B - L'appel contre la sentence ou contre la decision
statuant sur l'exequatur
246. Selon l'article 1482 du Code de procédure civile,
<< la sentence arbitrale est susceptible d'appel à moins que les
parties n'aient renoncé à l'appel dans la convention d'arbitrage.
Toutefois, elle n'est pas susceptible d'appel lorsque l'arbitre a reçu
mission de statuer comme amiable compositeur, à moins que les parties
n'aient expressément réservé cette faculté dans la
convention d'arbitrage È.
247. Dans le cas oü l'exequatur de la sentence a
été refusé, l'article 1501 du nouveau Code de
procédure civile1 précise qu'une telle décision
est susceptible d'appel. Mais lorsque la décision accorde l'exequatur,
l'appel n'est possible que dans les cas prévus par l'article 1502 du
nouveau Code de procédure civile2.
§ 2 Le recours en annulation
248. Le recours en annulation constitue l'autre voie de
recours que peuvent exercer les parties à l'instance arbitrale afin
d'obtenir l'annulation de la sentence. Si une annulation partielle est
possible, la jurisprudence prononce souvent une annulation totale de la
sentence (A). Cette solution est souvent critiquée dès lors
qu'une annulation partielle aurait pu suffire car une solution trop
tranchée met à mal la collaboration des juridictions arbitrales
et étatiques. En outre, l'examen
1 Art1501 NCPC : << La décision qui refuse la
reconnaissance ou l'exécution est susceptible d'appel È.
2 Art 1502 NCPC : << L'appel de la décision qui
accorde la reconnaissance ou l'exécution n'est ouvert que dans les cas
suivants :
1° Si l'arbitre a statué sans convention d'arbitrage
ou sur convention nulle ou expirée ;
2° Si le tribunal arbitral a été
irrégulièrement composé ou l'arbitre unique
irrégulièrement désigné ;
3° Si l'arbitre a statué sans se conformer à
la mission qui lui avait été conférée ;
4° Lorsque le principe de la contradiction n'a pas
été respecté ;
5° Si la reconnaissance ou l'exécution sont
contraires à l'ordre public international È.
des effets du recours en annulation dans le cadre d'un arbitrage
international soulignera la volonté de la justice étatique et de
la justice privée de se coordonner (B).
A - L'annulation totale de la sentence critiquée
249. Si les parties ont renoncé conventionnellement
à l'appel, la seule voie ouverte est le recours en annulation. Le
recours en annulation implique un contrôle de la légalité
de la sentence, et s'il est accueilli, il entra»ne l'annulation de tout ou
partie de la sentence. Mais ce recours n'est possible que dans l'un des six cas
énumérés par l'article 1484 du nouveau Code de
procédure civile1.
250. Le plus souvent, la nullité de la sentence
arbitrale sera encourue, soit parce que les arbitres ont rendu une sentence qui
méconna»t l'ordre public, soit parce qu'ils se sont
prononcés sur une question qui échappait à leur
compétence. Néanmoins si l'annulation de la sentence se justifie
au regard de la prééminence des règles des
procédures collectives, nombre d'auteurs soulignent que cette protection
aboutit à des solutions trop tranchées.
251. Dans l'arrêt Thinet en date du 8 mars
19882, la Cour de Cassation avait justifié l'annulation de la
sentence arbitrale au motif que les arbitres avaient violé la
règle d'ordre public d'arrêt des poursuites individuelles en
condamnant le débiteur au paiement d'une créance au lieu de se
contenter de statuer sur l'existence d'une créance et la
détermination de son montant. Cette violation de l'ordre public
empêche inévitablement l'exequatur de la sentence. Mais la Cour de
Cassation va plus loin et prononce l'annulation de la sentence, signifiant
ainsi la primauté des règles des procédures collectives.
De sorte que même en cas de paiement volontaire, il est probable que ce
paiement aurait tout de même été annulé3.
Cependant le Professeur Pascal Ancel critique cette solution et
considère Ç qu'une annulation partielle aurait pu
suffire4 È.
252. De même, la solution de la Cour de Cassation rendue
dans l'arrêt SBBM5 oü le débiteur avait
été condamné à payer une somme d'argent est
critiquée. Ainsi, Monsieur Moitry souligne que la
1 Art 1484 NCPC : Ç Lorsque, suivant les distinctions
faites à l'article 1482 , les parties ont renoncé à
l'appel, ou qu'elles ne se sont pas expressément réservées
cette faculté dans la convention d'arbitrage, un recours en annulation
de l'acte qualifié sentence arbitrale peut néanmoins être
formé malgré toute stipulation contraire. Il n'est ouvert que
dans les cas suivants :
1° Si l'arbitre a statué sans convention d'arbitrage
ou sur convention nulle ou expirée ;
2° Si le tribunal arbitral a été
irrégulièrement composé ou l'arbitre unique
irrégulièrement désigné ;
3° Si l'arbitre a statué sans se conformer à
la mission qui lui avait été conférée ;
4° Lorsque le principe de la contradiction n'a pas
été respecté ;
5° Dans tous les cas de nullité prévus
à l'article 1480 ;
6° Si l'arbitre a violé une règle d'ordre
public È.
2 Cass. Civ. 1re, 8 mars 1988 - Thinet - n° 86-12.015, Bull.
1988, I, n° 65 p. 42.
3 En ce sens, P.Ancel, Rev. arb. 1989, p. 477.
4 P. Ancel, Rev. arb. 1989, p. 477.
5 Cass. Civ. 1re, 4 février 1992 - Sté. de
recherches et d'études techniques c/ SBBM - n° 90-12.569, Bull.
Civ. I, n° 38, p. 28.
sentence n'était pas susceptible d'exécution
forcée car elle contrevenait au principe d'arrêt des poursuites.
De sorte qu' une annulation partielle de la décision aurait suffit afin
<< de sanctionner la décision de condamnation tout en confirmant
la décision des arbitres sur le montant de la créance1
È.
253. Ces critiques de la doctrine prônent indirectement
le recours à une solution modérée, par le biais de
l'utilisation souvent plus appropriée de l'annulation partielle. En
effet, ces annulations pures et simples de la Cour de Cassation constituent des
<< excès de procédures2 È qui ne tendent
pas à la coordination des procédures collectives et
arbitrales.
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