WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Les délais dans le contentieux de l'excès de pouvoir au Bénin

( Télécharger le fichier original )
par Théodor Enone Eboh
Université d'Abomey-Calavi/(ex-Université Nationale du Bénin - Maà®trise 2004
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

RECEVOIR LE RECOURS ADMINISTRATIF

Le recours administratif doit être dirigé auprès des autorités administratives. Le recours gracieux est celui qui est dirigé auprès de l'auteur de l'acte lui-même. Ce dernier est facilement identifiable. Par contre, lorsque le requérant choisit la voie du recours hiérarchique, l'identification du représentant est moins évidente. La difficulté réside souvent dans la complexité de l'organisation administrative. Il arrive que certaines autorités n'aient pas de supérieurs hiérarchiques apparents. Tel est le cas du Président de la République, du maire ou du président de l'Assemblée Nationale, etc.

A-Les difficultés liées à la détermination du supérieure hiérarchique

Le recours hiérarchique est relatif au pouvoir hiérarchique, qui suppose un supérieur hiérarchique et un subordonné, liés entre eux par le lien de subordination. Le subordonné a un devoir d'obéissance, mais ce devoir n'est pas illimité.

Le recours hiérarchique est porté devant l'autorité supérieure à celle qui a pris l'acte incriminé. Il peut s'agir du supérieur immédiat, ou même lointain. La notion de « supérieur hiérarchique lointain » peut par exemple conduire à un encombrement de la présidence. Mais le juge béninois n'a pas hésité à consacrer cette formule dans l'arrêt N° 24/CA du 24 octobre 1997. « Considérant que dans l'organisation administrative béninoise, le titulaire principal du pouvoir réglementaire, c'est le Chef de l'Etat, Chef du gouvernement, qu'à ce titre il peut recevoir tout recours administratif préalable ».61(*) On imagine l'engorgement des services de la présidence si chaque administré devait s'adresser au Chef de l'Etat pour la décision de toute autorité administrative quelle que soit son échelle.

Quoiqu'il en soit, le supérieur hiérarchique peut annuler ou même modifier l'acte pris par son subordonné, et éviter un engorgement de la justice par des procès inutiles. Mais il reste que la difficulté demeure. Car la détermination du supérieur hiérarchique n'est pas souvent chose aisée, et l'erreur qui consiste à la saisine d'une autorité incompétente équivaut à un non-recours. C'est la position du juge camerounais illustrée dans l'affaire GUIFFO J. P.

Enseignant de Droit public à la Faculté de Droit et de Sciences Economiques de l'Université de Yaoundé, M. GUIFFO a adressé son recours gracieux préalable au Ministre de l'Education Nationale plutôt qu'au Chancelier de l'université, seul habilité à représenter l'Université et donc à recevoir le recours gracieux préalable. Sa requête est simplement déclarée irrecevable par le juge pour défaut de recours gracieux préalable62(*).

B-L'indifférence du juge béninois quant à l'erreur dans la saisine de l'autorité administrative compétente

Contrairement à son homologue camerounais qui considère un recours « mal dirigé » comme l'absence de recours, le juge béninois est moins rigoureux. Il valide un recours administratif « mal dirigé », à condition qu'il intervienne dans les délais. Dans un arrêt rendu en 1998, la Cour Suprême n'a pas tenu compte de la nomenclature des actes du pouvoir exécutif pour accepter qu'un ministre soit fondé à recevoir le recours gracieux contre un décret pris en conseil des ministres.

Les faits de l'espèce méritent d'être rappelés. Madame Lydie POGNON née AKIBODE, par décret N° 96-368 du 29 août 1996, est nommée Directrice à l'Ecole Nationale d'Administration. Le Collectif des Enseignants de l'Ecole Nationale d'Administration introduit une requête contentieuse auprès de la Chambre Administrative de la Cour Suprême, après avoir exercé son recours gracieux auprès du Ministre de l'Education Nationale et de la Recherche Scientifique. Statuant sur l'incompétence soulevée par le MENRS à recevoir le recours gracieux, le juge tranche la question en ces termes : « Considérant que la nomination contestée a été faite dans le cadre du Ministère de l'Education Nationale et de la Recherche Scientifique, qu'à ce titre, et conformément aux normes en vigueur au Bénin, le décret a été contresigné par le MENRS, en tant qu'il est chargé de son application;

Considérant donc qu'à l'origine de la proposition de nomination se trouve le MENRS, membre du gouvernement dont le Président de la République signataire du décret attaqué est le chef;

Considérant que le recours administratif peut être adressé à l'autorité la mieux informée ou à son supérieur hiérarchique;

Que dans le cas d'espèce, l'autorité la mieux informée et bien celle de qui émane la proposition de nomination et qui, par surcroît est chargée de l'exécution de la décision en sa qualité d'autorité administrative responsable du département ministériel concerné, ce qu'atteste son contreseing et signée par le chef du gouvernement par les ministres chargés de leur exécution et plus particulièrement le ministre premier responsable du département ministériel concerné, autorité la mieux informée ».63(*)

Malgré cette construction juridique, reste le problème même du fondement juridique du recours administratif préalable, qui n'est pas une simple formalité d'information.

Le fondement juridique du recours administratif réside dans un arrêt de principe dégagé par la jurisprudence française : « la possibilité pour les autorités administratives d'assurer, par une procédure de retrait, le contrôle de leurs propres actes ».64(*)

C'est cette jurisprudence que le juge béninois, dans son arrêt du 4 août 1994, a repris en termes presque similaires : « Considérant qu'aucune condition de capacité ni d'intérêt n'est exigée pour l'exercice du recours administratif préalable et que l'autorité administrative est tenue sous peine d'annulation de sa décision, de procéder au retrait de l'acte irrégulier... ».65(*) De quel pouvoir dispose donc un Ministre pour retirer l'acte qui émane du Président de la République, son supérieur hiérarchique ? En l'espèce, de quel droit le MENRS aurait-il accédé à la demande du requérant en retirant le décret présidentiel ? Le juge prétend t-il que le MENRS aurait, par un arrêté retiré ou modifié un décret présidentiel ? Cette décision de la Cour Suprême ne devrait pas prospérer longtemps.

Pour limiter les conséquences de l'absence du recours administratif préalable, le législateur ivoirien est intervenu en 1978 pour atténuer la rigueur de ce principe en prescrivant à la Cour Suprême que : « la chambre administrative, si elle est saisie, en l'absence de recours administratif préalable et sans constitution d'avocat mais dans les délais prévus à l'article 74 ci-dessus, peut impartir au requérant un délai pour saisir l'autorité compétente».66(*)

Le recours hiérarchique existe même en dehors de texte et se distingue du pouvoir de tutelle, exercé par exemple, par les autorités administratives (cas du préfet) sur la commune67(*), pour assurer le respect des lois et des règlements et l'harmonisation de ces actions avec celles de l'Etat. Le pouvoir de tutelle est, quant à lui exercé dans les limites établies par la loi, selon l'adage « pas de tutelle sans texte ni au-delà des textes ».

* 61 Arrêt N° 24/CA du 24 octobre 1997, SOCOBE-ICC-CCB c/ Ministre des Finances, Cour Suprême, Recueil des arrêts de la Cour Suprême du Bénin, Cour Suprême, 1997, p.174.

* 62J.- C. KAMDEM, op. cit. P. 114.

* 63 Arrêt N°97-07 / CA du 15 mai 1998, Collectif des Enseignants de l'ENA c/ MENRS, Cour Suprême, Recueil des arrêts de la Cour Suprême du Bénin, Cour Suprême, 1998, p.221

* 64 CE, 3 nov. 1922, Dame Cachet, GAJA, op. cit. pp. 235 et s.

* 65 Arrêt N° 83-2/CA du 4 août 1994, TOUKOUROU TAOFIQUI MAMADOU- BIDOUZO BARNABE- ROKO JEAN-MARIE OCTAVE c/ Ministre du Travail et des Affaires Sociales, Cour Suprême, Recueil des arrêts de la Cour Suprême du Bénin, Cour Suprême, 1994, p. 125.

* 66 R. DEGNI-SEGUI, Droit administratif général, 2e éd. Abidjan, 1996, p. 431.

* 67 Article 141 de la loi N° 97-029 du 15 janvier 1999 portant Organisation des communes en République du Bénin, Recueil des lois sur la décentralisation, Mission de décentralisation, Cotonou, Mars 2002, p. 2.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery