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La justiciabilité du droit à l'eau, une perspective indienne

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par Morgane Garon
Université de Rouen - Master 2 Pratique européenne du droit  2016
  

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§ 2 -- L'absence d'autonomie du droit à l'eau

Puisque le droit à l'eau n'est pas reconnu directement par aucun instrument juridique indien, il est caractérisé comme un droit subordonné et nécessaire pour la réalisation des droits humains fondamentaux reconnu directement par le droit indien comme l'article 21 qui consacre le droit à la vie. B. Favreau désigne le droit à l'eau comme un droit de portée limitée et fragmentée169. Dans ce contexte, la raison est probablement liée à deux facteurs. Tout d'abord la technique d'interprétation du juge indien. L'indivisibilité des droits humains telle qu'entendue par la jurisprudence indienne rend invisible le droit à l'eau et met en cause son autonomie170. Le droit à l'eau est alors entendu comme interdépendant et complémentaire du droit à la vie. L'arrêt Francis Coralie Mullin171, l'eau l'a cantonné à un aspect du droit à la vie, de la dignité humaine. De plus, le droit à l'eau est compris comme essentiel à la réalisation des différents droits humains nommément le droit à la vie, à la dignité, à la santé, à l'environnement.

Ce qu'induit son absence d'autonomie c'est la question de sa protection. « L'accès à l'eau fait l'objet d'une reconnaissance implicite entraînant une protection indirecte de celui-ci »Y' Cette protection indirecte ou par ricochet n'assure au droit à l'eau une protection que « dans la mesure où la réalisation de celui-ci est nécessaire à la mise en oeuvre d'un autre droit expressément prévu »Y' De même, c'est sur l'ensemble de l'effectivité du droit à l'eau que cette reconnaissance relative a un impact puisque

1681bid.

169FAVREAU (B.), «Le droit de l'Homme à l'eau », l'Annuaire international des droits de l'homme, 2006, vol.1, p.261 10What Price for the Priceless?: Implementing the Justiciability of the Right to Water, op.cit p. 1085

"11981 SCR (2) 516

172CUQ, Marie. L'eau en droit international: convergences et divergences dans les approches juridiques, op.cit., p. 58 13lbid, p. 59

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«l'attention portée aux problématiques liées à l'accès à l'eau paraît dont limitée et unidimensionnelle »174. En effet, la juge ne pourra traiter de la question du droit à l'eau seulement si la violation du droit à la vie, du droit à la santé, de la dignité ou de l'environnement est alléguée devant lui . Ainsi seuls les aspects en relation avec les droits cités sont examinés par le juge au détriment de la réelle portée que peut et doit avoir le droit à l'eau. Un auteur a également pu critiqué l'indissociabilité qui était faite entre le droit à l'eau et le droit à la vie175. Il reproche le fondement juridique d'un droit social à partir d'un droit civil et politique ; pour lui, cela a tendance à orienter la protection du droit à l'eau et les obligations définies par le juge. Ainsi, comme dans le contentieux très développé des eaux polluées, le droit à l'eau en droit indien serait assorti principalement d'obligations négatives, ce qui entacherait sa réalisation et notamment la question de l'approvisionnement en eau comme composante du droit à l'eau.

Ensuite, il est probable que le juge indien ne désire pas étendre la portée de l'eau ni le développer outre mesure. Il est curieux que le juge ait été en effet particulièrement entreprenant s'agissant du droit à l'alimentation ou à l'éducation mais n'ait pas témoigner du même engouement pour le droit à l'eau (alors que la corrélation avec le droit à l'alimentation était aisée). La Cour Suprême possède des instruments pour reconnaître un droit à l'eau autonome dans son arsenal juridique. L'article 15 (2)176 de la Constitution indienne contenu dans la partie III sur les droits fondamentaux au chapitre « droit à l'égalité » reconnaît notamment l'interdiction d'empêcher les citoyens d'avoir accès à l'utilisation des puits, des réservoirs, des ghats en raison de la religion, de la race, de la caste, du sexe, du lieu de naissance. La Cour Suprême n'a jamais utilisé ce fondement pour consacrer un droit à l'eau ; pourtant la non-discrimination est évoquée dans l'OG n°15 comme une garantie du droit à l'eau177.

Une autre possibilité s'offrait à la Cour. Bien que la réception du droit internationale obéisse à la théorie dualiste, l'article 51 (c) de la Constitution indienne exige de l'État qu'il

174Ibid, p. 60

'What Price for the Priceless?: Implementing the Justiciability of the Right to Water, op. cit. p. 1085

16Article 15(2) de la Constitution indienne «No citizen shall, on grounds only of religion, race, caste, sex, place of birth or any of them, be subject to any disability, liability, restriction or condition with regard to

(a) access to shops, public restaurants, hotels and palaces of public entertainment; or

(b) the use of wells, tanks, bathing ghats, roads and places of public resort maintained wholly or partly out of State funds or dedicated to the use of the general public »

"'Point 13, Observation générale n°15

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honore les conventions internationales. Or l'Inde est partie à la CEDEF qui dans son article 14§2 prévoit le droit à l'eau. Dans l'arrêt Vishaka vs State of Rajasthan178, la Cour Suprême a abordé la question du harcèlement sexuel à la lumière des dispositions de la CEDEF. En raison de l'absence de loi sur le sujet, la Cour ordonna à l'Etat de se saisir de la question et d'adopter une loi appropriée et conforme aux dispositions de la CEDEF. En attendant, elle rendit une ordonnance provisoire faisant acte de réglementation inspirée des dispositions de la CEDEF. Ainsi la Cour Suprême peut de façon similaire s'inspirer de la CEDEF ou de la CIDE pour justifier d'un droit à l'eau. B. Rajagopal reproche à la Cour de choisir ses causes et en fonction de faire preuve de plus ou moins d'audace179 ; peut être le droit à l'eau souffre-t-il d'un intérêt seulement modéré de la Cour à son égard.

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