B - Le principe de bonne foi comme garantie de la
loyauté
238. Une autre manoeuvre peut consister pour les parties
à l'arbitrage à ne pas révéler qu'elles sont
soumises à une procédure collective afin d'obtenir plus tard
l'annulation de la sentence ou le refus d'exequatur pour violation des regles
d'ordre public des procédures collectives. En effet, cette omission
empêche la prise en compte par les arbitres des regles d'ordre public des
procédures collectives et anéantit donc une possible coordination
des procédures.
239. Par le passé, la Cour d'appel de Paris, dans un
arrêt en date du 12 janvier 19932 a considéré
que les arbitres pouvaient écarter l'application des regles de la
faillite au nom de la contrariété au principe de bonne foi. La
Cour précise néanmoins que les arbitres peuvent ignorer la
procédure de faillite, qui n'a pas été volontairement
portée à leur connaissance, à deux conditions. D'une part,
l'efficacité internationale du jugement de la faillite doit être
contesté par une partie car l'arbitre ne peut pas s'auto-saisir
d'office3. D'autre part, l'efficacité internationale du
jugement de la failite doit être selon la Cour d'appel invoquée
Ç à titre incident È. Des lors que ces conditions sont
remplies, les arbitres peuvent ignorer la procédure collective qui n' a
pas été portée à leur connaissance. Le principe de
bonne foi s'impose donc aux parties sous peine de les priver du
bénéfice des regles protectrices des procédures
collectives.
240. On peut conclure que si les arbitres doivent se
soumettre aux regles des procédures collectives, le principe de bonne
foi, comme le principe d'estoppel, permettent de contrer les manoeuvres des
parties qui tenteraient, au prétexte qu'elles sont soumises à une
procédure collective, d'anéantir l'arbitrage. Ces solutions
jurisprudentielles ne paraissent pas contestables car toute position contraire
aurait été une prime à la mauvaise foi.
241. On peut également, à l'instar du
Professeur Jean-Baptiste Racine, encourager les juges qui auraient à
conna»tre d'un appel ou d'un recours en annulation dans un tel contexte,
à ne pas hésiter à débouter les parties qui
agissent ainsi, voire à les sanctionner4.
1 D. Vidal, Bulletin de la Cour internationale d'arbitrage de la
CCI, Vol.20/1, 2009, p. 64.
2 CA Paris, 12 janvier 1993, République de
Côte-d'Ivoire et a. c/ Norbert Beyrard., cf Rev. arb.1993, p 684.
3 J.-B. Racine, op. cit., p. 117.
4 En ce sens, J.-B. Racine, op. cit., p. 504.
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