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KAFALA (le recueil legal)

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par Hafid ASSAOUI
Université de PERPIGNAN - DES Droit comparé 2006
  

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Chapitre II

LA KAFALA, ET SON INTERPRETATION DANS LES DECISIONS DE LA JUSTICE FRANÇAISE

SECTION 1 : CAUSES ET MODES D'ABANDON DANS LA SOCIETE OCCIDENTALE

Les femmes qui ne veulent pas élever l'enfant qu'elles ont mis au monde ont toujours créé un problème pour la société. La question de l'abandon des enfants dès la naissance s'est posée tout au long de l'histoire. Pour éviter les infanticides et les abandons sur la voie publique, la société a tenté d'en organiser les modalités. De tout temps, il y eut des enfants abandonnés, sitôt nés, par leur géniteur.


On connaît l'abandon ordonné par la Cité de Sparte, des enfants considérés comme fragiles, malformés, susceptibles d'être à charge de la société. Il s'agissait là, en fait d'une forme d'infanticide.

L'infanticide, l'Eglise, dès le début du moyen âge, essaie de l'éviter, en encourageant précisément l'abandon. De manière générale, les enfants illégitimes sont abandonnés dès la naissance, les enfants nés de famille pauvre peuvent l'être plus tard, quand les parents se rendent compte de l'impossibilité qu'ils ont à les élever. Que l'on songe au fameux conte du Petit Poucet.

 

Mais au 17 ème siècle, l'abandon des enfants constitue un véritable fléau dans la société française. L'acte consiste principalement à exposer son enfant dans un lieu public comme, par exemple, une église.


La cause principale reste l'illégitimité. Quand l'enfant naissait hors mariage, il était considéré comme un "bâtard". En France, une ordonnance de Louis XIII, datant de 1639, ordonne que tous les enfants nés hors mariage soient frappés d'indignité, d'incapacité totale de succession, ce qui revient à les exclure de la famille. C'est principalement la noblesse et la bourgeoisie qui recourront à cette décision.


Les jeunes filles célibataires peuvent abandonner leur enfant à cause de leur faible revenu mais aussi en raison de leur difficulté à affronter la honte de l'éducation d'un bébé né "hors normes". Que ce soit le père ou l'employeur, quand il découvre la grossesse, la réaction est bien souvent la colère et l'expulsion.

Il y a également des enfants légitimes dont les parents sont incapables d'assurer l'existence. Accoucher à l'hôpital et y laisser l'enfant est le seul moyen de fuit la famine et la mort.

L'Eglise a joué un très grand rôle dans les abandons d'enfants car elle condamnait tout acte contraceptif et tout avortement. Ainsi, en 1687, Bossuet souligne que " vouloir éviter d'avoir des enfants est un crime abominable". Ces techniques étaient considérées comme des actes totalement condamnables puisque les femmes qui avortaient étaient condamnées à la peine de mort, de même que les personnes qui les avaient aidées.

Au 18 ème siècle, la progression des abandons est due à la misère des classes ouvrières populaires mais aussi au développement des naissances illégitimes liée à la liberté des moeurs qui caractérise ce siècle. En simplifiant, on pourrait dire que les abandons sont la conséquence de la débauche des classes hautes et de la précarité des classes basses. En effet, les classes populaires bénéficient d'un maigre revenu qui ne leur permet pas d'assurer la subsistance de l'entièreté de la famille. La contraception existe mais les familles les plus précarisées n'ont pas les moyens de bénéficier de ce luxe étant donné leur revenu. Ce revenu ne leur suffit parfois même pas pour pouvoir se nourrir eux-mêmes alors l'apparition d'un enfant dans la famille est souvent très mal acceptée. Selon les statistiques de l'époque, les mères qui abandonnent leur enfant sont le plus souvent des servantes, des ouvrières, des domestiques, des veuves ou encore de marchandes. Ainsi confrontés à ces problèmes financiers, les mères sont contraintes d'abandonner leur enfant devant une maison de riches bourgeois ou encore dans un lieu public comme devant le porche d'une église.


On voit aussi apparaître un autre mode, celui de l'abandon à l'hôpital après la naissance, dans les mains de la sage-femme ou encore chez une nourrice. La majorité des abandons se fait avant l'âge d'un mois.. Une des raisons de ces abandons est peut-être l'insuffisance de l'alimentation lactée dispensée aux nourrissons ( le lait de vache n'a pu être utilisé qu'après la découverte de la stérilisation). En tout cas, si l'illégitimité reste une cause importante, on constate une relation évidente entre l'abandon et la misère car il y a augmentation des abandons en période de crise alimentaire. Pour preuve, on peut citer les petits mots trouvés dans les langes des enfants abandonnés om l'on peut lire des choses telles que celle-ci : " Janvier, 1789, Rouen. Je suis né aujourd'hui 7 janvier de légitime mariage. Mon père et ma mère souffrant de l'extrême misère ont été hors d'état de me faire recevoir le baptême et de me rendre les services que ma tendre jeunesse les oblige à me donner. Ce n'est qu'avec la plus humiliante affliction et douleur la plus sensible qu'ils m'abandonnent et exposent en attendant que le ciel les favorise d'être en état de me rappeler au sein de ma famille" ( Jean Dandrin, enfants trouvés, enfants ouvriers, 17e-19e siècle, Aubier Montaigne, 1982.) A cette époque, on compte plus de 7000 abandons par an, que l'on attribuera majoritairement à l'illégitimité; mais, comme le soulignent certains auteurs contemporains, en rejetant la faute sur l'inconduite des parents, l'Etat évitait d'admettre sa responsabilité dans le système économique et social qui créait cette pauvreté.

Au 19 ème siècle, la cause de l'abandon est identique. La misère règne toujours dans les classes populaires. Cette pauvreté est un réel barrage aux familles défavorisées désireuses d'avoir des enfants mais étant donné la précarité, ils ne peuvent se permettre de garder l'enfant. Ils préfèrent donc déposer l'enfant dans un lieu qui favorisera son épanouissement plutôt que de le laisser mourir de faim (dans certains cas, c'est l'enfant qui meurt et dans d'autres, c'est la mère car elle s'est sacrifiée pour son enfant). En général, les familles à cette époque déposaient dans les langes des enfants des signes de reconnaissance gardant l'espoir de leur identification voire d'une future restitution.

La forme d'abandon, elle, a changé : la société a mis en place des " tours d'abandon ". Ces tours étaient destinés aux personnes qui voulaient laisser leur enfant dans l'anonymat et la sécurité. C'était une sorte de guichet installé dans la façade des hospices; on y pratiquait un trou où était logé une boîte pivotante. L'ouverture du tour se faisait par la rue; il suffisait de déposer l'enfant dans la boîte, de sonner et la boîte se tournait vers l'intérieur de l'hospice où une soeur recueillait l'enfant.


A la fin du 19e siècle, les tours sont supprimés pour faire place au bureau d'admission auquel les mères peuvent confier leur enfant. La police intervient parfois lorsque les parents ont commis un délit pour survivre. De plus, les domestiques ont parfois eu des relations avec leur employeur qui avaient entraîné une grossesse, ce qui poussait les employeurs à renvoyer la domestique car ils ne voulaient pas avoir de problèmes avec leurs femmes.

Au 20 ème siècle, la misère s'atténue petit à petit mais elle ne disparaît pas, elle reste présente. La cause d'abandon reste donc ce fléau. Mais il faut noter l'apparition grandissante des abandons dans la classe bourgeoise. Les femmes riches avaient des serviteurs et il leur arrivait quelque fois que celles-ci aient des relations extraconjugales. De peur que le mari le découvre, elles étaient contraintes d'abandonner l'enfant ou même d'avorter. Si elle était célibataire, la crainte du scandale et le risque que la famille, à l'annonce de la grossesse, n'expulse la jeune fille, ne laissaient à celle-ci pas d'autre choix que de se débarrasser du bébé.

Au 20e siècle, la législation française a créé l'accouchement sous X, assurant l'anonymat d'abord total sur la personnalité de la mère. C'est devenu la principale forme d'abandon.


Fin 20 ème et début 21 ème siècle, la misère reste la cause principale d'abandon. Les femmes qui ont recours à l'abandon sont souvent très jeunes et sans ressources car elles ne travaillent pas. Elles ont aussi peur d'annoncer à leur compagnon leur grossesse car ceux-ci risquent de fuir face à l'annonce de leur paternité. Enfin, lorsqu'il s'agit d'adolescentes issues de minorités ethniques (maghrébines ou antillaises par exemple), elles risquent aussi de se faire bannir de la famille, voire d'être physiquement punies.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard