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Pénalisation et dépénalisation (1970 - 2005)

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par Gatien-Hugo RIPOSSEAU
Université de Poitiers - Master II Droit pénal et sciences criminelles 2004
  

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Partie III - Le double mouvement de pénalisation, dépénalisation face à l'encombrement du système pénal.

Le double mouvement de pénalisation, dépénalisation fait preuve de paradoxe dans son évolution : d'un côté ; le législateur entreprend de dépénaliser certains domaines afin d'optimiser le fonctionnement du système pénal (Section I)et de l'autre, il encombre ce dernier par de véritables politiques publiques de pénalisation (Section II) qui d'une part, n'apportent souvent aucune amélioration à la répression des comportements visés, et d'autre part, nuisent à la lisibilité du droit répressif. Ce paradoxe met en exergue l'absence de cohérence de l'action du législateur à long terme : il s'agit plus d'une accumulation d'interventions ponctuelles, que d'une politique criminelle globale.

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Section I - La logique pragmatique du processus de dépénalisation au service de l'économie du système pénal.

Certaines entreprises de dépénalisation ont pour point commun leur pragmatisme : elles ont toutes été le fruit du constat que le fonctionnement et même l'efficacité du système pénal est dans une large mesure contingente des contentieux qu'il a vocation à traiter. Ainsi, afin de faire face à certains contentieux dits de « masse », le législateur a entrepris des « campagnes » de décriminalisation et de dépénalisation (de droit)(§1), voire de dépénalisation de fait (§2) pour éviter l'asphyxie du système pénal du fait de l'importance quantitative de ces contentieux.

§ 1 - Dépénalisation et décriminalisation au service de l'économie du système pénal.

L'économie du système pénal est une préoccupation perpétuelle du législateur. C'est dans l'optique de désencombrer les tribunaux correctionnels qu'un mouvement de dépénalisation a été initié en matière de circulation routière (A) et d'émission de chèques sans provision (B).

A - Le mouvement de dépénalisation en matière de circulation routière dans les années 1980.

Au cours des années 1980, dans le domaine de la circulation routière, ne se manifeste aucune volonté délibérée de dépénalisation, tout au moins entendu au sens commun d'abandon des poursuites. Ceci est renforcé par le fait qu'à cette période, de nouvelles infractions apparaissent203(*) et la répression de certains comportements s'aggrave204(*). Néanmoins, se dessine une certaine forme de dépénalisation en la matière, conséquence inéluctable de l'importance du contentieux auquel il apparaît impossible de faire face sans nuire à la lutte contre d'autres types de délinquance. Le droit de la sécurité routière n'échappe pas au reflux du droit pénal motivé par l'impossible emprise du droit sur le fait. « Les termes numériques du problème condamnent en fait l'idéal que seraient la personnalisation et l'individualisation de l'action répressive»205(*).

Le mouvement de dépénalisation de certaines infractions routières s'est traduit d'une part, par une importante vague de contraventionnalisations et d'autre part, par les implications des procédures utilisées afin de ne pas entraîner un encombrement des tribunaux de police suite à cette contraventionnalisation massive.

Ce mouvement de dépénalisation se caractérise donc tout d'abord par un certain nombre de contraventionnalisations. Le mouvement n'est pas nouveau dans les années 1980, mais il semble accéléré. Par exemple, c'est l'encombrement des tribunaux répressifs par les affaires d'accident de la circulation routière qui a motivé le législateur, dès 1958, à disqualifier en simple contraventions les blessures par imprudence n'ayant pas entraîné une incapacité totale de travail supérieure à trois mois. Une contraventionnalisation massive a ensuite été réalisée par la loi du 30 décembre 1985 et des décrets postérieurs : de nombreux articles de la partie législative du Code de la route ont été transférés dans la partie réglementaire dans le but clairement affirmé de décharger les tribunaux correctionnels de bon nombre d'infractions routières et notamment de celles qu'on appelait les délits papiers. Cette vague de contraventionnalisations a transformé en contraventions, le défaut d'autorisation ou de pièces administratives exigées pour la circulation des véhicules, l'usage d'autorisations ou de pièces administratives périmées ou annulées, le défaut de permis de conduire (sauf récidive), le défaut d'assurance, voire les infractions à la réglementation relative aux barrières de dégel et au passage sur les ponts. La plupart de ces infractions sont devenues des contraventions de 4e classe, les autres (défaut de permis, défaut d'assurance et infractions aux barrières de dégel et au passage sur les ponts) des contraventions de 5e classe. La partie législative du Code de la route s'est ainsi appauvrie afin d'opérer un recentrage de la répression sur les délits subsistants ; les tribunaux correctionnels ont ainsi pu se focaliser sur les principales atteintes involontaires à la vie humaine ou sur des délits obstacles comme la conduite sous l'empire d'un état alcoolique ou encore le délit de fuite.

Cette dépénalisation en matière d'infractions routières se décline ensuite à travers les implications des procédures utilisées pour faire face à cette contraventionnalisation massive. Le législateur n'a pas souhaité encombrer d'avantage les tribunaux de police avec le mouvement de contraventionnalisation auquel il s'est livré pour décharger les tribunaux correctionnels. Ainsi, les contraventions de 5e classe et certaines contraventions de classe inférieure mais punissables d'emprisonnement ou de suspension de permis de conduire, relèvent de la procédure ordinaire (citation directe) ou de la procédure simplifiée dite de l'ordonnance pénale. A ce sujet, toujours afin de pouvoir traiter le plus d'infractions possibles sans encombrer les tribunaux de police, le Garde des Sceaux recommande de procéder par la voie d'ordonnance pénale lorsque ni l'emprisonnement, ni aucune peine complémentaire n'apparaissent nécessaires. « Et l'on constate que cette procédure simplifiée est en pratique très utilisée, ce qui aboutit à faire perdre à la loi une partie de sa force, puisque, par cette procédure, les peines encourues d'emprisonnement ou de suspension de permis de conduire ne peuvent être prononcées »206(*). Les autres contraventions207(*) sont alors soumises à l'amende forfaitaire. Ainsi, pour permettre l'application de l'amende forfaitaire et donc optimiser les capacités du système pénal en matière de traitement simplifié du contentieux contraventionnel, certaines contraventions, sans changer de classe, ne sont plus punissables de l'emprisonnement208(*) depuis le décret du 18 septembre 1986. Toujours dans le but de pouvoir recourir à l'amende forfaitaire, la répression d'un certain nombre de récidives a été abandonnée209(*).

* 203 Il s'agit notamment de l'obligation du port du casque ou encore d'attacher la ceinture de sécurité, de l'interdiction d'utiliser des appareils anti- radar, etc.

* 204 La loi du 10 juillet 1987 renforçant la lutte contre l'alcool au volant a doublé les peines pour les délits d'alcoolémie mais aussi pour d'autres infractions comme le délit de fuite

* 205 SARGOS P., La politique législative des infractions routières, RSC, n° spécial, 1978, p. 79.

* 206 COUVRAT P. et MASSE M., De quelques aspects de la dépénalisation actuelle en France : les décalages de la répression en matière de sécurité routière, RSC 1989, p. 454.

* 207 Cela englobe toutes les contraventions des quatre premières classes non soumises à l'emprisonnement et à la suspension du permis de conduire, et donc seulement punissables d'une amende.

* 208 C'est le cas par exemple pour l'arrêt et le stationnement gênant.

* 209 Par exemple, concernant les infractions aux règles relatives à l'équipement des véhicules.

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