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Le droit de garder silence: mise en oeuvre de l'équitabilité du procès en droit international des droits de l'homme

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par Briba Mussa Mbuya
Université de Goma - Licence 2015
  

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§2. Les exigences du procès équitables

Nous allons successivement analyser les composantes du droit au procès équitable. Il s'agira d'analyser le droit d'accès à un tribunal ce qui nous conduira au droit à un tribunal indépendant et impartial (A), le droit à la présomption d'innocence (B), le droit au délai raisonnable (C), le droit à l'égalité des armes et à une procédure contradictoire (D) et en fin le droit de saisir un tribunal supérieur (E).

A. Le Droit d'accès à un tribunal indépendant et impartial

Le droit à un tribunal implique le droit à un juge au sens strict, le droit d'un recours et le droit à un bon juge63(*). Il est défini comme étant le droit pour toute personne physique ou morale ou étrangère, d'accéder à la justice pour y faire valoir ses droits. Il s'agit d'un principe fondamental dans le sens où il comporte une valeur qui est celle de toujours pouvoir s'adresser à un tribunal pour trancher une contestation juridique et empêcher ainsi le recours à la vengeance64(*). C'est aussi un principe essentiel au fonctionnement de l'Etat de droit. L'Etat de droit est un Etat qui doit respecter la loi et ne commettre aucun abus vis-vis de ses habitants et des étrangers se trouvant sur son territoire65(*) car s'il n'y a pas d'accès au droit et à la justice, il n'y a ni justice ni droit. L'Etat de droit devient en ce moment là un événement.

Mais qu'est-ce qu'un tribunal ? Professeur Téléphone Kavundja estime que trois conditions doivent être réunies pour qu'une institution soit qualifiée de tribunal : le tribunal doit être créé par la loi, le tribunal doit être indépendant et impartial et respecter les principes fondamentaux de procédure, le tribunal doit trancher les prétentions selon les règles de droit. Cette condition reflète le principe de l'Etat de droit. Si une institution ne remplit pas cette condition, ce n'est pas un tribunal, c'est donc autre chose. Le mot " doit être créé par la loi" signifie non seulement la base légale de l'existence même du tribunal mais aussi la composition du siège dans l'affaire66(*).

Un juge qui n'est pas impartial et indépendant est-il encore un juge ? Ces qualités attendues du juge sont consubstantielles à la notion même de justice. Il faut y voir des principes universels de procédure (...) Fréquemment associés, l'indépendance et l'impartialité n'en sont pas moins distinctes, la première garantissant le juge à l'égard de ceux dont il tient son pouvoir de juger (l'autorité de nomination : Le pouvoir exécutif, les électeurs) ; la seconde garantissant le justiciable du juge lui-même.

1. Tribunal impartial

Le principe d'impartialité est l'une des clés de voûte du système pénal67(*) Ainsi l'exige l'idéal de justice. Le PICDP dispose à son article 14 que  « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil.68(*)». Tout justiciable a le droit d'être jugé sans partialité ; il s'agit là d'un droit primordial qui est une condition sine qua non du système judiciaire tout entier.

L'impartialité est une notion difficile à définir ; elle vise une attitude humaine qui concerne directement l'action du juge au cours du procès qui ne doit pas se montrer partial69(*). Est partial « celui qui prend parti pour ou contre une personne, une chose, un groupe, sans souci de justice ni de vérité, celui qui fait preuve de parti pris ». L'impartialité peut donc être définie comme étant la qualité de celui qui apprécie ou juge une personne, une chose, une idée sans parti pris favorable ou défavorable. Cette notion d'impartialité est étroitement liée à celle d'indépendance ; elles sont rarement évoquées l'une sans l'autre mais nous verrons après présentation du principe d'indépendance où se situe leur distinguo.

L'impartialité est la garantie essentielle d'un procès juste et équitable. Elle concerne non seulement la décision elle-même mais aussi le processus qui a conduit à cette décision. Ce devoir oblige le magistrat à veiller à ce que l'impartialité se reflète dans l'exercice de ses fonctions. Il les exerce sans favoritisme ni parti pris. Il doit faire preuve d'objectivité et se prémunir notamment de l'influence de son milieu, de sa culture, de ses préjugés et de ses conceptions religieuses, ethniques ou philosophiques comme de ses opinions politiques70(*).

Le magistrat, dans l'exercice de ses fonctions, doit éviter tout conflit d'intérêts ainsi que toute situation susceptible d'être perçue comme tel71(*). Il doit veiller à ce que sa conduite, dans et hors l'exercice de ses fonctions, maintienne et augmente la confiance du public, du barreau et des plaideurs vis-à-vis de l'appareil judiciaire, de façon à prévenir au maximum les demandes de récusation. Il doit s'abstenir de faire tout commentaire sur une affaire dont il est saisi ou il va être saisi, susceptible de faire craindre qu'il affecte le résultat du procès ou de faire obstacle au caractère équitable de ce procès72(*).

Tout citoyen accusé de crime devait pouvoir comparaitre devant une cour de justice impartiale73(*). Pour garantir cette impartialité décriée, la fonction du juge s'exerce en collège : la décision juridictionnelle est le fruit d'une délibération collective. La collégialité offre donc à la justice des garanties d'impartialité et de réflexion74(*).

Il y a collégialité des juridictions lorsque l'instruction à l'audience a été menée et la décision rendue dans un procès par plusieurs juges75(*). Cette collégialité a rejoint la philosophie de MALEBRANCHE qui, depuis son temps a estimé je cite « je me trompe si je juge des autres par moi-même. Je suis sujet à certaines passions, j'ai de l'amitié ou de l'aversion pour telles ou telles choses ; et je juge que les autres me ressemblent : ma conjecture est souvent fausse. Ainsi la connaissance que nous avons des autres est fort sujette à l'erreur, si nous n'en jugeons que par les sentiments que nous avons de nous-mêmes76(*) » fin de citation. Les tribunaux de grande instance siègent au nombre de trois juges (article 16 de la même loi organique), les cours d'appel, trois juges au moins (article 22 de la même loi organique) et la Cour de cassation, siègent au nombre 5 membres au moins (article 32 alinéa 2 de la même loi organique). Comme nous le constatons, la collégialité est devenue la règle en droit judiciaire congolais. Les auteurs favorables à la collégialité en voient trois. D'une part, combiné avec le secret de délibéré, la collégialité permet de sauvegarder l'indépendance du magistrat contre les éventuelles pressions extérieures, la décision étant anonymes77(*). D'autre part, elle réduit le risque d'erreur judiciaire parce que de la discussion jaillit la lumière. En fin, elle permet la formation des jeunes magistrats au contact de leurs ainés. « juge unique, juge inique », a-t'on dit78(*).

Il faut remarquer que parfois le tribunal, employé seul, désigne plutôt une juridiction collégiale qu'un juge unique79(*). Il résulte que le droit judiciaire congolais a innové et répond même à la philosophie du vocabulaire juridique de Gérard CORNU en supprimant la forme du juge unique au tribunal de paix80(*).

Nous sommes auteur d'un point de vue critiquant la philosophie contenue dans le principe de la collégialité de juges dans les juridictions militaires et de paix. En fait, la collégialité des juges de ces juridictions existe du moins en apparence ; avec l'existence des juges assesseurs. Jean PRADEL pense que l'évolution des sciences criminelles, notamment les progrès de la criminologie, la diversification des sanctions et la complexité croissante des certains secteurs (...), rend indispensable une spécialisation du juge répressif81(*). Dans la philosophie de rendre justice mieux une bonne justice, il est demandé que les justiciers aient la maitrise du droit. La compétence professionnelle est une exigence fondamentale pour l'exercice correct de la charge judiciaire. Il est exigé du magistrat des qualités intellectuelles énormes. Mais lorsque dans la composition, il y a inclusion des assesseurs, la question reste celle de savoir la qualité de la décision qui y sera rendue. Sur le plan formel, le vote est rassurant mais encore et surtout sur le plan de fond, le délibéré est confronté aux capacités de membres de la composition de donner des points de vue juridiquement profonds. Consécutivement, on assiste un président du tribunal qui seul maitrise le droit et émet un point de vue foncièrement influençable du moins capable d'influer les assesseurs même lorsque ces derniers ont donné leur point de vue les premiers. L'article 255 du code de justice militaire dispose que le président pose à chaque juge et juge assesseur la question de savoir si le prévenu est coupable d'avoir commis le fait de la prévention tel que spécifié dans le dispositif de la décision de renvoi, ou de la traduction directe82(*). N'est-ce pas une collégialité apparente ?

Ce principe d'impartialité n'est pas sans poser un certain relativisme sur le terrain pénal du moins pour une certaines catégories de juges en l'occurrence ceux des enfants mais aussi les magistrats de parquet, ce principe semble être exclu. Les juges pour enfant agissent en matière pénale même dans d'autres, pour l'intérêt de l'enfant. C'est ainsi qu'il ne prononce pas à proprement parlée une décision imprimant un caractère impartial, il prend de mesures nécessaires pour la rééducation de l'enfant.

Lorsque les justiciables ont des raisons à croire que l'impartialité est périlleuse, la loi leur a donné la possibilité, en vue de garantir l'impartialité du juge, d'engager la procédure de récusation, le déport et le renvoi pour cause de suspicion légitime ou de sûreté publique.

Ce qu'il convient de préciser ici, c'est le fait que la loi organique n°13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l'ordre judiciaire n'a pas dit de manière tranchée que les règles de déport et de récusation sont pas applicables aux greffiers. Mais le professeur Antoine Rubbens estime que les greffiers sont légitimement considérés comme « empêchés » de siéger dans une cause où ils sont partie ou dans laquelle eux-mêmes ou l'un de leurs proches a un intérêt personnel83(*). Le Professeur Kavundja partage et cela notre position, cette analyse dans la mesure où le justiciable est en droit d'attendre du tribunal (y compris le greffier faisant partie de la composition du siège) qu'il présente toutes les garanties de l'impartialité84(*).

Un autre principe est l'indépendance de la justice ou, tout au moins, l'indépendance qui résulte de la séparation des pouvoirs. Si l'on veut que le citoyen puisse exposer son cas devant un juge impartial, il est nécessaire que les tribunaux soient à l'abri de toute pression politique. Il ne faut pas que les détenteurs du pouvoir politique aient la possibilité de démettre les juges de leurs fonctions uniquement parce qu'ils n'apprécient pas les jugements que ceux-ci ont rendus85(*).

Après avoir été impartial, le juge doit également être indépendant. L'indépendance de la justice est aussi d'une importance on ne peut plus capitale.

* 63 Idem, p.181.

* 64 Ibidem.

* 65 Ibidem.

* 66 T. KAVUNDJA MANENO, Op. Cit. pp.181-182.

* 67 « Impartialité du juge pénal », p.1. Disponible sur http://www.droit.univnantes.fr/m2dp/upload/word/Expose_Impartialite_Juge_Penal.doc. consulté 29 Janv.2016 à 14h35.

* 68 Article 14 point 1 du Pacte International sur les droits civils et politiques Adopté et ouvert à la signature, à la ratification et à l'adhésion par l'Assemblée générale des Nations Unies dans sa résolution 2200 A (XXI) du 16 décembre 1966 et entrée en vigueur le 23 mars 1976, conformément aux dispositions de l'article 49. Cet article dispose que le présent Pacte entrera en vigueur trois mois après la date du dépôt auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies du trente-cinquième instrument de ratification ou d'adhésion

* 69 « Impartialité du juge pénal » Op. Cit. p.2.

* 70 Ce devoir d'impartialité est prévu aux articles 6 à 13 du Code d'éthique et de déontologie des magistrats, JORDC, n° spécial, 09 janvier 2013.

* 71 T. KAVUNDJA MANENO, Cours de Déontologie de magistrats, Goma, UNIGOM, Fac Droit, notes de cours inédit. 2016, p.

* 72 T. KAVUNDJA MANENO, Op. Cit. p.

* 73 J. A WIDNER, Construire un Etat de Droit. Francis Nyalali et le combat pour l'indépendance de la justice en Afrique, Nouveaux Horizons, Paris, 2001, p.1.

* 74 J. VAN COMPERNOLLE, Introduction aux principes du droit: Droit judiciaire, Bruxelles, UCL, Faculté de Droit, 2ème candidature en droit, Notes de Cours, 1992-1993, p.40.

* 75 T. KAVUNDJA MANENO, Op. Cit. p.62.

* 76 MALEBRANCHE, De la Recherche de la Vérité, cité par C. BIRMAN et alii, Philosophie, éd. Nathan, 1999, p.76.

* 77 J. PRADEL, Procédure pénale, 13e éd. CUJAS, Paris, 2006/2007, p.45.

* 78 Ibidem.

* 79 G. CORNU, Vocabulaire juridique, 7ème édition, revue et augmentée avec locutions latines, PUF, 2005, V° Tribunal. p.919.

* 80 L'article 10 de loi organique n°13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l'ordre judiciaire prévoit que les tribunaux de Paix siègent au nombre de trois juges en matière répressive.

* 81 J. PRADEL, Op. Cit. p .44.

* 82 Loi n°023/2002 du 18 novembre 2002 portant code de justice militaire, in Journal Officiel - Numéro Spécial - 20 mars 2003.

* 83 A. RUBBENS, Le droit judiciaire zaïrois, Tome II, Kinshasa, éd. PUZ, 1978, p. 22. Cité par T. KAVUNDJA MANENO, P.485.

* 84 T. KAVUNDJA MANENO, Op. Cit.

* 85 J. A WIDNER, Op. Cit. p.2.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld