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Les révisions constitutionnelles au Sénégal

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par Ibrahima DIALLO
Université Cheikh Anta Diop de Dakar -  Maitrise en droit public 2008
  

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I°) LES REVISIONS DE LA CONSTITUTION DU 7 MARS 1963 :

La constitution de 1963 a connu une pluralité de modifications. Plus exactement elle a été réformée vingt fois. Ces modifications ont trait à divers aspects. Il s'agit de la pérennisation du pouvoir, du renforcement et de la stabilisation des pouvoirs du Président de la République, du multipartisme, de la spécialisation juridictionnelle et enfin de la consécration constitutionnelle des collectivités locales.

1°) la pérennisation du pouvoir en place :

Il s'agit de l'ensemble des révisions entreprises par le régime socialiste en vue de se maintenir au pouvoir. Celles-ci concernent d'abord la suppression de la clause de limitation du nombre de mandats du Président. En effet en 1970, une révision constitutionnelle avait instauré la limitation du nombre de mandats du Président à deux.4(*) Il s'agissait par là de taire les velléités d'occupation du pouvoir à vie contraires à l'alternance des élites politiques au sommet de l'Etat qui ont entraîné des conflits armées dans plusieurs Etats africains. Cependant cette clause sera frappée d'une réelle instabilité car elle alternera suppression et restauration au gré des circonstances politiques. C'est ainsi qu'elle sera supprimée par la révision constitutionnelle de 19765(*).

Il était question par cette réforme d'après la motivation d'une part « de permettre au Président Senghor de poursuivre la tache qu'il s'est assigné pour le plus grand bien du peuple sénégalais »et d'autre part de lui permettre de trouver un successeur à la tête de l'Etat. En réalité il s'agissait de renouer avec l'éligibilité indéfinie afin de maintenir le régime en place. Cela est visible par la mention du nom du Président dans la motivation qui plus pose le problème de la validité de la loi constitutionnelle de 1976 car, par nature, la loi est générale et impersonnelle à fortiori celle qui est destinée à intégrer la norme fondamentale, suprême. En outre cette révision va affecter le statut du Président de l'Assemblée nationale dans la mesure ou le titre de deuxième personnalité de l'Etat et la suppléance du chef de l'Etat lui seront retirés au profit du premier ministre. Ce dernier, en sa qualité de nouveau suppléant du Président de la République sera chef de l'exécutif au lendemain de la démission du Président Senghor jusqu'aux élections présidentielles de1983 qu'il remporta brillamment.

On constate ainsi que le Président sortant a utilisé les mécanismes constitutionnels pour organiser sa propre succession .Sans doute avait -il plus confiance en son premier ministre ou pensait -il qu'il était le plus apte à poursuivre sa mission. Dans tous les cas, on peut noter une certaine patrimonialisation du pouvoir considéré comme un bien devant rester entre les mains de la famille socialiste. Malgré son irrégularité matérielle, cette loi de 76 fera parti du corpus constitutionnel jusqu'en 1991.

En effet suite à la concertation entre l'opposition et le pouvoir sur le système électoral, la limitation du nombre de mandats est restaurée. Ainsi l'article 21 al 2 de la loi n°91-46 du 06 octobre 1991dispose « il n'est rééligible une seule fois ».En outre le mandat du Président passe de cinq à sept ans.

Selon l'exposé des motifs cette réforme devait faciliter l'alternance à la tête de l'Etat. Cependant on peut s'interroger sur la sincérité de cette motivation car la limitation sera levée à la veille de l'élection de 2000. En effet à la veille de cette dernière, une volonté de restaurer l'éligibilité indéfinie du Président se manifesta au sein du parti socialiste. C'est ainsi que son responsable des élections disait « il faut supprimer la limitation du mandat présidentiel », après avoir affirmé que même aux Etats-Unis d'Amérique, la limitation des mandats était de fait et non de droit6(*) ; ce qui n'est pas exacte car aux Etats- unis la limitation est bien de droit depuis le vingt deuxième amendement. En plus supprimer la limitation du mandat présidentiel reviendrait à instaurer une monarchie. Ce qu'on peut supprimer, c'est la limitation du nombre de mandats. A cet effet, le groupe parlementaire socialiste déposa sur le bureau de l'Assemblée Nationale une proposition de loi Elle fut adoptée le 27 Août 1998.

Cette révision constitutionnelle fut mal perçue par l'opposition car elle remettait en cause de façon unilatérale le fruit d'un compromis entre elle et le pouvoir. Pour la justifier, les tenants du pouvoir avaient émis certains arguments. A ce titre , Monsieur  Abdourahim Agne soutenait que le dernier mandat, notamment dans ses dernières années, pouvait constituer une période de relâchement dans la gestion de l'Etat et entraîner une ouverture prématurée de la succession politique, avec les conséquence qui pouvaient en découler7(*). Un tel argument ne peut être valablement soutenu dans un régime démocratique car il remettait en cause le choix éventuel des électeurs à chaque fois qu'il y aurait relâchement dans les dernières années de gestion du pouvoir. Un autre socialiste M Christian Valentin alors rapporteur des travaux de la commission soutenait qu'un texte ne doit pas limiter les mandats, mais qu'il appartient « au peuple dans sa sagesse de décider tous les sept ans ». Ses propos posent le débat sur la légitimité de la clause limitation du mandat. Si pour certains cette clause est antidémocratique force est de reconnaître que, dans un contexte de pérennisation du pouvoir cette clause est salutaire en ce qu'elle permet l'alternance politique8(*).

En outre la révision constitutionnelle de 1998 supprime également le quart bloquant. Pour comprendre cette suppression, c'est sur le terrain de l'opportunisme politique qu'il faut se placer en partant des élections législatives du 24 Mai 1998. En effet celles -ci, avaient enregistré un faible taux de participation et le parti au pouvoir obtenait 50,12% des suffrages exprimés. Ce résultat tout comme le taux de participation était significatif d'une diminution considérable de l'électorat du parti au pouvoir dont une partie avait fini par désavouer ses représentants en raison de la léthargie du système. Le groupe dirigeant compris qu'il y avait un risque d'exposition de son candidat à l'élection présidentielle en vue à des votes sanction ou à une abstention massive qui pourrait le conduire au second tour. C'est la raison pour laquelle il avait pris en compte les arguments techniques des fonctionnaires du ministère de l'intérieur : « supprimer le quart bloquant » pour ne pas ajouter aux déboires à la présidentielle qui pointait .Cela devait lui permettre de remporter plus aisément les élections de 2000.

Néanmoins le résultat escompté ne sera pas atteint puisque c'est le chef de l'opposition d'alors, l'actuel Président de la République qui remportera ce scrutin au second tour. En somme la clause de limitation du mandat et le quart bloquant seront frappés d'une instabilité notoire car ils seront supprimés et restaurés en fonction des préoccupations personnelles des tenants du pouvoir.

Par ailleurs la stabilisation et le renforcement des pouvoirs du Président ont également servi de fondement à des réformes

* 4 Loi n°70-15 du 26 février 1970(JORS n°4089 du 28 février 1970) en son article 21 dispose « Il n'est rééligible qu'une seule fois »

* 5 Loi n° 76-27 du 6 avril 1976 ( JORS n°4485 du 10 avril 1976) supprime la limitation du nombre de mandats du président de la république

* 6 Sud quotidien du 13 février 1998

* 7 Ismaila Madior Fall, Evolution constitutionnelle du Sénégal : de la veille des indépendances aux élections de 2007, CREDILA CREPOS 2007, p.157 et s

* 8 A loada, la limitation du nombre de mandats présidentiels en Afrique francophone, Afrilex n°3, www .u bordeaux 4.fr

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon