Publier un mémoire
Consulter les autres mémoires

Rechercher sur le site:

Arts, Philosophie et Sociologie | Biologie et Médecine | Commerce et Marketing | Communication et Journalisme | Droit et Sciences Politiques | Economie et Finance | Enseignement | Géographie | Histoire | Informatique et Télécommunications | Ressources humaines | Sciences | Sport | Tourisme | Rapports de stage |

La coopération non gouvernementale à l'épreuve de la réduction de la pauvreté au Cameroun:une analyse sociologique des relations Bailleurs de fonds-ONG nationales


par Sosthène Hervé MOUAFO NGATOM
Université de Yaoundé 1
Traductions: Original: fr Source:

précédant sommaire suivant

C- LES ORGANISATIONS NON GOUVERNEMENTALES DANS L'UNIVERS ASSOCIATIF CAMEROUNAIS

Au Cameroun, les ONG sont créées conformément à la loi n°90/53 du 19 décembre 1990 relative à la liberté d'association. Bien que la loi n°99/014 du 22 décembre 1999 ait été adoptée dans le souci d'une spécification de la loi sur les ONG, le cadre légal de 1990 reste en vigueur pour les ONG. Il est d'ailleurs renforcé par la loi de 1999 lorsqu'elle fait du statut d'association un préalable à la postulation au statut d'ONG (Art 1 et 2 al.1). A s'en ternir à cette nouvelle loi, il n'y a pas encore d'ONG Camerounaise, relèvent les responsables du ministère de l'Administration territoriale en charge des associations et de cultes. M. ESSI et T. NDONKO (1994 :4) affirment également à ce propos que le sigle « ONG » est largement utilisé au Cameroun, pourtant, cette forme d'association reste illicite. Ainsi, parler d'ONG camerounaise, c'est faire allusion aux associations et donc à l'univers associatif camerounais. Quelle est la configuration de cet univers associatif et quelle en est la place des ONG ? Avant de répondre à cette question, permettons-nous tout d'abord un aperçu historique, fut-il une esquisse.

L'idée de la mise en commun des efforts individuels dans le cadre d'une association naît chez les populations camerounaises, d'un certain nombre de besoins non satisfaits. En effet, les limites des actions étatiques doublées du retrait de l'État-providence ont conduit les populations à la prise de conscience qu'elles ne peuvent plus attendre de l'État les services sociaux essentiels, la sécurité économique et même la sécurité de proximité. Cette prise de conscience les amène à s'engager dans la lutte pour leur propre survie. Elles commencent alors à chercher les solutions à leurs problèmes par elles-mêmes en organisant des groupes allant du village à la ville. Le phénomène associatif prend ainsi son essor et ne cessera plus de s'amplifier. Après les tontines de toutes tailles, l'on est passé aux champs communautaires, aux petits projets de pistes carrossables, à l'achat de petits camions en commun pour évacuer les produits vivriers vers les villes, à la création parfois anarchique et improvisée des ONG. Quel peut être de nos jours le profil de l'univers associatif camerounais?

Dans son étude sur la société civile au Cameroun, le PNUD distingue quatre typologies possibles des organisations de la société civile camerounaise : une typologie retenue par l'Administration, une typologie selon la nature des personnes regroupées croisée avec la finalité d'action, une typologie selon le domaine d'intervention et une typologie selon le degré d'insertion dans l'espace public de négociation. (2000 : 19-20).

La typologie retenue par l'Administration propose une nomenclature constituée des associations simples ou socio-culturelles ; les groupements d'intérêts économiques (GIE), les groupements d'initiatives communes (GIC), les coopératives, les organisations non gouvernementales (ONG), les syndicats, groupements et ordres professionnels.

La typologie selon la nature des personnes regroupées croisée avec la finalité d'action distingue les associations de base, les organismes d'appui et les organisations de corporation.

Les associations de base regroupent des personnes physiques qui entreprennent pour eux-mêmes des actions avec pour finalité d'apporter des réponses solidaires aux problèmes du quotidien. On les appelle encore les initiatives locales de développement (ILD), ou organisations communautaires de base (OCB). ce sont par exemple les comités de développement, les groupes d'entraide, les groupements d'initiatives communes, les coopératives, les associations culturelles, etc.. L'effectivité du fonctionnement de cette catégorie d'organisation de l'univers associatif réside dans le critère de « participation » des membres que l'on peut appréhender par la contribution en espèces et en nature.

Les organisations d'appui regroupe des personnes physiques ou morales qui offrent des appuis techniques, matériels et/ou financiers à des groupes ou des individus qui leurs sont extérieurs et avec lesquels ils n'ont aucun lien fonctionnel, ni professionnel. Ils ont pour finalité d'amener les initiatives locales de développement (ILD) ou les individus à agir pour la transformation du milieu. On retrouve ici les ONG, les organismes humanitaires, les organismes de défense de droits, et dans une certaine mesure les congrégations religieuses. L'un des critères d'appréciation de cette catégorie d'organisation est la notion de « pédagogie» puisque ces organisations contribuent à l'éducation des personnes et des groupes qu'elles appuient.

Les organisations de corporation regroupent des personnes physiques ou morales ayant des métiers et de professions identiques ou bien évoluant dans des secteurs d'activités identiques qui offrent différents types d'intérêts à leurs membres et surtout défendent leurs intérêts. Il s'agit des corporations et groupements professionnels, les unions d'associations, les groupements d'intérêt économique (GIE). On peut aussi y inclure les fédérations d'unions qui, bien que regroupant des personnes morales ayant des activités diversifiées, ont la même fonction pour leurs membres.

La typologie selon le domaine d'intervention distingue les organisations de l'économie sociale et les organisations de défense des droits.

Les organisations de l'économie sociale sont celles qui opèrent dans le secteur social en vue d'identifier puis de subvenir aux besoins des populations cibles. Elles créent des emplois aux besoins des populations et suppléent généralement l'État dans son action sociale et économique. ce sont les ONG de développement, les GIC, GIE, COOPEC ; les associations d'entraide ; etc..

Les organisations de défense des droits sont celles qui font dans les droits de l'homme et des libertés, droits des consommateurs, droits des femmes, droits des jeunes, droits des catégories professionnelles, etc..

La typologie selon le degré d'insertion dans l'espace public de négociation distingue les organisations du 1er degré, du 2nd degré et 3ème degré.

Les organisations du 1er degré sont celles qui ne se situent pas dans le champ public. ce sont les associations de base dont les activités concernent exclusivement leurs membres. Elles appartiennent à la société civile parce qu'elles constituent le premier niveau de structuration du milieu associatif.

Les organisations de 2nd degré sont celles qui interviennent de temps en temps dans l'espace public, en organisant périodiquement des cadres de concertation sur des thématiques verticales (pour des spécialistes d'un même secteur) ou des thématiques horizontales (pour des catégories de personnes évoluant dans des sphères et/ou secteurs différents) et en servant parfois de porte-voix aux recommandations émises lors de ces concertations. On y retrouve les unions, les fédérations, les ONG et leurs collectifs. Elles constituent un second niveau de structuration du milieu associatif et participent à donner un sens à la notion de « mouvement associatif ».

Les organisations du 3ème degré sont celles qui créent des espaces de négociations avec des partenaires tierces, notamment les pouvoirs en s'appuyant sur les organisations des degrés 1 et 2 : ce sont des confédérations et collectifs (regroupements d'unions et/ou de fédérations, syndicats professionnels, les associations de défense de droits).

Toutes ces typologies rendent compte de la diversité de la configuration de l'univers associatif camerounais. Toutefois, dans le souci de rendre la lisibilité du paysage associatif camerounais plus aisée, le Programme national de gouvernance (PNG : 1999) distingue les associations à caractère économique des associations à caractère socio-culturel. Suivant cette distinction, le paysage associatif camerounais en chiffre, bien que ce ne soit qu'une tendance, peut se lire dans le tableau ci-après :

Grandes zones géographiques

Provinces

Associations socio-culturelles

Associations économiques

Total

%

Soudano Sahélien

Adamaoua

 

487

487

1,6

 

Extrême nord

1481

194

1675

5,4

 

Nord

-

779

779

2,5

 

S/total

1481

1460

2941

9,5

Grassfield

Ouest

1576

1023

2599

8,4

 

Nord Ouest

-

2176

2176

7

 

S/total

1576

3199

4775

15,5

Côtier

Sud Ouest

142

335

477

1,5

 

Littoral

6730

3049

9779

31,7

 

S/total

6872

3384

10256

33,2

Forestier

Centre

3780

4580

8360

27

 

Est

1180

160

1340

4,3

 

Sud

2113

1058

3171

10,3

 

S/total

7073

5798

12871

41,7

 

Total

17002

13841

30843

 
 

Pourcentage

56 %

44 %

 

100 %

Source : Programme national de gouvernance, in PNUD (2000 : 14)

Tableau 1 : Répartition des associations enregistrées par provinces et par grandes zones géographiques

Dans les différentes typologies de l'univers associatif camerounais sus-parcourues, la présence des ONG est récurrente. Récurrence qui traduit l'existence des ONG camerounaises ou alors des associations qui tiennent lieu d'ONG.

Depuis plus d'une quinzaine d'années, divers organismes ont tenté d'identifier les ONG qui interviennent au Cameroun. Le but recherché étant de savoir combien elles sont, ce qu'elles font, où elles travaillent. En 1983, une étude réalisée par l'Association pour la promotion des initiatives communautaires africaines (APICA), l'Institut panafricain pour le développement (IPD) et l'UNICEF a répertorié 43 ONG dont 25 nationales. En 1988, une étude conduite par le PNUD et le gouvernement camerounais a dénombré 76 ONG dont 50 nationales. En 1994, GTZ et COPAD donnent le chiffre de 136 ONG dont 108 nationales. En 1997, on estime leur nombre supérieur a 600 (S. C. ABEGA,1999 :180).

Les ONG camerounaises interviennent directement auprès des populations dans divers domaines. La protection de l'environnement, la protection de l'enfant, la mère et l'enfant, la promotion des femmes, le développement communautaire, les soins de santé primaire, la vulgarisation des techniques, l'assistance aux nécessiteux, la réinsertion des marginaux, la culture et la linguistique, l'appui aux initiatives diverses, l'agro-pastoral, la recherche scientifique, le planning familial, la lutte contre le Sida, l'hydraulique villageoise, la structuration du monde paysan, etc., sont autant des domaines d'intervention des ONG camerounaises.

Les ONG camerounaises se caractérisent généralement ,d'une part, par le recours à un personnel local volontaire parfois qualifié, souvent inexpérimenté. D'autre part, elles manquent de financements et dépendent des Bailleurs externes ou de la sous-traitance avec les ONG internationales. Toutes raisons, relève S. C. ABEGA (1999 : 181), limitant une action et une approche spécifiques que leur permettrait leur bonne connaissance du milieu. C'est pour ces mêmes raisons, poursuit-il, qu'elles sont partagées entre l'entreprise créée pour le bénéfice de ses promoteurs et l'ONG véritable dont l'idéologie est tournée vers l'altruisme. Telle est la situation des ONG nationales camerounaises auxquelles font partie celles qui ont servi de cadre à cette étude.

Présentation faite du cadre institutionnel de cette étude (bailleurs de fonds, ONG nationales) permettons-nous un regard synoptique sur la pauvreté au Cameroun.

précédant sommaire suivant


® Memoire Online 2006 - Pour tout problème de consultation ou si vous voulez publier un mémoire: webmaster@memoireonline.com