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Une administration publique performante: un défi pour l'état haà¯tien à  la croisée d'une exigence des citoyens et d'une incitation des acteurs internationaux ? Le cas de la modernisation de la fonction publique

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par Destin JEAN
Université Pierre Mendès-France - Master 2 en Droit public 2011
  

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Chapitre 2

La modernisation de la Fonction publique comme levier de performance de l'S Q)i4istratio4 SXElique

Dans ce chapitre, nous faisons, d'une part, état des tentatives de réformes de la Fonction publique en Haïti depuis la décennie des années 1980 à nos jours tout en essayant d'analyser et de chercher à comprendre la logique guidant lesdites réformes et les éventuelles mutations dans le modèle du management public (section I). Ensuite, nous essayons de dresser un bilan desdites réformes engagées (section II).

Section I

Des tentatives de réforme de la Fonction publique : Vers un nouveau modèle de management public ?

Dans cette section, nous faisons, dans un premier temps, une présentation du cadre juridique et institutionnel de la réforme à travers le temps tout en analysant les mutations observées (§ 1). Dans un second temps, nous analysons les enjeux du processus de réforme de la Fonction publique par rapport à la réforme globale de l'Etat et de la gestion publique (§ 2).

§ 1. Le cadre légal et institutionnel de la réforme : Entre tâtonnements et mutations

Le processus de réforme de la Fonction publique en Haïti ne date pas seulement d'aujourd'hui. Il est certes mené, entre autres, au rythme des crises sociopolitiques et institutionnelles qui jalonnent l'histoire du pays, mais force est quand même de constater que de différentes initiatives dans ce sens peuvent être observées sous presque tous les gouvernements qui se sont succédé depuis au moins la décennie 80. Quand un gouvernement,

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de jure ou de facto, ne prend pas directement des mesures concrètes en vue de la réforme, on relève au moins dans le discours politique qu'il tient la nécessité de cette réforme.

La Commission administrative de 1981, qui avait déjà existé depuis plusieurs années, selon le professeur Enex JEAN-CHARLES47, a été réorganisée par le décret du 08 avril 1981. Ce fut un organe consultatif du Pouvoir Exécutif en matière de réforme administrative et sa fonction fondamentale a été, entre autres, de préparer des programmes de réforme portant sur la réorganisation, l'adaptation de l'Administration publique et l'organisation de la Fonction publique.

Les productions de cette commission chargée de préparer la réforme au début des années 80's ont surtout permis un avancement significatif, entre autres, au niveau de l'adaptation et de la précision du cadre légal de l'organisation et du fonctionnement de l'Administration publique et de la Fonction publique. Pour ainsi dire, c'est suite aux travaux de ladite commission qu'ont été adoptées la loi du 06 septembre 1982 définissant l'Administration publique nationale, la loi du 19 septembre 1982 établissant le statut général des agents de la Fonction publique et le décret du 04 novembre 1983 portant organisation et fonctionnement de la Cour supérieure des Comptes et du Contentieux administratif (CSC/CA)48. Sauf leurs dispositions contraires à la Constitution du 29 mars 1987 qui leur est postérieure et supérieure dans la hiérarchie des normes juridiques, ces instruments juridiques demeuraient jusqu'à tout récemment encore en vigueur et servaient évidemment de guides à l'Administration publique et à la Fonction publique.

Néanmoins, mise à part cette avancée significative au niveau du corpus juridique à proprement parler, nous n'avons pas pu déceler des actions concretes d'opérationnalisation en vue du déclenchement d'une réforme effective de la Fonction publique.

47 JEAN-CHARLES, Enex. Manuel de droit administratif haïtien, page 290.

48 Aux termes, respectivement, des articles 200, 200-1 et 200-2 de la Constitution haïtienne de 1987, la CSC/CA :

« .est une juridiction financière, administrative, indépendante et autonome. Elle est chargée du contrôle administratif et juridictionnel des recettes et des dépenses de l'Etat, de la vérification de la comptabilité des entreprises d'Etat ainsi que de celles des collectivités territoriales ».

« ~ connait des litiges mettant en cause l'Etat et les collectivités territoriales, l'Administration et les fonctionnaires publics, les services publics et les administrés ».

« Ses décisions ne sont susceptibles d'aucun recours, sauf le pourvoi en cassation ».

Donc, il va sans dire que c'est une institution qui allait être consacrée par la Constitution de 1987.

Par ailleurs, le 07 février 1986, suite à une insurrection populaire, le Président à vie Jean-Claude DUVALIER a dü laisser le pouvoir et prendre le chemin de l'exil. C'est le début du processus de démocratisation de la société haïtienne et de la vie politique en Haïti. C'est aussi l'âge d'or de l'apologie des réformes de toutes sortes au sein de la communauté politique. L'image de l'Etat est complètement dégradée, les citoyens Haïtiens, par différents modes d'expression populaires et différentes formes de l'action collective, montrent clairement leur enthousiasme à vouloir participer dans la vie politique de leur pays. Ils réclament, entre autres, transparence et efficacité dans la gestion de la chose publique.

D'où l'importance de légitimer ou peut-être relégitimer l'Etat en vue de la gouvernabilité du pays. Or, dans ce sens, l'Administration publique c'est l'un des points de rencontre privilégiés entre l'Etat et les citoyens. Par voie de conséquence, la Fonction publique regorgeait de figures de personnalités qui, aux yeux de la population dans cette période d'euphorie collective, symbolisaient le statu quo ante. Ainsi, le peuple, dans sa majorité, réclamait aussi dans cette période, à qui veut l'entendre, la chasse aux « sorcières » au niveau de la Fonction publique.

Les différentes revendications les plus sensées de la population haïtienne ont été prises en compte déjà au niveau de la Constitution de 1987. Par contre, il a fallu attendre l'avènement de la 45ème Législature et l'arrivée au pouvoir du Président Jean-Bertrand ARISTIDE pour l'adoption d'une loi, celle du 07 mars 1991, autorisant le Pouvoir Exécutif à prendre toutes les mesures nécessaires en vue de la réforme effective de l'Administration publique en général, ce en application d'une disposition transitoire de la nouvelle Constitution de 1987 retrouvée à l'article 295 et dont le libellé est le suivant : « Dans les six mois à partir de l'entrée en fonction du premier Président élu sous l'empire de la Constitution de 1987, le Pouvoir Exécutif est autorisé à procéder à toutes les réformes jugées nécessaires dans l'Administration publique en général et dans la Magistrature. »

Six mois après l'adoption de ladite loi d'application, le pouvoir en place a été renversé par un putsch militaire. Il a fallu encore attendre le retour au pouvoir du Président de la République déchu, Jean-Bertrand ARISTIDE pour la relance de la réforme au niveau de l'Administration publique en général et la Fonction publique en particulier. Ainsi, dans les années 1994-1995 a-t-on pu assister à la mise en oeuvre de politiques de réduction du nombre

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des Fonctionnaires de l'Etat. Le décret du 28 mars 1995 assouplissant les conditions d'éligibilité à la pension civile de retraite vient, sinon accélérer, du moins mieux encadrer juridiquement cette démarche.

En effet, selon le professeur Enex JEAN-CHARLES, pendant la décennie précédent 1995, « la plupart des réformes entreprises dans la Fonction publique ont visé essentiellement à réduire le nombre de Fonctionnaires49 ». Pour notre part, nous pouvons ajouter que cette tendance se confirme même au-delà des années 95's. Nous en voulons pour preuve au moins la loi du 09 avril 1997 portant sur le départ volontaire et la mise en retraite anticipée, le décret du 21 avril 1998 portant sur le même objet tous deux adoptés en vue de la réforme de la Fonction publique. C'est que pendant toute cette période dite de « retour à l'ordre constitutionnel » et celle qui l'a suivi, la vision de la réforme de la Fonction publique se matérialisait fondamentalement en des programmes d'encouragement au départ volontaire et à la retraite anticipée en vue de réduire la taille de Fonction publique.

Par ailleurs, en décembre 1996, sous le Gouvernement du Premier Ministre Rosny SMARTH, le Président de la République d'Haïti, René PREVAL, a créé par arrêté présidentiel la Commission nationale à la réforme administrative (CNRA) dont l'une des missions essentielles « est la réalisation d'un diagnostic complet de l'Administration et de la Fonction publique et d'en faire des propositions de réforme.50 »

En 2001, le changement de gouvernement a provoqué une discontinuité des travaux de ladite commission. Néanmoins une cellule de travail a été créée au sein de la Primature, le Bureau du Premier Ministre en Haïti, en vue d'assurer la consolidation des acquis et sauvegarder les études et propositions faites par la CNRA. Selon le Bureau du PNUD en Haïti, « les tentatives de mise en oeuvre des propositions ont toutes échouées 51». Ainsi, durant l'année 2003, les études et propositions de la CNRA ont été revues et soumises à nouveau au Pouvoir Exécutif via le projet « Modernisation de l'Etat et Décentralisation » avec l'aide du PNUD.

49 Manuel de droit administratif haïtien, op. cit., page 292.

50 Assistance préparatoire à la réforme administrative et à la décentralisation 2007-2008, document préparé par le Bureau du PNUD en Haïti, signé en date du 16 juillet 2007 par Anne-Marie CLUCKERS, Directeur du Bureau.

51 Op. cit. page 5.

Vu les évènements de turbulence politiques de l'époque, cette démarche n'a pas eu le temps de produire ses effets. Donc, suite à la chute du Président de la République Jean-Bertrand ARISTIDE, le Gouvernement de transition, ayant à sa tête le Premier Ministre Gérard LATORTUE de concert avec le Président provisoire de la République, en l'occurrence Me Boniface ALEXANDRE, tablant sur les travaux de la CNRA, a adopté un ensemble de décrets donnant ainsi un nouveau cadre légal à la réforme administrative dont le décret du 17 mai 2005 portant organisation de l'Administration centrale de l'Etat et celui adopté à la même date portant révision du Statut général de la Fonction publique. Ce dernier offre un nouveau cadre statutaire à tous les Fonctionnaires de l'Etat et reflète, entre autres, la politique de l'Etat en ce qui concerne la gestion des agents publics permanents de l'Etat en application de la Constitution de 1987 qui institue une Fonction publique sur le modèle de la carrière.

Après le retour à la normalité constitutionnelle qui coïncidait avec l'élection d'un Président de la République élu, René PREVAL, et l'avènement d'une nouvelle Législature au Parlement, la 48ème, la question de la réforme de la Fonction publique revenait encore dans l'agenda institutionnel. En fait, selon le gouvernement d'alors ayant à sa tête le Premier Ministre Jacques Edouard ALEXIS, la réforme de l'Etat, donc nécessairement celle de la Fonction publique, a été au centre des priorités gouvernementales depuis les engagements pris devant la Communauté internationale lors de la Conférence internationale pour le développement économique et social et d'Haïti (CIDESH I) tenue à Port-au-Prince le 25 juillet 2006 et la Conférence de suivi de Madrid (CIDESH II) tenue en novembre de la même année.

En réalité, deux institutions clés ont été créées en février 2007 en vue de cette réforme de l'Administration et de la Fonction publique. Il s'agit d'une part, du Conseil supérieur de l'Administration et de la Fonction publique (CSAFP), responsable du pilotage stratégique de la modernisation du service public et de la Fonction publique et d'autre part, l'Office de Management et des Ressources humaines (OMRH), chargé du pilotage opérationnel des activités de la réforme.

Selon le Bureau du PNUD en Haïti : « La création de l'OMRH marque la fin des travaux directement effectués par le PNUD pour soumission à la Primature comme ce fut le

cas depuis 2003 ».52 Par voie de conséquence, Le document intitulé : « Assistance préparatoire à la Réforme administrative et à la Décentralisation », préparé par le Bureau du PNUD en Haïti, contient le plan d'action du PNUD pour l'année 2007-2008. Il fait suite « aux différentes actions du PNUD dans ce domaine depuis 1995 et vient, entre autres, en appui aux activités de l'OMRH, créé pour la mise en oeuvre de la réforme ».53 En grosso modo, son objectif est de soutenir les différentes initiatives du Gouvernement en la matière, notamment le renforcement des capacités de l'OMRH à conduire la réforme.

A l'heure actuelle, le document de référence de la réforme administrative en Haïti demeure le « Programme-cadre de réforme de l'Etat 2007-2012 -- Modernisation administrative et décentralisation54 » dont l'un des six (6) volets est réservé à la réforme de la Fonction publique. L'Etat haïtien reconnait à la page 27 du document que « la modernisation des structures administratives ne se conçoit pas sans celles de la Fonction publique, puisque la ressource humaine se situe au coeur mrme des processus de changements organisationnels. Autant dire qu'il n'y-aura pas d'Administration publique célère, efficace, performante, sans une Fonction publique de qualité. »

Or, à la page 15 du document en question le Gouvernement haïtien d'alors a aussi fait le constat d'une « Fonction publique extrêmement fragilisée et faiblement tournée vers la modernité ». Le problème le plus criant identifié c'est la gestion des ressources humaines, ce qui s'explique par des faiblesses au niveau du modele de management en vigueur. D'où un obstacle majeur à une possible Administration publique performante.

Tenant compte de tout ce qui précède, nous pouvons alors affirmer que le cadre légal et institutionnel du processus de réforme de la Fonction publique en Haïti est tributaire non pas nécessairement des aléas politiques liés à l'alternance politique, ce qui serait à la limite d'une certaine normalité dans un système démocratique à pluralisme idéologique et

52 Op. cit., page 8.

53 Ibidem, page 2.

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54 Ce document a été élaboré et publié par le Gouvernement haïtien ayant à sa tête le Premier Ministre Jacques Edouard ALEXIS avec l'appui technique et financier du PNUD à travers le projet d'assistance préparatoire à la réforme administrative et à la décentralisation (APRAD). Toutefois, suite au séisme du 12 janvier 2010 en Haïti, le Gouvernement haïtien opte pour la relance dudit programme, mais après adaptation. Cette position du Gouvernement haïtien d'alors est tirée dans le document préparé par l'Etat haïtien, intitulé : « Plan d'action pour le relèvement et le développement d'Haïti -- Les grands chantiers pour l'avenir », à la page 43, présenté à la Communauté internationale en mars 2010, soit deux mois après le séisme.

fonctionnant à plein régime ; mais plutôt des crises politiques et institutionnelles à répétition provoquées et/ou expliquées par l'instabilité politique qui caractérise la vie politique en Haïti depuis, pour la période contemporaine, le départ en exil du Président de la République à vie Jean-Claude DUVALIER et l'entrée du pays dans la voie de la démocratisation.

Cette influence « négative » des aléas politiques sur le processus de réforme de la Fonction publique engagé depuis fort longtemps déjà en Haïti fait que l'on soit aujourd'hui encore au stade de tâtonnement en termes d'une vision ou d'une philosophie claire et commune de cette réforme.

Ajouter à cela, nous pouvons aussi déceler un problème de lisibilité de l'action publique dans le domaine de la réforme de la Fonction publique. Cette carence de lisibilité est liée, entre autres, au fait que l'Etat haïtien ainsi que les partenaires internationaux intervenant dans ce processus de réforme en Haïti procèdent toujours par package. D'où, en dépit de la reconnaissance, par l'Etat haïtien comme il a été indiqué plus haut, de l'importance de la réforme de la Fonction publique comme une condition sine qua non d'une Administration publique performante, les travaux, actions concretes et études y afférent s'apparentent à des actes de saupoudrage tant le processus est noyé dans le processus de la réforme globale du secteur public en Haïti.

§2. Le processus de réforme de la Fonction publique noyé dans le processus de la réforme globale du secteur public ?

La réforme du secteur public haïtien est un vaste chantier. C'est aussi l'un des domaines le plus privilégié de la politique extérieure de la République d'Haïti depuis plusieurs décennies déjà. Donc, il est rare de trouver une action ou un projet de coopération bilatérale ou multilatérale qui fait obstruction de cette question de réforme qui fait partie d'ailleurs du vocabulaire quotidien des autorités politiques haïtiennes et des acteurs internationaux engagés en Haïti.

En outre, la majeure partie de la population haïtienne, exaspérée et déçue dans sa quête d'un changement du modèle de la gouvernance politique ne cesse de continuer quand même à

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réclamer aussi la réforme de l'Etat. D'où, nous pouvons nous demander à bon droit si à la fois les citoyens, l'Etat et la Communauté internationale ont la même représentation de cette réforme. En d'autres termes, ces trois (3) groupes d'acteurs, mettent-ils la même signification derrière le mot réforme qui s'apparente de plus en plus dans l'opinion publique à un simple slogan tant il a été utilisé, voire galvaudé, sans nécessairement produire les effets escomptés ?

Les tentatives de réforme de l'Etat en Haïti depuis la décennie 80, sont initiées dans la perspective des programmes d'ajustement structurel encouragés, voire incités principalement par les institutions de Bretton Woods, en l'occurrence le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale ; dans l'optique de la bonne gouvernance ou encore de la gouvernance démocratique appuyée par la Banque interaméricaine de développement (BID) et le Programme des Nations-Unies pour le Développement (PNUD).

De plus, d'autres partenaires extérieurs, dans le cadre de la coopération bilatérale, exigent des remaniements au niveau du secteur public en contrepartie de dons ou comme conditionnalité de l'aide au développement. En addition aux apports financiers, certaines fois, des institutions internationales et d'autres partenaires extérieurs interviennent plus directement sous forme d'assistance ou d'appui technique par le biais des études, voire de placement d'experts internationaux dans des ministères comme c'est souvent le cas du Ministère de l'économie et des Finances ou celui de la Planification et de la Coopération externe, par exemple.

En réalité, Haïti reste encore au stade de démocratie émergente, c'est un pays en transition démocratique et dont tous les indicateurs économiques et de développement humain montrent bien qu'il est l'un des Etats les plus pauvres au monde et le plus pauvre de l'hémisphere occidental55. Donc, il s'agit d'un pays où les problèmes politiques et socioéconomiques sont perceptibles même par l'homme de la rue. On ne sait pas nécessairement s'il s'agit d'un pays à reconstruire, à construire ou à refonder tant les questions de ses orientations stratégiques dans le domaine du développement économique, du développement humain, de la politique extérieure, de la qualité des rapports entre les différentes classes sociales, voire celui de la réforme de l'Etat n'ont jamais eu le temps d'être

55 Dans le Rapport sur le Développement humain 2010 du PNUD, Haïti est classée 145ème sur 169 pays. Cf. http://www.undp.org/publications/hdr2010/fr/HDR_2010_FR_Summary.pdf

Publié le 04 novembre 2010 et consulté le 18 août 2011.

discutées par les différents acteurs représentatifs des multiples secteurs vitaux du pays en vue d'essayer de dégager un consensus sur un minimum vital en vue du décollage du pays.

Dans ces conditions, il va sans dire que le pays est « malade » dans toutes ses composantes. Il suffit de vouloir s'attaquer à un problème de la société haïtienne pour se rendre compte de ses multiples connexions avec d'autres problèmes existants, tant ils sont nombreux et interconnectés. D'où, ce qui amène certains à surnommer Haïti « le pays à problèmes » ou encore une «entité chaotique ingouvernable56 ».

Par voie de conséquence, d'un côté, d'aucuns pourraient faire valoir que cette transversalité ou interconnexion des problèmes commanderait qu'ils soient tous attaqués en même temps pour pouvoir espérer des solutions durables. D'un autre côté, d'autres intervenants pourraient invoquer, toutes proportions gardées et en sens inverse, la théorie des dominos pour expliquer que si l'on résout certains problèmes dans quelques domaines de la vie nationale au niveau de la société haïtienne cela aura certainement des externalités positives sur d'autres secteurs. Par conséquent, d'autres problèmes pourraient aussi disparaitre sous l'effet domino, au sens positif du terme.

Dans l'un ou l'autre cas, on est bel et bien face à des acteurs en quête de la méthode ou de l'approche la plus pertinente en vue d'une décision « rationnelle » qui aura permis de résoudre des problèmes qui émergent ou ayant émergé dans la communauté politique.

En l'espèce, pour le cas de la réforme du secteur public en Haïti, nous ne pouvons pas oser affirmer, avec véhémence et sans risque de nous tromper, que tel modèle a été choisi plutôt que tel autre. Comme c'est d'ailleurs le cas dans presque tous les pays en voie de développement et aussi dépendants qu'Haïti financièrement, les acteurs internationaux sont toujours impliqués à fond dans les processus de réforme engagés en Haïti. Ainsi, étant donné

56 Dans un article publié dans le journal « Le Monde », intitulé : « Haïti ou la permanence du malheur » paru dans l'édition du 29 janvier 2003, en prélude du Bicentenaire de l'Indépendance de la République d'Haïti, Jean-Michel Caroit reprend les propos de l'historien haïtien, Michel Soukar qui dit constater qu'Haïti est en passe de se convertir en « entité chaotique ingouvernable ».

En réalité, nous doutons fort que l'expression soit une invention de Michel Soukar, car depuis plus d'une décennie on pouvait entendre cette expression sur les lèvres de plus d'un en Haïti. Néanmoins, j'avoue n'avoir pas pu trouver son auteur initial.

L'article en entier a été repris sur le site de « Haïti Democracy Project ».

Cf. http://www.haitipolicy.org/content/554.htm?PHPSESSID=6321cf5e7fe78

La page est consultée le 18 août 2011.

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que les mêmes acteurs internationaux changent-ils de méthodes ou d'approches suivant le temps et les aléas géopolitiques et économiques ; considérant que les partenaires extérieurs d'Haïti ne sont pas toujours les mêmes ; étant donné qu'en dernier lieu les orientations politiques et idéologiques des différents gouvernements qui se sont lancés dans le processus de la réforme du secteur public en Haïti ne sont non pas les mêmes en tout temps, l'Etat haïtien n'est jamais sür de pouvoir garder, voire contrôler une ligne conceptuelle et directrice de la réforme sur le long terme.

Par ailleurs, vu que le pays est au bord de la « banqueroute57 », il reçoit d'aides ou de promesses de prêts, de dons venant de partout et parfois de toutes formes. Puisque ces prêts, aides ou dons viennent de multiples acteurs internationaux ayant des intérêts qui ne se convergent pas nécessairement et visent généralement des réformes dans le secteur public ou encore sont conditionnés par la mise en oeuvre concomitante de telles réformes, il devient alors difficile de trouver une cohérence, voire une rationalité certaine dans le choix des modèles ou approches de cette réforme.

En revanche, à défaut de cette cohérence dont nous parlons plus haut, nous pouvons quand même observer depuis plusieurs décennies que maints programmes, études ou projets adoptés dans le cadre du processus de la réforme du secteur public en Haïti, comportent presque toujours une multitude de volets dont celui de la modernisation de la Fonction publique. Donc, la question de la modernisation ou la réforme de la Fonction publique n'est pas une problématique traitée distinctement par les différents acteurs représentatifs de différents secteurs vitaux de la nationale en coordination avec les partenaires internationaux dans la perspective d'une Administration performante visant la satisfaction ultime des usagers

57 Certains estiment qu'Haïti est déjà dans l'abîme. C'est le cas de Castro DESROCHES, dans un article intitulé : « Michel Martelly ou le triomphe de la médiocratie », qui estime : «Haïti est capable du meilleur et du pire. Ayant atteint le fond de l'abîme, elle est condamné à rebondir. Le sursaut national contre l'inacceptable est la seule voie de salut ».

L'article est publié le jeudi 07 avril 2011 sur le site web de « Haïti Nation ». Il est consulté le 15 août de la même année et disponible à partir du lien suivant :

http://haiti-nation.com/index.php?option=com_content&view=article&id=773:michel-martelly-ou-le-triomphede-la-mediocratie&catid=35:libre-tribune&Itemid=78

Un autre observateur fait remarquer que « le problème fondamental avec l'Etat marron autoritaire faible haïtien est que l'abîme qu'il crée se creuse quotidiennement ». Cette phrase est tirée d'un article de Leslie Péan, intitulé : « Haïti : La crise du choléra n'est pas un coup de tonnerre dans un ciel bleu », publié sur le site de Alter Presse, en date du 28 octobre 2010. Il est consulté le 15 aoüt 2011 et disponible à partir de l'URL suivant : http://www.alterpresse.org/spip.php?article10193

des services publics. Ladite question fait quasiment toujours partie d'un grand package mis en branle dans le processus de la réforme.

Le fait qu'il en soit ainsi, les différents acteurs nationaux et internationaux impliqués dans le processus de cette réforme, ne diluent-ils pas la problématique de la réforme de la Fonction publique que l'Etat haïtien reconnait même être au coeur, sinon l'essence d'une Administration publique haïtienne performante ? L'Etat haïtien, peut-il avoir les moyens de sa politique en s'engageant dans des réformes à la limite « fourre-tout » ? Ne serait-il pas plus aisé de définir un nouveau modèle cohérent de management public au niveau de la Fonction publique de l'Etat haïtien en vue d'une Administration publique performante à partir d'une approche systémique pour éviter des actions disparates, mais aussi plus ciblée permettant d'aborder la question de la Fonction publique dans ses tenants et aboutissants ?

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams