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Notion et régulation de l'abus de puissance économique

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par Azeddine LAMNINI
Université Sidi Mohammed Ben Abdellah Fès - DESA 2008
  

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§2 - LE POUVOIR ECONOMIQUE RELATIF SUSCEPTIBLE D'ABUS

69. Les fondements du pouvoir économique relatif : la qualité des partenaires ou la dépendance d'un partenaire. Comme on l'a déjà indiqué, la mesure de la puissance économique est indispensable à la détermination du pouvoir susceptible d'abus. Ce pouvoir, sans être absolu, comme ce qui a été exposé, peut donner à l'entreprise la capacité d'agir sur la volonté d'un partenaire économique, étant le déséquilibre de rapports de forces économiques. A l'instar des relations professionnels consommateurs ou des relations de dépendance économique dans lesquelles peut se trouver un partenaire. Dans le premier cas, le pouvoir est déduit de la qualité des partenaires en rapport, dans le deuxième, il s'agit d'envisager concrètement un rapport de forces entre deux partenaires économiques professionnels.

A - Le pouvoir déduit de la qualité des partenaires économiques

70. Pouvoir déduit de la relation professionnel/consommateur. Pour nous procurer des biens ou des services, nous tous consommateurs, entrons en relation avec des personnes physiques ou morales, qui font profession de vendre des biens ou de fournir des services. Or la relation entre professionnel et consommateur est naturellement déséquilibrée. La compétence du professionnel, les informations dont il dispose, et souvent sa dimension financière, lui permettent de dicter sa loi au consommateur155(*). Selon une opinion qui fait autorité en la matière, cela ne signifie pas que les professionnels sont, par hypothèse, gens malhonnêtes, cherchant à abuser de la situation. Mais, il n'en ai pas moins vrai, selon la même opinion, que les professionnels sont, par la nature des choses, en position de supériorité, et que les consommateurs risquent d'en être les victimes156(*).Ainsi, le pouvoir économique peut être déduit de la seule qualité des partenaires en rapport économique. C'est le cas du rapport professionnel / consommateur157(*). Ici la qualité des partenaires justifie le déséquilibre de puissance économique158(*). La présence des deux parties en rapport, avec les deux qualités de professionnel et consommateur sera une condition sine qua non de l'existence d'un pouvoir économique présumé chez le professionnel. Ainsi, c'est la qualité de consommateur qui présumé sa faiblesse et la qualité de professionnels qui présume sa supériorité de fait. Cela rend la définition des deux notions indispensable pour caractériser un déséquilibre de puissance économique.

71. La qualité de professionnel condition de déséquilibre de puissance économique. Professio, -onis signifie « déclaration publique, action de se déclarer comme », d'où l'idée que le professionnel est celui qui est spécialiste de son métier ou, à tout le moins, qui déclare l'être159(*). De point de vue économique, le professionnel doit être rapproché du producteur et, donc, de l'entreprise. Il est cette personne physique ou morale qui rassemble, exploite et gère des moyens humains et matériels, plus ou moins importants, dans le but de proposer à titre onéreux sur un marché des biens ou des services. La notion de professionnel est, donc, moins catégorielle que fonctionnelle. Par exemple, un commerçant qui contracte pour la satisfaction de ses besoins personnels ou familiaux ne sera pas traité en professionnel, mais en consommateur. Alors que l'on ne peut être à la fois employeur et salarié, tous les professionnels sont également des consommateurs au regard des actes passés en dehors de l'exercice de leur profession.

72. La notion du « professionnel » en droit. En droit la notion de professionnel est plus récente que celle de commerçant, qu'elle tend, de nos jours, à supplanter en raison de son domaine plus vaste160(*). Mais, alors que le commerçant est légalement défini comme la personne qui exerce des actes de commerce en en faisant sa profession habituelle, la loi, au Maroc comme en France, est en revanche, muette quant au professionnel161(*). Néanmoins, le terme est fréquemment utilisé en droit. Ainsi, en droit commun, la jurisprudence marocaine, à l'instar de celle française, distinguent, pour admettre ou refuser la validité des clauses supprimant la garantie des vices cachés dans le contrat de vente, les professionnels de même spécialité et ceux de spécialités différentes162(*). En droit français de la consommation, certaines décisions de jurisprudence admettent le principe de l'application des dispositions relatives à l'élimination des clauses abusives à certains professionnels, assimilés pour le coup à des consommateurs. En outre, une partie importante de la doctrine et de la jurisprudence qualifie de consommateurs les associations et autres groupements à but non lucratif, alors même que leur position et leur fonction dans le circuit économique correspondent à la définition du professionnel.

73. Incertitudes quand à la notion du professionnel. Toutes ces réflexions éprouve des incertitudes quand à la définition de la notion du « professionnel ». Ces incertitudes proviennent, en réalité, de la difficulté à définir le consommateur et, plus précisément, des tentatives d'étendre la qualification de consommateurs à certains professionnels en situation de faiblesse. De ce fait, on estime opportun de retenir la définition donnée par le professeur Cornu, qui définit le mot professionnel par opposition au profane. Ainsi, selon le professeur Cornu, « c'est l'homme de l'art ; personne dont l'appartenance à une profession fait attendre une qualification correspondante ; plus précisément, par opposition au consommateur, toute personne physique ou morale, qui dans les contrats de vente ou de prestation se services, agit dans le cadre de ses activités professionnelles privées ou publiques »163(*). Cela dit, reste à déterminer la notion du consommateur, deuxième condition nécessaire à la mesure du pouvoir économique relatif aux qualités des partenaires économiques.

74. La notion de consommateur. La définition du consommateur est beaucoup plus délicate à poser que celle du professionnel. Le consommateur final de la théorie économique, celui qui « pour finir, consomme, absorbe, utilise » 164(*), est l'enjeu de la compétition économique. Il ne participe pas à cette compétition, ne concourt pas. En ce sens, tous sujet de droit, consommant, utilisant des biens ou services, peut être qualifié de consommateur165(*). Le domaine de la protection est alors extrêmement large166(*). Mais, le seul fait de consommer ne suffit pas à attribuer au sujet de droit la qualité de consommateur. Autrement dit, la faiblesse de consommateur ne peut être toujours présumée de sa seule activité. De ce fait, d'autres critères apparaissent pour le définir. Il entre dans cette notion une idée de « destination personnelle » et de « non compétence professionnelle ». Le domaine de protection en est d'autant restreint167(*). Ainsi, il convient de chercher la définition retenue par le droit marocain ainsi que celle retenue par le droit français avant d'exposer l'avis de la doctrine.

75. La notion de consommateur en droit marocaine. En droit marocain, le terme « consommateur » est utilisé dans certains textes juridiques, ainsi que par la jurisprudence. En effet, la loi 06-99 recourt à ce terme dans le chapitre premier, du Titre XI. Ce chapitre est intitulé « De la protection et de l'information des consommateurs ». Ce texte de loi ne donne aucune définition à cette notion, de même que son décret d'application qui reste encore muet en ce sens168(*). Le juge marocain, de sa part, n'a pas encore eu l'occasion de se pencher sur la question. Certes, ce dernier recourt souvent au terme « consommateur moyen », notamment dans le cadre des litiges de la concurrence déloyale, de la propriété industrielle, ou de la responsabilité du professionnel fabriquant169(*), mais sans en délimiter les contours170(*). Cette réalité peut être due à l'absence d'une législation spécialisée dans la protection du consommateur Cela nous pousse à recourir au droit français dans la mesure où ce droit contient même un Code de consommation.

76. La notion du consommateur dans le Code français de la consommation. Assez paradoxalement a priori, le Code français de la consommation ne définit pas le consommateur. Sans doute cette omission est-elle liée à la difficulté de cerner ce personnage. Si tout le monde n'est pas salarié ou commerçant, toute personne est consommateur. La catégorie juridique est donc incertaine. L'impression de flou est renforcée par le fait que le Code français de la consommation paraît parfois distinguer le consommateur et le non-professionnel. La logique de ce code renseigne que le point faible du contractant est différent selon le domaine de la réglementation. Il conclut un contrat sous la pression d'un démarcheur, il mesure mal le coût de son endettement, il adhère à une convention qui confère à son contractant un avantage excessif. A chaque domaine son consommateur et sa règlementation171(*).

77. La jurisprudence française. De sa part le juge français, cherchant les critères de la notion de consommateur, s'emploi en fait à déterminer l'inaptitude de ce dernier à résister à la puissance économique du professionnel dans la mesure où cette incapacité est inhérente à la qualité du consommateur172(*). Pour le juge français, de façon générale, est considéré comme consommateur celui qui contracte pour des besoins sans rapport direct avec sa profession173(*). Mais ce critère reste aussi imprécis. Son imprécision est le fait que la Cour de cassation renvoie l'appréciation de l'existence de ce rapport direct aux juges du fond174(*), ce qui engendre une véritable incertitude quant à cette notion175(*). Certains arrêts l'ont d'ailleurs écarté au profit d'une définition plus restrictive.

78. La doctrine française. La recherche dans la doctrine française, nous a permis de retenir deux définitions comparables du consommateur, données par deux professeurs, dont la voix fait autorité en la matière. Ainsi, selon le professeur j. Ghestin : « Le consommateur est « la personne qui, pour ses besoins personnels, non professionnels, devient partie à un contrat de fourniture de biens ou de service »176(*). L'autre définition est voisine de la première. Elle est donnée par les professeurs J. C ; Auloy et F. Stenmetz. Selon ces auteurs « le consommateur est une personne physique ou morale qui se procure ou qui utilise un bien ou un service pour un usage non professionnel »177(*).

79. De ce qui précède on peut déduire que la notion de consommateur en droit reste incertaine, malgré une partie de la doctrine qui en prône une délimitation stricte178(*), la jurisprudence et une grande partie de la doctrine179(*), paraît plutôt en faveur d'une définition extensive, par le recours au critère du rapport direct180(*). Ainsi, si le droit de la consommation a pour objectif la protection du consommateur, la traduction juridique de ce but n'est pas aisée. Empruntée au domaine des sciences économiques, la notion de consommateur a été amenée, depuis quelques décennies, à jouer en droit civil français un rôle de protection, sans qu'une véritable réflexion n'ait été préalablement menée. Le résultat est qu'une définition rigoureuse du consommateur est, aujourd'hui encore, absente du droit français de la consommation181(*). Le consommateur est multiple car, cette qualité recouvre un sens différent selon les normes juridiques qui l'utilisent. Cette absence de définition uniforme de la notion du consommateur n'est pas tellement regrettable. En effet, certains mettaient en garde les juristes contre un excès de définition, facteur de rigidité et donc d'injustice182(*). La notion de consommateur en fournit un exemple topique. A notre sens, on estime que cette absence de définition ne peut que profiter au consommateur dans la mesure où elle permet au juge plus de souplesse dans l'application des textes consuméristes. Cependant, ce qui importe dans notre propos, c'est l'établissement des deux qualités de consommateur et de professionnel, condition nécessaire à la mesure du pouvoir économique relatif, résultant du rapport déséquilibré entre ces deux partenaires. En effet, le pouvoir économique relatif peut aussi résulter de la relation de dépendance dans laquelle peut se trouver un partenaire économique à l'égard d'une entreprise économiquement puissante.

B - Le pouvoir déduit de la dépendance d'un partenaire économique

80. La notion de dépendance économique. Le pouvoir économique peut être mesuré à travers le déséquilibre qui peut surgir entre deux partenaires économiques à cause de la dépendance de l'un envers l'autre. En effet, la dépendance économique vise la situation dans laquelle se trouve une entreprise dans sa relation avec une autre, cliente ou fournisseur, caractérisée par une position de puissance telle à son égard quelle ne peut s'y soustraire183(*). Dans ce cas de figure, la continuité d'exploitation au sens économique du terme de la première qui se trouve être en situation de dépendance n'est plus assurée, dès lors que les relations commerciales qu'elle entretient avec la seconde viendraient à cesser. Selon cette définition donnée par le conseil français de la concurrence184(*), le concept désigne une relation commerciale dans laquelle l'un des partenaires n'a pas de solution alternative s'il souhaite refuser de contracter dans les conditions que lui impose son client ou son fournisseur185(*). L'on peut reconnaître, dans cette énumération, trois des quatre types principaux de dépendance sur lesquels se greffent différents abus, distingués par la doctrine allemande186(*) et analysés par M. Pédamon187(*), comme la « dépendance pour cause d'assortiment188(*), la dépendance pour cause de puissance d'achat189(*) et la dépendance pour cause de relations d'affaires »190(*). Mais il convient d'y ajouter un quatrième type, soit la « dépendance pour cause de pénurie »191(*).

81. Les critères d'appréciation de l'état de dépendance économique. L'entreprise dominante exerce une contrainte sur le partenaire dépendant. Cette contrainte est rarement absolue193(*). Pour mener à bien son expertise, le juge a recours à un faisceau d'indice, dont la réunion lui permet de présumer l'état de dépendance. Sa démonstration le conduit à appréhender la puissance économique à la fois positivement, c'est-à-dire, en envisageant directement la contrainte exercée sur le partenaire dépendant, et négativement en vérifiant l'inaptitude du partenaire dépendant à se soustraire à cette contrainte. Ces deux modes de démonstration lui permettent d'établir un phénomène unique : la relation de puissance entre les parties. Ainsi, pour le Conseil français de la concurrence, la situation d'un état de dépendance économique « s'apprécie en tenant compte de l'importance de la part du fournisseur dans le chiffre d'affaires du revendeur, de la notoriété de la marque du fournisseur, de l'importance de la part de marché du fournisseur, de l'impossibilité pour le distributeur d'obtenir d'autres fournisseurs de produits équivalents », ajoutant que « ces critères doivent être simultanément présents pour entraîner cette qualification »194(*). Ces critères ont été adoptés par la Cour de Paris195(*) et approuvés par la Cour de cassation196(*). Cette dépendance doit s'apprécier dans le cadre de relations bilatérales entre deux entreprises, et doivent être évaluées au cas par cas, et non globalement pour l'ensemble de la profession197(*).

82. Ainsi présentée, la dépendance économique marque un rapport de force et ainsi l'existence d'un pouvoir économique mesuré à travers le déséquilibre de puissances économiques. En la matière, ce déséquilibre de force résulte, non de la domination objective d'un marché, comme c'est le cas du pouvoir économique absolu, mais du fait que la puissance relative d'une entreprise engendre la vulnérabilité de ses partenaires commerciaux. Ces partenaires comme nous l'avons vu, peuvent être des consommateurs ou des professionnels. Toutes ces situations établissent l'existence d'un pouvoir économique susceptible d'abus. Ce pouvoir ne présente en tant que tel, rien d'illégitime parce qu'il est le résultat logique de la lutte concurrentielle. Néanmoins, il peut devenir un moyen d'abus. Son exercice abusif peut prendre plusieurs manifestations à l'égard du marché sur lequel il s'exerce ou dans les rapports de l'entreprise avec ses partenaires économiques. En outre, cet exercice abusif a souvent des conséquences considérables sur les principes juridiques directeurs de notre droit.

* 155 J. Calais-Auloy et F. Steinmetz, Droit de la consommation, op. cit., n° 1, p. 1

* 156 «  Le développement de l'économie de marché, au XIX siècle et au XX siècle, put faire croire que le consommateur était devenu le roi du système : la libre concurrence des entreprise devait en principe multiplier les biens offerts, accroitre leur qualité et réduire leur prix. Simultanément, le principe de l'autonomie de la volonté devient la base du système juridique. Tous les consommateurs sont réputés également lucides et raisonnables. Tous doivent veiller, en contractant, à leurs propres intérêts. Du moment qu'une personne a contracté, elle est tenue. « Qui dit contractuel dit juste ». Il ne paraissait donc pas nécessaire de protéger les contractants autrement que par quelques règles sanctionnant les tromperies caractérisées ». Ibid.

* 157 L'idée qui sous tend cette distinction est simple : les professionnels sont traditionnellement en position de supériorité par rapport aux consommateurs en raison de meilleures connaissances techniques et de capacités financières plus importantes. Ce déséquilibre s'étant accentué avec l'accroissement de la taille des entreprises, la complexité des produits et des services, le développement du crédit et de la publicité. F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit civil, les obligations, op. cit., n° 74, p. 84.

* 158 S'il est possible de critiquer le caractère absolu de cette affirmation - l'infériorité du consommateur face au professionnel n'est pas toujours avérée -, il n'en est pas moins indiscutable qu'elle reflète la grande majorité des situations. Ce face-à-face entre professionnel et consommateur qui participe de l'essence du droit de la consommation n'aboutit, cependant, pas à la constitution d'un droit de classes comme le pensent certains auteurs (par ex., V. H., L., J. MAZEAUD et F. CHABAS, Leçons de droit civil, t. 2, 1er vol., Obligations, 9e éd., 1998 ,op. cit., n° 32-2

* 159 G. Cornu, Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, PUF, Delta, 1996.

* 160 Le professionnel est le genre, le commerçant l'espèce. En d'autres termes, si tous les commerçants sont des professionnels, tous les professionnels ne sont pas commerçants.

* 161 Cette définition est plus précise que celle tautologique donnée par la directive européenne du 5 avril 1993 dans son article 2, c : « Toute personne physique ou morale qui [...] agit dans le cadre de son activité professionnelle, qu'elle soit publique ou privée ».

* 162 Cass. 3e civ. 30 oct. 1978, JCP 1979. II. 19178, note J. Ghestin ; Cass. com. 3 déc. 1985, Bull. civ. IV, n° 287.

* 163 G. Cornu, Vocabulaire juridique, op. cit., p.637.

* 164 G. Cornu, « Rapport sur la protection du consommateur et l'exécution du contrat en droit français », in Travaux de l'association h. Capitant, journées canadiennes, t. XXiV, Dalloz, 1973, n° 5, p. 135, sité par M. S. payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n° 30, p. 44.

* 165 L'entrepreneur peut être tout autant consommateur que le particulier, dès lors que son acte ne s'inscrit pas dans le processus économique de fabrication, de distribution et de commercialisation.

* 166 Les consommateurs ne constituent pas, à proprement parler, une classe sociale, mais une catégorie juridique fluide dans laquelle entre toute personne, quelle que soit sa profession, contractant en vue de la satisfaction directe de ses besoins personnels ou familiaux. Sans instaurer de rigidité dans les structures sociales, le binôme professionnel/consommateur défini de façon fonctionnelle constitue la colonne vertébrale de la législation relative à la lutte contre les clauses abusives et en fixe le domaine (contra : G. RAYMOND [Les contrats de consommation, in J. Calais-Auloy et H. Causse (sous la dir. de),

* 167 M. S. Payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n° 30, p. 45.

* 168 Il s'agit Décret N° 2-00-854 du 17 Septembre 2001 pris pour l'application de la loi N 06/99 sur la liberté des prix et de la concurrence, notamment son article 10 ; De même l'Arrêté du ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des affaires économiques et générales n° 649-07 du 16 rabii II 1428 (4 mai 2007) fixant les modalités de publicité et d'information du consommateur en matière de services de télécommunications, notamment ses articles 1, 5 et 6

* 169 Voir not., CS, n° 2536, du 28/09/2005, RJCS, n° 64/65, 2006.

* 170 Not. : CS, n° 9/64, 08/01/2003, RJCS, n° 61, 2003.

* 171 M. S. Payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n° 38, p. 71. Pour l'auteur la faiblesse peut être commune à tous, indépendante du sujet, objective : c'est le droit de la publicité de fraude et de falsification. Propre à chacun, la faiblesse devient indifférente, et la seule qualité de sujet de droit justifie la protection. Parfois au contraire un danger particulier guette l'individu, en raison d'un contrat qu'il a conclu. Fragile parce que démarché à son domicile, ou en raison de l'impossibilité dans laquelle il se trouve, en fait, de parcourir avec une suffisante attention un contrat qui lui est proposé, ou encore par sa promptitude à s'endetter sans réflexion, encouragé par l'essor d'une économie d'endettement, le consommateur aspire à une protection. Mais dans toutes ces hypothèses, sa qualité de consommateur ne permet pas au système juridique d'identifier la faiblesse dont il souffre. Il tend au contraire à empêcher les causes de cette fragilité, le juge se voyant confier la mission improbable de qualifier un état de faiblesse par une qualité économique qui, en elle-même, ne s'identifie pas. En d'autres termes, la qualité de consommateur ne fonde pas la politique juridique de sa protection. Pour l'auteur, la définition subjective du consommateur est semble t'elle impossible. La définition objective apparaît tout aussi incertaine

* 172 Ibid., n° 96, p. 159 ; Pour le même auteur La recherche d'une définition de la notion du consommateur conduit à considérer que cette qualité est en elle-même un indice de faiblesse ; Pour le professeur G. Paisant, rattachée la notion du consommateur à sa faiblesse n'est pas si facile à réaliser car, si l'on veut bien reconnaître que le droit de la consommation est un droit de protection du présumé faible - le consommateur - contre le présumé fort - le professionnel -, on peut être tenté, par souci d'équité, d'en généraliser l'application dans les relations de faibles à forts, que la supériorité exprimée soit d'ordre technique, intellectuelle ou psychologique, juridique ou économique. G. Paisant, « A la recherche du consommateur. Pour en finir avec l'actuelle confusion née de l'application du critère de rapport direct », JCP éd G, 2003, n° 13, p. 121.

* 173 Il en résulte qu'un professionnel qui passe un contrat annexe à l'exercice de sa profession, dans un domaine dans lequel il n'a pas de compétences particulières, se trouvera protégé par certaines dispositions du Code de la consommation, en particulier la législation sur les clauses abusives.

* 174 V. notamment, Cass. 1re civ. 22 avr. 2002, op. cit..

* 175 Les juridictions administratives françaises contribuent également au flou de cette notion. Après avoir jugé, à la suite de la Cour de cassation : Cass. crim., 15 mai 1984 : Bull. crim. n° 178 ; D. 1986, jurispr. p. 106, note G. Mémeteau, que le patient pouvait être un consommateur : CE, 27 avr. 1998, Cornette de Saint-Cyr : Contrats, conc., consom. 1999, comm. n° 15, note G. Raymond ; La Haute juridiction administrative française a admis l'application de la législation des clauses abusives aux rapports entre une société et le concessionnaire d'un service public de distribution d'eau : CE, 11 juill. 2001, Sté des eaux du Nord : JCP G 2001, I, 370, note N. Sauphanor-Brouillaud ; R.T.D.civ. 2001, p. 878, n° 6, note J. Mestre et B. Fages.

* 176 J. Ghestin, Traité de droit civil, la formation du contrat, 3ème éd., L.G.D.J., 1993, n° 77, p. 54.

* 177 J. C. Auloy et F. Steinmetz, Droit de la consommation, op. cit., n° 2, p. 2.

* 178 « Selon la conception stricte, le consommateur est la personne « qui se procure ou qui utilise un bien ou un service pour un usage non professionnel », Ibid., n°  7.

* 179 Les partisans de l'extension de la notion de consommateur avancent, au soutien de leur thèse, un argument de texte et proposent des critères divergents. Les arguments en faveur de la conception extensive du consommateur se sont fondés sur le texte de l'article 35 de la loi du 10 janvier 1978. Le critère de compétence est certainement le plus extensif, car il conduit à soutenir que, en dehors de sa spécialité, le professionnel est aussi vulnérable qu'un consommateur. C'est à M. CARMET que revient le mérite d'avoir émis l'idée d'une distinction en fonction de la nature du lien unissant l'acte conclu à la profession exercée. Voir : O. CARMET, « Réflexions sur les clauses abusives au sens de la loi no 78-23 du 10 janv. 1978 », R.T.D.com. 1982, p. 1. v. aussi : J.-L. Aubert, obs. sous Cass. 1re civ. 3 mai 1988, Rec. D. 1988, somm. 407.

* 180 Les conceptions extensives de la notion de consommateur partent de l'idée juste, selon laquelle il existe des professionnels qui se trouvent dans des situations de faiblesse économique équivalentes à celles du consommateur.

* 181 Sur les définitions du consommateur, V. J.-P. Pizzio, « L'introduction de la notion de consommateur en droit français », Rec. D. 1982, Chron. p. 91 ; J. Mestre, « Des notions de consommateurs », R.T.D.civ. 1989, p. 62 ; G. Paisant, « Essai sur la notion de consommateur en droit positif », JCP 1993, I, n° 3655 ; D. Mazeaud, « Le juge face aux clauses abusives, in Le juge et l'exécution du contrat », colloque IDA-Aix-en-Provence, 28 mai 1993, PUAM ; J. Calais-Auloy et F. Steinmetz, Droit de la consommation, op. cit., n° 2 s.

* 182 C'est ce que signifie ce précepte de Javelonus, « Omnis definitio in jure civili periculosa ». J. P. Chazal, « De la cohérence de la notion de consommateur : de l'unicité de la définition à la multiplicité des régimes », Rec. D., 1999, p. 248.

* 183 Le Vocabulaire juridique publié sous la direction du Professeur Cornu définit la dépendance comme l'absence d'autonomie de comportement d'une personne par rapport à une autre. G. Cornu, « Vocabulaire juridique », op. cit., p. 257 ; Cette notion est connue du droit positif. Après avoir manqué un rendez-vous avec le droit du travail, elle a été consacrée en droit de la concurrence ; « Traditionnellement, à la dépendance juridique du salarié, on oppose l'indépendance juridique de l'entrepreneur, du commerçant, de l'agriculteur. Toutefois, cette opposition est relative car à côté de la dépendance juridique à laquelle ils échappent, il peut arriver que ces « indépendants » soient placés en situation de dépendance économique vis à vis d'un partenaire contractuel. C'est le cas, notamment, dans le secteur de la distribution qui procède à l'intégration d'un contractant dans un réseau », L. Bruneau, Contribution à l'étude des fondements de la protection du contractant, th. Toulouse, 2005, p. 346, n° 393.

* 184 Cons. conc., avis n° 97-A-04, 21/01/1997, BOCCRF 17 févr., p. 37.

* 185 Lors des débats parlementaires auxquels donna lieu la loi no 85-1408 du 30 décembre 1985, qui introduisit cette notion dans le droit français de la concurrence, avant que l'ordonnance no 86-1243 du 1er décembre 1986 ne prenne le relais, la dépendance économique fut largement évoquée. Pour le ministre français de l'Economie et des Finances, Rapp. Colon, JO doc. Sénat 1985-1986, n° 56, p. 24, ; Il y a solution équivalente quand l'entreprise en situation de dépendance économique à l'égard d'un partenaire, fournisseur ou client, qui a mis en oeuvre les pratiques contestées, est tout de même en mesure de poursuivre normalement son activité. De la même façon, il y solution équivalente lorsqu'il est établi que les pratiques dénoncées n'ont pas entraîné une baisse significative des ventes, V. Rapp. 1993, à propos de la déc. n° 93-D-21, 8 juin 1993 ; À l'inverse, l'absence de solution équivalente ou alternative peut être établie en prenant en compte, notamment, la faiblesse des ressources financières de l'entreprise, la faiblesse de ses marges sur le marché et la durée, de même que l'importance de la pratique de partenariat, Contrats, conc., consom. 1997, comm. n° 8, note L. Vogel.

* 186 Cette doctrine est fondée sur le paragraphe 26, alinéa 2, de la loi allemande du 27 juillet 1957 (modifiée en 1973 et en 1980)

* 187 Decocq A. et Pédamon M., « L'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence », J.Cl. Conc. consom., n° spéc. 1987, n° 30

* 188 Le cas du commerçant spécialisé (mercerie, parfumerie, articles de sport, notamment) qui ne peut exercer normalement son activité sans proposer à la vente les produits d'une marque disposant d'une notoriété particulière

* 189 Le cas du producteur qui réalise auprès d'une centrale d'achat une part importante de son chiffre d'affaires, à laquelle il ne peut renoncer sans mettre en péril son activité, et qu'il ne peut reconstituer rapidement auprès d'autres clients 

* 190 Le cas du sous-traitant qui ne peut facilement reconvertir son activité pour recourir à un autre donneur d'ouvrage 

* 191 Cette dépendance apparaît en cas de « crise dans la production et la fourniture d'une matière première pour les clients non intégrés, des firmes qui ont accès directement aux sources de cette matière première »192. Ces firmes sont alors amenées, à l'occasion de cette répartition des marchandises en pénurie, à privilégier des entreprises appartenant aux mêmes groupes qu'elles au détriment d'autres entreprises, comportements qui ont été reprochés en Allemagne, pendant les crises pétrolières, à quelques grandes compagnies.

* 193 Comme le relève un auteur, « l'expertise économique menée lors d'une délimitation du marché de référence conduit rarement à mettre en évidence une absence absolue de solutions équivalentes. Elle aboutit, au mieux, à constater que les possibilités objectives de fourniture de produits substituables (pour l'acheteur) ou de débouchés nouvelles pour (l'offreur) s'avèrent relativement limitées », M. Glais, « L'état de dépendance économique au sens de l'article 8 § 2 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 : analyse économique », Gaz. Pall., 1989, 1, doctr., p. 290.

* 194 Cons. conc., déc. no 96-D-44, 18/06/1996, BOCCRF 14 nov., p. 564, comm. Arhel P., JCP éd. E 1998, p. 76.

* 195 CA Paris, 1re ch., 12/07/1990, BOCCRF 20 juill., et CA Paris, 13/06/1991, BOCCRF 5 juill. ; adde, CA Versailles, 27/01/2000, D.  Aff. 2000, act. jur., p. 157, JCP éd. E 2000, p. 872.

* 196 Cass. com., 12 oct.1993, Rec.D. 1994, som., p. 169, obs. Gavalda Ch. et Lucas de Leyssac Cl. ; Cf. pour l'analyse économique de ces critères, Glais M., « L'état de dépendance économique au sens de l'article 8 de l'ordonnance du 1er décembre », loc. cit.

* 197 Cons. conc., déc. no 03-D-42, 18/08/2003, Suzulli, Contrats, conc., consom. 2003, no 182.

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