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Les compétences du juge étatique dans l'arbitrage OHADA

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par Francis NGUEGUIM LEKEDJI
Université Catholique d'Afrique Centrale - Master en Contentieux et Arbitrage des Affaires 2007
  

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II- DELIMITATION DU SUJET

Le droit de l'arbitrage tel que régi par l'OHADA a un système dualiste. Il est en effet constitué de l'AU.A qui régit l'arbitrage de droit commun, dit encore traditionnel ou ad hoc ; et du Traité OHADA18(*) complété par le Règlement d'arbitrage CCJA qui régit l'arbitrage institutionnel sous l'égide de la CCJA.

Sans négliger ce second aspect, notamment pour des raisons de comparaison, il nous semble plus intéressant d'étudier l'arbitrage de droit commun, ad hoc, régi par l'AU.A. En effet, en pratique, l'arbitrage ad hoc peut poser de sérieuses difficultés à même de susciter l'intervention du juge étatique, contrairement à l'arbitrage administré par une institution d'arbitrage, où le centre gère certaines difficultés en lieu et place du juge étatique.

En plus, toute la richesse du droit de l'arbitrage dans l'espace OHADA ne peut être mise à jour que si l'on observe aussi comment le juge étatique participe ailleurs à la procédure arbitrale. Nous ferons donc allusion, autant que possible, au droit comparé, car G. Farjat écrit à juste titre que le droit comparé est souvent « le plus court chemin pour la compréhension des phénomènes juridiques nationaux »19(*). La jurisprudence française nous sera d'un grand apport compte tenu de nombreuses similitudes entre l'arbitrage français et l'arbitrage OHADA, mais surtout du fait que cette jurisprudence est plus fournie et accessible ; ce qui n'est pas nécessairement le cas de la jurisprudence arbitrale OHADA20(*) dont la compréhension passe d'ailleurs par la définition des mots-clés.

III- DEFINITION DES CONCEPTS

Les éclaircissements nécessaires que l'on peut faire portent essentiellement sur les notions de compétence, de juge étatique que l'AU.A qualifie généralement de « juge compétent dans l'État partie », et d'arbitrage.

A- COMPETENCE

La notion de compétence peut être présentée comme l'aptitude d'une juridiction à instruire et juger un procès, ou d'une autorité à prendre un acte21(*). Mais sur le plan juridictionnel, cette notion se décline encore dans deux sens complémentaires: d'attribution et territorial.

La compétence d'attribution ou rationa materiae d'une juridiction est fonction de la matière ou du montant du litige22(*). Les règles de compétence d'attribution permettent ainsi de répartir le procès entre les différentes juridictions en fonction de la nature du litige entre l'ordre administratif et l'ordre judiciaire. Et, dans l'ordre judiciaire, entre les juridictions civiles et pénales ; et parmi ces dernières, entre les tribunaux de droit commun et les tribunaux d'exception.

La compétence territoriale ou « ratione personnae vel loci » est fonction de critères géographiques relatifs soit à la résidence des parties, soit à l'objet du litige et permettant de désigner entre les tribunaux de même nature celui qui connaîtra de l'affaire.

La notion de compétence revêt divers aspects. On parlera ainsi de compétence discrétionnaire, de compétence liée, ou encore de compétence exclusive. Nous n'insisterons pas dessus23(*).

Dans le cadre de notre recherche, la notion de compétence s'entendra aussi bien dans son sens d'attribution que territorial. Sur le plan matériel, c'est l'ensemble des prérogatives reconnues au juge étatique dans la conduite de l'arbitrage dans l'espace OHADA. Sur le plan territorial, cette compétence sera tantôt celle du juge du lieu où se trouve le siège du tribunal arbitral, tantôt celle du juge du lieu d'exécution de la sentence.

B- JUGE ETATIQUE

Le juge est un magistrat, personne physique, investi par l'État de la mission de trancher les litiges qui opposent les personnes, et de rendre justice en son nom24(*). Il peut être un magistrat de l'ordre administratif ou judiciaire, mais il est censé être un professionnel. Si l'on parle de juge étatique, c'est parce qu'il est institué par l'État et rend justice en son nom25(*).

La vision du lexique de cette notion nous semble parcellaire26(*). En effet, il fait croire que le titre de juge se réduit au seul juge d'instance, à l'exclusion de ceux d'appel ou de cassation. Cela est discutable parce qu'on verra plus loin que le juge d'instance n'est pas le seul à intervenir dans la procédure arbitrale du droit OHADA. Les juges d'appel et de cassation sont aussi compétents dans l'arbitrage OHADA. Par conséquent, le juge dont il est question ici est tout magistrat investi de sa mission par l'État ou par une organisation internationale, qu'il soit d'instance, d'appel ou de cassation.

Le droit OHADA fait régulièrement référence au « juge compétent dans l'État-partie » chargé de coopérer à la procédure arbitrale en cas de difficulté, mais sans le déterminer précisément, ce qui peut susciter quelques problèmes. Le Règlement d'arbitrage de la CCJA résout le problème27(*) en désignant la CCJA pour ce qui est de l'arbitrage institutionnel CCJA.

Le juge chargé de coopérer à la procédure arbitrale n'est pas désigné dans l'AU.A. Sa détermination dépend du système juridique interne de chaque pays. La situation n'est pas très claire d'autant plus que peu d'États ont, jusqu'à présent, désigné de façon expresse ce juge là.

Le problème peut être résolu au Cameroun à la lecture de la loi no 2006/015 du 29 décembre 2006 portant organisation judiciaire ; mais surtout les lois no 2003/009 du 10 juillet 200328(*), et no 2007/001 du 19 avril 200729(*) nous fixent pleinement sur la question. Dans la première, cette coopération est assurée d'une part par le Président du TPI ou le Magistrat qu'il délègue à cet effet30(*) ; et d'autre part, par la Cour d'Appel31(*). Il en est de même dans la loi no 2007/00132(*). Quant à la compétence pour statuer en cassation, l'AU.A désigne nommément la CCJA33(*).

C'est de ces différents juges désignés par les textes qu'il sera question dans la conduite de notre recherche.

C- ARBITRAGE

Le souci de promouvoir l'arbitrage comme moyen de règlement des différends est ardent dans le droit OHADA, mais la notion d'arbitrage n'y est pas définie aussi bien dans le Traité que dans les textes subséquents.

La doctrine s'est attelée à cette tâche, et nous retiendrons que pour Ph. Fouchard, par l'arbitrage, « les parties conviennent de soumettre leur différend au jugement de particuliers qu'elles choisissent »34(*). Ch. Jarosson abonde dans le même sens lorsqu'il écrit que « l'arbitrage est l'institution par laquelle un tiers règle le différend qui oppose deux ou plusieurs parties, en exerçant la mission juridictionnelle qui lui a été confiée par celles-ci »35(*) .

Il nous paraît important d'insister sur le fait que tout en visant  à faire donner la solution d'une question intéressant les rapports entre deux ou plusieurs personnes par une ou plusieurs autres personnes tenant leurs pouvoirs d'une convention privée et statuant sur la base de cette convention, l'arbitrage ne fait pas partie de l'ordre juridictionnel interne de l'État. Les arbitres ne sont donc pas investis de leur mission par l'État ; et, par conséquent, ne bénéficient pas, par exemple, du pouvoir d'ordonner l'exécution forcée de la sentence36(*).

L'arbitrage ainsi défini présente deux facettes essentielles. C'est une institution à la fois d'origine contractuelle et de nature juridictionnelle.

Enfin, l'arbitrage peut être ad hoc ou institutionnel ; civil ou commercial ; interne ou international ; il peut être en droit ou en équité. Le droit de l'arbitrage OHADA est assez particulier sur plusieurs de ces points. Il établit une différence fondamentale entre arbitrage ad hoc régi par l'AU.A et arbitrage institutionnel sous l'égide de la CCJA37(*). Cependant, il n'y a aucune distinction entre arbitrage civil et arbitrage commercial. Il s'agit d'une évolution notable du droit de l'arbitrage OHADA38(*). Il n'y a pas non plus de différence entre arbitrage interne et arbitrage international. Cette unité de régime des deux types d'arbitrage a été dénoncée comme factice. En effet, elle ne correspond pas toujours à la réalité de certaines dispositions de l'AU.A qui ne peuvent valablement être appliquées que si l'on est en présence d'un litige ayant un caractère international39(*).

* 18Titre IV, articles 21 à 26 dudit Traité.

* 19G. Farjat, Droit économique, Paris, PUF, 1971, p.17.

* 20En effet, le site www.ohada.com qui s'attèle à diffuser la jurisprudence OHADA ne contient qu'une vingtaine de décisions relatives à l'arbitrage.

* 21Lexique, op. cit., p.128.

* 22V. art. 15 al. 1b et 18 al. 1 de la loi no 2006/015 du 29 décembre 2006 portant organisation judiciaire du Cameroun.

* 23Pour une vue d'ensemble sur la notion de compétence et d'autres facettes qu'elle peut avoir, cf. Lexique, op. cit., p. 128.

* 24Lexique, op. cit., p.334.

* 25Par opposition au juge institué par de simples particuliers. Tel est le cas de l'arbitre.

* 26Lexique, op. cit., p. 334.

* 27Articles 1 et 2 règlement d'arbitrage de la CCJA

* 28Portant désignation des juridictions compétentes visées à l'acte uniforme relatif au droit de l'arbitrage et fixant leur mode de saisine.

* 29Instituant le juge du contentieux de l'exécution et fixant les conditions de l'exécution au Cameroun des décisions judiciaires et actes publics étrangers ainsi que les sentences arbitrales étrangères.

* 30Article 2 de la loi no 2003/009 précitée.

* 31Article 4 alinéa 1 de la loi no 2003/009.

* 32 Article 11 de la loi no 2007/009 précitée.

* 33Article 25 alinéa 3 AU.A.

* 34Ph. Fouchard, L'arbitrage commercial international, Paris, Dalloz, 1965. No 11.

* 35Ch. Jarrosson, La notion d'arbitrage, Paris, LGDJ, 1987. No 785.

* 36Contrairement au juge étatique qui bénéficie de cet imperium.

* 37La CCJA est aussi un centre d'arbitrage qui gère l'arbitrage institutionnel mis sur pied par le Traité. Cet arbitrage est régi par le Règlement d'arbitrage de la CCJA. V. supra, p.4.

* 38Il a vocation, conformément à l'article 1er AU.A, à s'appliquer à tout arbitrage, sans aucune exception que celle liée à l'arbitrabilité du litige. Le droit suisse adopte le critère de la disponibilité des droits.

* 39L'exemple des dispositions relatives au choix du droit applicable au fond du litige qui n'est réellement envisageable que si l'on se situe dans une relation de droit international privé. V. article 15 A.U.A.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry