WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La photographie du territoire, entre donnée personnelle et donnée publique

( Télécharger le fichier original )
par Azéline Boucher
Université Paris Descartes - Master 2 - Droit des Activités Numériques 2017
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Conclusion

LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS

SOURCES DU DROIT

C. civ. : Code civil

CRPA : Code des relations entre le public et l'administration

CPI : Code de la propriété intellectuelle

Const. : Constitution

RGPD : Règlement général sur la protection des données

G29 : Groupe de travail de l'Article 29 de la directive du 24 octobre 1995

PUBLICATIONS

Bull. civ. : Bulletin des arrêts de la Cour de cassation (chambres civiles)

CCE : Communication Commerce électronique

D. : Recueil Dalloz

JCP G : Jurisclasseur périodique (semaine juridique), édition générale

JO / JORF : Journal officiel de la République française

JO AN Q / JO Sénat Q : Journal officiel de la République française (questions écrites au ministre, Assemblée nationale, Sénat)

RTD civ. : Revue trimestrielle de droit civil

RTD com. : Revue trimestrielle de droit commercial et de droit économique

JURIDICTIONS

CA : arrêt d'une Cour d'appel

Cass. Ass. Plén. : arrêt de l'assemblée plénière de la Cour de cassation

Cass. Civ. : arrêt d'une chambre civile de la Cour de cassation

CE : arrêt du Conseil d'Etat

CJCE : arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes

Cons. const. : décision du Conseil constitutionnel

TGI : jugement d'un tribunal de grande instance

ACRONYMES

CADA : Commission d'accès aux documents administratifs

CNIL : Commission nationale de l'informatique et des libertés

IGN : Institut national de l'information géographique et forestière

ABREVIATIONS USUELLES

Aff. : affaire

Art. : article

c/ : contre

cf. : se reporter à

conclu. : conclusions

comm. : commentaire

ib. / ibid. / ibidem : au même endroit

loc. cit. / loco citato : à l'endroit cité

n. : note

op. cit. / operecitato : dans l'ouvrage cité

obs. : observations

p. : page

pp. : plusieurs pages

s. : suivants

somm. : sommaires

sté : société

Introduction

Chacun a «le droit de mener sa vie à l'abri des regards indiscrets, derrière le mur de la vie privée»1(*).Ce mur, métaphorique, peut néanmoinssematérialiser par des haies, des palissades ou encore de véritables blocs de bétons. Les individus construisent ces murs pour se préserver du regard d'autrui, du jugement, de la curiosité, de l'indiscrétion. Quel lieuplus protecteur de la vie privée, en effet, que le domicile ? Pourtant, les prouesses technologiques du XXIème siècle ont permis au public, à un amas d'étrangers, de s'approprier ce temple de l'intimité, ou plus exactement l'image de ce temple. Comment ? Par la diffusion sur Internet de prises de vues aériennes et satellites ou de photographies captées depuis la rue. Ainsi, la géographie s'est découverte une dimension sociale nouvelle. Elle ne représente plus seulement le territoire, elle localise et identifie également les Hommes.

La définition de la donnée géographique, telle qu'appréhendée par les spécialistes, est issue de l'article 3 de la directive INSPIRE de 20072(*). Ainsi, « toute donnée faisant directement ou indirectement référence à un lieu spécifique ou une zone géographique » est une donnée géographique.

Trois niveaux de description3(*) permettent encore de préciser la notion. Le niveau géométrique décrit la forme et la localisation de l'objet géographique à travers des données vecteurs (points, lignes, figures) ou des données raster (images pixellisées). La couche sémantique permet de décrire les informations caractérisant l'objet géographique. Ce sont des attributs. Par exemple, sont indiquées les caractéristiques du bâtiment, son adresse, sa surface, etc... Enfin, le niveau topologique décrit les relations de l'objet géographique avec ceux l'environnant. Il permet de positionner sur la surface terrestre la zone géographique ciblée.

Telle que définie et caractérisée, la donnée géographique recouvre donc plusieurs formes. Elle peut ainsi consister en des coordonnées de localisation, en une carte du territoire selon plusieurs échelles, en une représentation 3D de l'occupation du sol ou encore en une photographie aérienne ou une image satellite. Ces photographies peuvent être corrigées géométriquement pour correspondre à la réalité du sol, elles deviennent alors des ortho-images4(*). Ce travail nécessite précision, rigueur et créativité. Ainsi, le spécialiste imprime une part de sa personnalité lorsqu'il modifie la photographie. La création issue de photographies peut alors être considérée comme une oeuvre d'art dès lors qu'il existe « une correction géométrique, réalisant une mosaïque de dizaines d'images brutes, donnant à chacun des éléments sa couleur et harmonisant l'ensemble»5(*). La photographie satellite ou aérienne bruten'est donc pas protégeable en elle-même. Elle ne constitue une oeuvre de l'esprit qu'après avoir été travaillée.Ce sont ces images et ces photographies qui font l'objet de notre étude.

Une fois collectées, ces données géographiques sont agrégées au sein d'un ensemble, permettant alors une utilisation plus efficace. Cet ensemble, c'est la base de données6(*). Ainsi,la protection sui generis du droit des bases de données (articles L341-1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle)peut trouver à s'appliquer dès lors que les informations géographiques sont rassemblées au sein d'un système d'information géographique, un SIG.

Les bases de données géographiques sont un élément central des SIG. Leur intégration permet, en effet, d'assurer une utilisation efficace et efficiente des données acquises. Le SIG est « un ensemble organisé intégrant le matériel, le logiciel et les données géographiques nécessaires pour permettre la saisie, le stockage, l'actualisation, la manipulation, l'analyse et la visualisation de toutes les formes d'informations géoréférencées»7(*). Il peut également être défini plus fonctionnellement comme « un ensemble coordonné d'opérations généralement informatisées, destinées à transcrire et utiliser un ensemble d'information (géographique) sur un même territoire. Ce dispositif vise particulièrement à combiner au mieux les différentes ressources accessibles : base de données, savoir-faire, capacité de traitement selon les applications qui lui sont demandées. »8(*). Le SIG permet alors de « passer d'un état de savoir (données) à une dynamique de faire-savoir (informations)»9(*).

L'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) est un acteur majeur dans la collecte et la diffusion des données géographiques. Cet établissement public à caractère administratif a été créé par un décret du 26 juin 194010(*) puis, en 2011, il a fusionné avec l'Inventaire forestier national. Un décret du 27 octobre 2011 est venu préciser le statut et les missions de l'Institut11(*).

L'article 2 de ce décret dispose que « l'institut a pour vocation de décrire, d'un point de vue géométrique et physique, la surface du territoire national et l'occupation de son sol (...) ». Plusieurs missions lui sont donc attribuées. Le décret en liste treize. Deux apparaissent particulièrement intéressantes dans le cadre de cette étude. Ainsi, l'Institut doit notamment « réaliser et renouveler périodiquement la couverture en imagerie aérienne ou satellitaire de l'ensemble du territoire national ». Il est également chargé de « constituer et mettre à jour sur l'ensemble du territoire les bases de données géographiques et les fonds cartographiques dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé du développement durable, notamment le référentiel à grande échelle (RGE). (...) » . L'article 3 de ce même décret précise que pour l'accomplissement de cette mission, « l'institut a accès, auprès des services de l'État et des établissements publics nationaux, à toutes les informations nécessaires (...) ».

Aussi, l'IGN a pu établir de nombreux partenariats avec d'autres acteurs de la géographie, et plus particulièrement au niveau local, auprès des collectivités, pour assurer une coproduction des données. L'IGN développe également des échanges avec d'autres organismes publics, tels que la Direction générale des Finances publiques (DGFiP) ou le Conseil national de l'information géographique (CNIG). Ces coopérations permettent à l'IGN de proposer des données géographiques certifiées et homogènes mais aussi de garantir leur neutralité12(*). Ce n'est pas toujours le cas pour les nouveaux acteurs privés de la géographie : les néo-géographes.

En effet, la géographie n'est plus le seul apanage des acteurs institutionnels. De plus en plus d'acteurs privés se sont appropriés le secteur depuis le développement des SIG, d'Internet et des portails cartographiques13(*).

Ainsi, des entreprises telles que Google Maps, Mappy ou encore Pages Jaunes (pour ne citer que la partie visible de l'iceberg) ont « constitué des bases de données géospatiales à des échelles variables afin de répondre aux objectifs les plus variés»14(*). Ils ont alors permis la démocratisation des plateformes géographiques. Selon TeriituteaQuesnot, docteur en géométrie, l'arrivée de Google Maps en 2005 a radicalement modifié notre manière d'appréhender l'espace15(*). Google Earth, le navigateur de Google basé sur les objets géographiques, a également contribué à cette ouverture et y a acquis en popularité car Google, géant du web, était le seul serveur capable de supporter un tel flux de connexions. Un intérêt marqué pour la donnée géographique s'est alors dessiné et un usage de plus en plus intense des données géospatiales par un public diversifié s'est établi16(*).

L'essor des appareils mobiles et de la géolocalisation a fait émerger la dimension géographique de chaque individu. Aujourd'hui, il est possible de partager sa position sur la surface du globe en un seul clic. Le recours à l'information géographique est devenu quotidien.

La démocratisation de l'information géographique a également vu le développement de la géographie contributive. OpenStreetMap permet ainsi à tous les internautes qui le désirent d'ajouter des informations localisées sur une carte et de participer alors à une construction citoyenne de l'espace géographique sur Internet.

L'information géographique a toujours été d'une grande valeur dans une société. Aujourd'hui, la richesse des bases de données a accru l'utilisation des SIG.

Nombreuses sont les administrations et entreprises ayant recours à ces systèmes. La géographie permet, en effet, de répondre aux besoins des administrations de l'État. Il est possible, en ayant recours aux données géographiques, de surveiller localement l'environnement et d'évaluer les catastrophes, de contribuer à la sécurité nationale, mais également d'aménager le territoire dans les secteurs du transport, de l'urbanisme et de l'agriculture notamment.Le SIG contribue ainsi à éclairer les décisions des établissements publics, des collectivités et de l'État en général.La géographie est également au coeur de nombreux services proposés à la société. En effet, le SIG permet de projeter des données sur le territoire pour le qualifier, le décrire17(*). Il est donc très fréquent d'y avoir recours pour proposer des services en lien avec la géolocalisation ou les télécommunications.

Avec la vulgarisation de l'information géographique, les particuliers s'intéressent également à ces systèmes. Les données géographiques sont donc de plus en plus exploitées par les particuliers. La simplification de l'accès à l'information via Internet a permis à de nombreux utilisateurs de s'approprier des outils jusqu'alors réservés à des spécialistes. Les internautes peuvent désormais consulter facilement les données relatives à l'occupation du territoire, et ce depuis l'arrivée de Google Earth en 200518(*) et du Geoportail en 2006. Ils sont également actifs en matière d'information géographique puisqu'ils peuvent partager leurs coordonnées spatiales voire même contribuer au web géographique.

La forme de la donnée géographique à laquelle ces internautes ont le plus souvent recours est la photographie, ou plus précisément l'ortho-image. Sa facilité d'interprétation permet, en effet, une démocratisation de son usage. Considérée parfois comme une donnée d'intérêt général, la photographie peut également fournir des informations sur une personne. Dès lors, comment concilier la nature ambivalente de l'image du territoire, entre donnée d'intérêt public et donnée à caractère personnel ?

Cette étude a pour ambition de démontrer que l'image d'un bâtiment d'habitationpeut, dans certains contextes, identifier l'individu qui occupe les lieux et/ou qui bénéficie d'un droit de propriété sur ce bâtiment. Cette démonstration fera l'objet d'un premier chapitre. Dans un second chapitre, sera envisagéel'ouverture au public des données géographiques ; et plus particulièrement la conciliation entre la diffusion d'images décrivant le territoire et la protection des données à caractère personnelrelatives aux individus identifiés parles bâtiments reconnaissables sur ces images.

* 1 DERIEUX Emmanuel, « Vie privée et données personnelles - Droit à la protection et « droit à l'oubli » face à la liberté d'expression », Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel n° 48 (dossier : vie privée), juin 2015, pp.21-33

* 2 Directive 2007/2/CE du Parlement européen et du Conseil du 14 mars 2007 établissant une infrastructure d'information géographique dans la Communauté européenne (INSPIRE)

* 3 « Les bases de l'information géographique », L'essentiel de la géomatique, École nationale des techniciens de l'équipement, 15 mai 2013

* 4 Glossaire de l'information géographique, GéoInformations, Espace interministériel de l'information géographique, 5 juin 2014

L'orthophotographie est une « image photographique sur laquelle ont été corrigées les déformations dues au relief du terrain, à l'inclinaison de l'axe de prise de vue et à la distorsion de l'objectif pour la transformer en projection cartographique ».

* 5CA Riom, 14 mai 2003, Société Rubie's France c/ Société M SatEditions, D. 2003, p.2754, obs. P. Sirinelli, RTD Com. 2004, p.308, note P. Gaudrat

* 6 L'article L112-3 du Code de la propriété intellectuelle dispose, en effet, qu'une base de données est « un recueil d'oeuvres, de données ou d'autres éléments indépendants, disposés de manière systématique ou méthodique, et individuellement accessibles par des moyens électroniques ou par tout autre moyen ».

* 7 Glossaire de l'information géographique, GéoInformations, Espace interministériel de l'information géographique, 5 juin 2014

* 8 Glossaire de l'information géographique, GéoInformations, Espace interministériel de l'information géographique, 5 juin 2014

* 9 BRIETZ Aurélien, « De la donnée géographique à l'information territoriale », Wikiterritorial, Urbanisme / aménagement urbain / SIG, 20 janvier 2014

* 10 Décret du 27 juin 1940 portant suppression du service géographique de l'armée et création de l'Institut géographique national, JO 12-07-1940, p.4518

* 11 Décret n° 2011-1371 du 27 octobre 2011 relatif à l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN), JORF n°0251 du 28 octobre 2011, p.18186, texte n°7

* 12 « Compte-rendu de la rencontre AFIGEO avec Mme Valéria FAURE-MUNTIAN, Ministère de la Transition Ecologique, 17 avril 2018 », site de l'Association française pour l'information géographique, rubrique documentation

* 13JOLIVEAU Thierry, « Le Geoweb, un nouveau défi pour les bases de données géographiques », L'Espace géographique, Tome 40, DOI 10.3917/eg.402.0154, 2011-2012, p.154

* 14Ibid., p.156

* 15QUESNOT Teriitutea, « L'involution géographique : des données géosociales aux algorithmes », Netcom, 22 mars 2017

* 16JOLIVEAU Thierry, op. cit., p.163

* 17 BRIETZ Aurélien, loc. cit.

* 18 Google Earth a franchi la barre du milliard de téléchargements. Il est devenu le SIG le plus utilisé sur la planète. « Google Earth downloaded more than one billion times », blog de Google Maps, 5 octobre 2011

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein