes, il s'agit d'abord des limites dans les capacités humaines, ensuite viennent les limites d'ordre politico-financier. Ces deux limites sont des obstacles dits « hors de la volonté» de l'élu communal, mais quand cet élu est guidé par ses intérêts personnels, ce sont ceux-ci qui déterminent les clauses du contrat, c'est la problématique de l'éthique des marchés publics et sa violation.

Sous-section première : L'humain

Avant le juridique, le financier, le politique, le technique, il y'a l'humain ; dans son être social, dans ses capacités de conception et de gestion, de suivi ; l'humain c'est la base, le départ, la conduite et l'arrivée. Bien que l'étude des cas pratiques a révélé que la violation de l'éthique constitue l'obstacle le plus éminent à la bonne gestion des achats communaux; c'est la problématique des capacités humaines qu'il importe de traiter en premier lieu.

Les cas pratiques ont mis en lumière des insuffisances dans les capacités de gestion des élus communaux, certaines de ces insuffisances sont dues essentiellement à un déficit dans les compétences humaines. Afin d'analyser les causes de ce déficit, il parait dans un premier temps nécessaire d'établir le profil de l'élu communal ; afin de mieux le connaître ce qui permettra d'aborder convenablement la problématique des limites humaines.

Quoique l'élu communal est l'acteur privilégié de ce travail d'étude, un paragraphe serait consacré à la fonction publique communale ; car, s'il y'a un vide à combler en matières techniques, administratives,... que connaissent la plupart des élus, ce sont les fonctionnaires communaux, qui par leur collaboration apporteront leur savoir-faire. Enfin il serait question d'aborder la problématique de la dépendance technique ; conséquence logique du déficit dans les capacités humaines, mais aussi des gênes autoritaristes de l'Etat marocain.

A. Profil de l'élu communal :

Le représentant communal est élu pour être responsable de la gestion de l'affaire locale, il est donc appelé à déployer un certain savoir faire. Ce savoir faire, est d'une utilité d'extrême importance quand il s'agit de gérer la procédure de passation des marchés publics.

1. Le niveau d'instruction :

Certes, un analphabète qui gère une commune rurale, peut le faire de manière plus efficace qu'un docteur en gestion administrative ; c'est normal puisque c'est du « local » qu'il s'agit ; c'est celui qui a vécu entre les ressortissant de la collectivité décentralisée, c'est lui qui connaît le mieux ses besoins, et donc c'est lui qui est capable de leur apporter des réponses. Cependant, en matière de marchés publics, l'élu doit avoir un certain niveau d'instruction. Selon les statistiques officielles, 2,1% des élus sont sans instruction dans les communes urbaines, contre 12,7 % dans les communes rurales. 11,1 % des élus communaux ont atteint le niveau primaire dans les milieux urbains, contre 32,5 dans les milieux ruraux. La proportion du niveau d'instruction collégial est de l'ordre de 11,6 dans les communes urbaines contre 10,8 dans les communes rurales. 29,6 % des élus ont atteint le lycée dans les communes urbaines contre 25% dans les communes rurales, 45,5 % des élus des communes urbaines ont un niveau d'instruction supérieur, contre 18,9 % seulement dans rural198(*).

Ces chiffres démontrent que c'est dans les communes rurales où les élus ont un faible niveau d'instruction, et ces dans ces communes où les élus communaux du royaume sont les moins instruits. Quoique le niveau d'instruction des élus a évolué au fil des années 199(*), il se trouve toujours limité par rapport aux pouvoirs et aux compétences que la charte communale confère aux élus communaux.

2. La maitrise des langues :

Dans un marché public, l'élu communal peut être amené à négocier, discuter, à communiquer avec un étranger qui peut être français, espagnol..., ou encore, avec un marocain ne parlant que son dialecte, connaît-il ces langues ? D'après une enquête menée sur la formation des élus, par le programme d'accompagnement de la décentralisation (PAD) ; c'est la langue arabe qui est placée en premier (94,8 % élus dans les communes urbaines et 93,4 dans les communes rurales). La langue française vient en deuxième position avec 82,5 % dans les communes urbaines contre 46,6 % dans les communes rurales.

Concernant la langue Amazighe, l'enquête a révélé que 15,9 % des élus parlent cette langue dans les communes urbaines, contre 25 % dans les communes rurales. Quant aux autres langues, 19 % des élus déclarent qu'ils parlent anglais dans les communes urbaines contre 7,5 % dans les communes rurales, 13,20 % déclarent parler espagnol dans l'urbain contre 2,4 % dans le rural. Ces chiffres donnent à réfléchir sur les difficultés de communication que peut engendrer le non acquisition des langues, la commune peut être amenée à contracter avec entreprises étrangères, encore plus, comment pourrait se faire la lecture des journaux, des magazines ..., tout ce qui peut apporter une plus value aux connaissances de l'élu ; tout ce qui est nouveau en matières économique, technique, industrielle..., et nécessaires à la gestion des marchés publics si l'élu ne maitrise les langues?!

3. Spécialités et activités professionnelles :

Les élus communaux occupent des activités professionnelles aussi diverses que variées, la part la plus importante est celles des agriculteurs dans les commune rurales ; ils représentent 40 % des élus ruraux. Dans les communes urbaines ; les cadres moyens, les professeurs et les instituteurs représentent la proportion la plus élevée qu'est de l'ordre de 19,6%, suivis par des employés d'entreprises (17,5 %) et les commerçants (16,4 %). Les élus ayant des diplômes d'études supérieures représentent des proportions très basse dans les milieux ruraux ; 4,2 % est le pourcentage des élus ruraux ayant suivi des études supérieures ; en sciences humaines, sociales, en philosophie et en études islamique ; c'est la proportion la plus élevée.

L'enquête a dévoilé l'absence totale d'élus spécialisés en sciences administratives dans les communes rurales. La situation n'est pas meilleure dans les communes urbaines ; ces spécialistes ne représentent que 0.5 %. 3,3 % est la proportion des juristes dans les communes rurales, elle est de 6,9 % dans les communes urbaines. Dans les communes urbaines, les spécialistes en économie, en gestion, en finances et en commerce représentent 5,3 %, 1,7 % d'ingénieurs. Le manque de spécialistes est plus flagrant dans les communes rurales ; les économistes et les spécialistes en finances, en gestion et en commerce ne représentent que 0,5 % des élus ruraux, 0,5 % d'ingénieurs, 0,5% de spécialistes en informatique, en communication et en information200(*)...

Des proportions très basses dans les spécialités les plus importantes pour la gestion de l'affaire communale en général, et celle de la gestion des marchés publics en particulier ; alors que les proportions les plus élevée concernant des domaines comme les études islamiques, la philosophe, langues et la littérature (3,8 %).

à ce faible niveau d'instruction, s'ajoutent d'autres facteurs qui font que le potentiel humain, dans les communes comme dans les autres collectivités locales du royaume ne réponde pas aux exigences d'efficacité et de rentabilité.

4. La formation :

La première ébauche de la formation à l'achat public au Maroc a fait progressivement son entrée en 1976, à l'occasion des travaux de réforme de la réglementation sur les marchés publics. En fait, les décideurs politiques ont constaté que l'obstacle majeur, à cette époque, était celui des retards dans l'exécution des marchés et que l'une des causes les plus évidentes de ces retards est relative à un manque de personnel qualifié.

Ainsi, la spécialité « section des marchés publics » fut introduite à l'école nationale d'administration (ENA)201(*), celle-ci, par la création des 7 centres régionaux de formation administrative, avait dispensé des cours sur les marchés publics à travers la section « régie » dans les échelons décentralisés. Mais sans pour autant être une véritable spécialité en la matière. Au sein de l'institut national de l'aménagement et de l'urbanisme (INAU) existe aussi une section relative aux marchés publics, mais elle ne concerne que les fonctionnaires des communes. En dehors de ces cours, il n'existe aucune formation continue de gestion des marchés publics « le seul organisme ayant une stratégie durable de passation des marchés est le contrôle général des engagements de dépenses (C.G.E.D). Toutefois la formation qu'il dispense ne permet pas de répondre à tous les besoins en formation en matière de gestion d'achat public.

En 2004, le Maroc s'est engagé dans un processus visant le renforcement des capacités des élus et du personnel des collectivités locales, dans un cadre de partenariat avec l'Etat français, et suite à la signature de la convention de financement portant sur la réalisation d'un programmes dit « fonds de solidarité prioritaire » (FSP 2003-43)202(*). Ses actions se proposent sous trois composantes ; la première est relative à l'amélioration des relations entre les services de l'Etat et les collectivités locales, et ce sont les deux autres composantes qui s'attachent aux problématiques de qualification, de formation et renforcement des capacités.

La deuxième composante vise l'adaptation de l'offre de formation des élus, cadres et agents des collectivités locales, qui nécessite pour sa mise en pratique, la réalisation d'un schéma directeur et des schémas directeurs régionaux pour la formation des élus et des cadres et agents des collectivités locales dans 5 régions pilotes (Rabat-salé-Zémour-zaër, Tanger- Tétouan, Marrakech -Tensif -Al Haouz, Souss - Massa - Draa et l'oriental). Cette composante vise aussi la conception et la mise en place de « Maison de l'élu » dans ces régions. La troisième composante a pour objet le renforcement des capacités et maitrise d'ouvrage des collectivités locales, Pour se faire un accompagnement des collectivités locales dans leurs démarches de projets, la conduite des appels à projets ainsi que la capitalisation et la diffusion des « Bonnes pratiques de la coopération décentralisée ». Toutefois ce programme ainsi que les séminaires organisés occasionnellement ne peuvent répondre aux besoins énormes en formation à l'achat public.

B. La fonction publique communale :

En abordant celle-ci, la doctrine, la presse, le citoyen dans son quotidien utilisent l'appellation « fonction publique locale », or celle-ci ne concerne que les entités communales. La fonction publique communale est régie par les dahirs n° 1.58.008 du 24 février 1958 portant statut général de la fonction publique203(*) qui constitue la référence de base, et le décret n° 2.77.738 du 27 septembre 1977 portant statut particulier du personnel communal204(*). L'adoption de ce texte avait coïncidé avec la promulgation du Dahir n°1-76-586 de 1976 portant organisation communale précité qui renvoie dans son article 54 au décret régissant la fonction publique précité et au décret portant statut particulier du personnel communal précité. La charte communale de 2002, renvoie aux décrets sus cités dans son article 48, en reprenant les termes de l'article 54 du dahir de 1976. Cela veut dire que le personnel communal fonctionne toujours dans l'esprit des années 70, un esprit d'autoritarisme qui ne prenait en compte ni les particularités locales ni l'adéquation des lois aux exigences des spécificités territoriales, « un tel choix dévoile le désir constant du législateur de ne manifester aucune rupture par rapport aux pratiques antérieures... »205(*)

Le décret de 1977 comporte non seulement des insuffisances mais aussi des contradictions avec les stipulations de la charte communale, qui dans son article 54, investi le président du conseil communal du pouvoir de nomination du personnel communal dont il est le chef hiérarchique. Or le décret limite « la portée de ce pouvoir puisqu'il ne confère la qualité de fonctionnaire qu'aux cadres classées dans les échelles n° 1 à 9 incluses. L'on peut se demander alors ou est la conformité avec la compétence dévolue au président du conseil vis-à-vis des fonctionnaires ayant une échelle supérieure à la limite imposée par le décret de 1977... »206(*). Tout aussi important les chefs de services ainsi que les secrétaires généraux et les contractuels sont nommés par le ministre de l'intérieur ; il s'agit donc d'une « cogestion ».

Ces lacunes juridiques ainsi que le non ajustement du régime de la fonction publique communale aux exigences du processus décentralisateur font que la commune fonctionne avec un personnel régit par un cadre juridique en déconnexion avec les contraintes du présent, avec les aspirations futures d'un pays qui se déclare « en transition démocratique », non plus avec le « local » marocain que les marocains d'autre fois ont conçu.

Outre les insuffisances, les ambiguïtés et les contradictions textuelles, les défaillances dans la fonction publique communale s'observent aussi dans le recrutement du personnel qui se fait « ...sans tenir compte des véritables besoins locaux, cette situation s'est traduite par une grande fragilité financière des collectivités locales. « ... », essentiellement des communes rurales, connaissent une situation de sous encadrement affirmé « ..... » Plus étonnant encore, c'est qu'au sein des collectivités locales disposant de suffisamment de personnel, un autre problème, lié à leur gestion« ... »handicape sérieusement l'efficacité économique des pouvoir décentralisés... »207(*). Et quand l'efficacité économique, l'efficacité managériale, l'efficacité sociale.....des fonctionnaires communaux est compromise, l'interventionnisme communal est aussi compromis. La fonction publique communale présente des insuffisances capitales ; qui ne peuvent ne pas se traduire directement et négativement sur l'action communale. L'insuffisance ou l'absence même d'encadrement dans certaines communes, du personnel recruté sans tenir compte des véritables besoins locaux, associés à l'inefficacité de la formation initiale des fonctionnaires communaux font que la fonction publique communale est incapable de répondre aux exigences de rentabilité et d'efficacité.

C. Des insuffisances dans le personnel :

«  Si les collectivités locales ont pu rapidement s'affirmer comme des acteurs publics avec lesquels il faut désormais compter, c'est d'abord grâce à l'évolution rapide, aussi bien en qualité qu'en quantité qu'en qualification des effectifs.... » Déclara feu Driss Basri208(*). Si le symbole de l'autoritarisme marocain affirma qu'en 1992, les collectivités locales du royaume ont connu une évolution rapide en effectifs en termes de quantité, de qualité et de qualification, c'est, qu'un principe, après 16 ans passés, celles-ci doivent fonctionner avec effectif suffisant et de qualité meilleure.

Or, avec la création des régions, l'augmentation du nombre des collectivités locales (leur nombre est passé de 801 en 1976 à 1547 en 2002)209(*). La révision de la charte communale et du Dahir portant organisation préfectorale et provinciale, et l'accroissent de leurs compétences font que celles-ci n'arrivent pas à couvrir leurs besoins, et ce malgré l'évolution du nombre du personnel qui n'est pas commode avec le nombre des collectivités locales du royaume. Le nombre d'effectif est passé de 29.199 en 1977210(*) à 110.080 en 1992, à 145 736 en 2002211(*). Les communes comptent 121 264 effectifs dont 86247 dans les communes urbaines contre, seulement 35017 dans les communes rurales. Le personnel dans les communes urbaines est réparti comme suit : 5500 cadres supérieurs, 13263 cadres moyens, 13762 agents d'exécution et 53434 de main d'oeuvre ouvrière et les 208 restants correspondent à d'autres catégories d'emploi. Alors que dans le communes rurales les quelques 35017 effectifs contiennent 2406 cadres supérieurs, 6260 cadres moyens, 11582 agents d'exécution, 14741 de main d'oeuvre ouvrière.

Ces chiffres témoignent de la disparité entre les communes rurales et les communes urbaines, les communes rurales sont au nombre de 1298, soit plus que 5 fois le nombre des communes urbaines qui sont au nombre de 249. C'est dans les communes rurales ou les élus ont le plus bas niveau d'instruction et de qualification, donc ce sont elles qui ont le plus besoins d'effectif, et surtout d'un effectif de qualité. Encore plus, pour ce qui est de l'encadrement, son taux n'a presque pas évalué de 1994 à 2002 ; 6,6 % en 1994, 6.8 % en 2001 et 6,9 % en 2002), alors que dans les communes urbaines, le taux d'encadrement a évalué de 4,6 % en 1994 à 6.5 % en 2002212(*).

Le manque de personnel et la faiblesse de son encadrement dans les communes rurales, et ses insuffisances dans les communes urbaines font que l'élu communal, se trouve démuni des moyens et aussi de l'appui technique, administratif...du personnel communal.

D. La dépendance technique :

Dans une commune, l'élu n'est généralement pas assez instruit, ses connaissances sont limitées, le personnel communal est insuffisant, inadapté... ; plusieurs facteurs font que l'Etat interfère dans l'affaire communale, cette fois-ci il ne s'agit ni d'un contrôle à priori, ni d'un contrôle à postériori. L'interférence dont il s'agit se manifeste par une « tutelle technique » ; qu'est dans une certaine mesure, une conséquence logique des insuffisances quantitatives et qualitatives dans les ressources humaines dans collectivités locales du royaume. La tutelle technique, ou encore assistance technique « peut prendre des formes très diverses allant de la conditionnalité de réalisation des projets sur le territoire local, à l'intervention directe pour certaines action, en passant par l'orientation des projets économique dans les domaines voulus par l'Etat .... »213(*). En raison de la carence en cadres spécialisés, en personnel qualifié ; l'élu communal qui, lui aussi manque de formation, de connaissances techniques, juridiques, et souvent en déconnexion avec l'environnement économique de l'actualité administrative ; se trouve désinvesti partiellement, parfois même en totalité du pouvoir de décision.

La plupart des collectivités locales ne disposent pas du potentiel humain approprié pour entreprendre des projets efficaces et rentables ; ce qui accroit l'ingérence des pouvoirs centraux dans les affaires locales, et « ...les concours apportés par les services techniques de l'Etat aux collectivités locales ne peuvent conduire qu'à un renforcement de la dépossession des pouvoirs décentralisés. ». En fait, quand l'assistance devient ingérence ; le but de l'Etat central dépasse l'encadrement et l'assistance ; pour se réserver une compétence de décision, ainsi la commune voit son rôle « ...se réduire à approuver, ou dans le meilleur des cas à proposer des correctifs généralement superficiels »214(*) sur des domaines relavant de la compétence propre du mandataire de la nation.

L'emprise des services techniques de l'Etat en matière de marchés communaux peut se manifester différemment d'une commune à une autre et aussi selon la nature du projet. Par l'orientation, le centre guidera l'investissement communal aux projets qui lui semblent utiles. Par l'encadrement, surtout dans les milieux ruraux, les autorités centrales agissent à leurs initiatives ou à la demande des élus librement durant les étapes procédurales du marché ; voire même antérieurement au lancement des appels d'offres en décidant du placement de l'investissement communal.

Certes, la tutelle technique sert, dans une certaine mesure à combler un déficit certain dans la qualification de l'élu et du fonctionnaire communal. Cependant, ce déficit n'est dû ni à l'élu ni au fonctionnaire ; il est l'oeuvre des producteurs des normes qui ne sont pas encore arrivés au stade de la prise de conscience des exigences d'adaptabilité de la fonction publique communale aux évolutions et aux exigences des contextes locaux. C'est l'oeuvre aussi du gouvernement qui porte un intérêt minime à la formation technique des élus quand il trace ses programmes. Cette tutelle s'explique donc par une situation de dépendance technique créée par les autorités centrales afin d'avoir le premier et le dernier mot sur les actions des collectivités décentralisées.

- Sous section deuxième : L'éthique du marché public 

« Si pour certains, la mise en concurrence permet une affectation rationnelle des dépenses des collectivités publique ainsi qu'une compression des coûts, et par voie de conséquence, une protection efficace des deniers publics, pour d'autres, elle ne serait qu'une « hypocrisie », une « façade masquant des pratiques occultes : corruption, pots-de-vin, dessous de tables, fausses factures et bien d'autres, pratiques répréhensibles. Mais bien dissimulées par les entreprises candidates à la commande publiques »215(*).

A .L'entente frauduleuse :

L'existence d'une entente veut dire que les contractants passent des accords secrets, s'entendent, se concertent pour prendre des décisions afin de détourner la procédure ; au bénéfice de l'entreprise qui assure en échange, à l'agent chargé du marché, notamment l'élu communal, des faveurs illicites : pots-de-vin, avantages, services à titre privé, perspectives d'une carrière ...Les gains de cette entente sont donc partagés entre un élu corrompu et une entreprise qui cherche à avoir le plus de profit possible.

D'après les cas pratiques étudiés, la manigance peut avoir lieu à chaque moment du déroulement de la procédure, et à chacun de ses stade ; la manipulation des prix, le modelage des spécifications techniques selon la volonté l'entreprise bénéficiaire, des factures falsifiées, des prestations non-conformes et pourtant réceptionnées par l'acheteur public, la surfacturation... autant de pratiques immorales font que la commune paye cher un produit, un service ou un ouvrage public et le fait payer cher au contribuable. Dès le stade de la définition préalable des besoins, l'élu communal ; par manque d'éthique peut définir les besoins de la commune sur mesure des capacités de l'offre d'une entreprise déterminée, rédiger un cahier de charges de manière à écarter des candidats sincères et concurrentiels.

Les possibilités de favoritisme sont nombreuses dans la définition des aspects qualitatifs de certaines spécifications ou la faisabilité de certains services, qui servent à déterminer la recevabilité des offres. L'entente frauduleuse entre l'élu communal et l'entreprise prennent d'autres cas figures, ainsi par exemple, durant l'examen des échantillons, l'élu connaît bien l'échantillon qu'a présenté son corrupteur, ou s'est mis d'accord avec ce dernier que cet échantillon n'est-que fictif et ne correspond nullement au matériel qu'il compte fournir à la commune. Ou encore, l'octroi d'un enrichissement indu à l'attributaire qui encaisse le montant total de la commande sans que le service soit fait...

Dans une enquête sur l'intégrité216(*), et sur la base d'échantillons d'entreprises, 22% ont déclaré qu'ils font toujours recours à la corruption dans les marchés publics, 37 % le font fréquemment, 9% rarement, et les 13% restants n'ont pas donné leur opinion. 59 % des échantillons questionnés déclarent qu'ils font recours toujours ou fréquemment à la corruption au cours de l'exécution du marché. Quant aux intermédiaires, 77 % font appel à leur assistance pour coordonner l'entente frauduleuse. Ces chiffres, ainsi que les cas pratique étudiés ; expliquent pourquoi dans le système de passation des marchés publics au Maroc ; ça ne marche pas. Le risque d'entente existe avec force et ses manifestations dans les différentes étapes procédurales de l'élaboration de la décision du marché ; ne peuvent ne pas altérer la qualité de la dite décision avec toutes les conséquences qui en résultent.

B. la violation de l'éthique du marché public : le coût social :

Coût social, et efficacité sociale, ce sont ces deux maître-mots qui déterminent la performance d'un système national ou local de la gestion des marchés publics ; et c'est à la lumière de ces deux maître-mots que peuvent être décelées les incidences d'une gestion immorale des marchés communaux sur le fonctionnement du service public communal.

Un marché public basé sur une entente entre l'élu communal et l'attributaire coute cher aux finances nationales et donc au contribuable. Cette entente à une mauvaise allocation des ressources au regard du coût du marché par rapport à son efficacité sociale. Un marché qui coûte cher peut être la cause de la non conclusion d'autres, quoique le besoin du service public l'exige, ajouter à cela son inefficacité sociale ; cela veut dire que le marché n'a pas d'issue socialement utile et profitable. Par manque de transparence, des marchés sont attribués selon des modalités anticoncurrentielles, ce qui affecte non seulement le marché objet de l'entente, mais le danger s'étend sur le long terme pour affecter la concurrence en elle-même ; graduée dans son principe ; principe en principe sacré, mais aussi dans la confiance en son effectivité. L'enquête sur l'intégrité précitée a révélé que les parts les plus importantes des entreprises qui ne répondent pas aux appels d'offres, ne le font pas en raison du manque de transparence dans la procédure.

Le décret sur les marchés publics tient la notion d'égalité au premier plan, cela s'explique par le fait que « la liberté dans la concurrence suppose l'égalité dans la concurrence »217(*. Ainsi les garantie de neutralité, d'objectivité et d'impartialité sont compromises, les propositions d'offres le sont aussi, le nombre de candidats se voit limité ; limitant par conséquent la marge de choisir l'offre économiquement la plus avantageuse dans les marchés futurs.

Les conséquences de la violation de l'éthique des marchés publics sont innombrable, elles agissent directement sur la qualité de vie de la population locale ; cette population a mandaté cet élu parce qu'elle a confiance en lui et en ses capacités de gestion. Elle se trouve trahie, voire même victime du vol manifeste des deniers servant à lui assurer des conditions d'une vie décente. Sur les finances de la commune, un marché de mauvaise qualité risque de donner lieu à la conclusion d'autres, encore plus un marché payé excessivement par rapport à sa quantité et à sa qualité, c'est qu'il condamne la commune à ne pas s'investir dans d'autres affaires et donc ne peut servir convenablement les intérêts locaux, et les cas pratiques étudiées ont illustré ces cas figure.

La violation de l'éthique des marchés publics agit aussi sur les entreprises ; celui qui a gagné le marché précédent avait versé de pots-de-vin alors que le candidat évincé avait présenté une offre concurrentielle tout en restant dans l'éthique.

Des cas de figures pareils font que soit l'entreprise s'abstient de participer aux prochaines appels d'offres soit qu'elle suivra ses précédent et versera à son tour des pots-de-vin, « la corruption nuit à l'entreprise parce qu'elle nuit à l'économie et fausse les règles du jeu. Mais elle lui nuit aussi parce que ses efforts vont vers la recherche du circuit de la corruption au lieu de se concentrer sur l'innovation... »218(*).

Sous-section troisième : Le politico- financier

La collectivité décentralisée doit avoir la possibilité de se procurer des ressources et de choisir leur emploi ; l'autonomie financière ne consiste pas seulement « ...à échapper à la dépendance, mais à savoir s'en nourrir ...»219(*), il faut qu'elle ait ses propres ressources, mais qu'elle ait aussi la liberté dans choix de l'affectation des ses ressources.

Aux limites dans les ressources humaines, s'ajoutent des limites financières ou encore politico-financières à la bonne gestion communale des marchés publics ; la commune doit mobiliser efficacement ses ressources, afin de rentabiliser ses investissements. Sans pour autant s'attarder sur la problématique des ressources (fiscales, subventions, dons...), qui porte un intérêt majeur en matière de gestion financière en général, mais elle n'affecte pas, de manière directe la qualité de la gestion communale des marchés publics. Il faut dire qu'aujourd'hui, avec la réforme de la fiscalité locale220(*), les communes comme les autres collectivités décentralisées peuvent voire leur fonctionnement s'améliorer.

Cependant c'est la dépendance politico-financière de la commune à l'égard des autorités centrales qui pose des contraintes de taille aux élus communaux et à l'action communale en matière de marchés publics. Le budget est sous tutelle, la contractualisation d'un emprunt l'est aussi. En plus de la tutelle, l'obtention de l'emprunt par la collectivité décentralisée constitue l'une des limites passibles de bloquer l'investissement continu et harmonieux en des contrats de marchés publics.

Sans rappeler ce qui a été énoncé en première partie à propos la tutelle politico-financière sur les actes des la collectivité décentralisée ; il faut dire que la tutelle sur le budget communal est le mécanisme le plus restrictif de la liberté des pouvoirs décentralisés.

* 197M .EL Mouchtary, A. Bouachik, le rôle des collectivités locales dans le développement et sociale au Maroc, op-cite p.225.

* 198 Programme d'accompagnement du processus de la décentralisation, schéma directeur de formation des collectivités locales, phase 3, rapport intermédiaire : Résultat de l'enquête auprès des élus, profils des élus, analyse des compétences et besoins en formation, Mars 2007. www.pad.org.ma p.6

* 199 Une comparaison des chiffre sus cités avec ceux des élections communales de 1983 ; révèle qu'en 24 ans, un écart existe, mais sans pour autant être de grande importance, ainsi en 1983 dans les communes urbaines, 9,42% des élus étaient sans instruction contre 38,69 % dans les commune rurales, 16,26 des élus avait atteint le primaires dans le communes urbaines contre 30,24 % dans le communes rurales. Concernant le niveau d'instruction secondaire, la proportion était de 44,58 dans les communes urbaines contre 22,49 % dans les communes rurales, et enfin le niveau supérieur, atteint par 29,4 % des élus dans les communes urbaines contre seulement 8,58 % dans les communes rurales. M. Mouchtary, A. Bouchik, le rôle des collectivités locales dans le développement et social au Maroc, op-cite p. 234.

* 200 Programme d'accompagnement du processus de la décentralisation, schéma directeur de formation des collectivités locales, phase 3, rapport intermédiaire : Résultat de l'enquête auprès des élus, profils des élus, analyse des compétences et besoins en formation, op cite. P.8.

* 201 Les programmes de formation était fixés et aménagés comme suit : «  la spécialité M.P est enseignée au cours des deux dernières années d'études du cycle le normal. Cette option organisée en troisième années, comporte l'étude des modèles modernes de gestion, comptabilité publique et générale, avec des séances pratiques d'application en 4ème année, l'option « marchés publics » est organisée autour de deux enseignements : comptabilité analytique et l'administratif des marchés... » A. Regala Ouazani, l'impératif de formation à l'achat public, Remald n°17 Octobre - Décembre, 1996. P. 155.

* 202 Ce programme a pour objectif principal l'amélioration des conditions d'exercice des collectivités locales de leurs attributions, il est d'un montant estimé à 11 millions d'euros (dont 4,6 Millions d'euros sur les crédits du FSP).Projet d'accompagnement du processus de décentralisation (PAD. Maroc), Schéma directeur nationale de formation, termes de référence. www.pad.ma

* 203 B.O n° 2372 du 11 Avril 1958. (P. 631 à 636)

* 204 B.O n° 3387 du 28 septembre 1977. (1068 à 1070)

* 205 T. Zair, la gestion décentralisée du développement économique au Maroc, L'Harmattan, 2007. P.349

* 206 M. El Mouchtary, A. Bouachik le rôle des collectivités locales dans le développement économique et social au Maroc. Op-cite p 235

* 207 T. Zair, la gestion décentralisée du développement économique au Maroc, op-cite. P.353

* 208Extrait du discours Driss Basri, ancien ministre de l'intérieur et de la formation, discours prononcé à l'ouverture des travaux du Vème colloque des C.L, publié dans le matin du Sahara du Mardi 28 Avril 1992. Cite in M. El mouchtary, A. Bouachik , op-cite p 236

* 209 Ministère de l'intérieur, les collectivités locales en chiffres op-cite p.15

* 210M.EL Mouchtary, A. Bouachik, le rôle des collectivités locales dans le développement économique et social au Maroc, op-cite p.236.

* 211 Ministère de l'intérieur, les collectivités locales en chiffre op-cite p.27

* 212 Ministre de l'intérieur, les collectivités locales en chiffres, op-cite. p.28

* 213 J.chabih, les finances des collectivités locales au Maroc : essai d'approche globale des finances locales, op-cite P.172.

* 214A. Gourari, « le rôle des collectivités locales dans la gestion de l'environnement en droit marocain », in démocratie locale et développement , actes du colloque organisé par le département de droit public de la faculté de droit de souissi, les 23 - 24 Avril 1997, Remald, série « thèmes actuels » n° 15.1998, p.11, cité in J.chabih, les finances des collectivités locales au Maroc : essai d'approche globale des finances locales, op-cite . P. 172

* 215 M ben latif, les marchés publics et la concurrence, op-cite p.110.

* 216 K. Mesbahi, table ronde : « lutte contre la corruption, promotion de l'éthique et de la transparence au Maroc », lecture autour des réponses des entreprises : enquêtes d'intégrité, p.16.

* 217M. Ben latif, les marchés publics et la concurrence, op-cite p 117.

* 218 M.A. Aboudrar C.G.E.M, le chef d'entreprise face à la corruption, Ministère de la modernisation des secteurs publics, Banque mondiale, CGEM et transparençy Maroc, table ronde, Etat des lieux et moyens de concrétiser le plan d'action du gouvernement, rapports de synthèse. p.5.

* 219 S. Benyoussef, « pour sortir du XX siècle », in la gestion des finances locales, quelle rationalité .P 374. Cité in M. El mouchtary ; A. Bouachik. Rôle des collectivités locales dans le développement économique et social. Op-cite, p.124

* 220 Par Dahir n° 1-07-195 du 19 Kaada 1428 (28 novembre 2007) portant promulgation de la loi 47-06 relatif à la fiscalité des collectivités locales. Publié au B.O n° 5584 du 6 décembre 2007. (P.1261 à 1355)

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