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Contribution du Bois Energie aux moyens d'existence durables des ménages riverains de la Réserve de Biosphère de la Pendjari


par Abdelaziz LAWANI
Faculté des Sciences Agronomiques de l'Université d'Abomey-Calavi
Traductions: Original: fr Source:

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2-1-2-2- De la pauvreté à l'approche par les moyens d'existence durables

La pauvreté se révèle être une réalité complexe, s'exprimant dans de multiples dimensions, économiques et sociales, relevant d'un processus au sein duquel les individus sont influencés par leur environnement naturel et institutionnel. Les aspects sociaux doivent être pris en compte conjointement aux aspects économiques.

Ces aspects débordent largement le cadre de l'approche monétaire de la pauvreté. Par conséquent, s'engage une réflexion de fond sur des méthodes plus aptes à traiter des aspects qui ne se prêtent pas aux analyses conventionnelles. Ainsi, au renouvellement des problématiques de la pauvreté correspond un renouvellement des méthodologies qui se traduit par la mise sur pied de systèmes alternatifs d'investigation, s'efforçant de répondre à la nouvelle donne scientifique. D'une part, le modèle standard est enrichi par les travaux de Sen (1999). Le niveau de bien-être de l'individu est alors déterminé par ses fonctionnements réalisés (ou son niveau de consommation comme dans l'approche standard) mais aussi par ses possibilités de choix (capacités). D'autre part, avec l'affinement de la réflexion sur la nature et les causes de la pauvreté et sur les caractéristiques et le comportement des pauvres, ces dernières années, on comprend la nécessité d'établir une distinction entre l'ampleur, la gravité et la répartition de la pauvreté (dans le temps et dans l'espace) (Lipton et al, 1992). On s'oriente désormais vers une intégration des caractéristiques et des causes multidimensionnelles qui concerne les moyens d'existence durables (the sustainable livelihood).

L'approche basée sur les moyens d'existence durables a émergé ces dernières années, comme une alternative en réponse aux nouveaux questionnements relatifs à l'analyse de la

pauvreté. Alors que la pauvreté monétaire décrit un état de privation vis-à-vis de certaines variables, cette approche s'attache aux perceptions des individus et à la description du processus de la pauvreté en analysant les choix comportementaux. On reconnaît de plus en plus l'importance de la possession de biens pour les pauvres, ceux-ci sacrifiant souvent la consommation courante pour protéger leurs avoirs. Les fluctuations de la pauvreté (selon les saisons, dans les différentes étapes de l'existence) sont mieux connues. La vulnérabilité face aux chocs (maladie, aléas climatiques, etc.) est désormais considérée comme un facteur essentiel d'appauvrissement. On souligne la nécessité d'appuyer des stratégies de survie diverses et créatives ainsi que la nécessité de promouvoir des sources de revenus durables ou la sécurité des moyens de subsistance. L'existence de mécanismes d'équilibrage (entre vulnérabilité et augmentation du revenu, par exemple) est reconnue (Lipton et Maxwell, 1992 ; Dasgupta, 1993 ; Chambers, 1994).

Les moyens d'existence regroupent les capacités, les biens et les activités nécessaires aux individus pour assurer leurs besoins de base et pour atteindre leur bien-être. Carney (1998) mentionne que les moyens d'existence sont durables, lorsqu'ils permettent de s'adapter aux difficultés, de faire face à l'adversité, et de conserver ou améliorer les capacités et biens, tant dans l'immédiat qu'à l'avenir, sans pour autant compromettre la base de ressources naturelles. Bien que la durabilité des moyens d'existence nécessite qu'on s'intéresse à leur tendance actuelle et à leur évolution future, une bonne compréhension du passé, des conditions et tendances qui prévalaient doit être prise en compte.

L'approche par les moyens d'existence durables requiert un cadre théorique qui prenne en compte les relations complexes et multidimensionnelles entre l'environnement physique et social, c'est-à-dire qui permette d'intégrer dans une même analyse les multiples dimensions (économiques, sociales, culturelles et institutionnelles) du bien-être. Ce cadre théorique est un ensemble d'éléments permettant d'améliorer la compréhension des moyens d'existence, en particulier les moyens d'existence des pauvres. Mis au point par le Department For International Development (DFID), le cadre théorique de l'approche par les moyens d'existence durables présente les principaux facteurs qui affectent le bien-être et les relations entre ces facteurs. La figure qui suit est une forme simplifiée de cette approche. Elle présente les éléments à prendre en compte pour cette analyse.

Figure 1. Cadre des moyens d'existence durables

Légende

H = capital Humain N = capital Naturel F = capital Financier

S = capital Social

P = capital Physique

N [Influence 8,1

accès

RESULTATS DE
MOYENS
D'EXISTENCE

· Plus de revenus

· Bien être accru

· vulnérabilité réduite

· Plus grande sécurité alimentaire

· Utilisation plus durable des ressources naturelles

o

AVOIRS DE MOYENS
D'EXISTENCE

STRATEGI ES DE
MOYENS
D'EXISTENCE

CONTEXTE DE
VULNERABILITE

· CHOCS

· TENDANCES

· SAISONNALFTE

STRUCTURES ET
PROCESSUS DE
TRANSFORMATION

STRUCTURES

· Niveaux de gouvemment

· Secteur Lois
privé

· Politiques

· Culture

· Institutions

PROCESSUS

Source : DFID (1999)

Figure 1 : Cadre théorique d'analyse : les moyens d'existences durables.

Le contexte de vulnérabilité sous entend l'environnement des ménages. Leurs stratégies de survie ainsi que leurs biens sont fondamentalement affectés par les chocs (catastrophes naturels, conflits, problèmes de santé, désastres agricoles ...etc.), par les tendances critiques (tendance d'évolution des ressources, de la population, des politiques de développement, de la technologie, du marché national et international ...etc.) et par la saisonnalité (variation des prix, des opportunités d'emploi, de la disponibilité des aliments ...etc.). Ces éléments peuvent avoir des impacts directs sur les moyens d'existence des ménages et sur les opportunités qui s'offrent à eux dans la poursuite d'un mieux être. En effet, confrontés à l'instabilité de leurs moyens de subsistance, les ménages vulnérables peuvent réagir de façons différentes. Face à des chocs, par exemple des inondations ou des guerres civiles, ils peuvent être obligés d'immigrer abandonnant leurs habitats et leurs ressources productives. Aussi, suite à des fluctuations dramatiques du revenu, ou de leurs biens, les individus vulnérables peuvent rechercher avant tout, la stabilisation du revenu et des moyens de subsistance plutôt que la maximisation du revenu. Ces stratégies réduisent leur exposition au risque tout en diminuant sérieusement leur revenu moyen et les moyens de subsistance. Parallèlement, ils peuvent essayer de lisser leur consommation en réalisant des stocks, en retirant les enfants de l'école et en recourant au crédit informel, autant d'efforts qui se révèlent souvent inadéquats ou plutôt aggravent leur vulnérabilité. Devant les fluctuations du revenu d'un ménage, ils doivent ajuster leurs dépenses de consommation en fonction des nouvelles disponibilités. Les plus marqués sont les ajustements effectués par les ménages les plus vulnérables, qui subissent de rudes chocs et des variations considérables de leur pouvoir

d'achat. Partout, les fluctuations de prix et de revenu provoquent des réactions et des changements du niveau de consommation des ménages vulnérables.

Mais ces facteurs listés plus hauts ne sont pas toujours défavorables aux pauvres. Par exemple, les indicateurs économiques peuvent être bons (hausse régulière des prix par exemple), ou des services sanitaires efficaces ou encore la vulgarisation de nouvelles technologies de production performantes. Mais, quand bien même les tendances se révèlent favorables aux pauvres, ils en bénéficient rarement à cause du manque de ressources ou ne disposant pas de structures qui travaillent en leur faveur. La faiblesse des opportunités sociales et des potentialités des individus constitue donc un moteur du processus de pauvreté. Ceci est d'autant plus vrai en présence d'un cumul des désavantages.

Les cinq formes de capital nécessaires aux moyens d'existence durables sont :

ü Le capital naturel : ressources naturelles comme la terre, les forêts, l'eau et les pâturages,

ü Le capital physique : biens privés pouvant servir à accroître la productivité de la main-d'oeuvre et de la terre (animaux de ferme, outils et machines) et infrastructures économiques publiques (par exemple routes et électricité) et infrastructures sociales (par exemple écoles et hôpitaux),

ü Le capital financier : liquidités (revenus et épargne) et biens de trésorerie aisément convertibles,

ü Le capital humain : santé, nutrition, niveaux d'instruction et savoir-faire,

ü Le capital social : le réseau de relations sur lesquelles les gens peuvent compter pour élargir leurs possibilités de revenus. Celles-ci comprennent les liens de parenté, d'amitié, les relations patron-client, les arrangements de réciprocité, l'appartenance à des groupes formels et à des organisations qui accordent des prêts, des dons et d'autres formes d'assurance.

Il faut toute une série de biens, pour obtenir des effets positifs sur les moyens d'existence : aucune catégorie individuelle ne suffit pour obtenir les nombreux résultats recherchés. L'accès des pauvres à chacune de ces catégories de biens est plutôt limité Ceux qui disposent davantage de biens ont un plus grand choix, et une plus grande capacité de gagner leur vie en réorientant leurs stratégies. La capacité de sortir de la pauvreté est fortement liée à l'accès à ces biens.

Les politiques, institutions et processus sont représentés par les structures d'intervention, les organisations tant privées que publiques, la législation, les politiques de développement, les institutions, la culture, le genre...etc, qui à travers les structures et processus de transformation ont une profonde influence sur l'accès aux capitaux. Elles les

créent (infrastructures, nouvelles technologies, existence d'institutions locales qui renforcent le capital social), déterminent l'accès à ces capitaux (les institutions qui régulent par exemple l'accès aux ressources naturelles) ou influencent le taux d'accumulation de ces capitaux (la taxation, ou les politiques qui affectent le recours à certaines stratégies de subsistance). Le rôle des institutions formelles ou tacites (normes et valeurs) prend une place de choix dans l'analyse des comportements individuels. L'introduction des normes et des valeurs, fondatrices des droits et obligations des individus, permet de considérer les contraintes institutionnelles qui pèsent sur eux et conditionnent leurs choix. La pauvreté tend alors à être analysée comme le résultat d'un processus d'exclusion socio-économique. Elle est vécue différemment par les hommes et les femmes et les mécanismes d'appauvrissement ne sont pas les mêmes. La pauvreté est un phénomène complexe à dimensions multiples qui est perçu différemment, en fonction de l'implantation géographique, du type de communauté, de l'âge, du sexe et des niveaux existants de services et d'infrastructures. En faisant appel aux notions de fluctuations et de vulnérabilité, on a pu constater que chez les populations démunies, les périodes de pauvreté alternaient avec des périodes d'amélioration et que ces notions variaient en fonction du sexe. Il a ainsi été démontré que les contraintes saisonnières, notamment dues à l'accroissement de la morbidité, étaient plus lourdes pour les femmes puisque celles-ci devaient consacrer davantage de temps à la famille, alors qu'elles en avaient déjà moins que les hommes (IDS, 1994). L'étude des fluctuations aux différentes étapes de l'existence révèle elle aussi, que les différences d'âge entre le genre, et d'autres différences sociales influencent significativement les moyens d'existence au sein des ménages et des communautés. Aussi, le contrôle de ces moyens est-il dynamique. Leur stock également fluctue en fonction de la saisonnalité et des contingences de la vie. Il a été montré que les femmes enceintes, allaitantes ou âgées, par exemple, sont plus particulièrement exposées à la pauvreté. Les femmes sont aussi plus vulnérables en raison de leur exclusion du droit à la propriété et de leur dépendance à l'égard des hommes Ainsi, le divorce ou l'abandon peut les plonger dans le dénuement. En outre, elles ont une moindre capacité de gain et moins de débouchés professionnels.

Les stratégies de survie sont représentées par la manière dont les individus combinent et utilisent leurs capitaux pour atteindre leurs objectifs ou arriver au résultat escompté. Les stratégies de survie sont généralement présentées comme de " bonnes choses " alors qu'elles consistent parfois à choisir le moindre mal entre des priorités relatives, par exemple, entre un bienfait pour l'environnement et un bienfait pour l'être humain, entre la subsistance immédiate et l'adaptation durable à un changement irréversible (Davies, 1994). Ces objectifs ou résultats sont : une amélioration du bien-être, une réduction de la vulnérabilité, une

amélioration de la sécurité alimentaire, un accroissement du revenu, une utilisation durable des ressources naturelles.

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