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Le conducteur victime dans le droit des accidents de la circulation

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par Hubert DIE KOUENEYE
Université de Dschang Cameroun - Diplôme d'études approfondies 2006
  

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1- Le fondement du recours du conducteur

La responsabilité du fait personnel est fondée sur l'article 1382 du code civil. La responsabilité du fait des choses dont on se sert est quant à elle prévue à l'article 1384 du même code qui dispose en son alinéa 1er que « l'on est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre ou des choses qu'on a sous sa garde ». Il est acquis que cet article consacre une responsabilité générale du fait d'autrui et des choses, mais un problème se pose quant à la notion de chose que l'on a sous sa garde, la chose pouvant être animée ou inanimée. La garde quant à elle n'implique nécessairement pas l'usage. De plus, tandis que la responsabilité du fait personnel est fondée sur la faute, la responsabilité du fait des choses quant à elle est fondée sur un défaut de contrôle ou de garde170(*).

Au demeurant, s'il est acquis que le conducteur adverse est sanctionné parce qu'il a commis un acte répréhensible, deux hypothèses pourraient valablement justifier l'action de la victime: une responsabilité du fait personnel pour les dommages causés aux tiers avec recours à l'article 1382 du code civil et une responsabilité pour des dommages causés aux tiers par un objet que l'on a sous sa garde ou dont on fait usage avec recours à l'article 1384. Il serait plus opportun d'engager la responsabilité du gardien sur la base de l'article 1384 du code civil pour lequel aucune faute du responsable n'est exigée. Le recours peut être exercé tant contre le tiers impliqué que contre le propriétaire du véhicule lorsque le conducteur victime n'était qu'un préposé de celui-ci171(*). Le droit français retient la distinction classique entre gardien de structure et gardien de comportement pour recevoir la demande du conducteur contre le propriétaire gardien du véhicule172(*).C'est aussi le cas lorsque le gardien pouvait valablement prévoir la réalisation de l'accident du fait de l'inexpérience du conducteur du véhicule173(*). Il n'en est pas moins qu'au cas où la victime n'aurait pas pu obtenir réparation sur la base de cet article, qu'elle puisse faire recours à l'article 1382 du code civil; ceci au moins parce que c'est le plus souvent en posant des actes irresponsable que le responsable cause l'accident (excès de vitesse par exemple).

2- L'exercice du recours du conducteur

L'action du conducteur est portée devant les juridictions civiles, soit devant le tribunal de première instance, soit devant le tribunal de grande instance suivant le montant de la demande et selon que celle-ci est associée à l'action publique ou pas. Le tribunal de première instance est compétent pour des demandes inférieures à dix millions de francs alors que le tribunal de grande instance l'est pour des demandes supérieures à ce montant174(*). La compétence territoriale est attribuée au tribunal du lieu du fait dommageable. Cependant, elle peut être étendue à celui du lieu de résidence effective du défendeur responsable de l'accident.

L'action sera exercée contre la personne jugée responsable des dommages. Celle-ci peut être le propriétaire du véhicule ou son préposé175(*). Le conducteur victime est demandeur à l'action (même s'il peut aussi être défendeur si le conducteur adverse réclame lui aussi réparation de ses dommages) et sa qualité de créancier de l'indemnité ne fait pas l'objet de doute, sauf à constater qu'en cas de décès son droit est transmis à ses ayants -droits. Le problème pourrait cependant se poser pour le cas du défendeur. En fait, la personne auteur de l'accident peut n'être qu'un préposé. C'est le cas des apprentis ou des conducteurs des véhicules des personnes morales.

Nombreux sont en effet les cas où des apprentis des écoles de formation en automobile ou des ateliers de réparation automobile entrent en collision avec des citoyens et il n'est toujours pas de mise que ces véhicules soient assurés. Il peut même arriver qu'un accident survienne le jour même où l'assurance arrive à expiration. Dans ce cas, il est admis que l'assureur sera déchargé de l'obligation de réparer et le recours de la victime conductrice ne sera exercé que contre le responsable sur le fondement de l'article 1384 du code civil. Si le véhicule de la personne morale n'est pas assuré, celle-ci sera tenue directement dans son patrimoine. En ce qui concerne les garagistes, ils sont en principe couverts par une assurance qui les protège pour les dommages causés aux tiers. Dans le cas contraire, c'est leur responsabilité personnelle qui sera engagée en vue de la réparation. Pour les questions de procédure, l'on devra faire recours aux dispositions du code de procédure civile et commerciale afin d'assurer à la victime une réparation équitable.

B- LA REPARATION DES DOMMAGES

Le recours du conducteur donne lieu à un procès en responsabilité civile au même titre que toute action de droit commun. Il correspond soit à la responsabilité du fait personnel de l'article 1382, soit à la responsabilité du fait des choses de l'article 1384, lorsque la faute de la victime n'est pas réprimée sur le plan pénal176(*). Le conducteur bénéficiera de la liberté de preuve puisqu'il s'agira pour lui de prouver un fait juridique. Il devra toutefois fournir des documents justifiant les dépenses qu'il a engagées, ainsi que l'étendue de ses dommages. C'est le cas notamment des certificats médicaux et des factures attestant la réalité des dépenses engagées pour l'hospitalisation ou l'achat des médicaments. Les dépenses déboursées peuvent aussi s'étendre aux frais de transport ou d'évacuation de la victime. Au cas où elle serait décédée, le juge devra y inclure les frais funéraires.

La réparation se fera généralement par le remboursement de ces frais. Ce sera donc le versement d'une somme d'argent pour les soins déjà effectués. Lorsque l'état de la victime nécessitera des soins permanents, l'on devra lui allouer une rente qui sera au besoin révisée suivant l'état d'avancement de son état.

L'indemnisation des dommages aux biens sera faite suivant l'estimation de leur valeur au jour de l'accident. L'estimation est faite par expertise177(*). Le rapport d'expertise est destiné à éclairer le juge sur la réalité des dommages soufferts par la victime et conditionne en lui-même la portée de l'indemnisation du conducteur sur le fondement du code civil.

* 170 V. FLOUR et AUBERT, Les obligations, le fait juridique, Armand Colin, 1999.

* 171 Réf, cass. Civ., 3 février 1993, M'BARRECK et autre c/ Consorts MOUZOUN, juris- Data, n° 000913, cassation de Aix - en- Provence, 10e chambre civile, 26 février 1991 : « attendu selon l'arrêt attaqué, que l'automobile conduite par M MOUZOUN et ayant comme passager le propriétaire M M'BARECK se renversa dans un fossé, que M MOUZOUN qui tentait de sortir du véhicule, fut alors mortellement blessé ; que les consorts MOUZOUN soutenant que M M'BARRECK était resté gardien du véhicule, lui ont demandé la réparation de leur préjudice sur le fondement de l'article 1384 du code civil ; attendu que pour retenir pour partie la responsabilité de M M'BARRECK, l'arrêt se borne à énoncer que la faute de la victime était celle d'un conducteur inexpérimenté dont le propriétaire du véhicule pouvait apprécier la compétence et ne présentait pas pour celui-ci les caractéristiques d'imprévisibilité et d'irrésistibilité de la force majeure ; qu'en se déterminant ainsi, en fonction seulement des fautes commises par M MOUZOUN dans la conduite du véhicule, sans rechercher si la faute relevée à l'encontre de M MOUZOUN écrasé par le véhicule au moment où il en sortait,présentait les caractères de la force majeure, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ».

* 172 Réf. Cass. 2e, 24 janvier 1996, les assurances mutuelles de l'Indre c/ Société Berry Peinture et autres,juri-Data, n° 000315, cassation partielle de CA de Bourges, première chambre, 8 novembre 1993 « à défaut d'avoir constaté que le pneu du véhicule appartenant à M MARIEN et conduit par M SINOPLE était atteint d'une usure excessive et d'un vice interne ayant provoqué son éclatement, la cour d'appel ne pouvait, sans priver sa décision de base légale au regard de l'article 1384, alinéa 1er du code civil, considérer que M. MARIEN était demeuré gardien du véhicule ».

* 173 V. GROUTEL (H.), «"Echangerais implication contre 1384 "(à propos de l'action du conducteur d'une automobile contre son gardien) », in RC. ASS. Hors série, décembre 1998, P. 20, à propos de la même affaire: une automobile, dont le propriétaire est passager transporté se renverse dans le fossé. En tentant de sortir, le conducteur est écrasé par le véhicule qui bascule sur lui. Ses ayants droit assignent le propriétaire, en qualité  de gardien du véhicule, sur le fondement de l'article 1384 du code civil. Une cour d'appel accueille l'action et prononce un partage de responsabilité. Pour cela, elle ne retient que la faute de conduite de la victime tout en considérant qu'en raison de l'inexpérience de celle-ci, cette faute n'était ni imprévisible, ni irrésistible pour le gardien. Cet arrêt donne une certaine idée sur le fondement de l'action du conducteur contre le gardien.

* 174 Cf. Loi n° 2006/015 du 29 décembre 2006 portant organisation judiciaire du Cameroun, art 15 (TPI) et art 18 (tribunal de grande instance). V. aussi ANOUKAHA (F.), «La réforme de l'organisation judiciaire au Cameroun », in Juridis périodique n°68, octobre -novembre -décembre 2006, p 34 et s.

* 175 CA de Bafoussam, arrêt n°971/cor du 5 août 2002, Aff MOGHU Boniface et consorts c/ Min Pub TAGNI Idriss Yaya et consorts : « considérant qu'au moment de l'accident, le prévenu CHIN Boniface était au service de la société AMOUR MEZAM ; qu'il convient dès lors de déclarer cette dernière civilement responsable des actes de son préposé », V aussi TPI de Bafia, jugement n° 945/cor du 21 mai 1996, affaire Ministre Public et ONANA Jean Marie c/KAMGA Pierre ; « Attendu qu'au moment de l'accident, le prévenu était chauffeur titulaire du camion-benne n°CE 7496 appartenant à TCHOMBOU Michel ; (...) qu'il échet de déclarer TCHOMBOU Michel civilement responsable des conséquences dommageables de l'accident causé par le prévenu ».

* 176 En droit pénal notamment, le ministère public exerce l'action publique en réprimant les comportements délictueux. La victime ne peut obtenir réparation que lorsqu'elle s'est constituée partie civile en introduisant justement une plainte avec constitution de partie civile.

* 177 L'expertise est définie par le doyen BOUZAT comme « la procédure qui a pour but d'utiliser les connaissances d'un technicien pour tirer au clair une question dont la solution demande une compétence technique dont le juge est dépourvu », in Traité de droit pénal, BOUZAT et PINATEL, tome 2, p.1138. C'est également l'acte par lequel le juge demande à un spécialiste son avis sur un problème technique qu'il est obligé de résoudre pour trancher un litige.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote