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La responsabilité des dirigeants en cas de procédure collective contre la société

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par Michel Justancia ILOKI
Université de Poitiers, faculté de droit et des sciences sociales - DEA master recherche en droit privé fondamental 2005
  

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B. Faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif37(*).

Les erreurs de gestion peuvent présenter des degrés de gravité plus ou moins importants; l'acte répréhensible peut se produire de manière isolée mais le plus souvent il existe un faisceau de faits positifs ou de simples abstentions ou imprudences qui, au bout du compte, caractérise la faute de gestion. Celle-ci est donc composée d'éléments divers. Elle peut apparaître dès la création de l'entreprise, mais le plus souvent c'est au cours de l'activité et/ou durant la période de la cessation de paiement jusqu'au jugement d'ouverture de la procédure collective qu'elle est la plus fréquente engendrant ainsi la responsabilité des dirigeants en cas d'insuffisance d'actif.

La condamnation pour insuffisance d'actif des dirigeants suppose la preuve d'une faute de gestion38(*). La qualification de la faute de gestion, qui n'est pas définie par le Code de commerce, relève du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond, et doit être déduit du comportement passé du dirigeant par comparaison à ce qu'aurait été le comportement d'un dirigeant normalement compétent et placé dans la même situation39(*).

La jurisprudence a une conception très large de la faute de gestion, à l'image de celle développée en matière de responsabilité des dirigeants d'une société in bonis40(*). Elle la déduit d'une véritable appréciation qualitative de la gestion. Elle retient aussi bien un défaut de surveillance ou de diligence que des décisions imprudentes, fruit d'erreurs d'appréciation graves, notamment sur le financement des investissements ou le niveau des risques financiers41(*).

La difficulté concrète est alors de déterminer le seuil de gravité à partir duquel l'erreur dans l'appréciation des opportunités de gestion commise lors de la prise de décision, qui fait partie des aléas de la vie des affaires, devient une faute de gestion au titre de la responsabilité civile des dirigeants. Il est incontestable que les mauvais résultats d'une décision ne sont pas en eux-mêmes un élément suffisant pour caractériser la faute.

Sont ainsi des fautes de gestion par exemple des absences répétées ou des délégations facilement consenties à des personnes incompétentes42(*). L'administrateur « homme de paille » encourt par ce biais un risque réel de condamnation.

Les éléments de preuve de la faute de gestion peuvent être puisés dans le rapport d'un expert-comptable établi à la demande du juge-commissaire.

La faute peut exister dès la création de la personne morale, par exemple par cause d'insuffisance des financements réunis par rapport aux investissements à réaliser ou de fixation d'une rémunération disproportionnée par rapport aux résultats prévisionnels, ou encore de défaut de libération intégrale du capital dès la première année alors même que la loi n'en fait pas obligation.

Elle est également constatée, le plus souvent, en cours d'exploitation par exemple :

§ pour cause de poursuite d'une exploitation déficitaire sans prendre les mesures nécessaires, même si la société n'est pas déjà en état de cessation des paiements43(*) et alors que sa situation était déjà compromise lorsque le dirigeant a pris ses fonctions44(*) ;

§ ou encore pour cause d'octroi, irrégulier, par le dirigeant lui-même d'une rémunération (auto rémunération) alors que la société était dans une situation difficile45(*).

La faute de gestion du dirigeant a été encore notamment retenue :

§ à l'encontre de trois administrateurs d'une société anonyme dans un cas où cette société, qui exploitait un fonds de distribution en gros de viande, avait perdu, pour défaut de paiement des loyers et charges la concession dont elle était titulaire au marché de Rungis46(*) ;

§ à l'encontre du gérant d'une SARL qui n'avait pas respecté l'obligation légale de demander l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire dans les quinze jours de la cessation des paiements et avait ainsi laissé s'accumuler les pertes, ce qui avait rendu impossible le sauvetage de l'entreprise ;

§ à l'encontre du gérant d'une SARL au motif qu'il avait poursuivi l'activité d'une société qui, en moins d'une année, avait perdu plus des quatre cinquièmes de son capital47(*) ;

§ à l'encontre d'un dirigeant de droit qui a laissé opérer à sa guise un dirigeant de fait48(*) ;

§ à l'encontre des dirigeants qui n'ont pas pris les mesures de restructuration qu'appelaient les difficultés de trésorerie et qui n'ont pas davantage pris de mesures alors que pourtant, les commissaires aux comptes avaient déclenché une procédure d'alerte49(*) ;

§ à l'encontre de dirigeants qui ont mis en place un montage juridique masquant la situation réelle de leur groupe et dont ils ont retiré des avantages financiers au détriment du groupe et des petits actionnaires, poursuivant une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements50(*)...

Une fois ces fautes énumérées de façon non exhaustive, reste à traiter du lien de causalité justifiant la contribution de celles-ci à l'insuffisance d'actif.

* 37 M. Bourrie-Quenillet, La faute de gestion du dirigeant de société en cas d'insuffisance d'actif, pratique judiciaire : JCP E 1998, p.455-461. ; A. Martin-Serf, Panorama des fautes de gestion : RTD com.1999, p.983.

* 38 M. Vasseur, Le droit français [et spécifiquement l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967] est-il un handicap pour l'apporteur de fonds propres ?: Banque 1979, p. 7 et 187. ; Cass. com., 11 janv. 1994, pourvoi n° 92-10-914.

* 39 A. Jacquemont, Droit des entreprises en difficulté, 4e éd. Lexis-nexis Litec, février 2006, n°897, p.450.

* 40 S. Hadji-Artinian, La faute de gestion en droit des sociétés, Litec 2002.

* 41 Voir par exemple à propos de l'erreur sur la viabilité d'une chaîne de télévision : T. com. Paris, 23 nov. 1992, aff. La Cinq : Bull. Joly Sociétés 1993, p. 255, note M.-J. Campana.

* 42 Cass.com., 25 mars 1997 : JCP E 1997, pan. 531, à propos d'un Comité de développement économique administrateur négligent d'une société.- Dans le même sens la passivité reprochée à une société de capital-risque qui détenait à la fois 20% du capital et 3 postes sur 7 au Conseil d'administration d'une SA. : Cass. Com., 30 oct. 2000 : Bull. Joly Sociétés 2001, § 5, p. 27, note J.-J. Daigre.

* 43 Cass. Com., 27 avr.1993 : JCP 1993, I, 277 § 20.

* 44 Cass.com., 23 mai 2000 : JCP E. 2000, p. 1165.

* 45 CA Lyon, 3e ch. Civ., 12 sept. 2002 : Dr. Sociétés 2004-1, n° 7, obs. J.-P. Legros.

* 46 CA. Paris, 3e ch. B 24 nov. 1989, BRDA 1990, n° 8, p. 21.

* 47 CA Versailles, 13e ch., 3 mai 1990, Bull. Joly 1990, p. 664.

* 48 CA Paris, 3e ch. B, 19 nov. 1999, Fabrec/Pelligrini ès qual., BRDA 2000, n° 4, p. 5.

* 49 Cass.com., 25 juin 2002, RJDA 2002, n° 1306, p. 1103.

* 50 CA Versailles, 13e ch., 4 mai 1995, Flouquet c/Chavinier, Bull. Joly 1995, p. 788, note Courret.

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