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L'obligation de conseil du banquier dans les relations entre la banque et son client

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par Moussa Ba
Université de Dakar-Bourguiba - Maitrise droit de affaires 2007
  

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Section ÉÉ : Le préjudice et le lien de causalité

Ce sont deux autres conditions classiques de la responsabilité contractuelle. Ainsi nous analyserons dans un premier temps le préjudice (§1) puis nous traitons le lien de causalité dans un second temps.

§1 : Le préjudice

Il ne peut avoir responsabilité civile sans dommage. C'est une condition sine qua non. Ainsi une faute non dommageable pour autrui aussi grave soit-elle ne peut être civilement sanctionnée. Donc si la victime doit toujours rapporter la preuve d'un dommage, il faut savoir que tout dommage n'est pas réparable.

Ainsi le dommage peut être corporel, matériel ou moral en droit commun de la responsabilité contractuelle. Pour ce qui concerne le dommage corporel il n'aura pas en la matière. Par contre la victime peut dans une certaine mesure demander la réparation d'un dommage matériel ou moral.

Le dommage matériel est celui dont la réparation est le plus souvent demandée. Le préjudice matériel, encore appelé dommage économique s'analyse en une lésion d'intérêts patrimoniaux appréciable directement en argent. Il peut s'agir d'une perte subie ou d'un gain manqué.

La perte subie ou « damnum emergens » correspond à l'appauvrissement de la victime, dépenses utiles effectuées par la victime par exemple.

Le gain manqué ou « lacrum cessans » correspond à l'hypothèse dans laquelle la victime a été privée d'un enrichissement qu'elle pouvait raisonnablement espérer. Exemple : une bonne affaire manquée par le client suite à un défaut de conseil de son banquier.

Le dommage moral est tous les dommages qui ne portent pas atteinte au patrimoine, qui n'ont pas d'incidences économiques directes et ne sont pas donc susceptibles d'évaluation pécuniaire. Ce genre de dommage sera pourtant généralement réparé par l'allocution d'une somme d'argent.

Pour être réparé le préjudice doit présenter plusieurs caractères, il doit être certain et prévisible. Le caractère prévisible du dommage ne pose pas en la matière beaucoup de difficultés. Il suffit que le banquier ait en conscience lors de la conclusion du contrat, des conséquences de sa défaillance. En revanche, le caractère certain du dommage pose en la matière plus de problèmes. En effet pour être réparable, un dommage doit être actuel et certain. Il peut frapper la victime directe ou bien par répercussion d'un premier dommage subit par une victime directe, c'est le problème du dommage par ricochet.

Un dommage certain c'est un dommage qui n'est pas hypothétique qui n'est pas éventuel, c'est celui qui est tellement vraisemblable que le droit le prend en considération. Seul le préjudice réel peut donner lieu à réparation, qu'il soit présent ou futur. Si le dommage moral résultant du défaut de conseil présente à l'évidence ce caractère certain, il en va différemment pour le préjudice matériel. En effet, lorsque le banquier n'a pas ou mal conseillé son client, le dommage peut-il exactement être mesuré à l'aune des pertes subies par celui-ci ? Du moment où le banquier conseille le client, il ne fait que l'inciter. Rien ne dit que le client suit le conseil, de même rien ne dit qu'aucun aléa ne serait venu compromettre le succès de l'opération. Dès lors, le préjudice subi par le client n'est pas de façon certaine étendue à toutes les pertes ou manques à gagner. En ne recevant pas le conseil auquel il avait droit, le cocontractant a seulement perdu l'opportunité d'éviter les pertes et de ne pas voir le risque se réaliser. De ce fait, le préjudice du client ne peut se mesurer qu'à la perte de chance éprouvée. C'est l'avis majoritaire de la jurisprudence.

Le préjudice réparable se résume alors à une perte de chance subie par le client du fait de la défaillance de la banque. D'ailleurs on trouve de nombreuses décisions de différentes Cour d'appel qui considèrent que le préjudice subis par le client est égal aux pertes qu'il a éprouvé41. Elles décident que le client, s'il avait reçu le conseil n'aurait pas subi ces pertes. Mais il semblerait de ce point de vue que ce raisonnement pose des problèmes. Parce que nul ne saurait prédire ce qui serait arrivé s'il avait été conseillé. D'ailleurs la Cour de cassation a corrigé cette jurisprudence dans l'arrêt du 10 décembre 199642. Il estime que le manque de conseil ne peut causer qu'une perte de chance. Encore faut-il que cette perte de chance soit effectivement due à la défaillance du banquier pour que le cocontractant obtienne réparation. C'est la question du lien de causalité.

§2 : Le lien de causalité

L'appréciation du lien de causalité est délicate.

La victime doit démontrer qu'il existe un lien de causalité exclusif entre la faute et le préjudice subi.

Les difficultés relatives au lien de causalité amènent le juge à se contenter d'une probabilité, faute de preuve absolue. C'est le même cas en matière bancaire. A cet égard, dans un arrêt en date du 29 avril 199943, la Cour d'appel déclare que dans cette affaire, deux prêts avaient été consentis a une société. Alors cette dernière ne pouvant les rembourser, invoque le manquement de la banque à son obligation de conseil dans l'octroi de crédit. La Cour alors par un constat fait de la faute de la banque décide : « que cette dernière a donc fait preuve de légèreté dans l'octroi de crédit, ce qui provoque sa condamnation à l'allocution de dommage et intérêts ».

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41 Voir par exemple : Versailles, 17 sept 1998, juris data no 049717 ou Amiens, 21 mai 1996, juris data no 049433.

42 Cass.com. 10 dec. 1996, op.cit.

43 Dijon, 29 avr. 1999, _in Martin (D.-R), De la causalité dans la responsabilité du préteur, Banque et droit 1999, no 68, p.3.

Par un aperçu fait du livre « De la causalité dans la responsabilité civile du prêteur » de Martin44, nous serons amenés à concevoir que l'analyse du lien de causalité est ici artificielle. La Cour n'a fait que constater la faute de la banque et en déduit une condamnation de la banque sans autre recherche.

Le lien de causalité, une fois prouvé par le demandeur, permet de déterminer quel sera le préjudice réparable. Ainsi donc cela suppose que seul le préjudice direct pourra être réparé. Mais cela n'écarte pas l'idée de savoir que le préjudice par ricochet peut être réparé du moment où il présente un lien nécessaire avec la faute commise. On peut citer à cet égard deux arrêts de la Cour de cassation. D'une part, dans l'arrêt du 2 juillet 199745, la Cour de cassation décide que la faute de la banque dans l'octroi de crédit a causé le défaut de paiement par l'emprunteur des charges afférentes au bien immobilier acquis grâce à l'emprunt. D'autre part, on peut reprendre l'arrêt de la Cour d'appel du 29 avril 199946. Une caution se plaignant du préjudice subi par ricochet du fait de la faute de la banque dans l'octroi de crédit. La Cour constate alors la faute de la banque. Puisque les cautions étaient informées, elle décide que le préjudice causé était égal à la moitié du prêt et condamne la banque à payer des dommages et intérêts égaux à cette part.

Cependant, la faute peut contribuer au préjudice sans être toujours la cause exclusive. C'est la raison pour laquelle les tribunaux prononcent parfois un partage de responsabilité.

Fréquemment, le professionnel invoque pour se défendre, soit des circonstances conjoncturelles, soit la passivité du client à réception des avis opérés.

Un arrêt de la Cour de cassation est venu rappeler que : « le client d'une société de bourse ne commettais pas la faute en ne réagissant pas aux avis d'opéré portant sur des montants anormaux dès lors qu'ayant donné un mandat de gestion à la société, il n'est pas tenu d'assurer la surveillance de l'évolution de son compte, sauf s'il reçoit des mises en garde »47. Plus récemment encore, la Cour de cassation a cassé un arrêt d'appel qui avait retenu un partage de responsabilité entre le banquier et le titulaire du compte au motif qu'il recevait régulièrement des relevés faisant ressortir la nature des opérations réalisées et aurait pu mettre un terme à celles-ci en clôturant le compte48.

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44 Martin (D.-R), De la causalité dans la responsabilité civile du préteur, Banque et droit 1999, no 68, p.3.

45 Cass.com. 2eme, 2 juillet 1997, Bull. civ., II, no 212; Petites affiches 1997, no 120, p.9 note Martin (D.-R)

46 Dijon, 29 avr. 1999, _in Martin (D.-R), De la causalité dans la responsabilité du préteur, Banque et droit 1999, no 68, p.3.

47 Cass.com 1ere fevrier1994

48 Cass.com 13 mai 1997

Les cas de figures concernant la responsabilité du banquier sont extrêmement variés. Il est néanmoins certain que l'évolution de la jurisprudence tend vers une plus grande sévérité à son égard.

Conclusion

Tout d'abord dans notre introduction, c'était un panorama de l'obligation de conseil que nous avions promis de dresser. Alors puisque toute promesse constitue une dette selon l'adage, donc il est temps que notre promesse soit exécutée.

L'obligation de conseil n'est pas un instrument privilégié de la mise en jeu de la responsabilité bancaire. Nous devons admettre ici que c'est un constat d'échec. En effet, l'obligation de conseil parait alors vaste en ce qu'elle est attachée à tous les contrats bancaires. Cependant l'appréciation stricte de la qualité de profane, l'objet du conseil restreint aux risques encourus par le client et le rattachement de l'obligation de conseil au simple devoir de vigilance du banquier en font un instrument sous contrôle, dépendant des autres obligations du banquier.

Ainsi nous pouvons affirmer que la consécration puis le développement de l'obligation de conseil du banquier constitue l'une des évolutions majeures du droit de la responsabilité bancaire comme le pense des auteurs49. En effet, et bien que la prudence s'impose en la matière tant la jurisprudence manque encore de clarté, on peut dire que le banquier dispensateur de crédit est tenu, à l'égard de ses clients profanes, à une obligation de conseil sur les dangers potentielles des opérations envisagées. Cette obligation parait, en outre, quelque peu renforcée si le banquier est détenteur de comptes ouverts au nom de l'emprunteur, puisqu'il devra, dans ce cas, informer globalement ce dernier sur les avantages et les inconvénients des diverses solutions qui s'offrent à lui à la place du crédit, sans pour autant s'intégrer dans ces affaires. Cette obligation risque, par ailleurs, d'être fréquemment couplé, en pratique à une obligation de vigilance, imposant plus particulièrement le banquier professionnel de ne pas proposer de crédit disproportionné au regard des facultés contributives de son client.

Cependant il est inutile de penser que l'obligation de conseil tend à disparaître, elle apparaît encore fréquemment à la charge du banquier.

Toutefois, l'analyse des arrêts rendus permet de constater cette réalité.

Dès lors, un réaménagement de l'obligation de conseil, consacré par le

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49. D. LEGEAIS, l'obligation de conseil de l'établissement de crédit à l'égard de l'emprunteur et de sa caution, in Mélanges AEDBF-France, Banque éditeur 1999. p.257.

législateur, n'est pas à exclure à l'encontre du banquier dispensateur de crédit. Ce réaménagement pourrait être réalisé par la transposition en droit interne de

nouvelles directives permettant une meilleure prise en charge des clients. Des directives exigeant à la charge du banquier une obligation générale de conseil visant à n'offrir à son client que le ou les types et montants de crédit qu'il serait en mesure de rembourser, en tenant compte, entre autre, de sa situation financière.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry