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Arbitrage et procédures collectives

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par Charlène RIET
Université Toulouse1 Capitole - Master 2 Droit fondamental des affaires 2010
  

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A - Interdiction légale d'ouvrir une instance arbitrale en cours de procédure collective

105. La solution interdisant l'ouverture d'une instance arbitrale est conforme à la loi et a été consacrée par la jurisprudence dans le cadre d'une clause compromissoire, invoquée postérieurement à l'ouverture d'une procédure collective, et portant sur des créances antérieures. Ainsi, dans un arrêt dit Gaussin contre Alstom Power Turbomachines, en date du 2 juin 20041, la Cour de cassation interdit la saisine d'un tribunal arbitral au cours d'une procédure collective par un créancier dont la créance est antérieure au jugement d'ouverture.

En l'espèce, suite à l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société Gaussin, la société Alstom se prévoit d'une clause compromissoire insérée dans un contrat conclu avant l'ouverture de la procédure collective.

En première instance, la demande de désignation d'un arbitre est rejetée. Mais la Cour d'appel infirme le jugement et considère que << le principe de suspension des poursuites individuelles et l'obligation du créancier de se soumettre à la vérification des créances ne font pas obstacle à la mise en oeuvre de la clause d'arbitrage >>. Elle considérerait, conformément à une jurisprudence antérieure2, que l'article L 621-40 devenu l'article L 622-21 du Code de commerce n'avait pas pour effet de rendre nulle une clause d'arbitrage valablement conclue avant l'ouverture de la procédure collective. Par conséquent, en dépit de l'ouverture d'une procédure collective, l'arbitre pouvait se prononcer. Cette solution était conforme à l'article 1466 du nouveau Code de procédure civile3 selon lequel seul l'arbitre est compétent pour statuer sur la validité et les limites de son investiture. Pourtant, ce n'est pas cette conception qui a été retenue par la Haute juridiction.

En effet, en 2004, la Cour de Cassation censure l'arrêt de la Cour d'appel et considère sur le
fondement de l'actuel article L622-21, que le principe d'arrêt des poursuites en cas d'ouverture
d'une procédure collective, interdit la saisine d'un tribunal arbitral pour un litige portant sur une

1 Cass. Com., 2 juin 2004, Sté Gaussin et a. c/ Sté Alston Tower Turbomachines - n° 02-13.940, Bull. civ. 2004, IV, n° 112, p. 115 . Selon la Cass. : << Le principe d'ordre public de l'arrêt des poursuites individuelles interdit après l'ouverture de la procédure collective, la saisine du tribunal arbitral par un créancier dont la créance à son origine antérieurement au jugement d'ouverture, sans qu'il soit soumis au préalable à la procédure de vérification des créances >>.

2 CA Paris, 13 février 2002, n° 2001/21101, << La règle d'ordre public de la suspension des poursuites individuelles et l'obligation pour le créancier de se soumettre à la procédure de vérification de sa créance ne s'opposent pas à la mise en oeuvre de la clause d' arbitrage pour l'opération de constitution du tribunal arbitral, celui-ci étant, en application de l'article 1466 du nouveau code de procédure civile, seul juge pour statuer sur la validité et les limites de son investiture>> , V.JCP, éd. entreprise, 2003, p. 447.

3 Art 1466 NCPC : << Si, devant l'arbitre, l'une des parties conteste dans son principe ou son étendue le pouvoir juridictionnel de l'arbitre, il appartient à celui-ci de statuer sur la validité ou les limites de son investiture >>.

créance antérieure et tendant soit à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent, soit à la résolution du contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.

On peut donc conclure à la primauté des procédures collectives, car elles peuvent empêcher la mise en oeuvre d'une procédure arbitrale.

106. En réalité, cette primauté n'est pas tant fondée sur le caractère d'ordre public de la règle de l'arrêt des poursuites que sur Ç l'antériorité de l'ouverture de la procédure collective (...) qui paralyse les effets de la clause compromissoire1 È. En effet, c'est davantage une approche chronologique qu'une approche hiérarchique qui prime2.

Cette solution de la Cour de Cassation est critiquée par certains auteurs3 qui plaident pour permettre à l'arbitre de se prononcer malgré l'ouverture de la procédure collective. En effet, cette solution semble porter atteinte au principe de Ç compétence-compétence È en vertu duquel l'arbitre est seul compétent pour statuer sur sa propre compétence, puisque en l'espèce, il ne peut être saisi et donc ne peut pas se prononcer.

107. Cependant, Monsieur Touchent considère qu'il ne s'agit pas Ç de faire prévaloir la règle des poursuites sur celle de la compétence-compétence4 È mais simplement de respecter les dispositions légales de l'actuel article L 622-21 du Code de commerce. D'autres auteurs considèrent quant à eux que cette solution est justifiée car Ç il n'y avait aucune raison de soustraire les instances arbitrales aux règles restrictives imposées par la discipline collective5 È.

Quoi qu'il en soit, cette prédominance des procédures collectives sur l'arbitrage, dès lors qu'une procédure collective est ouverte, n'est pas totale. En effet, lorsque l'instance arbitrale n'est pas en cours, la Haute juridiction affirme la primauté de la compétence arbitrale sur celle du juge commissaire une fois la procédure de déclaration et de vérification des créances effectuée6.

B - L'interdiction d'ouvrir une instance arbitrale en cours de procedure collective affaiblie

108. Dès lors que le créancier, invoquant la saisine d'un tribunal arbitral, a déclaré sa créance et qu'elle a été vérifiée par le juge commissaire, la jurisprudence considère que la convention d'arbitrage retrouve son empire et qu'une instance arbitrale peut être ouverte malgré l'ouverture préalable d'une procédure collective7. Par conséquent, la mise en oeuvre de la procédure arbitrale

1 D. Touchent, Petites affiches, 21 juillet 2004 n° 145, p. 15.

2 En ce sens, . Touchent, op. cit.; A. Lienhard, D. 2004, act. jur., p. 1732.

3 Ph. Fouchard, Rev. arb. 2003, n°1, p. 209.

4 D. Touchent, op. cit.

5 M.-H. Monsèrié-Bon, Droit et patrimoine 2004, n°130, p. 119.

6 Cass. Com., 2 juin 2004 - Sté Industry et autres c/ Sté Alstom Power Turbomachines - n° 02-18.700, Bull. civ. 2004, IV,n° 110, p. 114.

7 cf supra, Titre 2, Chapitre 1, Section 1, Sous-section 2, §1.

en cours de procédure collective est interdite mais seulement temporairement. Une fois les créances déclarées et vérifiées, la clause compromissoire peut jouer.

109. C'est la solution retenue par la Cour de Cassation dans un arrêt dit Industry contre Alstom rendu le même jour que l'arrêt Gaussin contre Alstom et concernant le même défendeur1. Elle considère qu'une fois que le juge commissaire a vérifié la régularité de la déclaration des créances, il ne peut conna»tre d'une contestation qui fait l'objet d'une clause compromissoire. Il doit donc se déclarer incompétent si la clause compromissoire est valable. Une instance arbitrale pourra alors être ouverte pour trancher la contestation. Ces solutions consacrant un retour de la compétence arbitrale seront examinées plus en détail ultérieurement2.

110. Pour l'instant, on peut néanmoins conclure qu'une procédure arbitrale peut être ouverte alors même qu'une procédure collective est en cours. Soit, pour satisfaire à la volonté des organes de la procédures collective de compromettre dès lors que le juge commissaire les y autorise ; soit, en vertu d'une convention d'arbitrage conclue entre les parties, préalablement à l'ouverture d'une procédure collective. Mais dans ce cas, pour que la convention d'arbitrage soit efficace, il est nécessaire de respecter certaines conditions3.

111. Par conséquent, procédures collectives et arbitrales ne se méconnaissent pas même si leur coexistence semble parfois être un véritable rapport de force oü prédomine les procédures collectives puisqu'elle a des effets tant sur le déroulement que sur l'ouverture d'une instance arbitrale. Mais cet assujetissement n'est pas total puisque l'instance arbitrale peut le plus souvent exister.

Néanmoins, lorsque les procédures coexistent, l'arbitre ne doit pas porter atteinte aux principes fondamentaux des procédures collectives. Ce qui explique une hiérarchisation des règles oü prédominent largement les procédures collectives.

1 Cass. Com., 2 juin 2004 - Sté Industry et autres c/ Sté Alstom Power Turbomachines - n° 02-18.700, Bull. civ. 2004, IV, n° 110, p. 114.

2 cf infra, Titre 2, Chapitre 1, Section 1, Sous-section 2, §2.

3 cf infra, Titre 1, Chapitre 2.

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery