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Le conducteur victime dans le droit des accidents de la circulation

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par Hubert DIE KOUENEYE
Université de Dschang Cameroun - Diplôme d'études approfondies 2006
  

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2- Sanctions de la faute du conducteur

Une fois la faute du conducteur prouvée, celle-ci doit produire des effets énergiques. Ceux-ci s'analysent en termes de sanctions. Le code CIMA dispose en son article 227 que « la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages corporels et matériels qu'il a subis ». Une pareille conséquence a aussi été retenue par la Loi Badinter80(*). Il faudra sans doute que la faute à retenir soit celle qui est en relation causale avec les dommages. La loi dit tout simplement qu'elle a pour effet de  « limiter ou d'exclure » le droit à indemnisation. Cette formule peu précise pourrait donner lieu à des interprétations diverses et à des injustices suivant les tribunaux : quelle faute doit-on considérer, quand la faute doit-elle limiter ou exclure le droit à indemnisation ?

Cette formule de la loi permet donc au juge, compte tenu des circonstances de l'accident, éclairé en ceci par les constats de police et de gendarmerie, d'apprécier la gravité de la faute commise par le conducteur. Les fautes communes obligent le juge à procéder à un partage de responsabilité. Ce partage permet justement d'allouer soit une indemnité modeste pour des fautes d'une importance considérable, soit des indemnités plus consistantes pour des fautes légères ou encore de refuser purement et simplement tout droit à indemnisation en cas de faute suffisamment grave (faute exclusive)81(*). La sanction de la faute du conducteur l'est abstraction faite de celle commise par le ou les conducteurs adverses82(*).

Dans les cas où les conducteurs se rejettent mutuellement les responsabilités, l'on devra procéder à un partage selon des proportions fondées sur le degré de participation de chaque conducteur dans l'accident. Ce fut par exemple le cas dans l'arrêt n° 971/cor du 05 août 2003 de la cour d'appel de Bafoussam83(*).

Dans cette affaire, trois véhicules sont intervenus dans un accident de la circulation et chacun des conducteurs demande réparation de ses dommages aux autres. Le juge a procédé à une répartition dans les proportions de 7/10e pour le premier conducteur (CHIN Boniface) et de 3/10e pour le deuxième (MOGHU Boniface), le troisième conducteur (TCHOFFO Bertin) ayant tout simplement été exclu du droit à indemnisation. Il reste à préciser que ces dispositions sur la faute sont applicables au conducteur quelque soit son âge, le type de véhicule conduit (cyclomotoristes, conducteurs de petits véhicules ou de gros camions semi-remorques) ou le type de dommage invoqué (dommage direct ou dommage par ricochet)84(*). C'est d'ailleurs l'occasion pour le droit des accidents de la circulation de faire chemin avec l'arithmétique, notamment en ce qui concerne le partage de responsabilité.

En droit français, dans une affaire du 14 juin 1997, deux conducteurs se demandaient réciproquement réparation, l'un et l'autre ayant été blessés. Avec le droit traditionnel, en pareil cas, le total des parts de responsabilité et des réparations y afférentes aurait atteint l'unité sans pouvoir la dépasser (A : 100% + B : 0%= 100% ; ou A : 50% + B 50%= 100%)85(*). Mais l'on s'est demandé si le total des parts la responsabilité tel que réparti par le juge devait nécessairement être de 100%. En effet, il peut arriver qu'un conducteur qui n'a pas commis de faute ait droit à une réparation de 100% alors que l'autre conducteur qui n'a commis qu'une faute limitative ait plutôt droit à une réparation de 30% par exemple. La logique de l'appréciation de la faute du conducteur victime voudrait que celle-ci soit opérée en faisant abstraction du comportement de l'autre86(*). Si alors les deux parties ont chacune commis une faute, lesquelles ont contribué à la réalisation de l'accident, à défaut de procéder à des répartitions de moitié, il serait plus facile de leur enlever simplement tout droit à indemnisation. C'est ce que le professeur H. GROUTEL appelle « la logique de la déchéance », laquelle poussée à l'extrême permet de résoudre plus allègrement les cas de conducteurs réciproquement victimes l'un de l'autre 87(*). Pour mieux apprécier les conséquences de la faute commise par un conducteur, La doctrine française a exprimé, assez vivement, le souhait que la Cour de cassation exerce un contrôle de la faute exclusive d'indemnisation88(*); le professeur G. VINEY suggérant même que la Haute juridiction prenne parti sur le critère de la faute exclusive d'indemnisation qui joue aujourd'hui un rôle si important dans le dispositif de la loi pour la réparation des dommages subis par le conducteur et ou par ses proches victimes par ricochet89(*). Avant que le conducteur n'exerce son droit à indemnisation, il pèse sur les parties à l'action en indemnisation un certain nombre d'obligations.

* 80 Cf. art 4 de ladite Loi « la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis ». 

* 81 V. Civ. 2e, 6 mai 1997 et 4 juin 1997, RC. Ass. 1997, Chr. GROUTEL : «...sauf au juge à apprécier, souverainement, si la faute qu'il a commise-le conducteur- et qui a contribué à la réalisation de son préjudice a pour effet de limiter l'indemnisation ou de l'exclure».

* 82 V supra.

* 83 V. CA de Bafoussam, arrêt n°971/cor du 05 août 2003, Aff Min Pub et MOGHU Boniface, CHIN Boniface et TCHOFFO Bertin précitée, inédit. Par cet arrêt, le juge confirme le jugement n°627/cor du 07 mai 2001 du TPI de Mbouda.

* 84 Cf. Y. L. FAIVRE, Droit du dommage corporel, Dalloz, Paris 2000, p 624.

* 85 L'accident s'est produit dans les circonstances suivantes : un cyclomotoriste qui change de direction est heurté par un motocycliste ayant entrepris de le dépasser. La cour d'appel déboute le motocycliste de son droit à réparation en lui reprochant d'avoir entrepris le dépassement alors qu'il voyait le motocycliste et d'avoir voulu forcer le passage à vive allure. La cour d'appel le condamne corrélativement à indemniser le cyclomotoriste. Tout aussi, dans un moyen concernant à la fois sa propre indemnisation et celle de l'autre conducteur, le motocycliste reproche à la cour d'appel de n'avoir pas recherché à savoir si ce dernier pouvait accomplir son changement de direction sans danger.

* 86 V. cass. Crim, 22 mai 1996, Aff. Dame BARSOT, Juris -Data n° 003181, rejet du pourvoi C/ Aix-en -Provence, ch. Corr, 7 octobre 1994. «Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'une collision s'est produite entre l'automobile de Claudette BARSOT et la motocyclette pilotée par Guillaume DUFFAU, qui l'a heurtée l'arrière ; que ce dernier ayant été blessé dans l'accident, l'automobiliste a été poursuivi, notamment pour blessures involontaires et définitivement relaxé de ce chef ; (...). Qu'en effet, il résulte de ce texte seul applicable en cas de collision de véhicules terrestres à moteur, que chaque conducteur, même non fautif est tenu d'indemniser l'autre sauf limitation ou exclusion de cette indemnisation par suite de faute commise par ce dernier ; qu'une telle faute ne s'apprécie qu'en la personne du conducteur auquel on l'oppose».

* 87 V. H. GROUTEL, «Faute du conducteur, la logique extrême», in RC. ASS. Hors série, décembre 1998, PP 34 et 35.

* 88P. JOURDAIN, RTDC 2006, n° 4, p. 783 ; RTDC 2005, n° 4, p. 792 ; G. VINEY : JCP, éd. G, 1998, n° 25, chr. I, 144, p. 1103 ; H. GROUTEL : RCA juillet -août 1998, chr. 17, p. 7 ; E. PERROUX : PA, 27 décembre 2005, n° 257, p. 7 ; G. Kessler : JCP 2006, éd. G, n° 3, II, n° 10004, p. 8, évoquant même « une démission inadmissible de la part des juges ». 

* 89G. Viney et P. Jourdain, Traité de droit civil, les conditions de la responsabilité, L.G.D.J., 3ème éd, p. 1320. Cette mesure s'applique aussi pour l'indemnisation des dommages subis par les victimes non conductrices ayant commis une faute inexcusable et celles victimes des atteintes aux biens.

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