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Arbitrage et procédures collectives

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par Charlène RIET
Université Toulouse1 Capitole - Master 2 Droit fondamental des affaires 2010
  

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B - La portée restreinte des limites au principe de compétence-compétence

184. Bien entendu, le principe de compétence-compétence ne signifie pas nécessairement que l'arbitre sera compétent pour trancher le litige. En effet, il peut tout à fait se limiter à constater son incompétence. Mais la force de l'arbitrage tient dans le fait que lui seul peut en décider.

185. En outre, le principe de compétence-compétence conna»t des exceptions. Dès lors que la clause est manifestement nulle, le juge étatique peut l'écarter et par conséquent se déclarer compétent1. Mais cette nullité manifeste fait l'objet d'une interprétation étroite par la jurisprudence qui retient que seule une nullité manifeste peut faire obstacle à l'arbitrage2.

On s'est demandé par le passé si la compétence arbitrale n'était pas qu'une exception à la compétence judiciaire3 puisque le juge étatique peut avoir la faculté d'écarter la compétence arbitrale. Mais cette hypothèse ne se produit que de façon sporadique et la conception selon laquelle elle justifierait la compétence principale du juge étatique pour reléguer la compétence arbitrale au rang d'exception ne semble aujourd'hui plus d'actualité. C'est donc l'inapplicabilité manifeste de la clause d'arbitrage qui constitue une exception au principe de compétencecompétence4.

186. Aussi, la jurisprudence tend à faire une application restreinte de cette exception permettant au juge de se prononcer sur la validité de la convention d'arbitrage lorsque le tribunal arbitral n'a pas encore été constitué.

Dans un arrêt dit Zanzi contre De Coninck, en date du 5 janvier 19995, la Cour de Cassation fait une nouvelle application du l'article 1458 alinéa 2 du nouvau Code de procédure civile6, selon lequel la juridiction étatique, saisie d'un litige soumis à un tribunal arbitral peut retenir sa compétence lorsque la convention d'arbitrage est manifestement nulle.

1 En ce sens, D. Vidal, Droit français de l'arbitrage commercial international, Gualino, 2004, p. 175.

2 Cass. civ. 1re, 1 décembre 1999, n° 97-21488, Rev. arb. 2000, p. 96 et s.

Ç Attendu que pour déclarer le tribunal de commerce compétent pour statuer sur le litige (...), l'arrêt attaqué retient, par motifs adoptés, que le litige, consécutif à la rupture d'un contrat de licence stipulant une clause d'arbitrage CCI, est survenu après la fin du contrat, de sorte qu'il n'entrait pas dans l'objet de la convention d'arbitrage qui ne visait que les litiges relatifs à l'interprétation et à l'exécution du contrat. Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans relever la nullité manifeste de la convention d'arbitrage, seule de nature à faire obstacle à l'application du principe susvisé, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision È.

3 V.D. Vidal, Droit français de l'arbitrage commercial international, Gualino, 2004, p. 175.

4 En vertu de l'art 1458 NCPC : Ç Si le tribunal arbitral n'est pas encore saisi, la juridiction doit également se déclarer incompétente à moins que la convention d'arbitrage ne soit manifestement nulle È.

5 Cass., civ.1re, 5 janvier 1999, Zanzi c/ De Coninck, n° 96-21.430, Bull. 1999, I n° 2, p. 1

6 Art 1458 al 2 NCPC : Ç Si le tribunal arbitral n'est pas encore saisi, la juridiction doit également se déclarer incompétente à moins que la convention d'arbitrage ne soit manifestement nulle È.

En l'espèce, la Cour d'appel avait donnée droit à la demande de nullité de la convention d'arbitrage introduite devant le Tribunal de commerce par une partie avant même que le tribunal arbitral soit saisi. La Cour de cassation censure la solution des juges du fond. Elle considère que lorsque le tribunal arbitral n'est pas saisi, même si la clause d'arbitrage est manifestement nulle, la partie ne peut introduire une demande de nullité à titre principal devant les juridictions étatiques. Le Professeur Eric Loquin souligne que cette solution se Ç justifie par la force du principe de compétence-compétence qui réduit au minimum les cas oü le juge de l'Etat doit vérifier à la place du tribunal arbitral la validité de la convention d'arbitrage1 >>. Si les exceptions légales au principe de compétence-compétence subsistent, l'interprétation limitée qu'en fait la jurisprudence renforce une fois de plus l'efficacité du recours à l'arbitrage.

Sous-section 2 : Persistance de la compétence de l'arbitre

187. Si on ne peut pas nier l'incidence d'une procédure collective sur un arbitrage en cours2, ni même sur l'ouverture d'une instance arbitrale3, il n'en reste pas moins que l'examen de la jurisprudence récente tend à démontrer la persistance de la compétence arbitrale en présence d'une procédure collective. Ainsi, dans certaines circonstances Ç l'ouverture de la procédure collective n'entame pratiquement pas la compétence des arbitres pour conna»tre des litiges qui leur ont été contractuellement confiés 4>>. Lorsqu'une procédure collective est en cours mais que l'instance arbitrale n'a pas été saisie, la jurisprudence limite la compétence du juge commissaire (1) une fois la procédure de vérification des créances effectuées. Il en résulte un regain d'efficacité de la compétence arbitrale (2).

§ 1 Compétence du juge commissaire limitée lorsque l'instance arbitrale n'est pas saisie

188. La Cour de cassation, dans un arrêt sociétés Cutting et Industry contre Alstom Power Turbomachines, en date du 2 juin 20045, statue sur la question de la compétence du juge commissaire afin de déterminer s'il peut statuer sur le bien fondé de créances en présence d'une clause d'arbitrage. En l'espèce, les sociétés Cutting et Industry sont mises en redressement judiciaire. La société Alstom Power Turbomachines déclare ses créances à la procédure afin de pouvoir faire valoir ses droits à paiement à la clTMture de la procédure. Mais lors de la vérification de ses créances, la société invoque une clause d'arbitrage.

1 E. Loquin, RTD Com. 1999, p. 380.

2 cf infra, Titre 1, Chapitre 1, Section 2, Sous-section 1.

3 cf infra, Titre 1, Chapitre 1, Section 2, Sous-section 2.

4 P. Ancel, rev. arb. 2004, p. 591 et s.

5 Cass. Com., 2 juin 2004 - Sté Industry et autres c/ Sté Alstom Power Turbomachines - n° 02-18.700, Bull. civ. 2004, IV,n° 110, p. 114.

La juridiction commerciale considère que le juge commissaire est compétent pour statuer sur la contestation du bien fondé des créances. Mais la Cour d'appel infirme le jugement et la Cour de cassation confirme cette solution au motif que << lorsque l'instance arbitrale n'est pas en cours au jour du jugement d'ouverture, le juge commissaire, saisi d'une contestation et devant lequel est invoquée une clause compromissoire, doit, après avoir, le cas échéant, vérifié la régularité de la déclaration de la créance, se déclarer incompétent à moins que la convention d'arbitrage ne soit manifestement nulle ou inapplicable È.

189. Par conséquent, lorsqu'une clause compromissoire est invoquée devant le juge commissaire, celui-ci doit se déclarer incompétent et sa seule mission est de vérifier la régularité de la déclaration de la créance. Ainsi, la juridiction étatique doit se déclarer incompétente lorsque le tribunal arbitral n'est pas encore saisi, à moins que la convention d'arbitrage soit manifestement nulle ou inapplicable.

190. Le créancier muni d'une clause compromissoire ne peut saisir le tribunal arbitral qu'après déclaration et vérification de sa créance. Mais désormais, une fois cette formalité accomplie, le juge commissaire n'est plus compétent et seul l'arbitre peut statuer sur le bien fondé de la créance. Même si la Haute juridiction ne le dit pas, on peut penser que la compétence des arbitres résulte de l'article 1458 du nouveau Code de procédure civile qui consacre le principe de compétencecompétence de l'arbitre1, puisque une fois déclaration et vérification des créances effectuées, la question de leur bien fondé échappe au juge commissaire.

191. Le Professeur Alain Lienhard souligne la modularité du juge commissaire qui en l'espèce <<décline sa compétence au profit du tribunal arbitral2 È. Ainsi, tantôt le juge commissaire a un rôle incontournable de vérification des créances3, tantôt sa compétence est écartée au profit de l'arbitre qui est seul habilité à statuer sur le bien fondé de la créance.

§ 2 Regain d'efficacité de la compétence arbitrale

192. Cette solution est une véritable révolution. Auparavant, la jurisprudence4 considérait que lorsque l'ouverture de la procédure collective était antérieure à l'instance arbitrale, le créancier ne pouvait

1 En ce sens, D. Touchent, LPA, 21 juillet 2004, n°145, p. 15 et s.

2 A. Linhard, op. cit.

3 cf supra, Titre 1, Chapitre 2, Section 1, Sous-section 2.

4 << lorsque la procédure d'arbitrage n'a pas commencé avant l'ouverture du redressement, le créancier... ne peut plus saisir le tribunal arbitral mais seulement déclarer sa créance et attendre sa vérification È.

CA Paris, 30 mars 1999,Consorts de Coninck c/ M. Zanzi et société Torelli ès qual.

CA Paris, 3 mars 1998, sté toulousaine d'exploitation cinématographique c/ sté Polygram Film Distribution.

plus saisir le tribunal arbitral et le juge commissaire se voyait réserver la décision d'admission ou de rejet de la créance1.

Désormais, le tribunal arbitral est seul compétent pour statuer sur l'existence et le montant d'une créance dès lors que l'instance arbitrale n'était pas en cours au jour du jugement d'ouverture. Cela à pour effet, malgré les défaillances de l'entreprise, de faire primer la liberté contractuelle des parties, maintes fois malmenée par la Cour de Cassation.

193. Pour conclure, il résulte des deux arrêts du 2 juin 2004, l'arrêt dit Gaussin contre Alstom vu précédemment2 et celui dit Industry contre Alstom, une complémentarité. La primauté de la règle de l'arrêt des poursuites individuelles empêche la mise en oeuvre d'une procédure arbitrale dès lors qu'une procédure collective a été ouverte. En effet, cette règle étant d'ordre public interne et international, l'institution arbitrale bien que reconnue par les juridictions étatiques ne peut s'y soustraire.

Mais une fois les créances valablement déclarées et vérifiées par le juge commissaire, l'égalité des créanciers est assurée. Par conséquent, la convention d'arbitrage retrouve son empire. En effet, les parties pourront mettre en oeuvre la convention d'arbitrage qu'elles s'étaient promises préalablement à l'ouverture de la procédure collective et seuls les arbitres seront compétents pour décider si la contestation relève ou non de leur compétence. On peut en conclure qu'une fois les règles des procédures collectives respectées, l'arbitrage retrouve son empire.

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984