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Arbitrage et procédures collectives

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par Charlène RIET
Université Toulouse1 Capitole - Master 2 Droit fondamental des affaires 2010
  

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B - Arbitrage international et procédure collective ouverte à l'étranger

158. Dans les relations internationales, les parties conviennent souvent d'un arbitrage pour éviter que leur différend ne soit tranché par les juridictions étatiques de la partie adverse. Pourtant, l'ouverture d'une procédure collective contre l'une des parties à l'arbitrage peut venir complexifier cette volonté initiale. L'arbitre se voit alors imposer le respect des règles des procédures collectives (1°), car << la loi de l'Etat d'ouverture d'une faillite régit en principe tous ses effets juridiques1 È. En outre, ils doivent tenir compte des règles d'ordre public du lieu oü la sentence peut faire l'objet d'un exequatur (2°).

1 Le respect par l'arbitre de la lex concursus2

159. En droit français, les règles d'ordre public internes bien qu'ayant aussi la qualification de règles d'ordre public international ne permettent pas d'évincer une règle différente dans un pays étranger dès lors que la procédure collective est ouverte à l'étranger.

Certes, dès lors qu'une procédure collective est ouverte en France, les règles d'ordre public international qui la régissent doivent être respectées. Mais si une procédure collective est ouverte en dehors du territoire français, ce sont les règles étrangères qui s'appliquent, sans qu'elles puissent être exclues au nom de l'ordre public international3. Car l'ordre public international n'est << pas un concept utilisé dans le cadre de l'éviction d'un droit étranger4 È.

Int. 1996, p 45.

1 En ce sens, P. Mayer, << La sentence contraire à l'ordre public au fond È, Rev. arb. 1994, p. 43.

2 La lex concursus correspond à la loi de la faillite. En ce sens, B. Hanotiau, op. cit., p.30.

3 En ce sens, P. Mayer, << La sentence contraire à l'ordre public au fond È, Rev. arb. 1994, p. 41.

4 J.-B. Racine, op. cit., p. 503.

160. Ainsi, un jugement étranger ayant appliqué dans le cadre d'une procédure de failite ouverte à l'étranger une loi étrangère ne connaissant pas les principes français des procédures collectives, peut s'appliquer en France. Car l'ordre public international ne s'oppose pas aux effets en France d'un jugement étranger1. Donc le but de l'ordre public international n'est pas d'évincer une décision étrangère au for.

Cependant, dès lors qu'une procédure collective est ouverte en France, l'arbitre étranger se doit de respecter les règles du droit français des procédures collectives.

161. Il se peut que des procédures collectives concurrentes soient ouvertes dans différents pays à l'encontre d'un même débiteur. Cette hypothèse présente un fort potentiel de multiplication des conflits, du fait de la pluralité de règles et de compétences impératives. Néanmoins, il est tout à fait possible d'ouvrir une procédure secondaire à coté d'une procédure collective principale ouverte dans un autre pays.

L'arbitre devra alors << appliquer les règles de droit choisies par les parties ou à défaut par lui même, sans être tenu de respecter les autres lois, fussent-elles des lois de police2 È. Mais le Professeur Philippe Fouchard souligne néanmoins qu'il est opportun pour l'arbitre de prendre en compte les règles d'ordre public international du pays oü l'exécution de sa sentence sera requise.

2° La prise en compte par l'arbitre de l'ordre public du lieu oü est exécutée la sentence

162. L'arbitre étant dépourvu d'imperium il peut avoir besoin du juge pour ordonner la mise en oeuvre de sa décision. En effet, l'arbitre ne peut pas donner force exécutoire à sa sentence mais on peut penser qu'il a pour objectif de résoudre définitivement le litige des parties. Cependant le juge du lieu d'exécution de la sentence n'autorisera son exécution sur son territoire que si elle a été rendue conformément à une loi de police de son for. C'est pourquoi l'arbitre a tout intérêt à prendre en compte les règles d'ordre public international oü sa sentence va être exécutée3.

163. Ainsi, si la sentence doit prendre effet en France, l'arbitre doit respecter les règles des procédures collectives françaises faute de quoi le juge français chargé du contrôle de la sentence rejettera son application. Par conséquent, au nom de l'ordre public international, la jurisprudence française impose à l'arbitre, qu'il soit étranger ou international, de respecter les principes fondamentaux du droit français de la faillite, pour peu que ce droit soit applicable en l'espèce.

1 J.-B. Racine, op. cit., p. 503 et s.

2 Ph. Fouchard, <<Arbitrage et faillite È, Rev. arb. 1998, p. 479 et s.

3 En ce sens, J.-B. Racine, op. cit., p. 292 et s.

164. En ce sens, une sentence dite Casa contre Cambior1 rendue le 26 décembre 1990 souligne que Ç les arbitres ne doivent pas prendre de décision qui violerait les principes fondamentaux considérés par le juge de l'exequatur comme d'ordre public international2 È.

En l'espèce, le tribunal arbitral rejette la demande de Cambior d'obtenir une caution bancaire afin de garantir l'éventuelle condamnation du défendeur, Casa. La sentence se fonde sur le droit luxembourgeois alors même que les parties avaient choisi l'application du droit suisse dans leur convention d'arbitrage. Les arbitres considèrent que le droit des procédures collectives luxembourgeois prévoyant le principe d'égalité des créanciers s'oppose à cette demande. L'intérêt de cette solution réside dans le fait que les arbitres écartent le droit suisse pour retenir les règles d'ordre public du Luxembourg car c'est le lieu oü sera exécuté la sentence. Ce qui justifie que l'arbitre écarte la lex causae3 afin d'assurer l'efficacité de sa sentence. Néanmoins, leur sentence n'est efficace que parce que sont respectées les règles d'ordre public des procédures collectives, même s'ils disposent d'une marge de manoeuvre quant au choix de la législation étatique référente.

165. On peut conclure qu'en matière d'arbitrage interne, la primauté des règles des procédures collectives ne fait pas de doute et l'arbitre doit respecter ces règles d'ordre public sous peine de nullité de sa sentence. En matière internationale, les règles françaises des procédures collectives s'appliquent dès lors que la procédure collective est ouverte en France. Mais si la procédure collective est ouverte à l'étranger, les règles françaises des procédures collectives sont évincées sauf dans le cas oü la sentence doit être effectuée en France. On peut donc conclure que la primauté des procédures collectives est étendue. Mais la mise sous Ç tutelle4 È de l'arbitrage n'est pas totale et on constate une dynamique jurisprudentielle tendant à donner plus de force à cette justice privée.

1 Sentence CCI, n°6697.

2 En ce sens, P. Mayer, Ç La sentence contraire à l'ordre public au fond È, Rev. arb. 1994, p. 47.

3 Locution latine signifiant la loi de la cause.

4 Expression empruntée à F. Carpi, Ç Ouverture È, Médiation et arbitrage, dir. L. Cadiet, Pratique professionnelle, Litec, 2005, p. 205.

TITRE 2 : MAINTIEN EFFECTIF DE L'ARBITRAGE FACE AUX
PROCÉDURES COLLECTIVES

166. Si les règles des procédures collectives prédominent largement les relations entre procédures collectives et arbitrales, l'instance arbitrale ne se contente pas d'exister malgré l'ouverture d'une procédure collective. Elle dispose de réelles prérogatives, qui résultent en partie de la double nature contractuelle et juridictionnelle de l'arbitrage. Ainsi, les pouvoirs publics reconnaissent la validité d'une convention d'arbitrage. Cela s'explique par la nécessité de respecter les engagements contractuels des parties, mais aussi par le caractère juridictionnel de l'arbitrage, qui lui confère une efficacité non contestable. Cependant, la persistance de la compétence arbitrale face aux procédures collectives (Chapitre 1) s'explique également par l'évolution de la jurisprudence. En effet, cette dernière tend à renforcer la compétence arbitrale, en la faisant parfois primer sur la compétence des acteurs de la juridiction étatique.

Il en résulte un maintien effectif de l'arbitrage, qui certes doit respecter les règles d'ordre public des procédures collectives mais qui dispose parallèlement d'une grande autonomie. Cette liberté de l'arbitre s'accompagne en matière internationale d'un assouplissement du contrôle de la juridiction étatique. Par conséquent, c'est la justice étatique elle même qui contribue au renforcement de l'efficacité de la justice arbitrale.

167. Mais si l'arbitrage tend à réaffirmer sa force en présence d'une procédure collective, il n'en résulte pas un simple rapport de force entre ces deux procédures. En effet, les juridictions étatique et arbitrale tentent de se coordonner (Chapitre 2). Cela se manifeste via l'échange d'informations mais aussi par la capacité du juge à contrôler la sentence arbitrale, lui donner force exécutoire ou de conna»tre des voies de recours. En effet, les pouvoirs du juge une fois la sentence arbitrale rendue sont étendus. Mais l'examen de la pratique montre que la juridiction étatique n'a pas pour but d'anéantir la sentence arbitrale. Son droit de regard se fait dans une volonté de construction et d'harmonisation afin de concilier l'efficacité de la sentence avec les valeurs fondamentales de la justice étatique. Ainsi, justice étatique et justice arbitrale apparaissent complémentaires car le juge veille sur l'institution arbitrale et l'encourage. Néanmoins, l'efficacité de la sentence arbitrale n'est pas totale. Ainsi, des contentieux post-arbitraux subsistent et la jurisprudence actuelle n'est pas encore enclin à recourir à la technique de Ç l'anti-suit injunctionÈ pour faire prévaloir la volonté des parties de recourir à l'arbitrage.

Pour autant, le maintien de l'arbitrage face aux procédures collectives est effectif. Il manifeste une reconnaissance mutuelle de la justice étatique et de la justice privée, et s'accompagne d'une volonté de se coordonner.

Chapitre 1 : Résistance de l'institution de l'arbitrage face aux procédures collectives

168. L'arbitrage est un mode alternatif de règlement des litiges dont la nature juridictionnelle est depuis longtemps reconnue, cela confère à l'arbitre des pouvoirs efficaces qui, bien que limités, ne cessent de s'accro»tre. L'essor quantitatif de l'arbitrage s'accompagne donc d'un regain d'efficacité comme en témoigne l'évolution de la compétence de l'arbitre. La consécration de la compétence arbitrale se manifeste tant dans l'élargissement de sa compétence traditionnelle (section 1), que dans l'appréciation assouplie des règles applicables par les arbitres (section 2).

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci