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Une administration publique performante: un défi pour l'état haà¯tien à  la croisée d'une exigence des citoyens et d'une incitation des acteurs internationaux ? Le cas de la modernisation de la fonction publique

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par Destin JEAN
Université Pierre Mendès-France - Master 2 en Droit public 2011
  

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Section II

Des insuffisances de la Fonction publique et des fonctionnaires

Dans une allocution du greffier du Conseil privé et secrétaire du Cabinet conseil canadien des chefs d'entreprise (CCCE), lors du sommet national sur les politiques, publiée le 26 septembre 2006, nous avons pu lire les lignes que voici : «.. Je crois qu'il existe une étroite corrélation entre des politiques publiques judicieuses et une excellente Fonction publique. La Fonction publique peut avoir un point de vue à long terme sur les défis en matière de politique que doit relever un pays et investir dans l'analyse pour présenter aux gouvernements un éventail complet de possibilités d'action. »27

Par ailleurs, dans une note intitulée : « Donner aux fonctionnaires haïtiens les moyens de servir leur concitoyens », publiée sur le portail officiel de l'Agence canadienne de développement international (ACDI), nous avons pu lire les phrases que voici : « La Fonction publique est la pierre d'assise de l'Administration d'un pays. Si la Fonction publique s'écroule, un gouvernement entier peut se retrouver paralysé. »28

Tenant compte de ce qui précède et sachant que bon nombre de carences liées à la Fonction publique et aux fonctionnaires en Haïti ne datent pas d'aujourd'hui29, nous pouvons affirmer que la crise d'efficience observée dans l'Administration publique nationale en Haïti est liée entre autres et surtout en grande partie aux insuffisances chroniques observées dans la Fonction publique de l'Etat et chez l'ensemble des agents publics permanents de l'Etat.

27 Cf : http://www.pco-bcp.gc.ca/index.asp?lang=fra&Page=clerk-greffier&Sub=archives&Doc=20060926- fra.htm La page est consultée le 06 août 2011.

28 Note écrite dans le contexte post-séisme (un séisme de magnitude 7.3 sur l'échelle de Richter a eu lieu en Haïti le 12 janvier 2010), rappelant, entre autres, que pas moins de 17% des fonctionnaires ont trouvé la mort à l'occasion dudit séisme. La note rappelle, in fine : « Être fonctionnaire dans les conditions actuelles en Haïti, c'est plus qu'un emploi, c'est un acte de citoyenneté. »

Cf : http://www.acdi-cida.gc.ca/acdi-cida/ACDI-CIDA.nsf/fra/FRA-52713958-N5S

La page est modifiée le 29 juin 2011 et consultée le 06 août 2011.

29 Nous en voulons pour preuve l'intitulé du sujet de la these de doctorat du professeur Haïtien, Monferrier Dorval : « La problématique de la Fonction publique en Haïti », thèse dirigée par Jean-Claude Ricci, soutenue le 08 juillet 1992 à Marseille, Université Aix-Marseille III.

Dans un premier temps, nous aborderons la problématique de la qualification des fonctionnaires et de l'attractivité de la Fonction publique (§ 1), pour ensuite exposer, sans aucune prétention d'être exhaustif, la crise de la responsabilisation et du management des ressources humaines de l'Etat (§ 2).

§ 1.- Le problème de la carence de qualification des fonctionnaires et de la « faiblesse » de l'attractivité de la Fonction publique

Suivant, respectivement, les articles 8 et 9 du décret portant révision du Statut général de la Fonction publique30 : « Est fonctionnaire tout agent public de nationalité haïtienne nommé à un emploi permanent à temps complet et titularisé dans un grade de la hiérarchie administrative. " et «La Fonction publique regroupe l'ensemble des agents publics ayant la qualité de fonctionnaires. "

D'emblée, nous précisons que dans le cadre de nos analyses, nous limitons ici notre objet d'étude aux agents publics titulaires des emplois permanents de l'Administration publique nationale, en l'occurrence les fonctionnaires de l'Etat, stricto sensu, à l'exclusion des titulaires des emplois non permanents, en l'occurrence les contractuels, correspondant à un besoin saisonnier ou occasionnel, suivant les propres termes des articles 2 et 6 du décret précité. De même, il va sans dire que ces réflexions ne se portent pas sur les problématiques de la Fonction publique territoriale.31

Une fois notre champ d'analyses et de réflexions précisé, d'ores, nous présentons en premier lieu la question de la complexité du problème de la qualification des fonctionnaires (A) et en second lieu le problème de l'attractivité de la Fonction publique et celui corrélatif de la fuite des cadres (B). Néanmoins, les deux problèmes sont liés ; c'est comme le dilemme de l'oeuf et de la poule. A titre indicatif, on peut se demander à bon droit si l'un n'engendre pas l'autre et vice versa.

30 Donné au Palais national, à Port-au-Prince, le 17 mai 2005, An 202ème de l'Indépendance, par Me Boniface Alexandre, sur le rapport du Premier Ministre et après délibération en Conseil des Ministres.

31 Le Statut général de la Fonction publique territoriale fait l'objet d'un autre décret adopté au Palais national, à Port-au-Prince, le 1er février 2006, An 203ème de l'Indépendance, par Me Boniface Alexandre, Président Provisoire de la République, sur le rapport du Ministre de l'intérieur et après délibération en Conseil des Ministres.

30

A. La complexité du problème du « faible » niveau de qualification des fonctionnaires

Aux termes de l'article 236-2 de la Constitution haïtienne du 29 mars 1987, actuellement en vigueur en Haïti, il est spécifié, expresis verbis : « La Fonction publique est une carrière. Aucun fonctionnaire ne peut être engagé que par voie de concours ou autres conditions prescrites par la Constitution et par la loi... ».

Pour sa part, le décret portant révision du Statut général de la Fonction publique32, précisant les conditions d'accès à la Fonction publique, dispose, respectivement, en ses articles 50, 51 et 52 : « Le recrutement vise la sélection sur concours des candidats à la Fonction publique apte à exercer certaines fonctions. » ; « Les concours dans la Fonction publique peuvent être internes ou externes. Ils sont organisés soit sur épreuve, soit sur titre, selon la nature des emplois à pourvoir. » ; « Les modalités de concours dans la Fonction publique sont établies par arrêté du Premier Ministre ».

Par voie de conséquence, il est clair que les conditions d'accès à la Fonction publique sont juridiquement encadrées en Haïti. De plus, le professeur Enex Jean-Charles rappelle que le concours, comme mode de recrutement des fonctionnaires, « représente une garantie fondamentale du principe d'égale admissibilité à la Fonction publique. »33.

En revanche, entre les prescrits du corpus juridique haïtien relativement à l'accessibilité et au recrutement des fonctionnaires et les pratiques observées au niveau de l'Administration publique, la panne n'est pas toujours franchie.

D'abord, dans un pays où la proportion des personnes ayant atteint le niveau universitaire n'est que de 1.1%34, il parait évident que les ressources humaines qualifiées soient, en principe, rares. Qui plus est, le niveau de la quasi-totalité des universités en Haïti ne dépasse

32 Op. cit.

33 ENEX, Jean-Charles. Manuel de droit administratif haïtien, page 299.

34 Suivant les données statistiques de l'Institut haïtien de statistique et d'informatique (IHSI), l'équivalent de l'INSEE (Institut national de la statistique et des études économiques) en France. Ces données sont mises à jour sur le site web de l'IHSI en date du 14 aoüt 2011 et la page est consultée à la même date.

Cf : http://www.ihsi.ht/rgph resultat ensemble education.htm#

pas la licence générale35, mis à part le fait que, de surcroît, les cursus offerts par les différentes facultés ne sont pas toujours actualisés et adaptés aux nouveaux besoins du marché et de la société en général.

Ensuite, ajouter à tout cela, les pratiques de copinage, pantouflage, militantisme, trafic d'influence et clientélisme au niveau de l'Administration publique en Haïti. Dans ces conditions, c'est le cas de le dire, le problème de la qualification des fonctionnaires est, pour le moins, complexe. Certes, il existe une Ecole nationale d'Administration financière (ENAF) dont la réouverture n'a eu lieu qu'en octobre 2005 et qui offre surtout un programme de formation en deux ans de technicien en finances publiques. Néanmoins, cette école dont la pauvreté du cursus parait évidente et gérée par le Ministère de l'économie et des finances est amplement insuffisante pour fournir à l'Administration publique des cadres qualifiés avec une formation adaptée en vue de sa performance malgré le peu de moyens ; ce qui requiert un fort niveau d'inventivité36.

De plus, vu la complexité de ce problème, telle que exposée plus haut, même une grande école de la trempe de l'ENA (Ecole nationale d'Administration) en France ou encore de l'ENAP (Ecole nationale d'Administration publique) au Canada ne suffirait pas en Haïti, semble-t-il, pour faire face à cette crise chronique de manque de qualification des agents publics permanents de l'Etat, puisque le problème est aussi lié à de vieilles pratiques sociopolitiques et administratives.

En effet, le RNDDH (Réseau national de défense des droits humains), dans un rapport publié en juillet 2011, intitulé : « 37Haïti Corruption : Le RNDDH appelle à la fin du

35 Bac+4 et mémoire de licence avec soutenance ; ce qui correspond, en grosso modo, au Master 1 français dans le système LMD.

36 C'est d'ailleurs dans cette optique qu'un programme de maîtrise en Administration publique, baptisé : « Projet d'appui au renforcement de la gestion publique du pays (PARGEP) a été inauguré, sous le Gouvernement de Madame Michèle Duvivier Pierre-Louis, au campus universitaire de l'Institut de la francophonie pour la gestion de la caraïbe (IFGCar) avec l'appui du Gouvernement canadien, via l'ENAP du Québec, en juin 2009.

La note est publiée sur le site web du journal Le Nouvelliste en date du 03 juin 2009. La page est consultée le 10 août 2011.

Cf : http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=70909&PubDate=2009-06-11

37 Curieusement, tous les parlementaires dont les noms ont été cités se sont présentés aux récentes élections sous la bannière de la plateforme Inite (Unité, en français) de l'ancien président René Préval et du sénateur Joseph Lambert. Douze d'entre eux ont été réélus. Or, c'est le Gouvernement sous la présidence de René Préval qui est encore sur place, gérant les affaires courantes, vu que les deux Premiers ministres choisis par le nouveau Président de la République, Michel Joseph Martelly, n'ont pas été ratifiés par le Parlement.

32

gaspillage et du copinage au sein de l'Administration publique »38, dénonce, entre autres, la constance du copinage comme caractéristique de l'Administration publique haïtienne. Le cas dénoncé ici est celui de parlementaires qui seraient gracieusement rémunérés par le Ministère de l'intérieur en qualité de « consultants », alors que suivant les prescrits de la Constitution haïtienne de 1987, le mandat parlementaire est incompatible avec toute autre fonction rétribuée par l'Etat, nonobstant celle d'enseignant.39

D'aucuns pourraient toujours arguer qu'il s'agit ici d'un cas touchant des contractuels. Cependant, nous devons faire remarquer que ces genres de situation ne sont pas étrangers à la Fonction publique proprement dite, car les informations sur les places vacantes, donc sur les concours en vue d'accéder à la Fonction publique ne font pas toujours l'objet de publication. Cette situation a pour effet de limiter ou de relativiser le but recherché dans l'institution du concours, par la Constitution, comme mode principal d'accession à la Fonction publique.

Cet ensemble, ajouté au problème de l'attractivité de la Fonction publique et celui de la fuite des cadres (B), explique, en partie, la complexité de la carence de qualification dans la Fonction publique.

B. Le problème de la « faiblesse ~ de l'attractivité de la Fonction publique et la fuite des cadres

Dans un monde de plus en plus globalisé, à l'ère de l'économie du savoir, les ressources humaines les mieux instruites, de par le monde, sont recherchées, parce que, entre autres, garantes de l'avantage compétitif. D'où, l'importance des leviers, la qualité de l'emploi par exemple, visant à renforcer l'attractivité des entreprises productrices de biens et services. Ainsi, le secteur public rentre-t-il en concurrence avec le secteur privé en vue de garder ou d'attirer les ressources humaines les mieux qualifiées et compétentes en vue de la performance.

Cette information a été recueillie sur le site web du journal Le Nouvelliste. Sa substance a été publiée en date du 29 juillet 2011 et nous avons consulté la page le 10 août 2011.

Cf : http://www.lenouvelliste.com/articles.print/1/95458

38 Cf : http://www.rnddh.org/IMG/pdf/RNDDH_CORRUPTION_1.pdf

Pages 1 et suivants. Le lien est consulté le 10 août 2011.

39 Cf : article 129-1 de la Constitution.

Par contre, ce qui fausse la concurrence dans ce domaine entre le public et le privé c'est le manque de moyens financiers observé dans le camp du public, surtout dans les pays en voie de développement. Puisque l'Etat, en principe, n'est pas animé par l'idéal du profit, comme le sont les entreprises du secteur privé, il fait face souvent à de sérieuses difficultés de pouvoir toujours offrir la même qualité de l'emploi que le secteur privé pourrait bien offrir pour se payer les meilleurs cadres D'où l'attrait du secteur privé par rapport au secteur public.

C'est dans cette perspective qu'en Haïti, on assiste désespérément à un exode massif des cerveaux vers l'étranger, comme le témoigne un rapport de la Banque Mondiale révélant que huit Haïtiens et Jamaïcains sur dix (8/10) détenant un diplôme universitaire vivent hors de leur pays.40 Cette migration internationale du capital humain qualifié d'Haïti ne laisse certainement pas intacte la Fonction publique, à telle enseigne que la Banque interaméricaine de développement (BID) a approuvé dix millions (10) de dollars US à Haïti pour un programme destiné à attirer les cadres de la Diaspora vers le secteur public. C'est une « action visant à lutter contre la fuite des cerveaux, à développer la Fonction publique et à améliorer l'efficacité du Gouvernement », suivant les propres termes du communiqué de presse de la BID.41

Par ailleurs, le secteur privé haïtien, les organisations internationales (O.I.) et non gouvernementales (ONG) ravissent à la Fonction publique bien des cadres qualifiés42.

En effet, selon les résultats de l'Enquête Diagnostique sur la Gouvernance43: « Seuls 5.2% des agents du secteur public ont estimé que leur salaire était suffisant ou très suffisant ».

40 Information trouvée dans un communiqué publié sur le site web de la Banque Mondiale le 25 octobre 2005. La page est consultée le 10 août 2011. Cf : http://go.worldbank.org/7J357LTEE0

Le rapport s'intitule : « Migration internationale, rapatriement de fonds et fuite des cerveaux » et publié en 2005.

41 Cf : Site web de la Banque interaméricaine de développement. Communiqué de presse publié le 13 décembre 2006. La page est consultée le 10 août 2011.

http://www.iadb.org/fr/infos/communiques-de-presse/2006-12-13/la-bid-approuve-10-millions-a-haiti-pour-unprogramme-destine-a-attirer-les-cadres-de-la-diaspora-vers-le-secteur-public,3527.html

42 Suivant un rapport conjoint de l'Organisation de Coopération et de Développement économiques (OCDE) et de l'Agence canadienne de Développement international (ACDI), intitulé : « Suivi des principes d'engagement international dans les Etats fragiles et les institutions précaires », les deux acteurs partagent leur appréhension par rapport aux écarts importants de rémunération entre les salaires de la Fonction publique et ceux des acteurs internationaux. Ils ont pu constater que cela entraine une fuite des cerveaux vers les agences internationales.

Cf : Le dit rapport est disponible sur le site web de l'OCDE sur le lien suivant : http://www.oecd.org/dataoecd/39/7/44654672.pdf

Le rapport est publié en 2010 ; page 9. Cette page est consultée le 10 août 2011.

34

Les doléances spécifiques concernent surtout le faible niveau de salaire, les retards de salaire et les maigres avantages sociaux. Comment alors, dans une telle situation, l'Etat, peut-il arriver à fidéliser ses Fonctionnaires afin de les garder au service de l'intérêt général ?

Si les Fonctionnaires qui sont censés déjà au service de l'Etat ne sont pas satisfaits de leurs conditions de travail et accusent une certaine proportion à laisser la Fonction publique à la premiere occasion, comment alors s'attendre à ce que les cadres les mieux qualifiés du secteur privé ou de la diaspora ou encore les jeunes frais émoulus de l'Université se bousculent pour accéder à cette Fonction publique ?

§ 2. La conception de « Fonctionnaire-poids » entretenue par le secteur public et la quasi-absence du management par objectifs

Suivant l'architecture budgétaire adoptée par Haïti, le budget national est divisé en budget de fonctionnement et budget d'investissement. Pour l'exercice fiscal 2008-2009, le budget de fonctionnement de l'Etat haïtien s'élève à 100 milliards de gourdes (1€=60G, avril 2008), alors que les recettes de l'Etat ne pouvait pas atteindre 40 milliards de gourdes. Donc le manque à gagner d'environ 60 milliards de gourdes est apporté par la Communauté internationale et représente à peu près 60% du budget de fonctionnement. Quant au budget d'investissement, n'en parlons même pas ; il dépend quasiment à 100% de l'aide externe.44

Dans ce contexte de raréfaction des ressources financières et de telle dépendance vis-à-vis de l'aide et des acteurs internationaux, la maitrise de la masse salariale au niveau du secteur public haïtien devient un enjeu de taille. Ainsi, sous la pression des acteurs internationaux, particulièrement les institutions financières internationales, la politique salariale dans la Fonction publique est pensée dans une perspective d'austérité.

43 Le rapport final, publié en janvier 2007, s'intitule : « Gouvernance et Corruption en Haïti ». La collecte et l'analyse des données sont assurées par le Bureau de Recherche en Informatique et en Développement économique et social (BRIDES). L'étude est commandée par l'Unité de Lutte contre la Corruption (ULCC) avec l'assistance technique de l'Institut de la Banque Mondiale (IBM). Rapport, page 73.

Cf : Ledit rapport est disponible sur le lien suivant : http://siteresources.worldbank.org/INTHAITI/Resources/RAPPORT.pdf

44 Les chiffres sont tirés du site officiel de « Afriquechos », dans une note publiée le 12 février 2011 par Ferdinand Mayega, intitulée : « Haïti : La diaspora propose un plan de développement durable ». http://www.afriquechos.ch/spip.php?article5052 . La page est consultée le 1er Août 2011.

Qui plus est, cette situation génère la construction de tout un discours sur la nécessité de rationaliser les dépenses publiques. L'un des pans de cette politique de rationalisation consiste, sous l'incitation des acteurs de l'extérieur, en l'adoption de politiques de réduction d'effectif dans la Fonction publique. D'où la conception de « Fonctionnaire-poids » développée par le secteur public haïtien.

Nous pouvons essayer de définir notre notion de « Fonctionnaire-poids » comme « le fait pour l'Agent public permanent de l'Etat d'être perçu, par le secteur public lui-même et sur la suggestion des acteurs financiers internationaux, comme un fardeau pour le trésor public dans un contexte raréfaction des ressources financières, au lieu d'être vu comme une ressource et qui pourrait potentiellement pourtant, par sa créativité et à condition d'être qualifié, compétent et valorisé, être le socle de l'optimisation des maigres ressources disponibles dans la perspective de l'efficience de l'action publique. »

A ce moment, l'Administration publique disposant en principe de trois (3) catégories de ressources, à savoir :

a) Les ressources juridiques

b) Les ressources matérielles

c) Les ressources humaines

ne tient, toutes proportions gardées, presque plus. Le volet « ressources humaines » est transformé en fardeau financier. L'accent est mis sur le coüt qu'il représente pour le trésor public, sans même pouvoir se rendre compte effectivement du rapport coüt/apport, car il n'est pas valorisé et son est beaucoup plus qualitatif que quantitatif.

Une telle conception ou représentation des Fonctionnaires par le secteur public luimême, sur la suggestion des acteurs financiers internationaux, empêche d'abord la valorisation des Fonctionnaires dans une dynamique de la recherche de la meilleure qualité de service public possible au meilleur coût. Ensuite, le Fonctionnaire à son tour devient démotivé. D'où des insuffisances de rendement des Fonctionnaires.

En effet, cette suggestion des acteurs financiers internationaux en période de crise et surtout de dépendance financière participe aussi d'une certaine démarche de

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reconceptualisation de l'Etat à partir d'un sous-bassement théorique néolibéral. Donc c'est loin d'être neutre.

Par ailleurs, depuis particulièrement la décennie des années 1980 marquée par la crise financière mondiale et l'incitation des institutions de Bretton Woods à adopter des mesures d'ajustement structurel, l'Etat haïtien a comme privilégié cette approche du Fonctionnaire. Entre-temps, Haïti est le pays de la région de la Caraïbe ayant le plus faible taux de pression fiscale, soit un taux de 10%.45 Quelle politique publique a été mise place pour contrer les phénomènes d'évasion fiscale et de fraude fiscale ?

Parallèlement, les méthodes de gestion publique en Haïti n'offrent pas les conditions d'un modèle de management par objectifs dans la Fonction publique. D'où la quasi-absence d'indicateurs de performance des politiques publiques mises en oeuvre et donc de l'évaluation de cette performance. Les insuffisances de la Fonction publique et les Fonctionnaires en Haïti participent aussi de cette logique. C'est le cas de dire qu'Haïti reste encore au stade de l'Administration de moyens au sens où il s'agit de gérer des crédits. Le pays n'a pas encore passé à la phase de l'Administration de résultat, au sens où chaque gestionnaire devra atteindre les résultats fixés.46

45 Cf. : Selon un article de Djems Olivier, intitulé : « Le CRI lance le débat sur les obligations fiscales des ONG », publié sur le site web du journal Le nouvelliste en date du 24 mai 2011. La page est consultée le 23 août 2011.

http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=&ArticleID=92862

46 J.M. GORGUE. « La culture du résultat », opere citato, page 3. L'auteur y développe la notion d'Administration de résultat et celle d'Administration de moyens.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams