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les enquêtes de concurrence

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par Ouafae LAROUSSI
Faculté de droit de Fès - DESA 2009
  

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Chapitre II - L'enquête contraignante dite lourde ou sous contrôle judiciaire

Le pouvoir de délibération et d'autorisation spéciale que détient le juge et qui fait défaut pour le CC explique la dépendance de ses investigations par rapport au pouvoir judiciaire notamment, parce qu'il s'agit de visiter, de saisir, de fouiller, de perquisitionner et, en général, de toucher la liberté des entreprises. A ce niveau, aussi, il est à mentionner «la contrainte de non empiétement des deux compétences d'instruire et juger. Autre raison qui tient au manque d'une magistrature économique »168(*).

Par ailleurs, Le Conseil de la concurrence peut, lorsque les faits lui paraissent de nature à justifier l'application de l'article 67 ci-dessus, recommander au Premier ministre de saisir le procureur du Roi près le tribunal de première instance compétent aux fins de poursuites conformément audit article.

Si les textes ne limitent pas les cas dans lesquels une inspection lourde, peut être réalisée, en pratique cette forme d'inspection n'est véritablement adaptée qu'à l'égard d'une entreprise elle-même suspectée d'avoir participé à une infraction grave169(*).

L'enquête sous contrôle judiciaire, dite sur décision170(*), prévue à l'article 65 de la loi 06-99 est mise en oeuvre, lorsque les documents recherchés n'entrent pas dans les activités normales d'une entreprise ou lorsque les documents en cause sont détenus ailleurs que dans un local professionnel ou encore qu'il est indispensable de se procurer des documents cachés171(*), on peut recourir au dispositif de l'article 65 de la loi marocaine sur la liberté des prix et de la concurrence. Cet article prévoit que sur demande de l'Administration172(*) et avec l'autorisation du procureur du Roi dans le ressort duquel sont situer les lieux à visiter, les enquêteurs peuvent accéder à tous les locaux même non professionnels et rechercher ou saisir des documents de toute nature.

De ce fait, les enquêtes contraignantes doivent être réalisées dans le respect des dispositions de l'article 65 de la loi relative à la liberté des prix et de la concurrence, qui définit les modalités de leur déroulement. Toutefois, le dispositif réglementaire manque de la jurisprudence au Maroc, ce qui nous renvoi à la jurisprudence française pour le compléter.

En effet, les règles de procédure se divergent quelque peu entre les enquêtes menées dans le cadre de l'article 65 et celles de l'article 64 de la 06-99.

Les enquêtes conduites par l'Administration a pour but de rechercher des indices de dysfonctionnement de la concurrence ou les informations dont elle dispose à la suite de plaintes peuvent révéler des comportements permettant de présumer des pratiques anticoncurrentielles mais dont les preuves nécessaires à une parfaite démonstration de ces pratiques sont susceptibles de disparaître ou ne peuvent, compte tenu de leur caractère occulte, être apportées avec les seuls pouvoirs de l'article 64 de la loi 06-99.

Bien qu'encadrés par les textes et la jurisprudence, les autorités de concurrence françaises ont une forte tendance à préférer les visites surprises173(*), étant en fait de véritables perquisitions, qui leur donnent des pouvoirs plus étendus, notamment pour bénéficier de l'effet de surprise et éviter ainsi que des pièces nécessaires à l'établissement de la preuve des pratiques suspectées ne disparaissent. On vise, en employant ces moyens à caractère soudain et inattendu, à prendre l'entreprise visée par surprise; pour elle, il peut s'agir de la première indication du fait que les autorités de concurrence enquêtent à son sujet.

Ces inspections permettent aux autorités de prendre une copie ou de saisir des documents, papiers, informatiques ou électroniques, avec des techniques d'investigation sophistiquées et, enfin, d'interroger les personnels de l'entreprise174(*).

Néanmoins, la doctrine française considère même qu'il s'agit du pouvoir d'investigation le plus efficace, c'est aussi le pouvoir le plus attentatoire aux libertés des entreprises et des personnes concernées175(*).

Dans ce sens, il est naturellement envisagé le recours aux pouvoirs de l'article 65 de la loi marocaine sur la liberté des prix et de la concurrence, plus contraignants pour les entreprises, mais qui nécessitent une autorisation du procureur du Roi compétent, sur la base d'une proposition du Conseil de la Concurrence176(*), et d'une requête, du Premier ministre ou de l'autorité dont relève l'enquêteur, présentant les présomptions dont l'administration dispose à l'égard des entreprises spécialement identifiées.

Dès lors, les enquêtes lourdes sont demandées par le PM dans le cadre d'enquêtes relatives aux pratiques anticoncurrentielles visées au titre III de la loi 06-99 et aux opérations de concentration économique visées au titre IV de la même loi. En revanche, elles sont demandées par l'autorité gouvernementale dont relève l'enquêteur dans le cadre d'enquêtes relatives aux pratiques visées aux titres VI, (c'est-à-dire, les pratiques restrictives de la concurrence), et VII de la loi 06-99, (c'est-à-dire, quand il s'agit des infractions aux dispositions particulières relatives aux produits ou services dont le prix est réglementé)177(*).

Quelle que soit la provenance de l'enquête, les pouvoirs d'investigation et le déroulement sont généralement identiques.  De ce fait, suivant un raisonnement parallèle à celui adopté pour l'examen des enquêtes administratives simples, on a opté pour ce deuxième chapitre une subdivision bipartite s'articulant une vision triptyque mettant l'accent sur l'étendue des pouvoirs des enquêteurs et leurs les constatations (Section I). Ce qui va nous amener à en exposer les limites d'ordre judiciaires (les voies de recours et prescription) et celles d'ordre fonctionnel et technique et légale, que nous désignons par limites extrajudiciaires (Section II). 

Section I - Les prérogatives des enquêteurs et leur étendue

Contrairement aux enquêtes simples, qui sont très étroites, les enquêtes lourdes réservent aux enquêteurs un véritable ensemble de droits consistant notamment, en un droit de fouille, dans tous les locaux, terrains et moyens de transport couverts par l'autorisation judiciaire. Sur cette base, ils peuvent saisir tout document utile en rapport avec l'objet de l'enquête178(*), apposer des scelles et, demander tous renseignements factuels.

Lorsqu'une enquête est ouverte, les enquêteurs, visés à l'article 61 de la loi 06-99, disposent de divers instruments d'enquête pour obtenir les renseignements supplémentaires dont ils peuvent avoir besoin. Les autorités habilitées à enquêter les affaires de la concurrence peuvent communiquer simplement avec des fournisseurs, des clients, des concurrents ou d'autres sources relatives à l'industrie. Dans certains cas, toutefois, c'est au moyen de perquisitions ou de saisies qu'elles pourraient le mieux recueillir les renseignements nécessaires. Lorsqu'elles doivent procéder de cette façon, elles s'adressent aux tribunaux pour obtenir un mandat les autorisant à perquisitionner et à saisir des éléments de preuve. Pratiquement, dans d'autres systèmes étrangers, Il est possible, en vertu de tels mandats, de perquisitionner également des documents électroniques.

Un juge décernera des autorisations motivées de perquisition ou de rendre des ordonnances si une enquête est en cours et s'il appert qu'il sera, par ces moyens, possible d'obtenir des éléments de preuve utiles à l'enquête.

A cet effet, les officiers de police judiciaire désignés par le procureur du Roi, selon l'article 65 de la loi 06-99, accompagnent les enquêteurs déjà cités afin de compléter la procédure de visite et saisie.

La subordination des enquêtes de la concurrence à l'autorisation du procureur du Roi et l'accompagnement de celui ci de toute la procédure visés à l'article 65 de la loi, enrichie non seulement le rapport de coopération, mais aussi garantie la loyauté des investigations et des opérations de visite et saisie. Il trouve son appui dans plusieurs textes, lorsqu'il s'agit des pratiques prohibés par l'article 6 et 7, il en ainsi des articles 36 et 37 de la loi 06-99, qui autorisent le premier ministre, par décision motivée et sur recommandation du CC de saisir le procureur du Roi près le tribunal de première instance aux fins de poursuite compétant conformément aux dispositions de l'article 70 en matière pénale.

Il est d'utilité de suivre, dans l'approche de ce point, une double répartition se penchant en premier lieu sur l'étendu des pouvoirs des enquêteurs (paragraphe1) pour aller tout droit vers leur concrétisation matérielle ( les PV et rapports d'enquête) dans un deuxième temps ( paragraphe2)

Paragraphe I - Les droits des enquêteurs

Le droit de la visite et de la saisie, constituant l'essentiel des prérogatives dont profitent les enquêteurs dans le cadre de leurs actions, trouve son fondement juridique dans l'article 65 de la loi 06-99. Cet article reconnaît ce droit et le subordonne à la nécessité de recourir à des opérations de visite et de saisie (A). Comme il réglemente ces actions de la sorte qu'il détaille le déroulement de ces opérations.

A - Le droit de recourir à des opérations de visites et de saisies

Les visites et saisies, opérées en la circonstance doivent, dans le cadre d'enquêtes lourdes, être appuyées ou ordonnées par une autorisation judicaire (a), et ce avant de prétendre en user effectivement (b)

a- formalités de recours aux visites et saisies

Eu égard à sa portée juridique, il convient alors de préciser le contenu de l'autorisation judiciaire (2), ou bien sa nature juridique, et ce après avoir présenté les bases légales du recours à laquelle (1).

1- bases légales du recours aux opérations de visites et saisies

L'exercice des droits de visite et saisie, est subordonné, au Maroc, à l'octroi d'une autorisation judiciaire. Cette dernière est soumise à une règle de forme. Elle est ainsi demandée par l'administration, et accordée par motivation du procureur du Roi dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter conformément aux dispositions de l'article 65 al. 1 de la loi 06-99. L'administration n'a pas à justifier des raisons pour lesquelles elle a décidé d'engager une enquête.

L'article 65 précité n'est pas complet, du fait qu'il n'impose l'autorisation à aucune règle de fond, sauf qu'il a édicté le terme « autorisation motivée » . Il convient de se référer à la législation française en la matière qui détermine des règles de fond pour la validité de l'autorisation. Aux termes de l'article 48-2 de l'ordonnance de 1986179(*), cette règle de fond consiste en une vérification de la demande. Dans ce cadre, l'article L450-4 (ex-article 48 de l'ordonnance) prévoit que « le juge doit vérifier que la demande d'autorisation qui lui est soumise est fondée ; cette demande doit comporter tous les éléments d'information de nature à justifier la visite ».

Il est à noter qu'au niveau communautaire les opérations de visites et de saisies sont soumises à une décision de la Commission européenne. Quant à lui, le législateur français subordonne les visites et saisies, à une autorisation judiciaire accordée par ordonnance du juge des libertés et de la détention (JLD) du tribunal de grande instance180(*), dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter. Lorsque ces lieux sont situés dans le ressort de plusieurs juridictions et qu'une action simultanée doit être menée dans chacun d'eux, une ordonnance unique peut être délivrée par l'un des juges des libertés et de la détention compétents qui donne commission rogatoire aux autres JLD territorialement compétents qui exerceront le contrôle sur les opérations de visite et de saisie jusqu'à leur clôture et désigneront à cette fin le ou les officiers de police judiciaire territorialement compétents »181(*).

En pratique, il apparaît que l'ordonnance est rarement rédigée par le juge lui-même mais lui a été communiquée sous la forme d'un projet d'ordonnance par l'administration. Ce procédé, certes fréquent dans les actions sur requête motivée par l'urgence. La Cour de Cassation considère cependant que cela ne remet pas en cause sa validité : «  les motifs et le dispositif de l'ordonnance (...) sont réputés être établis par le juge qui l'a rendue et signée »182(*).

Ladite ordonnance « doit faire preuve par elle-même de sa régularité, les productions ultérieures ne pouvant être prises en considération pour l'établir »183(*).il s'agit d'un acte particulièrement motivé, comportant le cas échéant des annexes, et généralement plus détaillé et plus long que les décisions d'inspection européennes. Bien que ce ne soit pas une obligation, la requête est fréquemment annexée à l'ordonnance, ce qui en fait un document extrêmement utile pour mesurer l'ampleur des investigations autorisées et l'état d'avancement de l'enquête.

La nature juridique de cette ordonnance est civile. Elle n'est susceptible que d'un pourvoi en cassation qui doit être formé dans les cinq jours de la notification de l'ordonnance. Le contrôle de la légalité de la requête ne saurait être opéré par le juge administratif sur la base d'un recours pour excès de pouvoir184(*), de même qu'une action en responsabilité concernant les éléments fournis à l'appui de la requête185(*).

Depuis le 1er décembre 1986, date de l'ordonnance ayant soumis les opérations de visites et saisies à une autorisation judiciaire, la chambre commerciale de la Cour de cassation française, puis la chambre criminelle depuis le 1er novembre 2001 a précisé au fil de très nombreux arrêts, les règles devant impérativement être respectées par le JLD tant sur le plan formel que sur le fond pour autoriser ces opérations. Depuis une dizaine d'année, ce contentieux continu à se développer car une entreprise sur deux faisant l'objet d'une telle opération en conteste la légalité, mais aucune annulation d'opération n'est intervenue.

2- le contenu de l'autorisation judiciaire

De prime abord, selon l'article 65 de la loi 06-99, l'autorisation judiciaire motivée doit, émaner du procureur du Roi dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter. Lorsque ces lieux sont situés dans le ressort de plusieurs juridictions et qu'une action simultanée doit être menée dans chacun de ces lieux une autorisation unique peut être délivrée par l'un des procureurs du Roi compétents.

Rappelons, au passage, qu'aucune enquête lourde de concurrence n'a eu lieu, au Maroc. Cette situation nous impose de se réfugier à la pratique comparée, notamment communautaire et française.

En effet la doctrine française confirme que l'autorisation judiciaire n'est véritablement mise en oeuvre que dans un nombre limité de cas où l'entreprise s'oppose à l'inspection. Néanmoins, même lorsqu'elle n'est pas mise en oeuvre, le seul fait que les agents disposent de ce pouvoir modifie l'équilibre des relations entre les agents et l'entreprise, au bénéfice des premiers186(*).

Ensuite, comme la décision, l'ordonnance judiciaire contient des précisions utiles. Surtout, en France l'ordonnance vise l'ensemble des entreprises françaises qui font simultanément l'objet de la même inspection, information qui ne figure pas en principe dans la décision de la Commission. Par ailleurs, elle contient fréquemment plus d'information que la décision d'inspection sur l'infraction suspectée. Elle délimite plus précisément le périmètre géographique concerné »187(*). Par conséquent, le champ de l'autorisation, défini par le JLD dans l'ordonnance d'autorisation, est fondé par la requête initiale de l'Administration, et fixe les limites au sein desquelles les enquêteurs sont autorisés à enquêter. De même l'objet de visites et de saisies doit être bien défini188(*).

Enfin, l'ordonnance autorisant les opérations de visite et saisie, doit contenir un certain nombre de mentions obligatoires (lieu et date des visites, pratiques et marchés visés189(*), nom du juge, dont émane l'autorisation, identification des entreprises visées, désignation d'un ou plusieurs officiers de police judiciaire pour assister aux opérations et tenir le juge informé de leur déroulement, recours).

L'ordonnance n'a pas à préciser la compétence territoriale de ces officiers; le seul fait de mentionner leur qualité d'officier de police judiciaire, doit satisfaire aux exigences de l'article L. 450-4 du Code de commerce190(*). D'autre part, l'existence d'une ordonnance rectificative désigne implicitement les OPJ déjà mentionnés dans l'ordonnance initiale191(*). La demande d'autorisation de l'administration doit être motivée. La DGCCRF produit au JLD des présomptions de l'existence de pratiques anticoncurrentielles suffisamment graves, précises et concordantes.

Toutefois, pour la constatation d'infractions aux dispositions du livre IV du Code de commerce192(*), en train de se commettre prévue à l'article L. 450-4 alinéa 2, la demande d'autorisation peut ne comporter que les indices permettant de présumer l'existence de pratiques prohibées.

Cela étant, la loi marocaine sur la liberté des prix et de la concurrence, prévoit dans ses articles 15 al. 4 et 38 al. 2 que le CC est consulté par les juridictions compétentes sur les pratiques anticoncurrentielles définis aux articles 6 et 7 et relevées dans les affaires dont elles sont saisies. De ce fait on se demande s'il s'agit d'une consultation afin de justification et motivation de la demande d'enquête ou bien une consultation pour fonder les jugements qui serons émis ou tous les deux?

Précisant encore que l'autorisation du juge doit se référer expressément à la demande d'enquête et contenir les éléments permettant le contrôle de sa régularité. La mention de la délégation de pouvoir donnée par le ministre doit par exemple y figurer lorsque la demande d'enquête est signée par le délégataire. Dans tous les cas, le juge qui autorise des visites domiciliaires en application de l'article L450-4 de l'ordonnance doit constater que la demande de visite, qui lui est présentée, s'inscrit dans le cadre d'une enquête demandée par le ministre de l'Economie ou le Conseil de la Concurrence193(*). Lorsque la demande d'enquête émane du Conseil de la Concurrence, celle-ci doit revêtir la forme d'une « décision » du conseil « délibérant collégialement ».194(*)

La demande d'enquête doit être présentée par une autorité compétente à cet effet. Ainsi l'agent habilité comme enquêteur, a, comme le chef de service, qualité pour présenter au juge la demande d'enquête dès lors que l'agent produit un mandat écrit du signataire.195(*)il n'est pas interdit au juge196(*) (ex président) du tribunal de laisser au chef de service qui a solliciter et obtenu l'autorisation de visite le soin de désigner les agents chargés d'effectuer l'enquête, à condition que les agents ainsi désignés soient placés sous l'autorité de ce chef de service)197(*).

En somme, l'ordonnance d'autorisation doit respecter de nombreuses règles qui, en cas de défaut, aboutiraient à sa nullité et à celle de tous les actes d'enquête qui en sont la suite directe198(*) . Elle doit mentionner le nom du juge, l'indication précise de l'objet de l'enquête, la qualité des personnes ayant demandé l'autorisation, la désignation des officiers de police judiciaire chargés d'assister aux opérations, la désignation précise des lieux où la visite est autorisée. Toutefois, le JLD n'est pas tenu d'identifier dans son ordonnance l'ensemble des sociétés d'un même groupe, domiciliées à la même adresse199(*). En outre, la décision d'autorisation doit être motivée.

b- Déroulement des opérations de visite et de saisie

Lorsqu'elle est mise en oeuvre, l'autorisation judiciaire doit conduire à une véritable perquisition200(*). Conséquente du pouvoir de la visite, la perquisition peut être généralement effectuée sans avertissement si on se réfère, corrélativement, aux dispositions de la procédure pénale201(*), pendant les heures de visite prévues à l'article 65 de la loi 06-99, notamment dans son alinéa 4 qui précise que la visite doit être effectuer en présence de l'occupant des lieux ou de son représentant. A défaut, les dispositions de l'article 104 du CPP sont appliquées.

Les enquêteurs composées des agents du corps des contrôleurs des prix, les fonctionnaires de l'administration habilités spécialement à cet effet et les OPJ mandatés du procureur du Roi dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter, peuvent arriver sur les lieux munis du pouvoir de perquisition les autorisant à examiner tous les documents pertinents de l'entreprise. Lorsqu'une entreprise soupçonnée d'avoir contrevenu à la loi occupe des locaux situés à des endroits différents, ou lorsque les lieux à visiter sont, habituellement, situés dans le ressort de plusieurs juridictions, des équipes sont envoyées à chaque endroit, avec une autorisation unique, qui peut être délivrée par l'un des procureurs du Roi compétents, et, les perquisitions sont effectuées simultanément. Seulement, le procureur du Roi du ressort d'exécution doit en être avisé.

Pratiquement, la visite commence par la notification de l'ordonnance202(*) ainsi que les enquêteurs doivent présenter leurs cartes de services203(*). Dès que la procédure de notification de l'ordonnance est terminée, la perquisition peut commencer.

Une notification effectuée auprès d'un responsable de l'entreprise204(*). Il est fréquent qu'ils « filtrent » les entrées et sorties jusqu'au moment de la notification pour éviter que des documents ne soient sortis de l'E/se. Les agents ont ainsi, le pouvoir d'apposer des scellés lorsqu'ils estiment nécessaire. Ces mesures doivent éventuellement être coordonnées d'un site à l'autre de l'entreprise.

Pendant toutes les opérations, la visite doit se dérouler en présence de l'occupant des lieux, ou de son représentant205(*) et de l'officier de police judiciaire206(*). De ce fait, seuls les enquêteurs, l'occupant des lieux ou son représentant, ainsi que l'OPJ peuvent prendre connaissance des pièces et documents avant leur saisie. Les enquêteurs peuvent également recueillir des explications orales.

Néanmoins, au niveau communautaire qu'au niveau de la pratique en France, les enquêteurs peuvent prendre certaines mesures conservatoires dès leur entrée dans les lieux dans les plus brefs délais.

La question est, bien entendu, particulièrement sensible en ce qui concerne l'inventaire des documents informatiques et messageries électroniques saisis dans leur globalité. Dans ce sens, la loi n° 2004-57545 qui a modifié l'article 56 du Code de procédure pénale français pour y inclure expressément la saisie de données informatiques, prévoit que ces données doivent bénéficier de la même procédure d'inventaire et de mise sous scellés et de la même protection que les documents «papiers»207(*).

En fin d'intervention, les enquêteurs procèdent à la mise sous scellé des documents conformément à l'article 56 du Code de procédure pénale français208(*) et l'article 59 du CPP marocain. C'est ainsi que l'alinéa 6 de l'article 65 de la loi 06-99 précise que les inventaires et mises sous scellés des pièces saisies sont réalisés conformément aux dispositions du code de procédure pénale. Les enquêteurs régulièrement autorisés disposent d'un pouvoir de perquisition et de saisie. Leur intervention doit être consignée dans un PV établi selon des règles précises209(*). Par ailleurs, les documents ne sont plus copiés mais saisis et placée sous scellés.

Les originaux du procès-verbal et de l'inventaire sont transmis au juge qui a autorisé la visite. Copie en est délivrée à l'intéressé. Il est délivré aux intéressées et à leurs frais des copies des pièces devant demeurer saisies, certifiées par le fonctionnaire chargé de l'enquête. Mention en est faite sur le procès-verbal.

* 168 Jean Jacques Israël, « la complémentarité face à la diversité des régulateurs et des juges », op.cit. p. 9.

* 169 Nathalie JALABERT-DOURY; « Les inspections de concurrence » ; op. cit. ; p. 31.

* 170 Idem.

* 171 En droit communautaire La Commission a listé les principales raisons qui pouvaient l'amener à procéder à une inspection lourde plutôt qu'à une inscription simple :

l'entreprise a refusé l'accès à ses locaux à des inspecteurs de la Commission agissant sur mandat ; la Commission soupçonne l'existence d'infractions particulièrement grave et craint que des documents ou autres preuves ne disparaissent ; dans le passé, l'entreprise a refusé de coopérer volontairement avec les inspecteurs de la Commission ou de répondre à des demandes d'informations ; l'entreprise a antérieurement effectué de fausses déclarations à la Commission ou l'a induite en erreur alors qu'elle agissait sur une base volontaire ; les inspections doivent être faites dans plusieurs entreprises situées dans des Etats membres différents et, pour que l'enquête menée par la Commission soit efficace, il importe que les inspections puissent être effectuées simultanément dans des lieux différents.

* 172 Le sens de l'administration est très vague, il peut signifier le Premier ministre ou l'autorité administrative dont il émane les enquêteurs. Voir l'article 24 du décret n°2-00854 pris pour l'application de la loi 06-99.

* 173 « Dans le cadre de l'inspection lourde, les enquêteurs arrivent par surprise (1), en tout début de la matinée (2), en nombre (3), le cas échéant sur plusieurs sites de l'entreprise (4), et peuvent prendre des mesures décisives dès leur arrivée (5), toutes circonstances qui nécessitent d'avoir mis en place les procédures permettant d'adopter très rapidement les réactions qui s'imposent ; (1) concernant la légitimité d'une inspection « surprise » au regard du droit fondamental au respect de la vie privée, la Cour de Justice qui a jugé qu'en n'exigeant pas une communication préalable,... le respect du droit à la vie privée n'implique aucun droit d'être prévenu à l'avance... Cette forme d'inspection a pour objet de s'assurer que des pièces ne puissent disparaître ». Nathalie J. D.; op. cit. p. 64.

* 174 http://www.dgccrf.bercy.gouv.fr/documentation/publications/publications_externes/marie_lamy_concurrence.pdf; consulté le 26-12-2008.

* 175 Nathalie J. D.; op. cit. p. 2.

* 176 Suivant les dispositions de l'article 26 de la loi « le Conseil de la concurrence peut, lorsque les faits lui paraissent de nature à justifier l'application de l'article 67, recommander au Premier ministre de saisir le procureur du Roi près le tribunal de première instance compétent aux fins de poursuites conformément audit article ».

* 177 Selon l'article 24 du décret n° 2-00-854 du 28 joumada II 1422 pris pour l'application de la loi n°06-99 sur la liberté des prix et de la concurrence.

* 178 A l'instar de l'enquête simple, l'article 66 de la loi rappelle que les enquêteurs habilités au titre de la loi, peuvent, sans se voir opposer le secret professionnel, accéder à tout document ou élément d'information détenu par les administrations, les établissement publics et collectivités locales.

* 179 Devenu actuellement l'article L450-4 du code de commerce, modifié par Ordonnance n°2008-1161 du 13 novembre 2008 - art. 1 http://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=ECC675AFB56AE705DD2F5B3F2EE143A1.tpdjo13v_1?cidTexte=LEGITEXT000005634379&idArticle=LEGIARTI000019761579&dateTexte=20090120&categorieLien=id; consulté le 12-12-2008.

* 180 Autrefois cette autorisation émanait du président du tribunal de grande instance.

* 181 Article L450-4 du Code de Commerce ; les termes de ce texte ont été appuyés par la jurisprudence (Cass. crim., 8 nov. 2006, n° 04-87.351, D). http://www.dgccrf.bercy.gouv.fr/documentation/publications/publications_externes/marie_lamy_concurrence.pdf;

* 182 Nathalie J.DOURY, op. cit. ; p. 201.

* 183 Com, 30 novembre 1999, pourvois n°98-30.318 e.a. ; http://www.dgccrf.bercy.gouv.fr/documentation/publications/publications_externes/marie_lamy_concurrence.pdf;

* 184 (CAA Nancy, 27 juin 1996, Légifrance n° 94NC00365) ; ibid.

* 185 (TA Strasbourg, 14 mai 1991, à propos de l'article L.16 B du Livre des procédures fiscales) ; ibid.

* 186 Ibid.

* 187 Nathalie J. D ; op. cit. p.82.

* 188 Cass. com., 6 avr. 1993, n° 91-17.835 et Cass. com., 26 oct. 1993, n° 92- 13.658, JCP G 1993, IV, 2720, p. 334, D. 1994, I.R., p. 3, Contrats, conc., consom. 1994, n° 1, p. 9. in http://www.dgccrf.bercy.gouv.fr/documentation/publications/publications_externes/marie_lamy_concurrence.pdf

* 189 Cass. com., 15 mars 1994, n° 92-15.501, Bull. civ. IV, n° 116, p. 89, Contrats, conc., consom. 1994, n° 198, D. 1994, I.R., p. 85, BID 1995, n° 5, p. 23. ; Ibid.

* 190 (Cass. crim., 28 mai 2003, n° 01-86.887, D). Ibid.

* 191 (Cass. crim., 14 févr. 2007, n° 06-80.177, D) ; ibid.

* 192 Voir Annexe A.9. LIVRE IV- DE LA LIBERTÉ DES PRIS ET DE LA CONCURRENCE. Nathalie J.D. op. cit. p. 391.

* 193 Dans un arrêt du 10 mars 1992, la cour de cassation avait par exemple jugé irrégulière l'autorisation de visite domiciliaire donnée par le juge sur la quelle ne figurait pas la mention que cette demande d'autorisation soumise en l'espèce par le directeur général de impôts, était présentée dans le cadre d'une enquête demandée soit par le ministre chargé de l'Economie, soit par le Conseil de la concurrence. La cour avait indiqué que les visas des décrets invoqués par le directeur général des impôts ne pouvaient suppléer ce défaut de mention ; René Galène ; op. cit. ; p. 51.

* 194 C. cass. 6 avril 1993, SAGTM bâtiment et travaux publics. ; In « Droit de la Concurrence et Pratiques Anticoncurrentielles », in ibid.

* 195 C. cass. 26 janv. 1993, SNC Cise. ; ibid.

* 196 Rectifié par nous.

* 197 René Galène ; op. cit. ; p. 51.

* 198 (Cass. crim., 30 sept. 1991, n° 90- 83.579 : annulation d'un arrêt d'une Cour d'appel condamnant pour abus de biens sociaux les personnes mises en cause lors de poursuites engagées au seul vu des résultats d'une visite domiciliaire autorisée par ordonnance du président du tribunal de grande instance, ladite ordonnance, frappée de pourvoi, ayant été postérieurement annulée).

http://www.dgccrf.bercy.gouv.fr/documentation/publications/publications_externes/marie_lamy_concurrence.pdf;

* 199 (Cass. crim., 6 déc. 2006, n° 05-85.341, D) ; ibid.

* 200 Nathalie J.DOURY, op. cit. ; p. 61.

* 201 Il s'agit notamment de l'article 15 du Code de la Procédure Pénale ; BO. N°5078 du 30 janvier 2003, p. 315.

* 202 Dans le régime juridique français, la notification est obligatoire car elle fixe le départ du délai de pourvoi en cassation de 5 jours contre l'ordonnance du JLD devant la Cour de cassation. Un procès-verbal de notification est rédigé et une copie est laissée à l'occupant des lieux. Il est signé par l'occupant des lieux ou son représentant, le ou les OPJ et les enquêteurs. Il certifie que l'occupant des lieux a pris connaissance de l'ordonnance, qu'il en a reçu une copie certifiée conforme à l'original, qu'il a été informé des règles à respecter pour former un pourvoi en cassation.

La notification ne concerne que la communication des ordonnances principales et secondaires, si nécessaire. La requête de la DGCCRF adressée au JLD pour obtenir l'autorisation de visite et saisie et les pièces annexées n'ont pas à être communiquées aux entreprises visées dans l'ordonnance (Cass. com., 5 févr. 1991, n° 89-15.030, n° 89-15.134, n° 89-15.588 et n° 89-15.133, P+B). in

http://www.dgccrf.bercy.gouv.fr/documentation/publications/publications_externes/marie_lamy_concurrence.pdf;

* 203 Nathalie J.DOURY, op. cit. ; p. 224.

* 204 Nathalie J.DOURY, op. cit. ; pp. 66.215.

* 205 Selon les termes de l'article 65 de la loi marocaine n° 06-99 et de l'article L450-4 du code de commerce français.

* 206 (CA Paris, 22 janv. 2002, BOCCRF, 27 mars 2002, répartition pharmaceutique: il était soutenu, à tort, que l'opération avait débuté avant la notification de l'autorisation) ;

http://www.dgccrf.bercy.gouv.fr/documentation/publications/publications_externes/marie_lamy_concurrence.pdf;

* 207 www.fidal.fr/file_download.php?filename=_fileup/actualite/FIDAL_Presse_Mai_2008_Concurrences.pdf -

* 208 «Les inventaires et mises sous scellés sont réalisés conformément à l'article 56 du Code de procédure pénale». Cet article 56, alinéa 4 CPP prévoit que «tous objets et documents saisis, sont immédiatement inventoriés et placés sous scellés. Cependant si leur inventaire sur place présente des difficultés, ils font l'objet de scellés fermés provisoires jusqu'au moment de leur inventaire et de leur mise sous scellés définitifs et ce, en présence des personnes qui ont assisté à la perquisition...».

* 209 Nathalie J. D. ; op. cit. p. 67.

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