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Les compétences du juge étatique dans l'arbitrage OHADA

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par Francis NGUEGUIM LEKEDJI
Université Catholique d'Afrique Centrale - Master en Contentieux et Arbitrage des Affaires 2007
  

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INTRODUCTION GENERALE

Il existe aujourd'hui plus qu'hier des possibilités de contact entre les hommes, tant au sein d'un État qu'entre plusieurs Etats. En effet, les moyens modernes de déplacement, les technologies de l'information et de la communication, la mondialisation des échanges militent dans ce sens tout en en facilitant une certaine interdépendance. Cette interdépendance est à l'origine de la conclusion de nombreux contrats, tant civils que commerciaux, entre divers partenaires. La mise en oeuvre de ces contrats ne va pas toujours sans créer des difficultés, voire des différends. Aussi, les sociétés ont-elles depuis longtemps imaginé les moyens qui, tout en concourant à l'apaisement, permettent en même temps de réparer le tort subi par l'un des membres du corps social. Cela passe essentiellement par la justice.

La notion de justice a fait l'objet de nombreuses spéculations. Pour Platon par exemple, « faire la tâche qui est la nôtre (...), voilà ce que c'est que la justice (...)»1(*). Il s'agit autrement de la traduction de l'adage latin « sum quirque tribuere », c'est-à-dire remettre à chacun ce qui lui revient. Si l'on définit couramment la justice comme l'action d'accorder à chaque justiciable ce qui lui revient, de le blanchir ou de le condamner2(*), il faut souligner qu'il existe de multitudes variantes de la notion de justice3(*).

Par ailleurs, la justice n'a véritablement de sens que lorsqu'elle est mise en oeuvre. Il faut pour cela des institutions, une procédure et un personnel appropriés. La justice en tant que institution se manifeste par l'existence des juridictions créées par l'Etat. Celles-ci vont, au Cameroun, des tribunaux d'instance à la Cour suprême en passant par les Cours d'appel. L'adhésion du Cameroun à l'Organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA)4(*) n'a que partiellement modifié la situation. Il y a notamment l'avènement de la Cour commune de justice et d'arbitrage (CCJA)5(*). On n'exagèrerait pas vraiment en affirmant que la justice était rendue au Cameroun6(*) essentiellement par les tribunaux de l'Etat. Et l'arbitrage n'a pris un véritable envol qu'avec l'avènement de l'OHADA7(*).

Si pour ses initiateurs, l'OHADA a été créée pour servir « l'intégration économique et la croissance »8(*) de l'Afrique, il convient de signaler qu'avant son institution, l'environnement juridique et judiciaire des affaires manquait une visibilité claire et certaine ; ce qui était en effet, une source d'inquiétude pour les investisseurs. J. Cassius relève par exemple l'insécurité juridique résultant du vieillissement des textes légaux en total déphasage avec le droit économique moderne, son incohérence et le manque de vulgarisation9(*). Il faut ajouter à ce tableau l'insécurité judiciaire résultant des procédures lentes et souvent fastidieuses, de l'imprévisibilité et la complaisance des tribunaux de l'ordre judiciaire dans leurs décisions, avec de surcroît d'énormes difficultés d'exécution des décisions de justice.

Au regard des inconvénients engendrés par cette situation, on a pu dire que si « investir est déjà en soi un risque, même s'il est calculé ; s'il faut doubler ce risque premier inéluctable de celui d'un système juridique fluctuant, ondoyant et insaisissable, il n'y a pas beaucoup d'espoir à susciter l'attrait des investisseurs »10(*).

C'est la raison pour laquelle le Traité OHADA ambitionne l'élaboration et l'adoption des règles communes simples, modernes et adaptées à la situation des économies de ses Etats membres, par la mise en oeuvre des procédures judiciaires appropriées, et par « l'encouragement au recours à l'arbitrage pour le règlement des différends contractuels »11(*). C'est dans ce cadre que nous conduirons notre recherche. Il convient dès lors d'en situer le contexte.

I- CONTEXTE DE L'ETUDE

Il y a une dizaine d'années, un tribunal camerounais appelé à prononcer une mesure provisoire en présence d'une clause compromissoire, s'était déclaré incompétent au motif que cette clause entraîne l'incompétence du juge étatique12(*). En l'espèce ; il s'agissait de désigner Elf Serepca comme séquestre des recettes du contrat de joint venture liant la Société Allation Property à la société Sirpi. Cette même tendance sera encore observée dans une autre espèce13(*). Bien plus, il y a toujours eu, dans l'esprit de certains magistrats, le fait que la justice arbitrale était en concurrence avec la justice étatique parce qu'elle les empêcherait d'exercer le monopole de rendre justice au sein de l'Etat. Dans l'ensemble, certains juges camerounais se montraient assez réticents pour se prononcer sur des affaires pour lesquelles les parties avaient conclu une convention d'arbitrage. Cette situation est source d'insécurité pour les investisseurs d'autant plus qu'il ne s'est pas toujours agi de juger l'affaire au fond, mais de prononcer une simple mesure provisoire14(*).

On comprend dès lors que l'OHADA se soit fixé pour objectifs d'harmoniser le droit des États parties par  l'élaboration et l'adoption de règles communes, simples, modernes et adaptées à la situation de leurs économies  et de promouvoir l'arbitrage comme un mode de règlement des différends contractuels15(*). L'idée a fait du chemin et commence à porter ses fruits. En effet, il y a eu une floraison de centres d'arbitrage dans l'espace OHADA depuis l'adoption de l'A.U.A16(*) ; davantage de personnes recourent désormais à l'arbitrage pour résoudre leurs différends, ce qui n'était pas le cas avant. Et la collaboration entre le juge étatique et le juge arbitral semble aujourd'hui bien établie si l'on en juge par le nombre et la qualité des décisions y relatives.

Par ailleurs, il est utile de poursuivre la réflexion sur les différents thèmes que porte l'AU.A. L'un des exemples les plus récents est sans doute le colloque17(*) qui s'est tenu à Yaoundé les 14 et 15 janvier 2008 sur le thème : « L'arbitrage en Afrique : questions d'actualités ». Ce colloque a traité de nombre de sujets ayant trait à la place du juge étatique dans l'arbitrage OHADA. Nous nous situons donc dans la continuité des ces différentes réflexions. Mais le champ d'étude sur l'arbitrage est si vaste qu'il convient de délimiter le nôtre.

* 1Platon, République, 4, 433-435.

* 2V. R. Guillien et J. Vincent (sous la direction de...), Lexique des termes juridiques, Paris Dalloz, 14ème éd., 2004. P.344.

* 3On distingue la justice distributive de la justice commutative. La justice distributive est celle qui répartit entre les personnes les biens, les droits et les devoirs en fonction des aptitudes et du rôle de chacun dans la société ; tandis que la justice commutative vise une certaine égalité arithméthique dans les échanges. V. R. Guillien et J. Vincent (sous la direction de...), Lexique des termes juridiques, op. cit.. p.344.

* 4Pour une vue d'ensemble sur l'OHADA, V. P.G. Pougoué, Présentation générale et procédure en OHADA, Yaoundé, PUA, 1998 ; et B. Martor, N. Pilkington, D. Sellers, S. Thouvenot, Le droit uniforme africain des affaires issu de l'OHADA, Paris, Litec, 2006. No 17 et s.

* 5Elle est, à l'instar de la Cour suprême, la juridiction de cassation pour les matières concernant l'application du Traité OHADA et des actes uniformes subséquents, et ce dans tous les Etats membres.

* 6Comme d'ailleurs dans la plupart des Etats membres de l'OHADA.

* 7En effet, le Code de procédure civile et commerciale, dans son livre troisième intitulé « des arbitrages », réglementait de façon lacunaire l'arbitrage. La conséquence en était que les justiciables choisissaient rarement l'arbitrage comme mode de règlement de leurs différends. V. aussi B. Martor et alliés, op, no 1163.

* 8K. Mbaye, in plaquette OHADA élaborée par l'Association pour l'Unification du Droit en Afrique.

* 9J. Cassius, « Etude comparée de la réglementation de l'arbitrage international dans l'OHADA et en Suisse », mémoire de DEA, Université de Genève, 2006-2007.

* 10A. Polo : « L'OHADA : histoire, objectifs, structure » in l'OHADA et les perspectives de l'arbitrage en Afrique, Bruxelles, Bruylant, 2000.P.9.

* 11Article 1er du Traité OHADA.

* 12TPI de Douala, ordonnance no 40 du 14 octobre 1998, aff. Société Allation Property Inc c/ Société Sirpi Alusteel Construction et Société Elf Serepca.

* 13Cour d'appel du Littoral, arrêt no 39/REF du 08 janvier 1997, aff. Reemtsa Cigaretten Fabriken c/ Sitabac.

* 14Qui, comme nous le verrons, ne doit en aucun cas préjudicier le fond de l'affaire.

* 15Article 1er Traité OHADA. V. supra p.2.

* 16Citons les cas du Centre d'arbitrage du GICAM au Cameroun et du Centre d'arbitrage de Cote-d'Ivoire.

* 17Colloque organisé par l'Association Africaine pour la Promotion de l'Arbitrage.

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