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La licéité de l'emploi de la force par une organisation internationale: cas de l'OTAN en Libye en 2011

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par James MUHINDO BUNDUKI
Université catholique du Graben - Licence 2011
  

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CHAPITRE II : ANALYSE CRITIQUE DE L'INTERVENTION DE
L'OTAN EN LIBYE

L'action humanitaire, dont le droit à l'assistance est reconnu et consacré par le droit international humanitaire, tire ses fondements juridiques des conventions de Genève de 1949 et de leurs protocoles additionnels de 1977.

Elle est cette forme de coopération qui appel à la nécessité de venir en aide aux victimes des conflits armés et des catastrophes naturelles et industrielles. Visant à soulager partout la misère et la souffrance des hommes, elle met en avant l'homme en tant que sujet, heurtant ainsi de font le sacro-saint principe de souveraineté et de non-ingérence qui régit les relations entre les Etats et que proclament encore le droit international, les résolutions de l'Assemblée Générale des Nations Unies et du Conseil de sécurité. Mais que faire pour aider les hommes qui sont massacrés par leur propre gouvernement ? Voilà la question qui pousse l'action humanitaire vers l'ingérence c'est-à-dire vers une nouvelle conception de la souveraineté des Etats. Celle-ci doit s'assouplir et se remodeler quand la souffrance humanitaire lance un cri d'appel.

Mais aujourd'hui, force est de constater que ce grand élan d'amour, de générosité et de solidarité, issu de la grandeur du coeur des hommes s'est perverti et transporte désormais avec elle des arrière-pensées, des non-dits, des égoïsmes, bref des motivations inavouées et inavouables. Cela s'est traduit par la Kyrielle de mots et de combinaisons qu'exprime aujourd'hui l'ingérence humanitaire et qui cachent mal ses motivations profondes. D'une part, nous avons les mots droit, devoir, obligation et, d'autre part, assistance, intervention, ingérence qui peuvent se combiner en un florilège d'expressions auxquelles il faut adjoindre le qualificatif humanitaire ; droit d'assistance, d'intervention ou d'ingérence humanitaire, devoir d'assistance, d'intervention, ou d'ingérence humanitaire, etc.

Dans ce chapitre, nous allons analyser les fondements de l'intervention (SECTION I), mais aussi les exceptions au principe de non intervention (SECTION II).

SECTION I. ANALYSE DES FONDEMENTS

Dans cette section, il sera question de faire l'analyse du fondement doctrinal (I), et l'absence d'un fondement juridique incontestable (II). Mais avant d'en arriver voyons d'abord le fondement doctrinal.

§1. Le fondement doctrinal

Par fondement doctrinal nous entendons la morale internationale et la solidarité humaine (A) mais aussi l'idéologie des droits de l'homme (B).

A. La morale internationale et la solidarité humaine.

Les partisans de la doctrine du droit d'ingérence basent leur argumentation juridique sur l'examen de la pratique contemporaine des interventions armées. Depuis la deuxième guerre mondiale, on assisté à une riche pratique d'interventions armées.

Mais, le fait de constater une telle pratique ne peut démontrer que le principe de non recours à la force soit assoupli. En elle-même, cette pratique ne suffit pas pour établir une coutume. C'est dans ce sens que la CIJ, dans l'affaire des « Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et

contre celui-ci, considère que pour déduire l'existence d'une règle coutumière, iiest suffisant que les Etats y conforment leur conduite de manière générale.

Pour la Cour alors, la pratique ne peut être prise en compte que si elle illustre un accord entre les Etats, qui constitueraient une opinio juris démontrant l'existence d'une règle coutumière.

Mais, la doctrine favorable au droit d'ingérence armée unilatérale évoque des cas particuliers d'interventions armées afin d'appuyer son argumentation. Le problème qui se pose est d'examiner les précédents évoqués tout en essayant d'isoler les considérations politiques des véritables positions juridiques. Ceci est beaucoup moins évident lorsque les Etats intervenants se réfugient derrière des motifs d'ordre humanitaire pour justifier une intervention armée unilatéral.

Un des précédents, évoqués par la doctrine favorable au droit d'ingérence armée humanitaire et qu'on va voir, est l'intervention de la

Tanzanie en Ouganda en 1979. En fait, au mois de janvier 1979, les troupes tanzaniennes pénètrent sur le territoire Ougandais. Le président Nyerere déclare que le gouvernement d'Amin Dada est un gouvernement des « voyou » et que le peuple Ougandais dispose bien du droit de le renverser. Quelques mois plus tard, un nouveau gouvernement est formé, (après coopération des troupes tanzaniennes avec les rebelles ougandais), et déclare qu'il va défendre les droits de la personne.

Pour les auteurs favorables au droit d'ingérence humanitaire, l'intervention en question vient appuyer la doctrine de l'intervention d'humanité puisque la motivation des Etats intervenant était de lutter contre un régime tyrannique qui violait les droits humains. C'est ainsi, que Teson prétend qu'il s'agit, ici du précédent le plus claire en faveur du droit d'intervention armée unilatérale pour des motifs humanitaires69. Mais, cette intervention dans le cadre de la Tanzanie en Ouganda est loin d'être justifiée par des considérations humanitaires. D'une part, le président tanzanien quand les troupes de son pays pénétraient le territoire ougandais il invoquait déjà, la légitime défense. Il ne faut pas oublier quelque semaine avant l'intervention tanzanienne, les troupes ougandaises avaient pénétré et occupé une partie du territoire tanzanien. La Tanzanie avait protesté officiellement et avait déclaré qu'elle ailler riposter (chose qui est faite quelques semaine plus tard). On voit alors, que le précédent invoque par la doctrine entre dans la considération humanitaires. C'est ainsi, que le gouvernement tanzanien a été soutenu de plusieurs Etats.

Un autre précédent, évoqué par la doctrine, est l'intervention indienne au Bengladesh qui conduit, en 1971, cet Etat à l'indépendance. Cette action a été présentée comme une intervention destinée à mettre fin aux massacres de la population Bengali par les forces pakistanaises. Là encore, la justification officielle par l'Inde était la légitime défense, puisque, selon New Delhi, le Pakistan avait auparavant bombardé des villages sur le territoire indien. Les considérations humanitaires en l'espèce n'avaient servi

69 (F.R)TESON, Humanitarian intervention : au inquiry into law and morality, Dobbs ferry (New York), Transnationale Publishers, 1988, pp.167-168

que pour convaincre politiquement les autres Etats et non comme fondement juridique.

On pourrait encore évoquer, comme exemple, l'intervention des Etats-Unis à la Grenade en 1983. En l'espèce, les représentants américains ont mis l'accent sur les motivations humanitaires. Cependant, les Etats-Unis ont basé leur défense sur d'autres arguments sans rapport avec la notion d'intervention humanitaire. Selon les américains, l'intervention était justifiée par l'appel du gouverneur général de la Grenade, en donnant une autorisation à l'organisation régionale des caraïbes et pour la protection des ressortissants américains établis sur l'île. Il faut enfin, souligner que cette intervention a fait l'objet d'une large condamnation internationale et elle a été condamnée en 1983, par la résolution 38/7 de l'Assemblée générale.

Par contre, la guerre de Libye a lourdement malmené le droit humanitaire. La « protection des populations civiles » est demeurée une notion abstraite au détriment des Libyens transformés en victimes des bombardements, du racisme et de la xénophobie, en miliciens armés par l'étranger ou par l'Etat, en personnes déplacées fuyant les lieux de combat. Un phénomène de fuite hors du territoire Libyen de centaines de milliers de travailleurs étrangers, dans les pires conditions de précarité, s'est ajouté dans une quasi indifférence des Etats occidentaux et dans l'impuissances des Etats voisins.70

Les opérations de l'OTAN dont la force de frappe a été constituée par l'armée française, son aviation et ses services spéciaux, n'ont rien respecté le droit humanitaire, quelques que soient les réactions de vertu outragé d'un Juppé lorsqu'on « ose » lui signaler les victimes civiles libyennes des bombardements de l'OTAN71.

Le rapport Libye : un avenir incertain. Compte rendu de mission d'évaluation auprès des belligérants libyens (paris, mai 2011) établi par une

70 R.CHARVIN, L'intervention en Libye et la violation de la légalité internationale : un retour à la pseudo « morale internationale » du XIXe siècle, Décembre, 2011, p.5-6

71 Le professeur Gérand de la pradelle dénonce le comportement de certains juristes Occidentaux qu'expliquent aux Etats major des armées et parfois aux officiers engagés sur le terrain comment contourner les « obstacles » dressés par le droit humanitaire qui contrarie les pratiques militaires « efficaces ». Cf. « Des faiblesses du droit humanitaire. Etats puissants et mouvements de résistance, sous la dir.D.Lagot, l'Harmattan, 2010, p33 et S.

délégation d'experts (dont Y.Bounet), sur lequel les médias ont fait silence quasi absolu, a constaté que la révolution libyenne n'est pas une révolte pacifique, que les (( civils », dès le 17 février, étaient armés et qu'ils ont attaqué les bâtiments civils et militaires de Benghazi : il n' y a pas eu en Libye de grandes manifestations populaires pacifiques réprimées par la force.

En tant que juriste, la première observation qui s'impose est le silence assourdissant des internationalistes, de la même nature que celui qui a pour le moins hypothèque la scientificité de leurs jugements pour l'Irak, le Kosovo72, l'Afghanistan ou la Côte d'Ivoire, par exmeple. La doctrine dominante chez les internationalistes demeure (( impassible )) : les manuels les plus récents ne témoignent d'aucune inquiétude, bien qu'ils évitent d'illustrer leurs propos académiques d'exemples non exemplaires.

Pour nombreux d'entre eux, les doctes professeurs de droit international, se sont fait ultra-cicéroniens : (( Summum jus, summa injuria )). Pour Cicéron, en effet, un (( excès )) de droit amène les pires injustices. Alignés derrière le personnel politique majoritaire en Occident, les juristes considèrent que le droit international lorsqu'il limite par trop le (( messianisme )), y compris guerrier, des Etats-Unis, de la France, de la Grande Bretagne, devient destructeur des valeurs civilisatrices dont il est porteur. L'idéologie, qu'ils récusent formellement pour eux-mêmes, est omniprésente dans leurs analyses : (( la légitimité )) prend le pas sur la (( légalité )), ce qui, pour les juristes, peut surprenant73.

En réalité, ils admettent implicitement que les Etats occidentaux s'autorégulent dans l'intérêt du bien commun. Il ne s'agit pas d'un mépris de la légalité chez ceux qui se réclament hautement de (( l'Etat de droit )) : pour ces juristes, les puissances occidentales se situent (( au-dessus » d'un (( juridisme inadapté )) au nom de la (( mission » supérieure qu'ils se doivent d'accomplir soins entraves. Etant donné l'inconvenance qu'il y a à mettre en cause la politique étrangère des Etats-Unis et leur conception anti-

72 Le professeur Guilhaudis, par exemple, dans son manuel de relations internationales contemporaines, Litec.2002, ose intituler un paragraphe « l'interminable éclatement violent de la Yougoslavie, malgré l'ONU et l'OTAN, p.730

73 R.CHARVIN, op.cit, p.7

multilatéraliste, on ne saurait faire non plus le procès des autorités françaises lorsqu'elles justifient (depuis le « Bettato-Kouchnérisme » qui a fait florès) leurs ingérences au détriment de la souveraineté des petits et moyens Etats au nom des droits humains.

Le président Sarkozy a poussé très loin le « Bettatisme », en 2010-2011, lorsqu'il a étendu le champ de l'ingérence au contentieux électoral : la France s'est méme faite, aux côtes des Etats Unis et de l'ONU, juge constitutionnel en lieu et place de l'instance ivoirienne compétente pour user en définitive de la force armée afin de changer le régime d'Abidjan, y compris au prit d'une tentative d'assassinat du président Laurent Gbagbo74.

La crise libyenne est allée encore au-delà : elle a permis de consacrer la notion de « révolution démocratique » parmi les causes légitimant la mise à l'écart de la légalité internationale. Les juristes rétablissent ainsi la vieille conception qui distinguait jusqu'au milieu du XXe siècle (voir les démonstrations du professeur Le Fur, par exemple, dans les années 1930-1940) les sujets relevant du droit international et ceux inéligibles à ce méme droit, créant ainsi les conditions d'une nouvelle hégémonie impériale Occidentale.

Néanmoins, la distance pouvant séparer la pensée juridique dominante et les positions politico-médiatique officielles tendant à disparaître, le droit international des manuels et des revues académiques demeurent un long fleuve tranquille, à l'image des pages de Wikipédia qui lui sont consacrées75.

Les éminents auteurs se consacrent aux problèmes techniques de l'Union Européenne, « planète » plus politiquement sérieuse, tandis que d'autres, tout aussi éminents, notent « la résistance des souverainetés devant les progrès du droit international ».

A l'occasion d'événements récents, et surtout à partir du moment où les troupes occidentales interviennent en Afrique, certains

74 Une procédure a d'ailleurs été ouverte en France contre l'armée Française pour « tentative de meurtre de L. Gbagbo ~. L'arrestation du président ivoirien s'est en effet produite par la collaboration des forces françaises et ivoiriennes, après un intense bombardement par la force de la Licorne de la résidence de Laurent Gbagbo.

75 Cf. R.CHARVIN, De la prudence doctrinale face aux nouveaux rapports internationaux, in Mélanges Touscoz, France Europe Editions, 2007, p.18.

auteurs commencent à parler de la remise en cause de la prohibition de l'intervention humanitaire. Ainsi, Bernard Kouchner affirmait que le droit d'ingérence, comme un retour de morale, a trouvé chez les Kurdes du Nord de l'Irak sa première application officielle76.

On ne peut en aucun cas prétendre qu'il serait licite pour un Etat de massacrer sa propre population sous le prétexte que tout ce qui se passe à l'intérieur des frontières relève des ses affaires intérieurs.

De nombreux juristes ont fortement critiqué la conception du droit international traditionnel que véhiculent les auteurs favorable au droit d'ingérence. La totalité des Etats ont formellement reconnu qu'ils devaient respecter des droits fondamentaux comme le droit à la vie, le respect de l'intégrité physique ou l'interdiction du génocide, à l'égard de leurs propres ressortissants et donc sur leur propre territoire. C'est « souverainement » qu'ils ont décidé de s'engager, et c'est dès lors « souverainement » qu'ils doivent respecter leurs obligations.

En cas de violation massive, on peut mettre en oeuvre des rétorsions ou des représailles sur les plans politique, diplomatique, économique ou financier. Par exemple, un embargo est envisageable, même en dehors d'une intervention de l'ONU, à l'égard d'un Etat ou d'un groupe contrevenant aux droits les plus élémentaires de la population.

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"Nous voulons explorer la bonté contrée énorme où tout se tait"   Appolinaire