A - La qualification élargie de l'arbitrage
international
147. Selon l'article 1492 du nouveau Code de procédure
civil, << est international l'arbitrage qui met en cause des
intérêts du commerce international È. Ce qui implique en
principe la présence d'un élément
d'extranéité apprécié en fonction de
critères juridiques. Mais on admet couramment que
l'internationalité de l'arbitrage résulte << de
critères purement économiques, tirés du fond du
litige1 È. Ainsi, la jurisprudence a retenu ce critère
économique pour définir un arbitrage comme étant
international2. Cette appréciation permet d'élargir la
qualification d'arbitrage international qui n'évalue pas
l'extranéité en fonction d'éléments purement
juridiques, ce qui permet d'inclure un nombre plus large d'affaires connues par
les arbitres comme étant internationales.
148. En outre, le Professeur Philippe Fouchard, souligne que
l'arbitrage international peut certes relever de lois nationales mais il
manifeste de plus en plus son autonomie et peut donc relever de règles
autres que celles des lois nationales3. Cette solution tend à
favoriser le règlement des litiges internationaux par l'application de
règles plus libérales lorsque les arbitres les estiment plus
adaptées.
1 Ph. Fouchard, Juris. cl. dr. int., fasc. 585-1 ou Juris. cl.
proc. civ., fasc. 1050, n° 68.
2 Cour d'appel de Paris, 20 septembre 1995,
société Matra Hachette c/ société Reteitalia. En
l'espèce la Cou d'appel considère que la participation de la
société française dans la société italienne
constitue un investissement au delà des frontières et justifie
donc l'internationalité de l'arbitrage.
3 En ce sens, Ph. Fouchard, Juris. cl. proc. civ., fasc. 1050,
n° 69 et 70.
B - La liberté des arbitres subordonnée au
respect de l'ordre public international
149. L'arbitre a un large pouvoir d'appréciation des
règles de droit applicable au litige qu'il doit trancher. Il peut
appliquer le droit national, qui est en principe celui oü l'institution
arbitrale à son siège, mais il peut aussi recourir à
l'application de règles qui ne relèvent pas d'un système
étatique. Ainsi, certaines sentences arbitrales appliquent des
règles consacrées par les conventions internationales ou par la
lex mercatoria.
150. Mais dans tous les cas, l'arbitre doit veiller à
ce que sa sentence soit valable dans l'Etat oü elle est rendue. Pour ce,
le Professeur Bernard Hanotiau précise Ç que la sentence ne doit
pas aller à l'encontre des principes d'ordre public international de
l'Etat du siège1 È.
Cette solution semble logique car au sens du droit
international privé, l'ordre public international recouvre Ç les
valeurs intangibles du for2 È, ce qui correspond aux
principes jugés essentiels au lieu du tribunal saisi du litige. De sorte
que, puisque l'arbitre doit respecter les règles d'ordre public
international, on peut penser qu'il doit trancher le litige en fonction de la
lex fori, c'est à dire la loi du lieu oü la juridiction a
été saisie.
Néanmoins, la loi applicable par l'arbitre n'est pas
nécessairement la lex fori car les parties peuvent
prévoir elles-mêmes la loi applicable pour régler leur
différend, l'arbitre appliquera alors la lex causae. Mais le
choix de la loi applicable se complexifie encore en présence d'une
procédure collective car l'arbitre ne peut pas ignorer la lex
concursus c'est à dire la loi de la faillite. Mais quelle que soit
la règle applicable dans le cadre d'un arbitrage international,
l'arbitre est tenu de respecter l'ordre public international.
151. C'est le juge qui veille au respect par l'institution
arbitrale de l'ordre public international. La particularité de ce
contrôle est que le respect de l'ordre public s'apprécie, non pas
au niveau de la sentence elle même, mais au niveau de sa reconnaissance
ou de son exécution3. Alors qu'en matière d'arbitrage
interne, le contrôle de la sentence se fait au niveau de la solution
consacrée dans la sentence. En outre, l'étude de la jurisprudence
montre une évolution quant à l'appréciation de l'ordre
public en matière d'arbitrage international, ce qui sera traité
ultérieurement4.
1 B. Hanotiau, Ç La loi applicable par l'arbitre en cas de
faillite d'une des parties à la procédure È, Rev. droit.
aff. Int. 1996, p 45.
2 J.-B. Racine, op. cit., p. 489.
3 P. Mayer, op. cit.
4 cf infra, Titre 2, Chapitre 1, Section 2, §2,
B.
§ 2 Loi applicable par les arbitres
152. Si les arbitres disposent d'une grande liberté
quant à la loi applicable, la sentence se doit de respecter les
règles d'ordre public international dans le cadre d'un arbitrage
international Aussi, seront étudiées successivement les
règles applicables par l'arbitre dans le cadre d'un arbitrage
international, selon qu'une procédure collective est ouverte
parallèlement en France (A) ou à l'étranger (B).
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