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Figure de l'autre et construction de l'identité de la victime à  travers l'association des étudiants et élèves rescapés du génocide, (AERG).

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par Eric Ndushabandi
Université Nationale du Rwanda et Facultés Universitaires Saint Louis- Bruxelles - PhD Student 2010
  

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II.1. Les étudiants sous multiples figures.

En considérant, de prime abord, l'état de lieux des relations sociales entre membres de l'AERG et les autres étudiants, tout semble se passer normalement du moins à entendre les rescapés s'exprimer : « Nos relations avec les autres étudiants sont normales, de façon que tu ne peux pas distinguer un étudiant membre de l'AERG des autres étudiants. A moins que l'on soit président ou un autre membre du comité connu pour son rôle joué au sein de l'AERG. Les restes sont comme les autres, on ne peut pas les distinguer  des autres ». Effectivement rien ne permet d'amblée de distinguer les uns des autres.

Comment l'AERG est-il perçu en général par les autres étudiants ? Un représentant de l'AERG-UNR se confie à nous : «Je trouve qu'il n'ya pas de mauvaise perception de l'AERG sauf celui qui peut décider de mal interpréter les missions de l'AERG pour d'autres intérêts personnels. Si c'est le cas, on peut sensibiliser la communauté universitaire sur la nature et les missions de l'AERG. Mais comment connaître ceux qui ont ces perceptions négatives sur l'AERG, c'est ça le problème ».

Dans leurs rapports aux autres étudiants, les rescapés, membres de l'AERG ne constituent pas un groupe isolé. Pendant la semaine de deuil ils portent tous un foulard de couleur mauve35(*). A part ces quelques représentants de l'AERG qui se distinguent par leur fonction assumée. Les restes des membres sont comme les autres et personne ne peut les distinguer des autres étudiants. Par contre le témoignage d'André qui est rapporté par Nicodème Bugwabari montre par ailleurs l'image du rescapé chez les autres étudiants, laquelle image peut avoir évolué dans le temps bien entendu. Sans que seuls les étudiants non rescapés fussent responsables de ce rapport, la création de l'AERG suscita des réactions d'hostilité dans la société. Pour les uns, il s'agissait d'un groupe d'extrémistes revanchards, pour d'autres des nuisibles qui font obstacles à l'unité et à la réconciliation nationale36(*).

En effet, la nature du génocide commis au nom des Hutu et contre les Tutsi, ne permet pas encore de dépasser les stéréotypes ethniques. L'AERG est perçu par certains comme un groupe des Tutsi. Comment la victime cesserait-elle d'être perçue comme Tutsi alors que son statut découle d'un génocide commis sous ce mobile ethnique ? Si la commémoration peut être perçue comme « une affaire des seuls rescapés »37(*), alors la mémoire collective restera longtemps compromise.

Partant de ce qui précède, nous pouvons donc souligner trois multiples figures de l'étudiant pendant la commémoration.

- La première est celle des « bons » qui sont venus se joindre aux rescapés dans ces moments difficiles de commémoration.

- La deuxième est celle de ces « autres » indifférents, qui préfèrent s'enfermer dans leurs chambres et d'autres qui préfèrent rentrer chez eux en vacances au moment où les autres commémorent le génocide commis sur le site universitaire.

- Une troisième figure est celle de ceux qui sont encore porteurs de l'idéologie du génocide, ils nient les faits, ils entretiennent la discrimination, ils se pensent exclus du pouvoir. Les écrits relevés sur les mûrs des toilettes des étudiants de l'UNR affirment encore l'ethnicité, la vengeance et la discrimination en promettant l'ultime extermination des Tutsi et de les chasser définitivement du pouvoir38(*).

Une perspective de recherche intéressante pour aborder les questions en rapport avec la mémoire, l'idéologie du génocide ou encore l'espace de parole dans les milieux rwandais. Pourquoi ces étudiants préfèrent-ils ce moyen de communication ? Quel impact sur la conduite des activités de commémoration à l'Université Nationale du Rwanda ? Ces multiples figures de l'étudiant sont chaque année évoquées. Le rescapé sollicite l'effort des autorités universitaires pour pouvoir sensibiliser et bannir les comportements indignes affichés par certains étudiants et fonctionnaires de l'université pendant la commémoration du génocide.

* 35 Couleur mauve symbolise le deuil. Il est de coutume au Rwanda que le deuil soit symbolisé par le port au coup ou sur le bras d'un foulard de couleur mauve.

* 36 BUGWABARI N., Op Cit., p14.

* 37 NSANZUBUHORO, N. Eric, La mémoire du génocide et la problématique de sa gestion politique au Rwanda. Cas de la mairie de la ville de Ruhengeri,(mémoire), UNR, 2003, p.5, lire aussi VIDAL C., « Les commémorations du génocide au Rwanda », in Les Temps Modernes, n° 613, pp1-46.

* 38 Lire les recherches récentes d'Evariste NTAKIRUTIMANA sur « Les paroles traumatisantes : un défi langagier à relever », communication faite au colloque international sur le génocide perpétré contre les Tutsi : 16 ans après le génocide, organisé par la Commission Nationale de Lutte contre le Génocide, Kigali, 4-6 Avril, 2010. L'auteur relève et analyse les écrits qui sont sur les mûrs dans les toilettes des étudiants à l'UNR. Il démontre que ces étudiants entretiennent encore les idées discriminatoires et préconisant l'extermination totale des Tutsi, rescapés du génocide.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand