B . Les incidences fiscales des modifications apportees au
compte de resultats
La  disparition  du  compte  de  resultats  au  profit  du 
« Performance  reporting »  implique 
d'abondant changements comptables et fiscaux. Le code de
commerce et le PCG precisent que les entreprises doivent presenter les
differents resultats de l'entreprise. L'Administration fiscale devra effectuer
un travail de fond quant aux normes impactant le compte de resultats. Le «
Performance reporting » devra faire l'objet d'une etude particuliere et de
nombreux retraitements sont a attendre afin de pouvoir par exemple l'integrer a
la declaration 2065. 
Deux hypotheses sont a envisager : 
   Le compte de resultats fait l'objet d'une adaptation etalee
dans le cadre d'une convergence du 
PCG  vers  les  IFRS.  Ainsi,  les  entreprises  seraient 
amenees  a  etablir  progressivement  le 
« Performance reporting », tout en laissant le temps a
l'Administration fiscale de se pencher sur 
les eventuelles modifications a apporter pour que celui-ci soit
compatible avec les regles edictees par le CGI (ou l'inverse...) 
   Dans le cadre d'une non-convergence, plusieurs difficultes
apparaissent. Les entreprises seraient amenees a etablir le « Performance
reporting » uniquement pour leur communication financiere 
et  devraient  simultanement  dresser  un  compte  de 
resultats  conforme  au  PCG  et  CGI  actuels. Cette  situation  est  source 
de  nombreux  retraitements  lourds  et  coüteux.  De  plus,  les  deux
comptes sont d'une logique totalement differente : l'une financiere et l'autre
fiscale. De méme, il serait  d'autant  plus  difficile  de  mesurer  les
 impacts  fiscaux  du  changement  de  methode comptable   d'une   part   et  
des   nouveaux   investissements   (charges,   produits)   d'autre   part.
Autrement dit, comment determiner de maniere fiable et rapide les impacts
fiscaux, alors méme 
que ces impacts ne peuvent s'evaluer qu'a partir du « compte
de resultats a la française » et non 
pas du « Performance reporting » ? Et comment expliquer
et reintegrer le coüt en terme d'impôt 
dans le « Performance reporting » ? 
Ainsi, dans les deux cas, les IAS / IFRS impliquent de revoir
totalement le CGI en ce qui concerne le compte de resultats ce qui signifie
reviser integralement les notions de charges et de produits et donc leur
caractere deductible ou non... 
l.   L'apparition du resultat ordinaire 
a.  Charges ordinaires 
· Definition et comptabilisation des charges ordinaires 
Avec les IAS / IFRS, les charges doivent étre
rattachees a l'exercice au cours duquel elles sont  nees,  ce  qui  n'est  pas 
le  cas  en  principes  français.  En  effet,  avec  le  PCG,  les 
contrats d'assurances sont portes en charge des l'instant que leur montant est
connu et que leur existence est certaine. Les contrats d'assurance d'un
exercice N sont donc supportes par l'exercice N-l. Sous les nouvelles normes,
tel n'est pas le cas et les contrats d'assurance sont portes en charge a
l'instant méme de leur versement : Ce qui prime est la sortie de
ressources pour l'entreprise. Ainsi, des lors que  l'entreprise  peut 
justifier  d'une  sortie  de  ressources  dans  le  futur,  elle  constitue 
une  charge immediatement deductible, sauf disposition specifique contraire. 
Un tel changement de principe devra faire l'objet d'une
adaptation de la legislation fiscale, puisque  les  principes  fiscaux  ont 
les  mémes  dispositions  que  le  PCG :  Pour  étre 
deductibles,  les charges doivent étre comptabilisees dans l'exercice au
cours duquel elles ont ete engagees. 
Rappelons que les modifications apportees aux provisions ont des
consequences directes sur 
les charges d'exploitation. 
Fiscalement, dans l'hypothese où la definition des IAS /
IFRS seraient retenue a l'avenir en 
ce qui concerne les charges, cela constituerait un avantage
important pour l'entreprise. En effet, le flou juridique relatif qui demeure
actuellement au sujet de la definition des charges n'existerait plus. 
En cas de contentieux, il serait plus facile de justifier que
telle ou telle depense constitue bien une charge  deductible  comptablement 
(et  a  priori  fiscalement)  puisqu'une  reelle  definition  generale
s'appliquerait et non pas seulement des indications plus ou moins interpretees.
Reste a savoir quelle position l'Administration adopterait au sujet d'une
veritable definition des charges, definition a la fois stricte et precise. 
· Les stock-options 
Les  stock-options  constituent  des  charges  de  personnel 
pour  l'entreprise.  L'avantage  des stock-options pour l'entreprise, en dehors
de la motivation qu'elles engendrent pour les salaries, est qu'elles sont hors
charges sociales. Or qu'en sera-t-il si celles-ci sont desormais considerees
comme 
des charges de personnel et une remuneration a part entiere ? 
De  plus,  en  tant  que   charges   (méme  si 
l'option  n'est  pas  levee),   les  stock-options representent  un  montant 
deductible  supplementaire.  L'Administration  devra  se  prononcer  sur  la
deductibilite des plans et d'autant plus que les charges ne seront pas
reactualisees en fonction du cours  de  l'action,  ce  qui  peut  representer 
un  caractere  excedentaire  dans  leur  montant  en  cas  de baisse du cours
de l'action. Fiscalement, une reintegration devrait-elle operee ? Une telle
solution collerait avec la logique des IFRS puisque celles-ci prônent la
« fair value ». Peut-on parler de « fair value » lorsque la
charge n'est pas reactualisee, et d'autant plus lorsque son montant est
dependant 
du cours de bourse ? 
De méme, le caractere irreversible de cette charge
pourrait a terme poser probleme vis a vis 
de l'Administration, particulierement au regard de l'article
3874  quater de l'annexe III du CGI. Une charge comptabilisee au
cours d'un exercice est sensee étre certaine dans son existence et son
coüt 
74  Voir B du premier chapitre portant sur le bilan 
selon  le  PCG  et  representer  une  sortie  de  ressource 
selon  les  IAS  /  IFRS.  Bien  qu'aucune 
disposition  du  CGI ne  soit  prise  a  cet  egard,  faute  de 
position  officielle  de  l'Administration,  ces charges conserveraient-elles
leur caractere deductible ? 
· Les frais de recherches et developpement 
Les IFRS imposent d'immobiliser les frais de developpement et
permettent de comptabiliser 
en charges immediatement deductibles les frais de recherche
appliquee et fondamentale. 
Le PCG laisse le choix pour les frais de developpement ainsi que
pour les frais de recherche appliquee, sous reserve de certaines conditions. 
Deux incidences fiscales apparaissent en cas d'adoption des
IFRS pour les frais de developpement: 
   Les   contentieux   portant   sur   l'immobilisation   ou  
l'inscription   en   charge   des   frais   de developpement  diminueront  avec
 l'homogeneisation  des  pratiques  comptables  et  fiscales.  En effet, 
l'obligation  d'immobiliser  ces  frais  presente  des  criteres  relativement 
imprecis  (projets individualises, chances de reussite, coüts distincts),
souvent interpretes de maniere abusive et a l'origine de contentieux. 
   Avec le passage aux normes IFRS en 2005, les entreprises, qui
n'auraient pas totalement amorti 
les frais de developpement dans le cas d'une immobilisation,
opereront une deduction massive 
des  charges  restantes,  correspondant  au  total  non  encore 
amorti  desdits  frais.  Reste  que l'Administration fiscale n'a pas encore
communique sa position en la matiere, mais il est evident 
qu'elle sera vigilante aux abus eventuellement pratiques. 
Les frais de recherche appliquee et fondamentale : 
   Les  mémes  consequences  quant  a  l'homogeneisation 
des  pratiques  sont  a  attendre  en  ce  qui concerne les frais de recherche
appliquee. 
   Aucune divergence particuliere n'est a relever au sujet des
frais de recherche fondamentale. Les desaccords portent davantage sur les frais
de recherche appliquee. Les entreprises ont exprime le souhait de pouvoir
continuer a exercer l'option de comptabiliser en charge ou d'immobiliser ces
frais. A ce sujet, l'AFEP a fait part de son desaccord avec le projet d'avis du
CNC, puisque la disparition  de  l'option  comptable  et  fiscale  (et  des 
avantages  qui  en  decoulent)  serait  plutôt defavorable a
l'accroissement des depenses de recherche des entreprises françaises. La
encore, 
les entreprises n'ayant pas totalement amorti les frais de
recherche appliquee devront les deduire massivement  en  charge,  ce  qui 
souleve  les  mémes  remarques  qu'a   propos  des  frais  de
developpement. 
· Les stocks 
Les  comptes  statutaires  sont  impactes  par  les 
modifications  comptables  apportees  par  le 
projet  d'avis  du  CNC  sur  la  definition,  la 
comptabilisation  et  l'evaluation  des  actifs.  Ces  regles impliquent  aussi
 de  nombreuses  incidences  fiscales,  pour  le  moment  non  encore 
arrétees  et  qui feront l'objet de decisions de la part de
l'Administration fiscale durant le 2nd  semestre 2004. 
- Enregistrements des stocks 
Les  dates  d'enregistrement  et  de  sortie  des  stocks 
peuvent  conduire  a  des  divergences  entre principes  français  et 
IFRS.  En  droit  français,  seuls  sont  inclus  dans  les  stocks  les
 biens  dont 
  Avril 2004  80 
l'entreprise  est  proprietaire,  exceptes  les  biens 
comportant  une  clause  de  reserve  de  propriete. 
Rappelons que les normes IFRS s'attardent plus a la notion de
propriete economique que juridique. C'est ainsi que l'entreprise peut compter
dans ces stocks des biens dont  elle n'a  pas la propriete mais dont elle
assume les risques, ce qui est le cas des commissionnaires en marchandises.
Ceux-ci verront  donc  leurs  stocks  gonfler  avec  l'application  des  normes
 IFRS.  Ces  divergences  de comptabilisation peuvent conduire a des
modifications importantes sur le resultat d'exploitation et donc sur le
resultat fiscal. De plus, l'Administration n'a pas encore publiee de position a
ce sujet et 
n'a pas precisee qu'elle serait le traitement fiscal a operer en
cas de divergences pour les entreprises lors du passage aux IFRS. 
- Coüt d'acquisition des stocks 
Les  principes  de  comptabilisation  du  coüt  des 
stocks  sous  les  IFRS  presentent  des  divergences relativement  fortes 
avec  le  PCG.  La  non  prise  en  compte  des  pertes  ou  gains  de  change 
peut influencer  le  coüt  des  stocks  de  maniere  significative.  Des 
consequences  fiscales  positives  ou negatives peuvent concerner des
entreprises qui ne commercent qu'avec certains pays du globe dans 
la mesure où le cours de monnaie de ces pays est stable.
Ainsi, le coüt des stocks peut presenter des differences en janvier 2005
une fois les normes IFRS appliquees. 
Rappelons  que  les  gains  et  pertes  de  changes  font 
l'objet  d'une  norme  particuliere  (IAS 
2l.2l). A ce jour, cette norme n'a pas encore ete reprise par les
normes IFRS, ce qui implique que 
le  CNC  et  l'Administration  fiscale  ne  se  sont  pas 
encore  prononces.  Fiscalement,  cela  pose probleme puisqu'en 2005, les gains
et pertes de change ne sont plus incorpores au coüt des stocks. Ainsi,
lorsqu'une entreprise constatera de tels differences de changes, quel
traitement fiscal devra t 
il étre applique ? 
  Avril 2004  8l 
- Coüt de production des stocks 
Les divergences en matiere de coüt de production des stocks
sont importantes. Le montant 
des coüts des stocks s'accrolt sous les normes IFRS avec la
prise en compte des frais generaux fixes 
de  production  et  la  prise  en  compte  pure  et  simple 
des  frais  d'Administration  generale.  Les conditions auparavant exigees par
le PCG ne sont plus a reunir, ce qui peut aboutir a des abus de la part des
entreprises. L'Administration sera particulierement regardante lors du passage
aux normes IFRS, particulierement lorsque l'on sait que les stocks constituent
une part importante du nombre de verifications... 
La  definition  des  stocks  peut  poser  probleme  en  ce 
qu'elle  diverge  fortement  de  celle retenue par l'Administration. Des
difficultes sont aussi a attendre en ce qui concerne l'inclusion des incidences
  d'escomptes.   Ceci   n'a   pas   encore   fait   l'objet   de   communique  
de   la   part   de 
l'Administration 
· Depreciation des actifs75 
Les  conditions  de  comptabilisation  des  depreciations 
sont  plus  strictes  avec  les  IFRS  et permettent  une  harmonisation  des 
pratiques  comptables  en  la  matiere.  Voir  « Depreciations  des
immobilisations corporelles et incorporelles » du premier chapitre. 
75Voir aussi parties correspondantes dans I A et B 
b.  Produits ordinaires 
La  divergence  principale  concernant  les  produits  reside 
dans  la  definition.  Les  textes 
français  fournissent  une  definition  beaucoup  plus 
detaillee  que  les  normes  IFRS,  tandis  que  ces dernieres se cantonnent a
des principes generaux. De plus la notion de produit ordinaire qui englobe 
la quasi-totalite des produits que l'entreprise reçoit est
largement differente de la notion de produit d'exploitation.  Des 
retraitements  importants  sont  a  operer  afin  d'eliminer  les  discordances
 entre 
comptabilite (IFRS) et fiscalite et d'aboutir au resultat
fiscal. 
· Ventes de biens et prestations de service 
    Vente de biens 
Les dates de comptabilisation des ventes de biens peuvent
étre largement decalees entre les normes IFRS et PCG, puisque le fait
generateur retenu pour l'enregistrement du produit en comptabilite est
different. Sous les IFRS, les solutions s'effectueront au cas par cas en
fonction des conditions de paiements et de livraison. Ces differences  auront
essentiellement un  impacts lors du  passage  aux normes  IFRS  et  les 
entreprises  seront  amenees  a  reintegrer  et  exclure  une  partie  de  leur
 produit. Fiscalement, le fait generateur est le méme qu'en comptabilite
mais qu'en sera-t-il sous les normes IFRS ?  L'Administration  ne  s'est  pas 
encore  prononcee  sur  les  solutions  a  retenir  en  cas  de differences de
date entre les regles des IFRS et celles du CGI. 
    Prestations de services 
Les IFRS permettent la encore une homogeneisation des
pratiques comptables en ne retenant que la methode  a  l'avancement. 
Fiscalement,  l'obligation  de  comptabiliser  certains  services  selon  la
methode a l'achevement peut poser probleme, notamment au regard de l'article
38-2 bis du CGI. 
Comptablement, les entreprises doivent suivre les regles de la
methode a l'avancement mais qu'en 
est-il en cas de divergence entre comptabilite et fiscalite
pour de telles prestations de services ? Les autorites  competentes  n'ont 
fourni  aucune  indication  quant  aux  eventuels  retraitements  a  operer.
Cette situation peut-elle étre source de contentieux au regard de
l'article 38 quater de l'annexe III 
du CGI ? 
Afin d'assurer une securite juridique satisfaisante pour les
entreprises, ces questions doivent étre traitees lors de l'application
des normes IFRS aux comptes statutaires. Il est necessaire que ces normes
restent en l'etat dans un souci d'homogeneite entre comptes consolides et
statutaires. 
· Comptabilisation des redevances76 
Un decalage des dates de comptabilisations selon le PCG ou les
normes IAS /  IFRS peut apparaltre  lors  de  la  comptabilisation  des 
produits  de  redevances.  La  notion  de  « Substance  over form »
etant inexistante en droit comptable français, il est impossible de
comptabiliser ces produits selon la « substance » du contrat. 
La comptabilisation integrale et immediate est donc
theoriquement impossible. Ce peut par exemple  étre  le  cas  en  normes
 IFRS  des  contrats  analyses  comme  des  ventes  (Produits  de redevances
fixes, depôt non remboursable en application d'un contrat non
remboursable...). 
Fiscalement,  il  serait  necessaire  que  des  textes 
precisent  si  un  tel  contrat  pourrait  étre rencontre  et  quel 
serait  la  position  a  adopter  puisqu'en  aucun  cas  un  produit  de 
redevance  n'est analyse comme une cession en droit comptable et fiscal
français. 
Ainsi,  les  principes  retenus  par  les  IAS  /  IFRS  peuvent 
étre  valides  par  l'Administration fiscale  et  les  operations 
seraient  alors  analyses  comme  une  vente.  Dans  le  cas  contraire,  un 
76  Voir aussi normes IAS l8.30 et l8.33 
retraitement fiscal est de mise ce qui, une fois de plus, plaide
a terme en la faveur d'un bilan fiscal. 
En  cas  de  comptabilisation  selon  un  principe  lineaire,  il
 n'y  aucune  divergence  avec  les principes français. Aucun probleme
fiscal n'est souleve. 
Les modifications apportees au resultat d'exploitation sont
importantes mais touchent 
principalement les comptes consolides. Pour le moment, les
comptes statutaires sont impactes par 
les  depreciations  d'actifs.  A  l'avenir,  les 
modifications  et  les  incidences  fiscales  seront  plus nombreuses   et  
plus   lourdes   de   consequences,   notamment   en   terme   de   definition 
 et   de comptabilisation des charges et produits d'exploitation. 
Concernant le resultat financier, il n'en reste pas moins que des
incidences fiscales importantes sont d'ors et deja a prevoir, particulierement
sur la notion de coüt d'emprunt. 
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