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La responsabilité des dirigeants en cas de procédure collective contre la société

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par Michel Justancia ILOKI
Université de Poitiers, faculté de droit et des sciences sociales - DEA master recherche en droit privé fondamental 2005
  

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Section II Le remplacement des procédures collectives sanctions par la nouvelle obligation aux dettes sociales du nouveau article L 652-1 du C. Com. issue de la loi du 26 juillet 2005.

Depuis le début du XXe siècle, une jurisprudence s'est progressivement forgée pour réagir contre les abus de la personnalité morale et atteindre par l'extension de la faillite - au sens ancien et patrimonial du terme - ceux qui détournaient à leur profit les mécanismes du droit des sociétés afin de réaliser les fraudes. Elle touchait deux catégories différentes : d'une part la société fictive ou les personnes dont le patrimoine était confondu et d'autre part, le maître de l'affaire qui se dissimulait derrière la façade d'une société ainsi que le dirigeant abusif.

D'abord, le décret-loi du 8 août 1935 avait prévu que :

« en cas de faillite d'une société, la faillite peut être déclarée commune à toute personne qui, sous le couvert de cette société masquant ses agissements, a fait dans son intérêt personnel des actes de commerce et disposé en fait des biens sociaux comme des siens propres ».

Ce texte fut repris par le décret-loi n° 55-602 du 20 mai 1955 et modifié par la loi n° 67-563 du 13 juillet 1967 qui en a élargi le domaine d'application au cas où l'entreprise était mise en règlement judiciaire ; il concerne en outre toutes les personnes morales de droit privé non commerçantes, à l'exclusion de celles qui n'avaient pas d'objet économique et ne poursuivaient ni en droit ni en fait un but lucratif et s'appliquera à « tout dirigeant de droit ou de fait ».

Alors que l'ancien article 437 du Code de commerce exigeait seulement que la personne ait, à la fois, fait dans son intérêt personnel des actes de commerce et disposé des biens sociaux comme des siens propres, le législateur de 1967 énumérera des cas distincts : « sous le couvert de la personne morale masquant ses agissements, fait des actes de commerce dans son intérêt personnel - ou disposé des biens sociaux comme des siens propres - ou poursuivi abusivement dans son intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements de la personne morale ».

La loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 avait apporté quelques modifications (C.com., art. L.624-2 et L 624-5 à L. 624-7 ancien) et la loi n° 94-475 du 10 juin 1994 ajouta un autre cas d'ouverture : le fait d'avoir tenu une comptabilité manifestement incomplète au regard des dispositions légales (C.com., art.L.624-5, I-7°, ancien).

Cette possibilité d'ouverture d'une procédure collective à titre de sanction a pris fin en 2005. La loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 y a substitué une nouvelle action en responsabilité « l'obligation aux dettes sociales ».

L'obligation aux dettes sociales en cas de liquidation judiciaire supprimant les procédures collectives sanctions est prévue à l'article L. 652-1 du Code de commerce :

« Au cours d'une procédure de liquidation judiciaire, le tribunal peut décider de mettre à la charge de l'un des dirigeants de droit ou de fait d'une personne morale la totalité ou une partie des dettes de cette dernière lorsqu'il est établi, à l'encontre de ce dirigeant, que l'une des fautes ci-après a contribué à la cessation des paiements... ».

La nouvelle obligation aux dettes de l'article L. 652-1 ressemble étrangement à l'obligation aux dettes qui existait avant la reforme de 2005 et connue sous le nom de l'action en comblement de passif. Dans les deux cas, le dirigeant peut être condamné à payer tout ou partie des dettes sociales s'il a commis une faute.

Sur le plan des principes, l'obligation aux dettes, n'est pas une action en responsabilité, contrairement à l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif (qualifiée comme telle par la loi) pour la quelle sont exigés une faute, un préjudice (insuffisance d'actif) et un lien de causalité entre les deux (l'insuffisance d'actif doit trouver sa cause dans la faute du dirigeant) et qui conduit à condamner le dirigeant à réparer le préjudice en comblant le passif. L'obligation aux dettes ne tend pas à réparer le préjudice (la cessation de paiement) que l'agissement du dirigeant cause à la société. Il s'agit d'une sanction patrimoniale applicable dès lors que l'un des faits limitativement énumérés à l'article L. 652-1 a été commis par le dirigeant, sans corrélation avec le préjudice qui a pu en résulter pour la société.

Admettons néanmoins que la nature juridique de l'obligation aux dettes est controversée. Comme l'action en comblement de l'insuffisance d'actif, l'obligation aux dettes sociales est une action en responsabilité civile fondée sur les fautes de gestion, mais celles-ci sont limitativement énumérées et doivent avoir contribué à la cessation des paiements de la personne morale73(*). De ce fait elle est parfois présentée comme une « action en comblement de l'insuffisance d'actif aggravée »74(*), car le dirigeant n'aura pas seulement à supporter l'insuffisance d'actif, mais tout ou partie des dettes de la personne morale. Enfin, elle se rapproche pour certains auteurs, d'une peine que d'un mécanisme de responsabilité civile75(*).

Le dirigeant qui a commis un fait sanctionné par l'obligation aux dettes ne peut pas être poursuivi en comblement du passif. Ainsi la Cour de cassation affirme nettement que le régime spécial de responsabilité de l'action en comblement de passif exclut la possibilité de mettre en oeuvre également l'action en responsabilité de droit commun, qu'elle soit fondée sur les articles L. 223-22 ou L. 225-251 ou encore sur l'article 1382 du Code civil76(*). Cette règle du non-cumul vaut également pour les actions intentées par les créanciers77(*).

Paragraphe1 Les conditions du prononcé de la sanction (les cinq cas de l'article L 652-1).

Une fois la personne morale mise en liquidation judiciaire, le tribunal peut décider de mettre à la charge de l'un des dirigeants de droit ou de fait la totalité ou une partie des dettes de la personne morale. Il faut que soit établie à son encontre, aux termes de l'article L. 652-1 du Code de commerce, l'une des cinq fautes suivantes (et non plus sept comme il était prévu avant l'entrée en vigueur de la loi du 26 juillet 2005), dès lors qu'elle a contribué à la cessation des paiements :

1. avoir disposé des biens de la personne morale comme des siens propres. Sous cette formule sont visé par exemple, parmi les comportements les plus souvent relevés, le fait de faire payer par la société des dépenses ou des investissements strictement personnels, ou encore le versement des rémunérations excessives ;

2. sous couvert de la société masquant ses agissements, avoir fait des actes de commerce dans un intérêt personnel. Dans ce cas, la société sans être fictive, masque l'activité du dirigeant maître de l'affaire, qui se comporte en fait comme un véritable entrepreneur individuel ;

3. avoir fait des biens ou du crédit de la personne morale un usage contraire à l'intérêt de celle-ci à des fins personnelles ou pour favoriser une autre personne morale ou entreprise dans laquelle il est intéressé directement ou indirectement.

Ce comportement correspond au délit d'abus de biens sociaux tel qu'il est défini dans les (seules) sociétés par actions et la SARL, moins la mauvaise foi qui n'est pas exigée ici ;

4. Avoir poursuivi abusivement dans un intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements de la personne morale.

En retardant artificiellement le dépôt de bilan pour en tirer un avantage personnel, le dirigeant a aggravé la situation de la personne morale. L'intérêt personnel peut être par exemple la perception d'une rémunération élevée, le souci de se faire rembourser un compte courant ou faire payer une dette sociale pour laquelle il s'était porté caution, etc. ;

5. Avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l'actif ou frauduleusement augmenté le passif de la personne morale.

L'ancien article L. 624-5 du Code de commerce prévoyait deux cas supplémentaires justifiant l'ancienne sanction de la déclaration personnelle en redressement judiciaire, les deux cas étant par ailleurs des délits comptables.

Ces manquements comptables ne sont pour autant pas dépourvus de sanction, puisque le dirigeant peut être condamné pour ces mêmes faits à la faillite personnelle (sanction professionnelle) et aux peines de la banqueroute (sanction pénale).

Le législateur de 2005 a simplement estimé que les sanctions pécuniaires, se surajoutant aux autres, étaient inutiles.

* 73 D. Vidal, Droit des procédures collectives, éd. Gualino, févr. 2006, p. 313. ;

A. Lienhard, obs. sous Cass. com., 7 juin 2005, D. 2005, AJ p. 1697.

* 74 Rapp. J.-J. Hyest. n° 335, p. 61.

* 75 P.- M. Le Corre, op. cit., D. 2005, Chron. p. 2306. n° 33.

* 76 Cass. Com., 19 fév. 2002, n°424 : RJDA 7/02, n°777.

* 77 Cass. Com., 11 avr. 1995 : Bull. Joly 1995 p. 684 note Daigre.

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