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La responsabilité de protéger au regard de la crise libyenne

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par Hippolyte LUABEYA Pacifique
Université de Kinshasa RDC - Licence 2010
  

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SECTION 2. LA RESPONSABILITE DE REAGIR

« Lorsque survient un génocide, lorsque le nettoyage ethnique est perpétré quelque part dans le monde et que nous restons sans rien faire, cela nous diminue. Et je crois que nous devons considérer qu'il en va de nos intérêts, de notre intérêt national, d'intervenir là où c'est possible 131». Telle est l'idée clé qui doit motiver la réaction de la communauté internationale lorsque la prévention des conflits est mise en mal.

Il s'agit de réagir devant des situations où la protection des êtres humains est une impérieuse nécessité, en utilisant des mesures appropriées pouvant prendre la forme de mesures coercitives telles que des sanctions et des poursuites internationales et, dans les cas extrêmes, en ayant recours à l'intervention militaire.

130 COLAVITTI Romélien, Op-cit, p.40

131 OBAMA Barack, dans un discours prononcé en tant que candidat à l'élection présidentielle, en 2008

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Point central de la responsabilité de protéger, la dimension réactive impliquerait la reconnaissance d'un droit d'intervention armée dans l'hypothèse où un État ne se conformerait pas à son obligation de protection132.

Mais, s'il faut réagir, dans des cas extrêmes et exceptionnels, de qui doit émaner la décision d'intervenir impliquant une action militaire et quels sont les critères à satisfaire ? (§1) De tous ces critères, quels sont les critères décisifs pouvant permettre de déclencher une action militaire ? (§2)

§1. La décision d'intervenir

De la lecture du rapport sur la responsabilité de protéger de la CIISE, il ressort que quand les mesures de prévention ne parviennent pas à résoudre le problème ou à empêcher que la situation se détériore, et quand un État ne peut pas, ou ne veut pas, redresser la situation, des mesures interventionnistes de la part d'autres membres de la communauté des États dans son ensemble peuvent s'avérer nécessaires. Ces mesures coercitives peuvent être d'ordre politique, économique ou judiciaire et, dans les cas extrêmes (mais seulement dans les cas extrêmes), elles peuvent également comprendre une action militaire. L'un des principes premiers, en matière de réaction comme en matière de prévention, est qu'il faut toujours envisager les mesures les moins intrusives et coercitives avant celles qui le sont plus133.

Il est retenu dans ce rapport que quoiqu'il en soit, même dans les cas extrêmes, le principe de non intervention est la règle par rapport à laquelle toute exception doit être justifiée. Elle souffre, néanmoins, des exceptions limitées pour certains types de situation d'urgence. Du point de vue de la CIISE, le point de vue général était que ces circonstances exceptionnelles devaient être des cas où la violence est si manifestement « attentatoire à la conscience de l'humanité » ou bien qui représentent un danger si évident et immédiat pour la sécurité internationale qu'ils exigent une intervention coercitive d'ordre militaire.

132 COLAVITTI Romélien, Op-cit, p.40

133 CIISE, Op-cit, p.33

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Ainsi, la décision d'intervenir doit répondre à six critères que sont : l'autorité appropriée, la juste cause, la bonne intention, le dernier recours, la proportionnalité des moyens et les perspectives raisonnables. Le rapport de la commission fait un sort à part à la question de l'autorité appropriée et à celle de la juste cause, à côté de ce qu'il qualifie de « critères de précaution », à savoir la bonne intention, le dernier recours, la proportionnalité des moyens et l'existence des perspectives raisonnables, qui ajoutent chacun un élément différent de prudence ou de précaution à l'équation décisionnelle134.

A ce stade, le message fort que lance la commission est que les critères doivent être rigoureux parce que l'action proposée est elle-même extrême : l'intervention militaire n'est pas qu'une simple intrusion dans le territoire d'un État souverain, c'est une intrusion qui donne lieu à l'emploi de la force meurtrière, éventuellement à grande échelle.

De tout temps, la question majeure qui se pose est celle de savoir à qui appartiendrait la prérogative d'intervenir lorsque l'Etat serait défaillant? Deux hypothèses sont à envisager.

Première hypothèse, face à un État défaillant, la responsabilité de protéger les populations civiles de tout risque majeur incomberait à un autre État, qu'il soit frontalier ou non. Dans le cas de la protection des droits des minorités, cette éventualité pourrait être illustrée par une intervention de l'État-parent, en vue d'assurer la protection de ses minorités sur le sol de l'État voisin défaillant. À l'évidence, cette hypothèse ne saurait être aucunement acceptable au regard du droit international positif. En dehors de l'existence de conventions bilatérales préexistantes, l'État-parent ne détient aucune prérogative extraterritoriale fondant sa capacité d'action, en vue d'assurer la protection de ses minorités expatriées135. A fortiori, il apparaît qu'aucun autre État ne saurait s'arroger le droit d'intervenir unilatéralement au nom de la

134 Idem, p.36 ; voir DECAUX Emmanuel, « Légalité et légitimité du recours à la force : De la guerre juste à la responsabilité de protéger », in Droits fondamentaux, n°5, janvier-décembre 2005, p.11

135 KOACS P. cité par COLAVITTI Romélien, Op-cit, p.41

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responsabilité de protéger. Dans le cas contraire, un tel recours contreviendrait alors radicalement au principe de non-ingérence dans les affaires intérieures de l'État, contenu dans l'article 2 §7 de la Charte des Nations unies. Hormis l'hypothèse (d'école?) de l'actio popularis, engagée en raison d'un manquement à une règle impérative du droit international général (commission d'un génocide notamment)136, cette première hypothèse doit être écartée, faute d'existence d'un fondement juridique suffisant.

Seconde hypothèse, le rapport Evans-Sahnoun relève qu'il appartiendrait au Conseil de Sécurité de s'acquitter de cette obligation, et ce, sur le fondement de l'article 24 de la Charte qui précise que les Membres de l'ONU lui confèrent « la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales et reconnaissent qu'en s'acquittant des devoirs que lui impose cette responsabilité le Conseil agit en leur nom ». Dans ce cas, il semblerait douteux, dans l'état du droit positif, d'envisager une autre procédure que celles prévues par les chapitres VII et VIII de la Charte. Il faudrait alors que le Conseil procède expressis verbis à la qualification de la situation comme constituant une menace à la paix, une rupture de la paix ou un acte d'agression et recoure ensuite à l'adoption de mesures conservatoires (article 40), de sanctions (articles 41 et 42) ou à l'habilitation d'un organisme régional de maintien de la paix et de la sécurité afin que celui-ci prenne les mesures adéquates (article 53).

Ainsi, pour déterminer s'il doit autoriser ou approuver l'usage de la force militaire, le Conseil de Sécurité devrait toujours examiner quelles que soient les autres considérations dont il puisse tenir compte, au moins les cinq critères fondamentaux de légitimité suivants :

- Gravité de la menace : la nature, la réalité et la gravité de la menace d'atteinte à la sécurité de l'Etat ou des personnes justifient-elle de prime abord l'usage de la force militaire ? En cas de menaces intérieures, y a-t-il un risque de génocide et

136 Voir sur ce point : Cour internationale de justice (CIJ), Barcelona Traction Light and Power Company, 5 février 1970, Rec. 1970, p. 32. Et une thèse récente : VOEFFRAY, F., L'actio popularis ou la défense de l'intérêt collectif devant les juridictions internationales, Paris, PUF, 2004, 403 p. citée par COLAVITTI Romélien, Op-cit, p.41

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autres massacres, de nettoyage ethnique ou de violations graves du droit international humanitaire, effectif ou imminent ?

- Légitimité du motif : Est-il évident que l'opération militaire envisagée a pour objet principal de stopper ou d'éviter la menace en question, quelles que soient les autres considérations ou motivations en présence ?

- Dernier ressort : toutes les options non militaires pour faire face à la menace ont-elles été examinées et peut-on penser raisonnablement que les autres mesures sont vouées à l'échec ?

- Proportionnalité des moyens : l'ampleur, la durée et l'intensité de l'opération militaire envisagée sont-elles le minimum requis pour faire face à la menace en question ?

- Mise en balance des conséquences : Y a-t-il des chances raisonnables que l'intervention militaire réussisse à faire pièce à la menace en question, les conséquences de l'action ne devant vraisemblablement pas être pires que les conséquences de l'inaction ?137

Quant aux mesures à prendre, le rapport Evans-SAHNOUN s'inspire très largement de l'état actuel du droit, en prescrivant un recours à des sanctions graduelles, impliquant d'abord des mesures non armées (embargo sur les armes, sanctions financières, rupture des relations de coopération militaire, économique ou diplomatiques, etc.)138, puis, « uniquement dans les cas extrêmes »139, l'intervention militaire. Pour ce faire, l'ONU est la seule organisation représentative de la communauté internationale habilitée à déclencher l'intervention humanitaire à l'exclusion de toute autre compétence140.

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