2.3. Quel lien entre le Paysage, Identité et Culture
en Côte d'Ivoire ?
Le territoire est une production sociale. Or, la culture est
en l'homme. Donc, la culture produit du territoire en formant des
différents paysages. Le paysage, empreinte de la culture (Berque, 1984 ;
Houssay-Holzschuch, 2005). En effet, la culture chrétienne a
favorisé la construction de la Basilique. Chaque visiteur à
Yamoussoukro sait automatiquement qu'il est dans une ville qui est
foncièrement ancrée dans la religion chrétienne. Tout
comme la culture musulmane a permis la construction de la mosquée de
Kong. Tous les visiteurs dans la ville de Kong ont la même l'impression.
Mais, aussi dans la culture, on retrouve du paysage. Dans ce cas, on dira que
la mosquée de Kong fait partir de la religion musulmane ou encore que la
Basilique fait partir de la religion chrétienne. Chaque
communauté religieuse aura un sentiment d'appartenance pour les deux
villes ou les deux paysages. Par conséquent, la culture tout comme le
paysage induisent la construction de l'identité collective (voir
figure).
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On a aussi le paysage « naturel », il n'a pas
été créé grâce à une intervention
humaine. Les « bois sacrés » ou les « forêts
sacrées », on les retrouve plus ou moins un peu partout en
Côte d'Ivoire. Ils ont tous des caractères mystérieux,
sacrés et secrets toutefois avec des rôles différents d'une
ethnie à une autre ethnie. N'est-elle pas cela même
l'identité ? Ce que j'ai de semble aux autres et ce qui me
différencie des autres.
En Côte d'Ivoire, « les bois sacrées »
sont des vecteurs de l'identité « des sénoufo ». En
pleine ville à Korhogo, l'espace urbain est aménagé en
prenant en compte le paysage du « bois sacrée » qui est
clôturé avec un portail. Les « sénoufo »
étant des sociétés d'initiations, c'est à
l'intérieur de ces forêts que le jeune « sénoufo
» est initié à porter les masques. L'initiation est
secrète, les masques sont sacrés d'où tout le
caractère sacré de ces paysages. Chez les « sénoufo
», il faut « faire » ce paysage de « bois sacré
» pour être considérée comme un « garçon
», c'est-à-dire un « homme ».
Comme « forêt sacrée », je peux citer
celle du village « Kambli » dans le département de
Toulépleu. La « forêt sacrée » abrite une colline
appelée « Tounan ». Cette forêt sacrée est
adorée par la population. Elle a un lien mystique, historique,
protectif, substantif avec la population. Les villageois de « kambli
» se sentent forts avec à ce paysage, situé à
l'entrée du village qui les protège des éventuelles
physiques et mystiques. Les guéré de « kambli »
où qu'ils se retrouvent sur la planète terre ne jurent que par
« Tounan ». Ainsi, ils s'identifient à ce passage. Les
paysages véhiculent une puissante charge identitaire. L'homme devient ce
que la culture en fait et inversement. Comme cela a été
démontré par Augustin Berque qui a mené des travaux sur la
relation forte entre l'homme et le paysage (Berque, 1984 ; 1990 ; 1994 ; 1995)
mentionné par (Bonnemaison et al., 2000). Le rôle que joue le
paysage dans la construction des identités culturelles est
fondamental.

Paysage
(culturel ou
identitaire) Sentiment
d'appartenance
Fff
Culture
Territoire
Identité territoriale
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Figure 5 :La construction de l'identité territoriale
en géographie
Les ethnies se définissent en fonction des lieux
où ils vivent. Ils s'identifient dans une représentation
collective au paysage en lui attribuant une valeur identitaire. La
communauté décide de « vivre ensemble » sur ce
territoire autour de ce paysage. Car, la communauté a
développé un sentiment d'appartenance à ce territoire par
l'intermédiaire du paysage.
La culture des peuples mobilise un grand nombre d'acteurs et
sont des marqueurs d'une identité territoriale. Voilà pourquoi
Claire Guiu (2007, p. 39) affirme que : « la pratique folklorique
fonctionne donc comme un pôle d'unification émotionnel et
d'intégration de l'ensemble de la population. Elle participe à la
narration d'une identité régionale et à la construction
d'un soi, d'un même, d'un soi-même comme un autre. » En effet,
la culture est essentielle pour la construction et la reconstruction de
l'identité.
Il peut aussi arriver que le paysage et la culture ne font
qu'un, c'est-à-dire que la culture est incluse dans le paysage et
inversement. Ce passage fait partir de l'identité culturelle des
peuples. Il va dégager une puissante charge identitaire. Cette
identité paysagère va construire une identité
territoriale. En Côte d'Ivoire, le paysage et la culture sont des
vecteurs de l'identité territoriale « villageoise » ou «
rurale ».
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