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La reconnaissance des mouvements rebelles dans la pratique internationale contemporaine

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par Gabriel MUGISHO Dunia
Université Catholique de Bukavu - Licence en droit public interne et international 2012
  

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Section 3. Problématique de la reconnaissance de la belligérance

La reconnaissance de belligérance attribue aux insurgés la personnalité internationale d'un gouvernement "de fait" sur la portion de territoire qu'ils contrôlent. A ce titre, MAZZESCHI a écrit que « leur responsabilité internationale pourra être engagée lorsqu'ils triomphent du gouvernement légal. »22(*) L'objet de la reconnaissance tel qu'il apparaît en droit international strict, n'est essentiellement si pas fondamentalement un fait, une situation ou un sujet de droit (État nouveau, gouvernement nouveau parvenu au pouvoir par des voies inconstitutionnelles). Cependant, la reconnaissance de la belligérance dont le régime juridique (§III) sera accordé en prenant en compte une situation spécifique, a des origines et repose sur les idées générales (§I) qui méritent d'être confrontées à la pratique internationale (§II).

§I. Origines et idées générales de la reconnaissance de la belligérance

Cette doctrine de reconnaissance est d'origine nord-américaine. Il s'agit là d'une pratique généralement appliquée à la fin du XIX ème siècle, notamment à l'égard du Chili, du Venezuela, du Brésil et du Cuba. Elle semble avoir été inaugurée par les États-Unis au lendemain de l'insurrection cubaine de 1868 contre l'Espagne, le Département d'État ayant dénié à cette occasion tous droits de belligérance aux insurgés tout en reconnaissant l'existence d'un état d'insurrection. Mais il y a eu à la même époque, plusieurs cas analogues qui n'ont entraîné aucune reconnaissance d'insurrection de la part des États-Unis.22(*) On se rend compte ici qu'elle s'est répandue à l'Amérique, les États-Unis ayant joué un rôle clé dans l'attribution ou la non attribution des droits de belligérance. Ceux-ci sont refusés indépendamment de la reconnaissance de l'état d'insurrection. Celle-ci ne confère pas ipso facto des tels droits. Ces derniers ne sont reconnus que lorsque les insurgés sont admis au bénéfice du droit de la guerre, c'est à dire lorsqu'ils sont reconnus désormais comme belligérants. On se rend compte également ici de la différence entretenue entre la nature des droits accordés aux belligérants de ceux accordés aux insurgés. Ces derniers sont du reste amoindris que les premières. Mais dans toutes ces matières, les époques ne se ressemblent pas.

AGO écrivit à cet effet: « Il y a là une raison de difficultés beaucoup plus subtile, plus cachée et, en dernière analyse, beaucoup plus grave que celle qui est représentée par l'influence de doctrines d'ordre politique dont le fondement et les finalités sont d'ailleurs trop évidents pour qu'on s'y méprenne. »23(*)Mais il reste que l'on se trouve ici en face d'une contradiction fondamentale entre les normes fondamentales du droit des gens, selon qu'il s'agit de guerre étrangère ou de guerre civile.

Tandis que dans les relations inter étatiques, la guerre est devenue un acte illicite, un délit, voir un crime et le Pacte BRIAND-KELLOGG, à la suite d'une évolution rapide, a constitué la renonciation solennelle de presque tous les gouvernements à la compétence de guerre, nous allons constater ou voir dans le second chapitre de ce travail, que le droit des gens moderne continue à reconnaître la compétence de guerre entre partis politiques à l'intérieur d'un même État. Comme nous le remarquerons, il ne peut pas y avoir de cloison étanche entre l'ordre constitutionnel interne et l'ordre constitutionnel international, et les procédés d'investiture réprouvés par l'un ne devraient pas pouvoir être tolérés dans l'autre.

L'article X du Pacte de la Société des Nations, en prohibant la conquête par la force des compétences internationales, mais en admettant implicitement la conquête par la force des compétences internes, est un illogisme vivant, qui fait toucher du doigt l'inconséquence de la doctrine dualiste. Il n'y a malheureusement qu'un remède lointain, et qui semble actuellement impraticable, à cet état de choses anarchique : le contrôle de la société internationale sur le jeu des institutions constitutionnelles internes. Il existe pourtant un précédent dont la doctrine a fait état à juste titre, en raison de la façon dont il tranche sur la pratique coutumière. C'est la reconnaissance « comme nation », au cours de la Grande Guerre, de la Pologne et de la Tchécoslovaquie avant même que les dirigeants de la collectivité insurrectionnelle aient pu acquérir sur le territoire où ils voulaient établir leur pouvoir cette effectivité qui est à la base de la reconnaissance de fait.24(*)

C'est le cas de figure le plus ancien et le plus classique. Il correspond à la situation de révolutionnaires ou de séparatistes qui, à l'occasion d'une guerre civile, ont établi effectivement leur autorité sur une partie du territoire de l'État, alors que la lutte continue avec le gouvernement légal. Il peut alors arriver que les États tiers reconnaissent aux insurgés le statut juridique de belligérants, c'est à dire qu'ils acceptent d'appliquer par rapport à eux les règles du droit de la guerre. C'est le passage d'un statut à l'autre. C'est notamment l'exemple de la France et la Grande Bretagne, en 1861, qui reconnaissent comme belligérants les "confédérés " sudistes. Deux conditions essentielles s'imposent pour qu'il y ait reconnaissance de belligérance :

Ø Il faut que le belligérant contrôle effectivement une partie du territoire ;

Ø Il faut qu'il se comporte en quelque sorte comme un gouvernement régulier.25(*)

Les pouvoirs de l'autorité « belligérante » sur la portion de territoire qu'elle contrôle sont assimilables à ceux d'un occupant de guerre. L'ordre juridique mis en place par l'organisation insurrectionnelle est opposable au sujet du droit des gens et justifie que soit engagée la responsabilité internationale des autorités insurgées lorsqu'elles triomphent du gouvernement légal. Le cas de l'Alliance pour la Force Démocratique de la Libération en RDC nous édifie davantage. Nous y reviendrons dans le second chapitre. Dans la conduite du conflit armé, le pouvoir légal et les insurgés doivent respecter le Droit International Humanitaire. Les États tiers devront respecter la neutralité. L'affaire des activités armées, RDC c. Ouganda nous édifie d'avantage. La CIJ avait condamné l'OUGANDA pour avoir violé l'article 2, §4 de la Charte de Nations unies et les principes cardinaux du droit international humanitaire. Nous en parlerons lorsqu'il sera question de traiter du cas de reconnaissance en République démocratique du Congo dans le second chapitre. A la différence des autres types de reconnaissance, la reconnaissance de la belligérance n'a que des effets limités et temporaires. Elle se distingue ainsi de la reconnaissance de l'État ou du gouvernement. Le parti ainsi reconnu, dit ROUSSEAU, sera traité comme un État, mais seulement pour ce qui est des opérations militaires.26(*)

La reconnaissance de belligérance n'a qu'un effet limité aux effets militaires avions-nous dit et elle n'est que temporaire. Ainsi, la reconnaissance de la belligérance permet d'attribuer aux belligérants la personnalité juridique internationale d'un gouvernement « de facto » local.Cela se comprend mieux lorsque la reconnaissance intervient par un acte juridique. Le problème est posé autrement lorsque la reconnaissance n'est que factuelle. C'est à dire, elle a été implicite ou silencieuse. Alors la reconnaissance apparaît comme une bouteille à encre. La capacité de sujet du droit international sera ainsi reconnue. La reconnaissance comme insurgés intervient alors au détriment des thèses de la reconnaissance déclarative. Selon celles-ci, une reconnaissance ne confère pas la capacité juridique. Les États qui ont reconnu les insurgés comme belligérants, admettent que ceux-ci ont le droit d'exercer à leur égard les prérogatives des États belligérants à l'égard des neutres. Mais cela ne signifie pas d'emblée que leur personnalité est absolue. L'acte de reconnaissance, en général, définit et limite les compétences des belligérants, par rapport à l'État qui reconnait, dans leur lutte contre l'autorité établie.27(*)

Cette reconnaissance de belligérance se distingue de la reconnaissance comme insurgés. On soutient qu'une reconnaissance d'insurrection met en place un statut particulier. Sommes toutes, cette théorie nous a permis de baliser notre chemin. Maintenant, nous allons aborder la question essentielle de notre travail de recherche : la problématique de la reconnaissance des mouvements rebelles dans la pratique internationale contemporaine.

* 34 R. P. MAZZESCHI, Responsabilité de l'État pour violation des obligations positives relatives aux droits de l'homme, Milan, Giffre, 2008, p. 202.

* 22 C. ROUSSEAU, Droit international public : les compétences, Toulouse, Sire y, 1977, p. 606.

* 23 R. AGO, Science juridique et droit international, Milano, Giffre, 1956, p. 859.

* 24 G. SCELLE, op.cit., pp. 117-118.

* 25 L. C. GREEN, op.cit., p. 5.

* 26 C. ROUSSEAU, op.cit., p. 597.

* 27 L. C. GREEN, op.cit., p. 6.

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