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Les compétences du juge étatique dans l'arbitrage OHADA

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par Francis NGUEGUIM LEKEDJI
Université Catholique d'Afrique Centrale - Master en Contentieux et Arbitrage des Affaires 2007
  

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§ I : LE TRIBUNAL ARBITRAL NE S'EST PAS CONFORME A LA MISSION QUI LUI A ETE CONFIEE

La mission confiée aux arbitres pourrait paraître assez malaisée à délimiter s'il n'y avait pas d'une part la convention d'arbitrage180(*), et d'autre part l'acte de mission arrêté conjointement par les parties et les arbitres avant le démarrage effectif de l'instance arbitrale.

L'acte de mission apparaît en réalité comme le véritable cadre matériel et temporel du règlement du litige. Il fixe à la fois les demandes formées par les parties ainsi que les pouvoirs conférés aux arbitres. Il sera donc facile de vérifier, au cours d'une éventuelle instance en annulation, si les arbitres ont respecté le cadre du litige sur le plan des demandes formulées (A) et sur celui des pouvoirs de décision (B). La méconnaissance de ces objets constituant des causes d'annulation de la sentence arbitrale.

A- LA MECONNAISSANCE DES DEMANDES FORMEES PAR LES PARTIES COMME CAUSE D'ANNULATION DE LA SENTENCE

La méconnaissance du cadre des demandes s'apprécie à la fois par le fait que les arbitres ont statué infra ou ultra petita.

Infra petita, cela signifie que l'arbitre n'a pas statué sur toutes les prétentions des parties. Les conséquences doivent normalement être tirées s'il s'agit d'un refus délibéré ou d'une omission. Mais la situation est si particulière dans le droit OHADA qu'on peut hésiter. En effet, l'AU.A autorise l'arbitre à rendre une sentence additionnelle lorsqu'il a omis de statuer sur un chef de demande181(*). L'infra petita ne se manifesterait vraiment que si l'arbitre a délibérément refusé de statuer sur un chef de demande. Encore faudrait-il aussi dans ce cas que la partie qui conteste la sentence ait préalablement invoqué ce manquement devant le tribunal arbitral conformément à l'article 14 alinéa 8 AU.A182(*). Dans tous les cas, il faut dire qu'en France, les tribunaux annulent rarement une sentence au motif que les arbitres auraient statué infra petita183(*). La même situation prévaudra sans doute dans l'espace OHADA.

Ultra petita, cela signifie que les arbitres ont statué sur un chef de demande non formulé par les parties. Il s'agira, également, d'une application au cas par cas. Ainsi, la jurisprudence française décide que les arbitres méconnaissent leur mission en attribuant à une partie plus que ce qu'elle a demandé. En l'espèce, le tribunal arbitral avait fixé le point de départ d'intérêts de retard à une date antérieure à celle qui était avancée par la demanderesse. Un autre cas est celui d'une sentence qui statue sur les droits immobiliers de l'une des parties alors qu'elle n'était saisie que du sort des statuts d'une société184(*). Dans ces cas précis, les sentences litigieuses ont été partiellement annulées. La jurisprudence OHADA n'est pas déjà fixée sur de pareils cas. Elle devrait, en cas de besoin, s'inspirer des décisions françaises comme en matière de méconnaissance des pouvoirs de décision conférés aux arbitres.

B- LA MECONNAISSANCE DES POUVOIRS CONFERES AUX ARBITRES ENTRAINE AUSSI L'ANNULATION DE LA SENTENCE

Pour bien apprécier cette hypothèse, il convient de rappeler que les pouvoirs de décision des arbitres concernent à la fois les règles de procédure et de fond.

S'agissant de la procédure, il appartient aux parties de choisir les règles procédurales applicables, soit un règlement direct de celle-ci, soit en la soumettant à une loi de procédure de leur choix185(*). Le choix des arbitres ne peut prospérer qu'en cas de silence des parties. En cas de choix exprès par les parties, il appartient alors aux arbitres de l'appliquer, sinon leur sentence encourt annulation.

Il est néanmoins douteux que le juge étatique sanctionne tourte sorte d'irrégularités. Nous pensons qu'il ne devrait, le cas échéant, sanctionner que les violations flagrantes telles que la violation des droits de la défense. Sur ce motif, et conformément à l'article 5 de la convention de New York de 1958, un tribunal de l'espace OHADA a refusé l'exequatur à une sentence arbitrale au motif que : « la date de la clôture des débats n'ayant pas été fixée de façon claire et précise, en rejetant les conclusions de l'une des parties et en examinant celles de l'autre en date, les juges arbitres ont violé manifestement les droits de la défense. Que le principe du contradictoire n'a donc pas été respecté, la SONAPRA n'ayant pu faire valoir ses moyens (...)Qu'il ne peut être fait droit, en l'état, à l'exequatur sollicité »186(*).

Quant aux règles de fond, on peut distinguer selon que les arbitres statuent en équité ou en droit. Dans ce cadre aussi, les parties ont fait un choix qu'il appartient aux arbitres de respecter. A défaut, leur sentence encourt annulation.

En réalité, il sera plus facile pour la partie qui a perdu le procès d'alléguer que les arbitres ont statué sans se conformer à la mission qui leur a été confiée. Elle en profitera le plus souvent pour faire du dilatoire. C'est la raison pour laquelle d'aucuns ont regretté que l'OHADA ait pu consacrer ce motif d'annulation de la sentence à cause de son extensibilité et de son caractère foure-tout187(*). On peut néanmoins espérer, une fois de plus, que la jurisprudence OHADA puisse s'inspirer de la jurisprudence française où le juge décide que le grief tiré de ce que les arbitres ne se sont pas conformés à la mission qui leur a été confiée n'a pas pour objet la révision au fond de la sentence. Il permet seulement au juge de vérifier si les arbitres se sont ou non, sur les points où leur décision est critiquée, conformés à leur mission, sans avoir à apprécier le bien fondé de leur décision188(*). Il ne s'agit donc pas d'une révision au fond. Quid en cas de violation d'une règle d'ordre public international des Etats signataires ?

* 180Il peut arriver qu'elle fixe l'objet exact du litige. Mais, le litige n'étant pas survenu, les parties se limitent généralement à utiliser une formule générale selon laquelle tout litige qui surviendrait lors de l'exécution du contrat sera réglé par la procédure arbitrale.

* 181Article 22 alinéa 3 AU.A.

* 182Cette condition constitue d'ailleurs un préalable pour tout recours contre la sentence. Pour une application, V. Cour d'appel d'Abidjan, arrêt no 1060 du 25 juillet 2003, aff. M. Vuarchex Jacques Pascal c/ La scierie Nouvelle de Gadouan, in www.ohada.com/Ohadata J-03-292.

* 183V. Ph. Fouchard et alliés, op. cit., no 1628 et s.

* 184Paris, 28 juin 1988, aff. Total Chine, Rev. Arb., 1989.328, note J. Pellerin ; et Paris, 19 janvier 1990, rev. Arb., 1991.125, obs. Moitry et Vergne, cités par Ph. Fouchard et alliés, op. cit., no 1630.

* 185Article 14 alinéa 1er AU.A.

* 186TPI de Cotonou, ordonnance no 19/94 du 25 janvier 1994, in Rev. cam. arb., no 02, p.16.

* 187P. Meyer, op. cit., p.256.

* 188Paris, 12 mars 1985, Rev. arb., 1985.299, note E. Loquin, cité par P.G. Pougoué et alliés, op. cit., pp. 234-235.

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