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La médiation sanitaire: une réponse à  l'insatisfaction du patient

( Télécharger le fichier original )
par Isabelle Jeanneret
Institut universitaire Kurt Bosch IUKB, CH-Sion - Master européen en médiation 2009
  

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3.9. Conclusions

C'est suite à des scandales médiatisés que la médiation santé est entrée dans le domaine public vaudois. Conscients des limites de l'appareil judiciaire et de l'administration dans la gestion des problématiques relatives au respect de la dignité et de l'intégrité des patients, les parlementaires, dans le cadre de leur enquête, recherchèrent une nouvelle forme de gestion sociale pouvant répondre aux besoins de l'Etat. L'on peut donc admettre que la médiation santé a été pensée par les politiques comme un outil de règlement amiable des conflits permettant le respect des droits des patients et la paix sociale. Aujourd'hui encore, les membres des commissions d'examen des plaintes et les responsables politiques expriment leur satisfaction à l'égard de l'activité du BCMS en regard du nombre de dossiers clos. L'apaisement des souffrances du patient a également été évoqué en entretien. Or, nous l'avons vu dans notre étude, les pratiques du BCMS se basent sur les logiques communicationnelles et pédagogiques de la médiation et non sur sa rationalité purement instrumentale de gestion des conflits. La liste des avantages de la médiation santé vue sous son angle communicationnel intègre, outre l'évitement de scandales, de recours aux médias ou à la justice et l'apaisement des plaignants, des bénéfices qui concourent non seulement à une cohésion sociale plus approfondie mais également à l'amélioration de la qualité des soins :

o la restauration de la confiance mutuelle et du lien social;

o le renversement du rapport «dominant-dominé» qui génère une

humanisation des relations «soignant-soigné» par des changements de

perceptions et de comportements des professionnels de la santé; o le regain d'autonomie du patient;

o la protection de l'image du professionnel de la santé mis en cause et de la structure sanitaire qui l'emploie;

o des ajustements organisationnels ou fonctionnels visant à améliorer les prestations de soins et à éviter la reproduction de défauts.

Les effets de la médiation santé sur les médiés et plus précisément sur les professionnels sont mesurables : la majorité d'entre-eux ne sont ultérieurement plus mis en cause et certains proposent spontanément au patient de s'adresser au BCMS. C'est dire que la médiation opère peu à peu un changement sociétal dans la communauté des professionnels de la santé.

A propos de l'institutionnalisation de la médiation santé, nous nous référons aux propos de Jacques Faget116 qui, parlant de médiation pénale et de justice restauratrice, estime que son institutionnalisation est désormais incontournable et que la défense farouche de l'indépendance et de l'autonomie de ses procédés risque d'en fragiliser ses pratiques communautaires. Par institutionnalisation, l'auteur entend sa légalisation, sa professionnalisation et sa juridicisation. Pour lui, les médiateurs eux-mêmes sont responsables de cette tendance du fait de leur recherche de légitimation et de ressources financières. D'autre part, la culture française s'inquiète peu du besoin et des risques de césure entre l'Etat, son administration et la société, comparativement aux pays anglo-saxons. La France n'hésite pas à institutionnaliser : preuves en sont les diplômes d'Etat délivrés en fin de formation, notamment dans le domaine de médiation familiale.

L'exemple vaudois est un modèle hybride d'institutionnalisation. L'articulation entre les principes éthiques et les exigences institutionnelles ne semble pas mettre en danger la déontologie de la pratique :

o la loi de santé prévoit un article relatif à l'indépendance du fonctionnement du médiateur et à son impartialité;

o dans la pratique, nous avons identifié le respect de ces notions;

116 J. Faget, in « La justice réparatrice et médiation pénale. Convergence ou divergences ? » de M. Jaccoud ( sous la dir. de ), collectif, Ed. L'Harmattan, Paris, 2003, p. 241

o la médiatrice détient un diplôme en médiation IUKB, alors que la loi de santé ne réglemente pas ce point.

En d'autres termes, conscient de l'importance du respect des principes éthiques de la médiation, l'Etat de Vaud s'est donné les moyens de les respecter et soutient le BCMS, satisfait du règlement définitif du contentieux sanitaire à moindres frais et remous. Quant au BCMS, il exerce son activité dans les règles de l'art de la médiation.

Reste le nombre de médiations abouties qui montre un taux de réussite de 88%. Jacques Faget117 faisant toujours référence à l'institutionnalisation de la médiation dans le domaine de la Justice restauratrice, explicite que le taux de réussite varie proportionnellement au niveau de formation du tiers :

«...calculé en fonction du nombre, du niveau et de la qualité de formations, la supervision et l'analyse de pratique, la fréquentation de colloques, le nombre de lectures spécialisées.[...] L'explication, corroborée par l'observation des pratiques, montre en effet que plus le niveau de formation est élevé, plus les principes éthiques de la médiation sont respectés, tandis que les procédés utilisés par les personnes non formées sont largement plus directifs, voire parfois autoritaires»118.

Une certaine obligation de résultats aurait pu motiver ce résultat positif. Or, comme nous l'avons précédemment dit, les accords sont signés quelques jours après la médiation et le refus de signatures concerne des plaignants atteints de pathologies psycho-organiques.

Nous voyons deux hypothèses qui pourraient expliciter ce phénomène particulier au domaine sanitaire sans qu'il nous soit possible de les vérifier.

Premièrement, nous pensons à la crainte d'un procès ou de détérioration de la renommée, vécue par les professionnels de la santé, crainte qui déterminerait favorablement les dispositions d'entrée en médiation. Rappelons les désirs de résoudre et de se réconcilier qui jouent un rôle majeur dans le déroulement du processus.

117 J. Faget, "La justice réparatrice et médiation pénale. Convergence ou divergences ? » de M. Jaccoud, (sous la dir. de ) collectif, Ed. L'Harmattan, Paris, 2003, p. 241

118 Ibidem

Deuxièmement, pour avoir participé à des séances, nous postulons que la formation ad hoc et les compétences relationnelles de la médiatrice jouent un rôle important dans l'établissement de l'intercompréhension

Enfin, si nous reprenons la définition de la médiation de Guillaume Hofnung, le
médiateur n'a d'autres pouvoirs «que ceux reconnus par les partenaires quis'adressent à lui». Or, la médiation santé vaudoise est exercée par une seule

personne. Nous concevons que sa légitimité se construit au travers du processus de médiation, ceci dès l'entretien préalable.

Après ces réflexions, nous estimons que le modèle vaudois de médiation santé institutionnelle représente un bon compromis entre les attentes politiques en termes de cohésion sociale et la pratique de la médiation dans sa dimension de gestion et régulation sociale au sens de Bonafé-Schmitt et de GuillaumeHoffnung.

Le chapitre qui suit présente une recherche sur les attentes et les effets de la médiation santé. Nous tenterons de mettre en évidence les changements de perceptions qui s'en dégagent, d'analyser les phénomènes et identifier les conséquences.

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