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La problématique des limitations juridiques à  l'intervention du pouvoir constituant dérivé :cas de la Constitution du 18 février 2006

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par Chris Shematsi
Université protestante au Congo - Licence 2010
  

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Chapitre III : LES LIMITES A LA REVISION CONSTITUTIONNELLE A L'EPREUVE DE LA REALITE

Après avoir épuisé les notions théoriques relatives aux limites à l'intervention du pouvoir constituant dérivé, il nous semble opportun de chuter dans la pratique pour mieux cerner ces aspects théoriques.

Ainsi, dans le cadre de ce chapitre, nous traiterons du processus permanent de déconstitutionnalisation - réconstitutionnalisation puis allons-nous rechercher mieux scruter les motivations profondes qui sous-tendent les velléités révisionnistes en République Démocratique du Congo.

SECTION 1 : LE PROCESSUS PERMANENT DE DECONSTITUTIONNALISATION- RECONSTITUTIONNALISATION EN RDC

Dans le cadre de cette section, nous allons faire une brève analyse de la production constitutionnelle congolaise, par ailleurs marquée par la fraude, puis allons-nous en rechercher les causes profondes en tentant de donner quelques pistes de solution.

§.1. Une production constitutionnelle marquée par la fraude

Les mutations constitutionnelles sont considérées comme destinées à améliorer les conditions politiques et socio-économiques nécessaires à la satisfaction des aspirations légitimes des congolais à plus de démocratie et au mieux-être.

A ce sujet, la RDC n'est pas en reste pour autant qu'elle soit une grande consommatrice des textes constitutionnels.

En effet, depuis son accession à l'indépendance notre pays a consommé plus d'une vingtaine des textes constitutionnels.69(*)

Fort malheureusement, cet effort ou ces efforts de construction constitutionnelle ont un soubassement malsain et se déroulent en dehors des procédures constitutionnelles requises.

A titre illustratif, la Constitution du 24 juin 1967 avec son cortège de révisions, 17 en 20 ans, a institué frauduleusement des nouvelles constitutions, à savoir :

- Loi n°70/001 du 23 décembre 1970 consacrant l'institutionnalisation du Mouvement Populaire de la Révolution ;

- Loi n°74/020 du 15 août 1974 instituant le mobutisme comme doctrine du Mouvement Populaire de la Révolution et consacrant la plénitude de l'exercice du pouvoir par le Président du MPR ;

- Loi n°78/010 du 15 février 1978 libéralisant l'exercice du pouvoir au sein du MPR en rendant tout organe de l'Etat responsable par l'abandon de la plénitude de l'exercice du pouvoir par le Président du MPR, Président de la République et par la restauration du principe de la séparation de l'exercice des pouvoirs au sein du MPR ;

- La loi constitutionnelle n°90/002 du 05 juillet 1990 restaurant le multipartisme.70(*)

Après avoir dégagé cette liste, il nous semble indiqué d'aborder la loi n°74-020 du 15 août 1974 portant révision de la constitution du 24 juin 1967 qui présente des différences tellement essentielles avec le texte originelle, tenant autant du fondement philosophique du pouvoir que de l'aménagement même des pouvoirs de l'Etat.

En réalité, c'est l'exemple le plus éloquent de la fraude à la constitution dans l'histoire constitutionnelle congolaise. Cette fraude à la constitution avait en effet pour objet de sanctionner à travers un acte juridique global toutes les conséquences pratiques découlant de la loi n°70/001 du 23 décembre 1970 consacrant l'institutionnalisation du Mouvement Populaire de la Révolution.

Le mobutisme et le recours à l'authenticité se trouvent, à l'occasion, affirmés mieux consacrés par le préambule de cette loi.

Mais ce sont les grandes modifications renforçant la suprématie du parti, les pouvoirs du Président fondateur, ceux du bureau politique et du Congrès qui ont constitué la sève de la fraude à la constitution en question.

Le Mouvement Populaire de la Révolution était ainsi devenu l'unique institution du pays en entraînant des profonds changements du système constitutionnel congolais. Cette révision constitutionnelle a doté la République du Zaïre d'un nouvel ordre constitutionnel. Le constituant de 1974 avait mis en place un régime de confusion des pouvoirs avec l'existence d'un parti unique au profit du Président du MPR tout à fait différent de celui instauré par le constituant de 1967 qui avait conçu un régime présidentiel pouvant fonctionner avec deux partis politiques.

Au demeurant, il sied de retenir que le régime institué en 1974 se résume par le contenu de l'article 29 de la loi n°74/020 du 15 août 1974 à savoir : "Le Président de la République est avant tout le Président du MPR, il détient par conséquent la plénitude des pouvoirs, il préside le bureau politique, le Congrès, le conseil législatif et le conseil judiciaire". Ces organes du parti représentaient le pouvoir exécutif, le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire.

Cela étant, la constance de la pratique de la fraude dans l'histoire constitutionnelle congolaise doit nous inciter à rechercher les véritables causes de cette dépravation constitutionnelle et à trouver en conséquence des voies et moyens de sortie.

§.2. Causes de la pratique de la fraude et ses pistes de solution en droit congolais

Nous allons essayer ici d'identifier les causes profondes de la fraude et tenter en conséquence d'en dégager les pistes de solution.

2.1. Causes de la pratique de la fraude en droit congolais

Le Professeur KAMUKUNY a, dans sa thèse de doctorat, dégagé trois causes de la constance de la pratique de la fraude dans l'histoire constitutionnelle congolaise, à savoir :

- Le manque de constitutionnalisme ;

- La personnalisation du pouvoir ;

- Le suivisme caractérisé de la population congolaise.71(*)

2.1.1. Le manque de constitutionnalisme

Le Professeur DJOLI affirme que malgré l'intense production constitutionnelle, le constitutionnalisme c'est-à-dire la théorie et la pratique des limitations effectives, systématiques et institutionnelles du pouvoir politique et gouvernemental en vue de la protection des droits individuels n'est pas encore une évidence en Afrique.72(*)

Ainsi, l'idéal du constitutionnalisme, estime le Professeur A. KAMUKUNY, ne peut être réalisé qu'à travers l'existence d'une constitution limitant véritablement, à travers leur séparation, les pouvoirs des gouvernants avec à la clé la promotion et la protection des droits humains.73(*)

Dans ce sens, il sied de noter que la construction d'un véritable constitutionnalisme passe impérativement par trois tests à savoir :

- Le test de suprématie qui postule la supériorité de la constitution sur toutes les règles de droit édictées dans un Etat et toutes doivent tirer leur force et leur conformité de la constitution. On parle dans ce cas d'un Etat de droit constitutionnel ;

- Le test de légitimité qui veut que la constitution émane du peuple ou soit approuvée par le peuple en sa qualité de souverain primaire, il ne doit pas s'agir d'un simple imprimatur ou plébiscite ;

- Le test de promotion et de protection effective des droits de l'homme par un outil judiciaire indépendant et impartial que les anglo-saxons appellent "integrity"74(*)

Au regard de ces tests, force est de constater que le constitutionnalisme en République Démocratique du Congo ne trouve pas pleinement son sens.

En réalité, la RDC pèche énormément en ce qui concerne la promotion et la protection effective des droits de l'homme par un outil judiciaire indépendant et impartial.

Ainsi donc, nous formulons le voeu de voir cette indépendance judiciaire consacrée par l'article 149 de la Constitution prendre corps en vue de donner vie au constitutionnalisme congolais car, nous semble-t-il, ces trois tests sont cumulatifs et non alternatifs.

2.1.2. La personnalisation du pouvoir

La personnalisation du pouvoir en RDC est à rechercher dans la survivance de l'idée du pouvoir coutumier qui postule un pouvoir fondé sur la personnalité du Chef. Ce type de pouvoir vise à garantir les intérêts du Chef au détriment de ceux du peuple.

Ainsi donc, les fraudes à la constitution émaillant l'histoire constitutionnelle congolaise recherchaient souvent à renforcer les pouvoirs d'un individu plutôt que de produire une construction constitutionnelle à même de réaliser les aspirations profondes d'un peuple.75(*)

2.1.3. Le suivisme caractérisé de la population congolaise

Le suivisme de la population congolaise est un facteur de l'analphabétisme et du manque d'encadrement civique et politique dans le chef de cette dernière.

Cet état de choses est malheureusement voulu voire même crée par les dirigeants en vue d'asservir le peuple dans le sens d'accompagner passivement l'accomplissement de leurs desseins souvent machiavéliques.

Ainsi donc, force est de constater que ces maux ont traversé les âges et ils rongent jusqu'à ce jour notre société.

* 69 J. DJOLI, Droit constitutionnel congolais, Cours polycopié, 2ème Graduat, Faculté de Droit, Unikin, 2007-2008, p,17, Inédit

* 70 Idem, p.18

* 71 A. KAMUKUNY, Contribution à l'étude de la fraude en droit constitutionnel congolais, Thèse de doctorat en Droit, Université de Kinshasa, Faculté de Droit, 2007, p.394

* 72 J. DJOLI, Op.cit, p.20

* 73 A. KAMUKUNY, Op.cit, p.397

* 74 J. DJOLI, Op.cit, p.20

* 75 Loi n°74/020 du 15 août 1974 instituant le mobutisme comme doctrine du Mouvement Populaire de la Révolution et consacrant la plénitude de l'exercice du pouvoir par le Président du MPR

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon