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Les révisions constitutionnelles au Sénégal

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par Ibrahima DIALLO
Université Cheikh Anta Diop de Dakar -  Maitrise en droit public 2008
  

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4°) Le retour du Sénat :

Parler de retour du Sénat suppose que celui-ci ait existé par le passé au Sénégal. En effet le Sénat n'est pas nouveau dans le paysage institutionnel sénégalais. Il a été introduit pour la première fois sous l'ère de la constitution de 1963 par la loi constitutionnelle n°98-11 du 2 mars 1998 .Sa création était officiellement liée au prolongement de la régionalisation en assurant la représentation des collectivités locales lesquelles étaient chargées d'élire les trois quarts de ses membres à cet effet ; une autre partie étant nommée par le Président de la République. Pour l'opposition d'alors le Sénat n'avait pas sa raison d'être, elle n'y voyait qu'un moyen pour le parti au pouvoir d'asseoir sa clientèle politique. C'est la raison pour laquelle le constituant de 2001 ne l'avait pas repris parmi les institutions républicaines.

Cependant cette vision du constituant va changer quelques années plutard car une révision constitutionnelle relative au retour du Sénat sera effectuée.

En effet, c'est par la loi constitutionnelle n° 2007-06 du 12 février 2007 que le Sénat réintègre les institutions républicaines du Sénégal. Son retour est justifié par les mêmes motifs qui avaient présidés à son instauration en 1998 : renforcer la décentralisation par la représentation des collectivités locales au Sénat mais également de représenter les sénégalais de l'extérieur35(*).

Concernant la désignation des sénateurs, à l'instar de la réforme de 1998, deux modes sont consacrés : l'élection et la nomination. Une partie des sénateurs est élue dans les départements au scrutin uninominal majoritaire à un tour sur une liste comprenant un titulaire et un suppléant, tandis que l'autre partie est nommée par le président de la République36(*).Toutefois avec le Sénat actuel les sénateurs nommés sont supérieurs à ceux élus contrairement au Sénat de 1998. Ce qui pose un problème de légitimité.

En tant que chambre du Parlement le Sénat se voit étendre certains pouvoirs reconnus à l'Assemblée nationale. Ainsi, il dispose d'un pouvoir consultatif notamment en matière référendaire.

Le Sénat est également compétent en toute matière législative qu'il s'agisse des lois ordinaires, des lois organiques ou des lois constitutionnelles. A cet effet, ses membres à l'instar des députés ont le droit d'initiative, le droit d'amendement mais également le droit de vote. Ces pouvoirs constitutionnels du Sénat ont des effets sur la procédure législative ordinaire et sur la procédure budgétaire.

Concernant la procédure législative ordinaire, c'est le système de la navette qui est adopté pour tenir compte du Sénat .De ce fait, le projet de loi adopté par l'assemblée nationale est transmis au Sénat qui statue dans un délai de vingt jours à compter de la date de réception, ce délai pouvant être réduit en cas d'urgence. Au cas où le Sénat adopte un texte identique, ce dernier est transmis au Président pour sa promulgation, dans le cas contraire l'Assemblée statue définitivement. Cela montre que le bicaméralisme sénégalais n'est pas égalitaire car c'est à l'Assemblée nationale que revient le dernier mot qui plus, par l'intermédiaire de son Président fixe la date d'ouverture des sessions parlementaires.

Quant à la procédure budgétaire, il faut remarquer qu'il n'y avait pas un grand changement. En effet la seule innovation est le vote du budget par le Parlement à savoir les deux chambres réunies et non plus par la seule Assemblée nationale.

Au demeurant cette procédure est réaménagée par une loi constitutionnelle votée le 13 novembre 2007.Cette dernière commence par réformer les sessions parlementaires. En effet il n'est plus question de deux sessions parlementaires, mais d'une session unique qui commence dans la première quinzaine du mois d'octobre et qui prend fin dans la seconde quinzaine du mois de juin de l'année suivante. Le projet de loi de finances est déposé au plutard le jour de l'ouverture de cette session de même qu'il est examiné au cours de cette session.

Mais le plus important avec cette réforme est la consécration du système de la navette pour l'adoption du budget. En effet contrairement à la loi créant le Sénat, celle-ci sépare les deux chambres pour l'adoption du projet de loi de finances. Ce faisant, l'Assemblée statue en premier dans un délai, de 35 jours et le Sénat dispose de15 jours. Si le Sénat adopte un texte identique à celui de l'Assemblée la loi est transmise au Président de la République pour promulgation au cas contraire l'Assemblée statue définitivement, là également l'Assemblée détient le dernier mot.

Par ailleurs cette loi renforce l'irrecevabilité des initiatives et amendements des parlementaires en matière financière en disposant « toutefois aucun article additionnel ni amendement à un projet de loi de finances ne peuvent être proposés par le Parlement, sauf s'ils tendent à supprimer ou à réduire effectivement une dépense, à créer ou à accroître une recette »37(*).

En outre les sénateurs ont un pouvoir de contrôle à l'instar des députés. A cet effet ils exercent un contrôle politique en posant aux membres du gouvernement des questions écrites ou orales, ils exercent également un contrôle juridictionnel contre les hautes personnalités de l'Etat coupables de haute trahison en participant à la haute cour de justice. Au demeurant, contrairement aux députés, ils ne peuvent provoquer la démission du gouvernement .En retour le Sénat ne peut être dissout par le Président de la République.

Par ailleurs concernant le régime des immunités, la réforme n'a pas eu une portée notoire, sauf à signaler que ce régime s'applique désormais aux sénateurs au même titre que les députés. Enfin il faut noter que les sénateurs participent à la consolidation et à l'adaptation de la constitution. Cela passe par les recours en inconstitutionnalité qu'ils peuvent introduire contre les lois qu'ils estiment contraires à la constitution, par leur participation au processus de révision de la constitution notamment avec leur initiative en matière de révision constitutionnelle.

En somme après avoir l'avoir supprimé au lendemain des présidentielles de 2000, le Sénégal renoue avec le bicaméralisme dans un contexte socio-politique hostile. En effet le Sénat est largement contesté par l'opposition, mais également par certains universitaires. Ainsi le professeur Abdoulaye Dièye disait : « dans un Etat unitaire comme le Sénégal, il y a de fortes chances qu'une deuxième chambre législative soit une simple institution pour la galerie,un simple lieu de promotion sociale...une deuxième chambre ,comme celle mise en place en 1998, pratiquement sans pouvoir de remettre en cause la procédure législative ordinaire ou de bloquer une procédure de révision qu'elle juge inopportune ne pourra jamais exercer l'action de freinage qu'imprime par hypothèse la cassure du parlement en deux fraction.. . »38(*).Cette contestation a été renforcée par le mode de désignation des sénateurs car 65 parmi eux ont été nommés par le Président de la République contre 35 qui sont élus, ce qui pose le problème de la légitimité du Sénat perçu comme un moyen pour le pouvoir de caser sa clientèle politique. Cette hostilité vis à vis du Sénat sera d'ailleurs renforcée une la loi constitutionnelle n°2007-2007 du 15 mai 2007 qui fait du Président du Sénat le suppléant du chef de l'Etat en lieu et place du Président de L'Assemblée nationale. Ce qui veut dire que rien ne s'oppose au plan strictement juridique à ce que le Sénégal soit dirigé par un Président qui à été nommé par son prédécesseur comme ce fut le cas avec le Président Diouf en 1980, car le Président du Sénat pourrait bien être nommé compte tenu du mode de désignation des sénateurs. En conséquence sur le plan démocratique, on peut constater un certain recul du fait de la possibilité de remettre en cause le principe de l'élection concernant la transmission du pouvoir.

Par ailleurs, il faut noter qu'en plus du Sénat les révisions constitutionnelles vont entraîner le retour de la cour suprême.

* 35 Voir exposé des motifs de la loi constitutionnelle n°2007-06 du 12 février 2007, JORS n°6332 du 10 mars 2007

* 36 Voir l'article LO 188-1 du code électoral

* 37 Loi votée le 13 novembre 2007

* 38 Tel est le cas avec le sénat car il ne peut bloquer aucune procédure, qu'elle soit législative ordinaire, budgétaire ou constitutionnelle. En cas de désaccord entre les deux chambres, l'assemblée statue en dernier ressort

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